Issu d'une famille férue de sport auto, Charles Leclerc se tourne naturellement dès le plus jeune âge vers les circuits de karting. Il remporte rapidement des succès notamment le titre de champion de France en 2009 à 12 ans, et deux ans plus tard la coupe du monde junior. Une rencontre capitale pour son parcours intervient en karting : il devient proche de Jules Bianchi, voisin niçois de neuf ans son aîné. Tel un grand frère, Jules s'entraîne avec Charles et lui prodigue de précieux conseils. A cours de financement, la carrière de Charles en karting aurait pu en rester là sans son mentor Bianchi qui le présente à son manager Nicolas Todt. Ce dernier, convaincu, le prend sous son aile dans son académie de jeunes pilotes. Charles continuera à briller dans l'élite mondiale du karting, jusqu'au titre de vice-champion du monde CIK FIA World KZ en 2013, derrière un certain Max Verstappen.
2018 : début très convainquant chez Sauber
Charles débarque donc en Australie avec seulement quatre jours d'essais de sa nouvelle monture et des objectifs modestes, simplement essayer de rejoindre les points. Sans surprise, le début de saison est compliqué, la voiture étant à trois secondes des meilleures. Pour ses trois premières courses, il échoue en Q1, est l'auteur de plusieurs têtes à queue et reste toujours derrière Marcus Ericsson, son coéquipier, en course. L'arrivée en Azerbaïdjan marque un tournant dans sa saison car un très bon rythme lui permet de se qualifier treizième, plus d'une seconde devant son coéquipier. En course, il profite pleinement des aléas et nombreuses safety-car, ainsi que d'une conduite irréprochable, pour terminer à une superbe sixième place. C'est le premier monégasque à inscrire un point en F1 depuis Louis Chiron en 1950 !
Après ce déblocage, Charles excelle et sublime sa monoplace. Exception faite de son grand prix national où il abandonne faute de freins, il enchaîne cinq arrivées dans les points, du jamais vu chez Sauber depuis 2015. Charles atteint aussi pour la première fois la Q3 avec la huitième place en France au Castellet, à quelques kilomètres de chez lui. A la mi-saison, sa cote est au plus haut dans le paddock tandis qu'il occupe le quatorzième rang au championnat avec 13 points. Pour la reprise en Belgique, Charles est le témoin involontaire de l'utilité du Halo, protection de la tête des pilotes, installé depuis cette année sur les voitures. Pris dans un carambolage au départ, Alonso passe au-dessus de son cockpit, protégé par le Halo qui attestera de la violence du choc en portant les traces de roue de la McLaren. Cet abandon est le troisième en quatre courses, dans une période moins favorable d'un point de vue comptable. Toutefois tout sourit à Charles en coulisse car il se murmure de plus en plus qu'il pourrait rejoindre dès l'an prochain la Scuderia Ferrari. Le jeune pilote est en effet fortement appuyé par le grand directeur Sergio Marchionne, sponsor qui décèdera pourtant au cours de l'été.
En septembre, une semaine après Monza, le secret de polichinelle est officialisé : il sera en rouge en 2019. C'est un rêve d'enfance qui se concrétise, il échangera son baquet avec Kimi Räikkönen qui lui rejoindra Sauber. La suite de la saison se déroule presque parfaitement pour le jeune monégasque. Malgré deux abandons mécaniques à Singapour et au Japon, il enchaine les arrivées dans les points et conclut l'année par trois septièmes places, éclipsant totalement son coéquipier Ericsson. Charles termine l'année avec un total de 39 points au classement et la treizième position finale. Il a fortement contribué au redressement de Sauber, qui avait pourtant arrêté assez tôt le développement. Désormais tous les regards se portent vers cette nouvelle coqueluche du public et sur sa future confrontation avec Sebastian Vettel chez Ferrari, l'allemand étant le leader naturel depuis son arrivée chez les rouges.
