Damon Hill: prophète en son pays ?
Une petite semaine s'écoule entre les Grands Prix de France et de Grande-Bretagne. Quelques jours au cours desquels Damon Hill est éreinté par une presse britannique aigrie par l'absence de Nigel Mansell. « Big Moustache » est en effet reparti aux États-Unis pour achever, contraint et forcé, sa saison d'IndyCar avec Newman-Haas. Bien qu'il n'ait absolument pas démérité jusqu'ici, Hill est pris pour cible par des plumitifs qui l'estiment incapable d'assumer la succession d'Ayrton Senna et de rivaliser avec Michael Schumacher. La rumeur court que Frank Williams chercherait à se débarrasser de ce pilote timoré, besogneux et de toute façon déjà trop vieux (34 ans), pour le remplacer par une vraie star: Mansell (quadragénaire...), Schumacher, ou pourquoi pas le jeune Jacques Villeneuve qui explose outre-Atlantique. Le maître de Didcot ne lève pas le doute: « J'ai eu dans l'écurie les plus grands pilotes de ces dernières années: Nelson Piquet, Nigel Mansell, Alain Prost et Ayrton Senna. Mais je ne me pardonne pas d'avoir laissé filer en son temps Michael Schumacher... »
Les nerfs à cran, flanqué de son inséparable épouse Georgie, Damon Hill lâche ses quatre vérités à la presse jeudi matin: « Je ne comprends pas du tout cet acharnement contre moi. J'ai signé à Nevers-Magny-Cours la pole position devant Mansell. J'avais aussi réussi deux poles en 1993 devant Prost. Et aussi devant Schumacher. Le seul que je n'ai jamais battu aux essais, c'est Ayrton Senna. Je n'en rougis pas. Ici et ailleurs, je défie Schumacher à visage découvert. J'ai été le seul, cette année, à le dominer en course. J'en ai assez d'être considéré comme un prix à réclamer ! » Cet épanchement libère quelque peu le pilote anglais de la tension emmagasinée depuis Imola, et lui permet de jouir d'un regain de popularité. En effet, celui qui n'était il y a deux ans qu'un faire-valoir anonyme est chargé depuis deux mois de guider la meilleure équipe du monde, et s'acquitte on ne peut mieux de cette tâche écrasante. En fustigeant les journalistes avides de scandale, il met dans sa poche les vrais passionnés de course automobile, très nombreux parmi le public britannique.
Enfin, ce GP de Grande-Bretagne revêt une dimension toute particulière pour la famille Hill, puisque le patriarche Graham n'a jamais réussi à y triompher en dix-sept participations. L'année dernière, Damon était en passe de l'emporter lorsque son moteur l'a lâché aux deux tiers de l'épreuve. Il est bien décidé à vaincre cette fois le signe indien.
Présentation de l'épreuve
Nous arrivons à la moitié du championnat 1994 et celui-ci semble déjà plié. Michael Schumacher a en effet empoché six victoires et une deuxième place en sept courses, soit 66 points sur 70 possibles. Son premier poursuivant Damon Hill est relégué à trente-sept longueurs et on ne voit pas comment il pourrait le rattraper. Toutefois, le départ-canon de la Benetton-Ford n°5 à Magny-Cours alimente les soupçons de tricherie autour de l'écurie italo-britannique. Beaucoup estiment que celle-ci utilise un antipatinage illégal. La FIA s'empare implicitement de l'affaire, puisqu'elle semble décidée à sanctionner Benetton pour avoir remis avec trois semaines de retard les copies de certains logiciels, faute d'ailleurs partagée avec McLaren. À Silverstone, Hill alpague Schumacher dans le paddock pour l'interroger au sujet de ces démarrages suspects, mais l'Allemand fait celui qui ne comprend pas.
