Présentation de la saison
Alain Prost: faux retour avec McLaren-Peugeot
Durant tout l'hiver, Ron Dennis s'échine à persuader Alain Prost de renoncer à sa retraite pour disputer la saison 1994 au volant de la McLaren-Peugeot, ou au moins aider à son développement. Au moins de février, le quadruple champion du monde s'entretient également avec Jean-Pierre Jabouille qui serait ravi de pouvoir compter sur son concours. Finalement, Prost se laisse tenter et accepte de tester la McLaren MP4/9 du 8 au 11 mars, à l'occasion de quatre jours d'essais à Estoril. Cette annonce consterne Renault avec laquelle il est encore sous contrat. Mais Louis Schweitzer, président de la firme au Losange, ne craint pas de voir le Forézien partir à la concurrence. Il sait que ni McLaren ni Peugeot ne peuvent pour le moment lui offrir un matériel compétitif. « Prost essaie le V10 Peugeot. Un jour ou l'autre, c'est Renault qui en profitera », assène-t-il.
Et en effet, Prost comprend rapidement qu'il n'a pas envie de revenir à la compétition, qui plus est sans espoir de gagner. Le 15 mars, il confirme à la presse sa retraite sportive. « Cet essai avec McLaren s'est passé de manière très honnête entre les deux parties, en sachant à quoi il fallait s'attendre. Je voulais me tester, savoir si j'avais vraiment envie de remettre ça. En fait, non », dit-il. Patrick Faure, président de Renault Sport, jubile. Mais il comprend aussi qu'il doit trouver une occupation à l'ex-champion qui se résigne mal à l'inactivité. Quelques semaines plus tard, Prost reçoit le poste de consultant de luxe chez Renault. Il sera également chargé d'effectuer des exhibitions au volant du futur Renault Espace F1, un prototype conçu par Matra à Romorantin.
McLaren et Peugeot avaient uni leurs efforts pour attirer Prost. Celui-ci hors d'atteinte, les deux partenaires se déchirent sur l'identité du coéquipier de Mika Häkkinen. Jabouille pousse en faveur de Philippe Alliot que Dennis juge trop instable et pas assez rapide. Il impose la candidature de Martin Brundle. Alliot se contentera de limer le bitume en essais privés, bien qu'il prétende remplacer l'Anglais tôt ou tard dans la saison. Voilà en tout cas déjà un premier couac entre Woking et Vélizy.
Ligier à vendre
L'écurie Ligier entame ce nouveau championnat dans l'incertitude la plus totale. Suite aux démêlés judiciaires de son propriétaire Cyril de Rouvre, elle devra en effet passer par une revente. Et les Bleus sont très convoités. Fin 1993, une rumeur vite démentie fait part de l'intérêt d'Alain Prost, mais le champion français n'a pas les soutiens financiers nécessaires pour risquer pareille aventure. Au début de ce printemps 1994, trois groupes d'acheteurs potentiels s'affrontent. Le premier est emmené par Flavio Briatore qui souhaite avant tout mettre la main sur le V10 Renault, mais aussi créer une véritable synergie entre Enstone et Magny-Cours. En somme, dans ce scénario, Ligier deviendrait l' « écurie B » de Benetton. Face à Briatore se dresse un triumvirat constitué de Philippe Streiff, Hugues de Chaunac et de la famille Giraudi qui possède un important groupe de cosmétiques (Orlane, Kelemata etc.). Ceux-ci agissent avec le soutien de Frank Williams qui veut ainsi conserver l'exclusivité du moteur Renault. Enfin, Gérard Larrousse se porte également acquéreur de son écurie rivale. Il compte pour cela sur le concours de son associé Robin Herd, millionnaire depuis la vente de March.