2019 : la prise de pouvoir chez Ferrari
Ferrari démarre l'année en favorite avec une voiture dominatrice lors des essais hivernaux 2019. Charles s'est montré dans le même rythme que son illustre coéquipier, mais le directeur de la Scuderia met les choses au point avant la saison : Vettel est le favori pour le titre et sera privilégié en début d'année. Docile, Charles acquiesce mais garde bon espoir de remporter sa première victoire cette année. A Melbourne, c'est la douche froide en qualification et en course où aucune Ferrari n'atteint le podium. Charles fait tout de même bonne impression grâce à une stratégie contraire à son coéquipier qu'il menace en fin de course : ce sont des consignes d'équipe, déjà, qui mettent le holà pour ramener les voitures intactes à l'arrivée. La seconde course à Bahreïn est un vrai tournant, les Ferrari sont les plus rapides et Charles signe sa première pole position ! En course, il fait le show après un départ raté : il dépasse Valtteri Bottas puis son coéquipier dès le sixième tour, malgré les consignes. Il survole la course mais sera hélas trahis par son moteur en perte de puissance. Il rallie l'arrivée au petit trot et à la troisième place, son premier podium doux amer. Très déçu, il apparaît toutefois comme la superstar qu'on attendait, questionnant le leadership chez Ferrari, face à un Vettel encore une fois parti à la faute en course.
Le développement de la saison révèle que la Ferrari est très rapide en ligne droite, plus encore que la Mercedes, mais perd tout en virage. Charles a donc beaucoup d'espoir pour les circuits rapides à venir. C'est le cas du Red Bull Ring où le moteur surpuissant de Ferrari l'aide à signer sa seconde pole. En tête toute la course, il se fera reprendre par Max Verstappen qui le dépasse à trois tours de l'arrivée dans une manœuvre musclée qui fera polémique. On retrouve les passes d'armes des deux hommes, viriles comme en karting, tandis que Charles doit digérer cet échec et cette nouvelle victoire perdue dans les derniers tours... Mais sa régularité est prometteuse, il enchaîne quatre podiums à mi saison et malmène Vettel en course et au championnat. Après une désillusion en Allemagne (sortie de piste) et en Hongrie (quatrième à plus d'une minute), Charles attend avec impatience le retour de la pause estivale à Spa et Monza qui semblent très favorables. Il signe en effet sa troisième pole à Spa et réussit cette fois à s'imposer le lendemain, d'un souffle devant Lewis Hamilton. A 21 ans, c'est le premier monégasque à s'imposer en F1. Une semaine plus tard, la F1 débarque à Monza et malgré la pression des tifosi, Charles assure de main de maître. Après une nouvelle pole, il s'impose rugueusement face à Hamilton et devient le premier pilote Ferrari à gagner à Monza depuis Alonso en 2010 !
Rien ne semble l'arrêter en automne puisqu'il signe cinq pôles en six Grand Prix, toutefois sans nouvelle victoire, Mercedes se montrant supérieur en course. Vettel est de plus en plus éclipsé dans la confrontation entre les deux garages, dont la rivalité est au plus haut au Brésil, lorsque les deux pilotes s'accrochent et abandonnent...La fin d'année est marquée par une polémique qui terni la saison avec des doutes sur la régularité du moteur Ferrari. Devant la pression des concurrents face au bloc surpuissant italien, la FIA reprécise le règlement sur la consommation d'huile. A partir de là, curieusement, il n'y aura plus de pole rouge, et des résultats rentrés dans le rang. Néanmoins Charles a plus que brillé pour sa première saison en rouge, son bilan est étincelant avec dix podiums, deux victoires et sept poles, il termine quatrième et devant son coéquipier au championnat ! Ferrari tient là sa nouvelle star et l'a bien compris : l'équipe s'empresse en décembre de prolonger le contrat du monégasque jusqu'à fin 2024.
2020 : sauver les meubles avec une voiture ratée
L'année 2020 ne sera hélas pas la concrétisation de la belle saison précédente. La nouvelle SF1000 est globalement ratée, c'est l'unique voiture du plateau qui est plus lente que sa devancière... Retardée à cause de la pandémie de coronavirus, la saison 2020 s'ouvre aussi sur la polémique autour du moteur Ferrari. La FIA annonce en effet avoir conclu son enquête sur le moteur mais ne révèle pas ses conclusions et indique avoir passé un accord confidentiel avec Ferrari. Curieusement depuis cet accord, la piste révèle le contraire de l'an passé : Ferrari est maintenant la F1 la plus lente en ligne droite... L'ouverture de la saison en Autriche est l'arbre qui cache la forêt : Charles qualifié septième fait une course sage et profite des faits de course pour terminer au second rang, opportuniste. La seconde course est la répétition du cauchemar brésilien l'an dernier : trop fougueux, Charles accroche Vettel dès le premier tour et les deux Ferrari doivent abandonner. La troisième manche en Hongrie est ratée par la faute d'un mauvais choix pneumatique : à l'agonie avec ses gommes, il rallie l'arrivée en onzième position quand son coéquipier est sixième, la Ferrari ne vaut pas mieux à ce stade.