L'autodrome de Silverstone a été modifié au printemps sur les recommandations du GPDA afin d'améliorer la sécurité. Plusieurs virages sont retouchés, notamment la courbe rapide de Stowe, au dessin beaucoup plus droit, qui se prend désormais en troisième vitesse. Elle est suivie d'un bout droit et non plus d'un léger gauche. Le gauche rapide d'Abbey est transformé en chicane lente. Enfin, le virage de Priory est avancé pour réduire la vitesse et permettre l'installation d'un bac à sable plus large.
Y-aura-t-il un GP d'Italie en septembre ? Le GPDA a en effet demandé à la Commission sportive de l'Automobile Club d'Italie (CSAI), présidée par Marco Piccinini, de procéder à des aménagements sur l'autodrome de Monza, en élargissant notamment les dégagements. Or ce circuit serpente dans un parc placé sous la haute surveillance des écologistes, lesquels refusent que l'on coupe quelques arbres pour installer des bacs à sable ! Piccinini ne peut pas ordonner de travaux. Il décrète donc, de son propre chef, la suspension du GP d'Italie, puis se saisit du prétexte du report à 1995 de certaines normes de sécurité édictées par la FIA pour présenter sa démission. Rosario Alessi, le président de l'ACI, se saisit de l'affaire et sollicite l'aide du président du conseil Silvio Berlusconi en personne pour faire bouger les choses.
Ferrari a confirmé début juillet la reconduction de Gerhard Berger pour la saison 1995, ce qui fera de celui-ci le pilote à avoir le plus souvent piloté pour le cheval cabré en Grand Prix. Jean Alesi devrait aussi être prolongé pour une cinquième saison en rouge. Benetton recherche un nouvel adjoint pour Michael Schumacher. JJ Lehto est écarté pour cause de méforme et Jos Verstappen est trop jeune et turbulent pour assumer longtemps cette tâche. Flavio Briatore et Tom Walkinshaw jettent leur dévolu sur le solide Johnny Herbert qui se morfond dans une écurie Lotus en perdition. Ils lui proposent un contrat pour 1995. Un contrat de deuxième pilote, bien entendu...
Quelle fée s'est penchée sur Ukyo Katayama ? L'an passé, le Japonais, moqué pour sa petite taille et son agitation derrière le volant, passait son temps à exécuter figures et acrobaties baroques, au point de rendre jaloux son équipier Andrea de Cesaris, l'expert en la matière. Mais cette année, il se montre diablement rapide au volant de sa Tyrrell-Yamaha, ne commet presque plus de fautes, et surtout domine son équipier, le teigneux Mark Blundell. Devant l'étonnement des journalistes, Katayama révèle qu'il a eu recours cet hiver aux soins d'un « manager » un peu spécial, un psychologue qui lui a appris à mieux se concentrer et à évacuer son stress. Il refuse toutefois de donner le nom de son mentor, ce qui incite les esprits fielleux à avancer qu'il a en fait tout bonnement suivi des cours de pilotage...
Les écuries apportent de nombreuses modifications à leurs monoplaces. Sauber étonne en installant sur sa C13 deux énormes déflecteurs partant des pontons pour remonter jusque devant les roues arrière, un dispositif qui vaut à la voiture noire le nouveau surnom de « Batmobile ». Ce carénage permettra de conserver un peu de charge aérodynamique lorsqu'entreront en vigueur les restrictions d'appui et d'effet de sol au GP d'Allemagne.
Ferrari inaugure ici une nouvelle boîte de vitesses entièrement réalisée en titane, d'où un gain de poids de huit kilos. Le nouveau moteur V12 043 est également présent en seulement deux exemplaires et ne participe qu'aux essais qualificatifs. En outre, la barre de torsion et les basculeurs de la suspension arrière sont modifiés, d'où un abaissement du capot. Alan Jenkins apporte un nouvel extracteur à l'Arrows FA13 afin d'améliorer la tenue de route. Tyrrell lance une nouvelle pompe hydraulique d'embrayage qui permet aux pilotes de mettre la boîte au neutre depuis le tableau de bord, y compris moteur coupé. Larrousse teste vendredi avec Comas un fond plat inédit qui ne donne pas satisfaction et est abandonné dès le lendemain. Enfin, Pacific est la dernière écurie à adopter la mode des déflecteurs installés devant les entrées d'air des pontons.