La décision finale reviendra en grande partie à l'État français qui est le principal bailleur de fonds des Bleus via la Seita, Elf et le Loto. Beaucoup de passionnés souhaitent que soit repoussé le projet de Briatore qui, selon eux, amènerait à terme le transfert de l'écurie outre-Manche, ce que dément formellement l'Italien. Streiff et Larrousse comptent eux sur leurs amitiés au sein du gouvernement français. Le premier est l'ami du ministre du Budget Nicolas Sarkozy tandis le second reçoit l'appui du ministre des Sports Michèle Alliot-Marie. Mais Larrousse se tire une balle dans le pied à Interlagos en annonçant son intention de fusionner son équipe avec Ligier à l'horizon 95. Il suscite ainsi une vague d'hostilité à Magny-Cours et l'incompréhension dans ses propres rangs. Ses nouveaux partenaires, Patrick Tambay et Michel Goulay, lui signalent qu'ils n'ont pas investi dans Larrousse F1 pour racheter Ligier...
Les doutes de Senna
Ayrton Senna aborde ce premier Grand Prix avec circonspection. Il est en effet inquiet du niveau de la nouvelle Williams-Renault, affectée d'un phénomène de « marsouinage » : la monoplace, plaquée au sol par un fort appui, peut soudain se soulever en une oscillation incontrôlée. Certes, les techniciens semblent pouvoir remédier à ce problème en touchant aux amortisseurs. Mais la FW16 n'en demeure pas moins difficile à mettre au point, avec une fenêtre d'exploitation très étroite. D'autre part, Senna est mal installé dans le cockpit, ce qui contrarie évidemment quelque peu son pilotage. En outre, le Brésilien se sent un peu perdu chez Williams. Il n'y est pas choyé comme il l'était chez McLaren, où règne une atmosphère à la fois studieuse et décontractée. Frank Williams et Patrick Head admirent certes leur nouvelle recrue, mais placer les pilotes sur un piédestal n'est pas vraiment une coutume de la maison. A Didcot, ce sont des employés presque comme les autres. Les mécaniciens et ingénieurs sont quant à eux impressionnés par le charisme et le talent de Senna et, un peu intimidés, ne parviennent pas encore à briser la glace. Toutefois Ayrton travaille en bonne intelligence avec ses ingénieurs attitrés, David Brown et Denis Chevrier.
Senna n'affiche donc pas une grande sérénité en débarquant à São Paulo. Il fait part de ses doutes à Alain Prost auquel il téléphone régulièrement depuis quelques semaines. Les deux hommes se sont définitivement réconciliés lors du meeting de karting de Paris-Bercy en décembre 93 et nouent même un semblant d'amitié. En proie à une certaine anxiété, Senna s'épanche auprès de son ex-rival en qui il découvre une oreille attentive. En marge de ce GP du Brésil, il participe au lancement de « Senninha » (« petit Senna »), un personnage de bande dessinée pour enfants créé par les dessinateurs Rogério Martins et Ridaut Dias Jr. Par ce « comic » auquel il a donné tout son soutien, Senna souhaite toucher les enfants, qu'il apprécie beaucoup, et leur faire passer des messages moraux. Le premier ouvrage est édité par Abril, le plus gros éditeur brésilien, et de multiples produits dérivés sont imaginés à partir de ce personnage. C'est donc également un juteux business, mais Senna semble vouloir consacrer une grande part de ces revenus à des œuvres caritatives.