Malgré la difficulté, à la fois technique et psychologique, Charles se bat et brille notamment en qualifications. Qualifié quatrième à Silverstone, il profite des crevaisons de fin de course de ses concurrents pour s'offrir son second podium de l'année. Ce sera hélas le dernier de la saison. Il termine quatrième lors du Grand Prix du 70e anniversaire puis connait un passage à vide lors des trois courses suivantes, deux abandons et aucun point. La réalité est cruelle à Spa où il échoue à une anonyme quatorzième position là où il avait triomphé un an plus tôt. Charles comprend bien vite que l'année est à oublier et doit ronger son frein. Toutefois les qualifications sont porteuses d'espoirs, souvent déchus en course. Ainsi pour le 1000e Grand Prix de Ferrari en Toscane, Charles roule les quinze premiers tours en troisième position, pour la plus grande joie des tifosi, absents des tribunes, mais terminera finalement neuvième en peine de rythme.
Charles réussit globalement à tirer le meilleur de son auto, lorsque son coéquipier Vettel, officialisant son départ en fin d'année, s'écroule complètement. Charles parvient à réaliser deux belles quatrièmes places au Portugal et en Turquie, bien qu'il perde le podium turc dans le dernier tour en tentant, trop gourmand, de prendre la deuxième place de Perez. Lointain dixième à Bahreïn, ce sera son dernier point de la saison. Lors de la seconde course bahreïnie, il est encore victime de sa fougue en accrochant Perez au départ puis termine l'année en treizième position à Abu Dhabi, à un tour du vainqueur.
Grand espoir l'année précédente, 2020 s'achève comme un chemin de croix pour Charles qui clame pourtant qu'il n'a jamais autant travaillé pour tenter de progresser. Il termine huitième du championnat avec deux podiums, et croise les doigts pour des progrès moteur et châssis... Hélas, le contexte de crise économique a convaincu les équipes de mettre en place un gel partiel des développements, et il est fort probable que 2021 soit du même acabit pour le monégasque qui sera associé en rouge l'an prochain à Carlos Sainz, transfuge de McLaren.
2021 : année frustrante et sans relief
Charles est confiant au début de la saison 2021, le moteur a été revu en profondeur et le scandale de fin 2019 semble déjà loin, la performance de retour. Toutefois le fossé qui sépare Ferrari de Mercedes et Red Bull est encore trop grand, la Scuderia ne peut pas se battre pour les victoires à la régulière.
L'année de Charles sera marquée par de jolies performances en qualifications mais un manque régulier de réussite ou de performance en course qui laisseront quelques frustrations. Le début de saison est très régulier avec quatre courses conclues dans le top six hors podium, avant son Grand Prix à domicile, à Monaco. Très en verve en principauté, il signe le meilleur temps des qualifications puis se crashe en tentant d'améliorer. Il conserve sa pole mais devra renoncer à prendre le départ dimanche, voiture trop endommagée. C'est un crève-cœur pour Charles, surtout quand on connait l'importance d'une pole à Monaco, et d'autant plus que son coéquipier Sainz signe ici le premier podium de Ferrari en 2021. Charles rebondit à Bakou en signant une nouvelle pole, mais le manque de rythme de son auto ne lui permet qu'une quatrième place à l'arrivée, malgré les aléas de course devant lui.
Charles connait à Silverstone sa meilleure course : qualifié quatrième, il prend la tête au premier tour après le contact entre Hamilton et Verstappen. Il va ainsi mener 49 boucles avant d'être rattrapé (et dépassé) par Hamilton à trois tours de l'arrivée. Charles est passé très près de la victoire mais se satisfait de cette belle deuxième place, enfin un podium, son premier depuis vingt-deux courses ! Ce sera hélas le seul de l'année ; bien que Ferrari se détache de sa rivale McLaren, Charles devra se contenter de places d'honneur, lorsque Sainz accumulera encore trois podiums en seconde partie de saison.
Charles termine ainsi l'année septième au championnat, derrière Sainz, une première pour lui en F1 d'être classé derrière un coéquipier en fin de saison. Pas de grand résultat certes, mais une belle régularité (dix-huit fois dans les points en vingt-deux courses) sur laquelle Charles fonde un optimisme mesuré avant le défi 2022 auquel la Scuderia s'est préparé toute l'année.
Vincent