Essais et qualifications
Le week-end commence mal pour Hill: il quitte la route vendredi matin à Becketts après qu'un mécanicien a oublié de boulonner ses attaches de suspension ! Furax, il injurie de retour au stand un Patrick Head éberlué... puisqu'il vient d'arriver sur le circuit !
Quatrième à l'issue de la première séance qualificative, Hill se transcende le lendemain pour tirer le maximum de sa FW16, et arrache la pole position... pour trois millièmes, 1'24''960''' contre 1'24''963''' à Schumacher ! L'Allemand de Benetton-Ford n'a pas ménagé non plus ses efforts, mais se contente de la deuxième place. Pour ce qui concerne leurs équipiers respectifs, Coulthard (7ème) peine à régler sa monoplace et Verstappen (10ème) part une nouvelle fois à la faute vendredi après-midi. Les Ferrari participent à la lutte pour la pole position grâce à la puissance délivrée par le nouveau V12. Berger, très incisif, échoue au troisième rang, à seulement vingt millièmes de Hill. Alesi (4ème), plus brouillon, est relégué à une demi-seconde. Les McLaren-Peugeot (Häkkinen 5ème, Brundle 9ème) réalisent des performances honorables mais concèdent plus d'une seconde aux meilleurs. Barrichello place sa Jordan-Hart sur le sixième rang, très loin devant Irvine (12ème) qui, de son propre aveu, surconduit et commet trop d'erreurs.
Le petit Katayama a mangé du lion et se classe huitième avec sa Tyrrell-Yamaha. Blundell (11ème), moins heureux, rencontre des problèmes de boîte de vitesses. Lentement mais sûrement, les Sauber-Mercedes régressent dans la hiérarchie. Frentzen (13ème) et de Cesaris (18ème) déplorent une mauvaise tenue de route. Fortunes diverses chez Minardi: si Martini (14ème) est satisfait de ses essais, Alboreto (17ème) est encore frappé par une avarie moteur. Panis réalise le 15ème chrono avec la Ligier-Renault de son équipier Bernard. Ce dernier, contrarié par une rupture d'attache d'aileron, se contente du 23ème temps. Les Arrows (Morbidelli 16ème, Fittipaldi 20ème) sont trop sensibles aux changements de revêtement et de température: leur comportement varie à chaque changement de pneus ! Herbert (19ème) et Zanardi (21ème) ont beau essayer tous les set-up possibles, la Lotus-Mugen 109 est toujours dépourvue de grip. Les Larrousse-Ford (Comas 22ème, Beretta 24ème) sont à court de développement. Les Simtek-Ford (Brabham 25ème, Gounon 26ème) peuplent la dernière ligne. La Pacific-Ilmor progresse car Gachot est samedi en mesure de se qualifier avant d'être trahi par sa transmission. En revanche, Belmondo, accablé par sa boîte, ne caresse jamais cet espoir.
Le Grand Prix
Damon Hill remporte déjà une première victoire dimanche matin en apercevant dans les gradins des dizaines de milliers de supporteurs britanniques ayant bravé les embouteillages pour l'encourager. Son succès à l'applaudimètre est presque égal à celui de Nigel Mansell en son temps. Voilà la meilleure réponse qui pouvait être apportée à ses détracteurs de la presse écrite. Bien sûr, dans le même temps Michael Schumacher est pris pour cible par ces mêmes passionnés et est hué à chacune de ses apparitions...