Présentation de l'épreuve
Les organisateurs du Grand Prix d'Afrique du Sud ayant fait faillite, la saison s'ouvre de nouveau au Brésil sur le circuit d'Interlagos. Bernie Ecclestone rencontre à cette occasion le maire de São Paulo, Paulo Maluf, auquel il propose une prolongation de contrat jusqu'à l'an 2000. Mais le Grand Argentier réclame surtout la réfection d'un circuit de plus en plus vétuste. En un an, le devis des travaux a vu son montant grimper de 8 à 25 millions de dollars ! Maluf hésite à lancer une telle opération car les revenus du GP du Brésil se tarissent depuis le passage d'Ayrton Senna de McLaren à Williams. En effet, depuis 1990 Marlboro arrosait largement l'épreuve et lui permettait d'afficher un budget à peu près équilibré. Mais maintenant que Senna fume Rothmans... Peter Schreer, le directeur de Philip Morris Amérique du Sud, propose une alternative à Ecclestone et Maluf: il met sur pied un « Marlboro Brazilian Team » comprenant Rubens Barrichello, Emerson et Christian Fittipaldi, Raul Boesel et André Ribeiro. Ce concept doit revigorer l'image du cow-boy au Brésil, et permettra peut-être au Grand Prix d'afficher des comptes au vert...
Olivetti a quitté la F1, si bien que TAG-Heuer se charge désormais seule du chronométrage et de la diffusion des données en temps réel. Le service proposé au Brésil n'est pas excellent et devra rapidement être amélioré, sinon les chaînes de télévision, et donc Bernie Ecclestone, vont voir rouge.
Jeudi, le boss de Goodyear Leo Mehl pique une colère lorsqu'il s'aperçoit que ses ingénieurs et invités n'ont pas tous reçu d'accréditations de la part de la FOCA. Devant la mauvaise volonté d'Ecclestone, il décide d'enfermer à double tour les quelques 1500 pneus envoyés pour ce Grand Prix. Voilà les F1 sur les jantes ! Un chantage inique, mais efficace, puisqu'Ecclestone est contraint d'offrir quelques laissez-passer supplémentaires... Le président de la FOCA se venge sur les commentateurs de la chaîne de télévision Eurosport France, réduits au chômage technique sur son ordre. Le motif ? TF1, dont dépend Eurosport, n'aurait pas aligné suffisamment d'argent pour acheter les droits TV de la saison 94. La chaîne française a pourtant déboursé 15 millions de dollars, soit 3,5 millions de plus qu'en 1993, mais cela reste insuffisant pour Ecclestone qui voudrait qu'elle paie autant que la RAI italienne: 23 millions de $...
Les écuries se préparent au retour des ravitaillements en essence, et ont pour cela organisé de nombreux essais durant la trêve hivernale. Un matériel coûteux a été acquis pour effectuer ces opérations avec un maximum de sécurité. Les mécaniciens doivent ainsi obligatoirement revêtir des combinaisons ignifugées pour se protéger des incendies éventuels. Beaucoup d'observateurs critiquent cette mesure jugée onéreuse et dangereuse, mais Bernie Ecclestone soutient qu'elle va permettre d'offrir un meilleur spectacle aux passionnés.
JJ Lehto a été victime d'un sérieux accident en essais privés à Silverstone au mois de janvier et souffre du dos. Après un test peu concluant à Imola début mars, il prend la sage décision de reporter ses débuts avec Benetton. C'est donc l'essayeur Jos Verstappen qui conduira la seconde B194 à Interlagos. Âgé d'à peine 22 ans, le Hollandais a remporté l'an passé le championnat d'Allemagne de F3 et a tapé dans l'œil de Flavio Briatore suite à des essais époustouflants réalisés avec Footwork. Son mentor, l'ancien pilote Huub Rothengatter, lui a dégoté cet excellent volant de réserviste chez Benetton Formula.
Carlos Reutemann revient dans les paddocks à l'occasion de ce Grand Prix. « El Lole » s'est lancé dans la politique, est devenu gouverneur de l'État de Santa Fé, et ne cache pas son ambition de devenir à terme président de la république argentine. Pour l'heure, il fait surtout la promotion du Grand Prix d'Argentine qui doit en théorie se tenir en octobre sur le circuit de Buenos Aires. Mais cette épreuve a toutes les chances d'être reporté à 1995 à cause du retard pris par les travaux de rénovation. Reutemann est aussi aperçu en grande conversation avec Emerson Fittipaldi, ainsi qu'avec - c'est plus curieux - son ancien ennemi Niki Lauda.