Coulthard réalise le meilleur chrono de l'échauffement du dimanche matin devant Schumacher et Hill qui signent de nouveau des chronos quasi-similaires. L'après-midi, sur la grille, l'attention des journalistes se porte sur l'ex-princesse de Galles Lady Diana Spencer, devenue une habituée de ce rendez-vous. Sa rayonnante présence ne trouble cependant pas les ingénieurs qui planchent sur les stratégies à adopter. Ils tablent sur des courses à un ou deux arrêts. A noter que Verstappen s'élance avec le mulet Benetton suite à une fuite d'eau sur sa monoplace habituelle.
Tour de formation: Zanardi s'élance depuis les stands après avoir fait vérifier son moteur qui tournait sur neuf cylindres. Au cours de cette ronde d'installation, Schumacher ne respecte sa position et double Hill à deux reprises, ce qui est une infraction au règlement. Puis, alors que les voitures sont installées sur la grille, Coulthard agite les bras: il a calé ! Roland Bruynseraede annule la procédure de départ et renvoie les voitures en piste pour un second tour de mise en grille. Coulthard parvient à s'élancer mais prend place en queue de peloton. La course est amputée d'une boucle.
Second tour de formation: Irvine se gare sur le bas-côté, moteur fumant. L'Irlandais d'Ulster ne prendra pas le départ. De nouveau, Schumacher se place devant Hill durant une bonne partie du tour. Les commissaires sportifs froncent les sourcils.
Départ: Hill conserve l'avantage de la pole devant Schumacher, Berger, Barrichello et Alesi. Verstappen prend un départ-canon et pointe au sixième rang devant Häkkinen. Le carter d'huile de Brundle est monté en pression: le lubrifiant se déverse sur l'échappement et s'embrase instantanément, soulevant une gerbe de flammes. Le Britannique bifurque aussitôt vers la pelouse.
1er tour: Hill mène devant Schumacher, Berger, Barrichello, Alesi, Verstappen, Häkkinen, Katayama, Frentzen et Morbidelli, auteur d'un superbe envol. Les commissaires ont circonscrit l'incendie sur la voiture de Brundle.
2e: Hill compte une petite seconde d'avance sur Schumacher. Berger est déjà relégué à quatre secondes du leader. Barrichello le talonne.
3e: Hill devance Schumacher (0.9s.), Berger (7s.), Barrichello (8s.), Alesi (9.7s.), Verstappen (10.5s.), Häkkinen (12s.), Katayama (13s.), Frentzen (14s.), Morbidelli (14.5s.) et Panis (16s.).
4e: Hill et Schumacher se battent à coups de records du tour. Berger leur concède deux secondes à chaque passage car il est parti avec plus d'essence que ses adversaires. Coulthard remonte comme une fusée: le voilà déjà 14ème !
5e: Coulthard déborde Martini et se retrouve douzième. Morbidelli regagne son stand au petit trot en raison d'une canalisation d'essence débranchée. C'est également fini pour Zanardi dont le moteur se tait pour de bon.
6e: Hill s'est forgé un petit ascendant d'une seconde et demie sur Schumacher.
8e: Hill précède Schumacher (1.1s.), Berger (14s.), Barrichello (15s.), Alesi (17.3s.), Verstappen (21s.), Häkkinen (22s.) et Katayama (23s.). Frentzen est sous la menace d'un trio comprenant Panis, Blundell et Coulthard.
9e: L'étonnant Katayama est sur les traces d'Häkkinen. Panis et Blundell passent devant Frentzen. Coulthard double le pilote Sauber au tour suivant.
11e: Hill boucle le meilleur tour de la course (1'27''100'''), mais Schumacher ne lui concède qu'une seconde. Le jeune Allemand ignore que le collège des commissaires vient de lui infliger une pénalité de cinq secondes pour avoir doublé Hill durant les deux tours de chauffe. Blundell surprend Panis au freinage de Stowe. Le jeune Français cède ensuite à Coulthard.
12e: Les deux leaders atteignent les premiers attardés. La Ferrari de Berger s'allège en carburant, ce qui permet à l'Autrichien de se défaire de Barrichello. Coulthard bute sur un Blundell très opiniâtre. De Cesaris rejoint son box suite à une rupture de son moteur Mercedes-Ilmor.
13e: La murette Benetton apprend la pénalité de Schumacher sans en connaître la cause (on parle à l'origine d'un départ anticipé) ni surtout la procédure à suivre (stop-and-go ? ajout au temps final ?). Flavio Briatore, Tom Walkinshaw, Ross Brawn et Joan Villadelprat réclament des précisions à la direction de course. La série noire se poursuit chez Larrousse: le V8 Cosworth de Comas part en fumée. Le Drômois se gare dans l'herbe.
14e: Hill mène devant Schumacher (1.5s.), Berger (24s.), Barrichello (28s.), Alesi (32.5s.), Verstappen (37.5s.), Häkkinen (38.5s.), Katayama (39.5s.), Blundell (44s.) et Coulthard (45s.).
15e: Hill entre au stand Williams pour un premier pit-stop (7s.) et reprend la piste en troisième position. Arrêt aussi pour Panis. Pendant ce temps-là, Pat Symonds prévient Schumacher de sa punition, mais il lui indique que les cinq secondes de pénalité s'ajouteront à son temps final. En fait, Briatore et Walkinshaw sont partis conférer avec les commissaires.
16e: Schumacher mène avec vingt-cinq secondes d'avance sur Berger. Blundell effectue son premier ravitaillement.
17e: Schumacher arrive au stand Benetton pour prendre du carburant et des pneus neufs, puis redémarre sans avoir observé sa pénalité. Coulthard et Bernard font aussi halte aux stands.
18e: Berger s'empare du commandement provisoire. Schumacher a repris la piste devant Hill et devient donc le leader virtuel de l'épreuve. Ravitaillements pour Katayama et Brabham.
19e: Schumacher a déjà rattrapé Berger. Blundell sort de la route à Abbey car son accélérateur ne s'est pas refermé. Il parvient à regagner la piste et fait halte à son stand pour faire vérifier sa machine.
20e: Berger précède Schumacher (0.8s.), Hill (3s.) et Alesi (9s.). Barrichello et Verstappen se succèdent aux stands pour prendre de l'essence et des gommes neuves.
21e: Hill est revenu dans le sillage du duo Berger - Schumacher. Le capot-moteur de Panis menace de se détacher. Le jeune Français rejoint son stand pour le faire refixer, puis retrouve le circuit.
22e: Schumacher déborde Berger au virage de Priory. Puis l'Autrichien stoppe chez Ferrari pour son ravitaillement (7.5s.). Blundell se retire: sa boîte de vitesse a rendu l'âme.
23e: La direction de course brandit un drapeau noir agrémenté du n°5 pour signifier à Schumacher sa disqualification. Le jeune Allemand, nouveau leader, poursuit comme si de rien n'était. Dans les stands, alors que Flavio Briatore palabre avec les représentants de la FOCA, Roland Bruynseraede explique à Tom Walkinshaw les raisons (évidentes) du drapeau noir présenté à la Benetton n°5.
24e: Schumacher mène devant Hill (3s.), Alesi (11s.), Häkkinen (22s.), Berger (34s.), Barrichello (39s.) et Frentzen (45s.). Coulthard prend la huitième place à Katayama.
25e: Après une explication houleuse avec Bruynseraede, Walkinshaw regagne sa murette et informe Briatore, Villadelprat et Symonds que Schumacher peut encore subir sa punition sans encourir l'exclusion. Le panneau « Penalty » est donc présenté à celui-ci. Beretta effectue un premier arrêt décalé.
27e: Schumacher s'engouffre dans l'allée des stands et s'immobilise durant cinq secondes, avant de reprendre la piste en troisième position. Martini et Herbert observent leurs uniques ravitaillements de l'épreuve.
29e: Hill est un temps bouchonné par Fittipaldi qui bataille contre Alboreto. Alesi et Häkkinen effectuent leurs seuls ravitaillements de l'après-midi. Ils sont imités un peu plus tard par Frentzen.