McLaren apporte ici deux types de différentiels, dont l'un est programmable. Par ailleurs, grâce à la nouvelle commande d'embrayage située au volant, Häkkinen peut freiner du pied gauche, alors que Brundle préfère pour le moment n'utiliser que son pied droit. Les pédaliers des deux pilotes sont donc disposés différemment.
Essais et qualifications
La météo est assez perturbée en ce week-end de mars. La deuxième session du samedi après-midi se termine même sous la pluie, ce qui obère les chances de certains pilotes. Senna n'est pas satisfait de la Williams-Renault FW16, souvent instable à la réaccélération, mais il ne laisse à personne le soin de lui chiper la pole position, la 63ème de sa carrière. Son chrono (1'15''962''') est très proche de la pole de Prost en 1993 (1'15''866'''). Hill (4ème) perd du temps à cause de coupures électriques et concède plus d'une seconde et demie à son nouvel équipier. Les Benetton-Ford se montrent très menaçantes. Schumacher (2ème) ne rend que trois dixièmes à Senna et vise ouvertement la victoire. Verstappen (9ème) effectue des débuts honnêtes. Alesi hisse sa nouvelle Ferrari au troisième rang (à une seconde et demie de Senna tout de même) en dépit d'une assiette perfectible dans les virages lents. Berger subit des pannes hydrauliques et électroniques et se retrouve relégué à la dix-septième place. Les Sauber-Mercedes confirment le potentiel entrevu lors des essais hivernaux. Le néophyte Frentzen (5ème) réalise une entrée en matière tonitruante et précède son collègue Wendlinger (7ème) d'un petit dixième. Les Arrows-Ford se montrent également véloces malgré un léger sous-virage: Morbidelli se classe sixième, Fittipaldi onzième.
Les McLaren-Peugeot connaissent des débuts très difficiles suite à d'incessants problèmes d'accélérateur. Häkkinen (8ème) est moins touché par le mal que Brundle (18ème). Le V10 Peugeot donne pour le moment satisfaction aux deux pilotes. Les Tyrrell-Yamaha (Katayama 10ème, Blundell 12ème) sont en gros progrès par rapport à l'année passée et devraient viser les points. Comas (13ème) est content du rythme de sa Larrousse flambant neuve. Beretta (23ème) se contente de découvrir la piste et surmonte d'inévitables douleurs au cou. La Jordan-Hart manque de grip, mais Barrichello (14ème) comme Irvine (16ème) peaufinent samedi leurs réglages et obtiennent un mieux sensible. Hélas, la pluie les empêche de grimper dans la hiérarchie. Les Minardi-Ford rencontrent un peu de survirage. Martini (15ème) devance Alboreto (22ème) qui casse un moteur. Les vieilles Ligier-Renault sont dépassées, mais Panis (19ème) comme Bernard (20ème) ne commettent pas une seule erreur. L'antique Lotus 107 manque dramatiquement de grip et de traction, et le moteur Mugen n'arrange rien. Herbert (21ème) et Lamy (24ème) surnagent.
Et les petits nouveaux ? Pacific retire dès samedi matin la voiture de Belmondo, immobilisée depuis la veille car les inserts d'attache de ses triangles avant ne cessent de se détacher. Il semblerait que le défaut provienne de la coque en carbone. Gachot (25ème) se qualifie pour sa part sans trop de peine. Les pilotes Simtek s'en sortent honorablement. Brabham (26ème) obtient le dernier ticket d'entrée et Ratzenberger, en proie à un mauvais sous-virage, est éliminé sans commettre de fautes grossières.
Le Grand Prix
Dimanche matin, Senna réalise le meilleur chrono du warm-up devant l'étonnant Wendlinger. Les Sauber paraissent décidément très en verve. L'après-midi, le ciel est couvert et le risque d'averse n'est pas à exclure. On estime que les grandes équipes prévoient deux ravitaillements en essence et pneus en cours d'épreuve. Comme les voitures ne partent plus avec le plein, les meilleurs chronos pourraient être signés tôt dans la course.