30e: Hill précède Schumacher (20.7s.), Berger (38s.), Barrichello (41.5s.), Alesi (48.6s.), Häkkinen (56s.), Coulthard (59s.), Katayama (1m. 01s.), Verstappen (1m. 10s.) et Frentzen (1m. 16s.). Ravitaillements pour Fittipaldi et Gounon, suivis un tour plus tard par celui d'Alboreto.
32e: Berger regagne les stands avec un moteur hors d'usage, conséquence d'une rupture dans le système de valve pneumatique.
33e: Hill compte dix-huit secondes d'avance sur Schumacher. Coulthard déborde Häkkinen et grimpe au cinquième rang.
34e: Panis effectue son troisième arrêt, cette fois pour rajouter de l'essence et mettre des pneus frais.
35e: Hill est premier devant Schumacher (18s.), Barrichello (47s.), Alesi (52s.), Coulthard (55s.), Häkkinen (59s.), Katayama (1m. 06s.), Verstappen (1m. 15s.), Frentzen (-1t.) et Fittipaldi (-1t.).
37e: Schumacher remonte peu à peu sur Hill. Seize secondes les séparent. Alesi ménage son moteur qui surchauffe quelque peu et voit Coulthard s'agiter dans ses rétroviseurs.
38e: Hill arrive chez Williams pour son deuxième et dernier arrêt (8s.). Il demeure premier puisque Schumacher ravitaille également dans la foulée (7.6s.). Les positions ne sont pas bouleversées. Alesi repousse les assauts de Coulthard.
39e: Coulthard tente de faire l'intérieur à Alesi dans Hangar Straight, alors que tous deux débordent Herbert, rangé sur la gauche. L'Écossais parvient à la hauteur du Français mais celui-ci lui ferme la porte à Stowe. Puis Coulthard exécute son second arrêt aux stands (9s.). Katayama et Bernard ravitaillent aussi
40e: Schumacher peine à rentrer certains rapports mais évolue à une quinzaine de secondes de Hill. Barrichello concède trente secondes au leader.
42e: Barrichello passe une seconde fois par le stand Jordan. Il fait une mauvaise affaire puisqu'il reprend la piste derrière Alesi et Häkkinen qui ne s'arrêteront plus. Pit-stop également pour Verstappen qui se retrouve à nouveau derrière Katayama.
43e: Coulthard prend l'ascendant sur Frentzen et glane ainsi la sixième place.
44e: Le porte-parole de la FIA Martin Whitaker annonce à la presse que Schumacher n'a pas été puni pour un départ anticipé, comme cela avait été précédemment annoncé, mais pour ne pas avoir conservé sa position lors des deux tours de formation.
45e: Hill est leader devant Schumacher (17s.), Alesi (58.5s.), Häkkinen (1m. 09s.), Barrichello (1m. 10s.), Coulthard (1m. 25s.), Frentzen (-1t.), Katayama (-1t.), Verstappen (-1t.) et Fittipaldi (-1t.).
47e: L'intervalle est stationnaire entre Hill et Schumacher. Barrichello pourchasse Häkkinen pour le gain de la quatrième place.
49e: Dix-sept secondes séparent toujours Hill et Schumacher. L'Allemand rencontre maintenant des problèmes de freins: ses roues arrière se bloquent par instants, ce qui qui endommage ses pneus. Alesi roule à plus d'une minute du leader.
50e: Alors que la course entre dans ses dix derniers tours, l'attention des reporters se portent sur l'arrivée au stand Williams de Lady Di, accompagnée des deux petits princes William et Harry.
51e: Hill prend un tour à Coulthard. Alboreto est pour la énième fois frappé par une panne de moteur. Le Milanais s'immobilise sur le bas-côté. Décidément Cosworth traverse une mauvaise passe...
52e: Hill devance Schumacher (17.5s.), Alesi (1m.), Häkkinen (1m. 12s.), Barrichello (1m. 14s.), Coulthard (-1t.), Frentzen (-1t.), Katayama (-1t.), Verstappen (-1t.), Fittipaldi (-1t.), Martini (-2t.) et Herbert (-2t.).
55e: Hill compte dix-neuf secondes de marge sur Schumacher et entraîne derrière lui son équipier Coulthard. Les Union Jack commencent à s'agiter dans les travées.
57e: Hill laisse Coulthard se dédoubler car celui-ci revient fort sur le duo Häkkinen - Barrichello.
58e: Quinze secondes séparent Hill et Schumacher. Frentzen exécute un tête-à-queue. Il repart mais perd la septième place au profit de Katayama. Touché par des crampes, Verstappen est cependant trop loin pour menacer l'Allemand de Sauber.
59e: Barrichello est dans les roues d'Häkkinen, paré à porter une ultime estocade.
60ème et dernier tour: Damon Hill remporte le GP de Grande-Bretagne. Schumacher se classe deuxième, Alesi troisième. Pendant ce temps-là, Barrichello se jette à l'intérieur du droit serré de Luffield pour surprendre Häkkinen. Mais il ne fait qu'harponner le Finlandais et l'envoie en tête-à-queue. Barrichello regagne les stands au petit trot avec une suspension faussée. Häkkinen garde pour sa part son moteur en route et redémarre poussé par les commissaires. Comme il peut appuyer sur le champignon, il coupe finalement la ligne une petite seconde avant Barrichello ! Coulthard finit en sixième position après avoir concédé un tour à son équipier. Katayama, Frentzen, Verstappen, Fittipaldi, Martini, Herbert, Panis, Bernard, Beretta, Brabham et Gounon achèvent aussi cette épreuve.
Après la course: Damon venge Graham
Damon Hill boucle son tour d'honneur en brandissant un immense drapeau britannique, pour la plus grande joie des spectateurs. Hélas pour lui, la FIA a récemment formellement proscrit ce type de démonstrations, pour d'obscures raisons sécuritaires...
Mais Damon s'en moque et préfère savourer cette superbe victoire, tout en rappelant bien sûr le souvenir de son père Graham qui n'avait jamais remporté cette épreuve: « Je ne peux trouver les mots pour raconter ce que je ressens, mais c'est un rêve qui se réalise. En remportant le GP de Grande-Bretagne. J'ai l'impression d'avoir comblé un trou dans le palmarès de mon père. Après ce qui s'est passé à Magny-Cours, je dois reconnaître qu'au départ je regardais dans mes rétroviseurs et que j'ai tendu la tête pour voir où était Schumacher. J'ai attaqué le premier virage et il n'était pas là. Ce fut une course particulièrement difficile, mais nous avons fait du bon travail dans les stands. La pénalisation de Michael a été une aubaine pour nous, mais je pense que même sans elle, la course aurait été très disputée entre nous deux. »
Benetton et Schumacher en accusation
Michael Schumacher n'a pas connu un après-midi agréable. « Pendant la première partie de la couse, je me suis bien battu avec Hill, même s'il disparaissait dans les lignes droites », raconte-t-il. « Je gagnais un peu de temps dans les parties sinueuses du circuit, mais cela ne suffisait pas. J'ai été prévenu de ma pénalité de cinq secondes juste avant mon premier arrêt au stand. J'ai compris qu'on allait l'ajouter à mon temps en fin de course et ça m'a paru un peu curieux. Puis, on m'a dit de rentrer pour un « stop-and-go », ce que j'ai fait. Puis, pour compliquer les choses, la boîte s'est mise à faire des siennes. Les rétrogrades devenaient de plus en plus brutaux. Je suis plutôt content de rallier l'arrivée, même si je suis frustré par le déroulement de la journée. »
Cette fameuse pénalité débouche sur une polémique. Tout d'abord, certains trouvent que les commissaires sportifs se sont montrés trop sévères: certes, doubler un concurrent dans le tour de chauffe est formellement interdit depuis 1992, mais cette règle discutable a été violée un grand nombre de fois sans que les autorités ne s'en émeuvent. Par ailleurs, comme les pilotes ne peuvent plus procéder à des simulations de départs aux essais, le tour de formation est devenu pour eux le dernier moyen pour s'entraîner à démarrer. Flavio Briatore et Tom Walkinshaw concentrent surtout leurs attaques contre la direction de course, à savoir le starter Roland Bruynseraede et le directeur de l'épreuve Pierre Aumonier. Leurs atermoiements ont provoqué cet imbroglio, et les deux patrons de Benetton clament bien haut leur bonne foi. Toutefois, la direction de course inflige 25 000 dollars d'amende à Schumacher pour non-respect du drapeau noir... alors que la disqualification semblait avoir été annulée !