Panique chez Ferrari une heure avant le démarrage: une défaillance de moteur est décelée sur la voiture de Berger alors qu'une fuite au circuit hydraulique paralyse celle d'Alesi. Finalement, le Français part avec le mulet et l'Autrichien avec la monoplace de son équipier réparée in extremis.
Départ: Senna s'élance convenablement alors que Schumacher, le pied encore sur le frein, se fait surprendre par un Alesi très incisif. Hill est quatrième devant Frentzen, Häkkinen et Wendlinger. Berger prend un super-envol et gagne de nombreuses positions.
1er tour: Schumacher déborde Alesi au virage de Junção, mais l'Avignonnais « croise » la Benetton à la réaccélération et conserve sa position. En fin de boucle, Senna mène devant Alesi, Schumacher, Hill, Frentzen, Häkkinen, Wendlinger, Verstappen, Berger et Morbidelli.
2e: Schumacher refait l'intérieur à Alesi à Junção et cette fois ne lui laisse pas la possibilité de répliquer. Berger doubler Verstappen et Barrichello dépasse Morbidelli. Bernard exécute un tête-à-queue qui sème la panique en queue de peloton. Beretta fait un écart pour éviter la Ligier mais se fait emboutir par Gachot. Le Franco-Belge n'ira pas plus loin.
3e: Senna devance de trois secondes le duo Schumacher - Alesi. L'Avignonnais essaie de prendre l'aspiration de l'Allemand devant les stands, mais ce dernier lui claque la porte au nez. Häkkinen prend l'ascendant sur Frentzen. Beretta se gare dans la pelouse avec une suspension endommagée suite à sa collision avec Gachot.
4e: Quatre secondes séparent Senna et Schumacher. Häkkinen se fait menaçant derrière Hill.
5e: Senna est premier devant Schumacher (3.7s.), Alesi (7.6s.), Hill (10.2s.), Häkkinen (11.6s.), Frentzen (12.4s.) et Wendlinger (15s.). Berger revenait sur Wendlinger lorsqu'il est trahi par son moteur. Les joints toriques des soupapes pneumatiques ont cédé. Il regagne son box au petit trot et met pied à terre.
6e: Schumacher roule en 1'18''953''' et comble peu à peu son retard sur Senna. Morbidelli ne parvient plus à sélectionner ses vitesses et doit renoncer.
7e: Schumacher boucle le tour le plus rapide la journée: 1'18''455'''.
8e: Schumacher revient à deux secondes de Senna. Alboreto renonce suite à une coupure moteur.
10e: Senna devance Schumacher (1.9s.), Alesi (16s.), Hill (20s.), Häkkinen (22s.), Frentzen (24s.), Wendlinger (26s.), Verstappen (27s.), Barrichello (33s.), Katayama (37s.), Irvine (41s.), Brundle (42s.) et Blundell (43s.).
11e: Senna est sous la pression de Schumacher. Il tente de creuser l'écart mais doit en même temps doubler les premiers attardés. Plus loin, Verstappen est dans les roues de Wendlinger.
13e: Deux secondes séparent Senna et Schumacher. Le V10 Peugeot d'Häkkinen coupe dans les courbes rapides suite à une défaillance du limiteur de régime. Le problème s'accroît rapidement et le Finlandais regagne son garage pour abandonner.
14e: En fin de tour, Brundle lance la salve de ravitaillements. Ses mécaniciens remplacent ses pneus et lui injectent du carburant en une dizaine de secondes.
16e: Schumacher n'est plus qu'à une seconde et trois dixièmes de Senna. Frentzen exécute un tête-à-queue après Ferradura et cale son moteur. Le jeune Allemand abandonne mais aura montré de fort belles capacités pour son premier Grand Prix.