Max Mosley s'empare le jour même de l'affaire pour la reprendre à zéro. Il convoque tout le monde à un prochain Conseil mondial de la FIA. Il relève deux graves irrégularités commises par Benetton et Schumacher: tout d'abord ne pas s'être acquitté de la punition primitive dans le délai imparti, ensuite avoir sciemment ignoré le drapeau noir. Il ne prête aucun crédit aux explications de Schumacher qui affirme avoir aperçu ledit drapeau mais pas le panneau sur lequel était inscrit son numéro, le 5 ! Briatore et Walkinshaw, qui ont entravé la mise en œuvre de la sanction, seront aussi sommés de s'expliquer. Par ailleurs, Mosley tonne contre la direction de course dont la conduite erratique est à l'origine de cette confusion. En effet, comment un drapeau noir, signifiant l'exclusion de l'épreuve, a pu être retiré pour se transformer en simple « stop-and-go » ? Enfin, le bras sévère du président de la FIA s'abat aussi sur Rubens Barrichello et Mika Häkkinen qui se voient reprocher leur accrochage dans le dernier virage. Tous deux sont également mandés devant le prochain Conseil mondial ! Qu'on se le dise: le temps du laxisme en F1 est terminé...
Par bonheur, le Grand Prix s'achève aussi par une note festive. Eddie Jordan organise un grand raout musical. Installé à la batterie, l'Irlandais à lunettes reprend quelques tubes de jazz et de rock'n'roll en compagnie de ses amis musiciens, dont le célèbre journaliste Ray Matts. Johnny Herbert, Eddie Irvine et Damon Hill s'illustrent par une reprise de « Johnny be good » qui aurait fait pâlir d'envie Chuck Berry lui-même...
Affaires Benetton et Schumacher
Classements (avant la disqualification de M. Schumacher du GP de Grande-Bretagne) :
| Pilotes | |
| Constructeurs | |
1. | Schumacher | 72 pts | 1. | Benetton-Ford-Cosworth | 73 pts |
2. | Hill | 39 pts | 2. | Williams-Renault | 42 pts |
3. | Alesi | 17 pts | 3. | Ferrari | 40 pts |
4. | Berger | 17 pts | 4. | McLaren-Peugeot | 13 pts |
5. | Barrichello | 9 pts | | Jordan-Hart | 13 pts |
6. | Häkkinen | 7 pts | 6. | Sauber-Mercedes | 10 pts |
7. | Larini | 6 pts | 7. | Tyrrell-Yamaha | 8 pts |
| Brundle | 6 pts | 8. | Minardi-Ford-Cosworth | 5 pts |
9. | Frentzen | 5 pts | 9. | Footwortk-Ford-Cosworth | 3 pts |
10. | Blundell | 4 pts | 10. | Larrousse-Ford-Cosworth | 1 pt |
| de Cesaris | 4 pts |
| Wendlinger | 4 pts |
| Katayama | 4 pts |
| Martini | 4 pts |
15. | Fittipaldi | 3 pts |
| Coulthard | 3 pts |
17. | Lehto | 1 pt |
| Alboreto | 1 pt |
| Irvine | 1 pt |
| Comas | 1 pt |
Tony