17e: Wendlinger se ravitaille en pneus et en essence et laisse la cinquième place à Verstappen.
18e: Schumacher évolue une seconde derrière Senna, mécontent de la tenue de route de sa Williams. Alesi fait halte aux stands (9.1s.) et repart entre les deux Tyrrell de Katayama et Blundell. Verstappen et Irvine effectuent aussi leurs ravitaillements. Le Hollandais cale au redémarrage et repart derrière l'Irlandais.
19e: Senna précède Schumacher (0.8s.), Hill (35s.), Barrichello (51s.), Katayama (52s.), Alesi (58s.), Blundell (59s.), Fittipaldi (1m. 02s.) et Martini (1m. 04s.).
20e: Senna peine de plus en plus à contenir Schumacher. Barrichello passe aux stands (9.5s.). Fittipaldi se retrouve soudainement au neutre et lève le pied.
22e: Schumacher et Senna entrent ensemble aux stands pour prendre de l'essence et des pneus frais. Les mécaniciens de Benetton sont plus prompts que ceux de Williams, et l'Allemand repart devant le Brésilien ! Arrêts également pour Katayama et Herbert. Fittipaldi rejoint son box avec une boîte hors d'usage, à l'instar de Morbidelli.
23e: Schumacher s'échappe aisément devant Senna. Hill, troisième, reste en piste car il a prévu de ne s'arrêter qu'une seule fois. Suite à une rupture mécanique, Blundell dérape après Junção et heurte les glissières par l'arrière, à haute vitesse. Il abandonne une Tyrrell très abîmée. La piste est jonchée de débris hors trajectoire entre Junção et Subida dos Boxes.
24e: Schumacher mène devant Senna (2.5s.), Hill (19s.), Alesi (43.3s.), Martini (1m.), Wendlinger (1m. 05s.) et Barrichello (1m. 07s.).
25e: Schumacher est longtemps gêné par Irvine mais repousse néanmoins Senna à quatre secondes. Le Brésilien effectue quelques blocages de roue. Arrêt de Comas.
27e: Wendlinger prend la cinquième place à Martini qui n'est pas passé par les stands. Barrichello et Brundle apparaissent dans les rétroviseurs de l'Italien.
28e: Schumacher klaxonne derrière Martini et Barrichello qui luttent pour la sixième place. Il met un bon tour à se débarrasser d'eux.
29e: Barrichello déborde Martini. Senna se retrouve aux prises à son tour avec ces attardés.
30e: Cinq secondes entre Schumacher et Senna. Brundle passe Martini et pointe au septième rang. Les morceaux de carbone abandonnés par Blundell ont été retirés par les commissaires.
31e: Schumacher est gêné par Brabham à Subida do Lago et lui adresse un poing furieux. Martini observe son unique arrêt aux stands.
32e: Schumacher précède Senna (5.6s.), Hill (38s.), Alesi (1m. 02s.), Wendlinger (-1t.), Barrichello (-1t.), Brundle (-1t.), Irvine (-1t.), Verstappen (-1t.) et Katayama (-1t.).
34e: Irvine et Verstappen luttent pour la huitième place, tout en revenant sur Brundle dont le rythme n'est pas excellent.
35e: Barrichello attaque Wendlinger, en délicatesse avec ses pneus. Il lui fait l'extérieur dans la longue pleine charge, mais l'Autrichien conserve l'ascendant au premier freinage.
36e: Brundle ralentit dans le bout droit suivant la Curve del Sol à cause d'une rupture d'amortisseur. Il contraint l'attardé Bernard, qui le suivait, à monter sur ses freins. Juste derrière la Ligier viennent Irvine et Verstappen. Le Hollandais fait l'extérieur à l'Irlandais au moment où celui-ci se décale brusquement vers la gauche pour éviter Bernard. Verstappen met deux roues dans l'herbe et part en tête-à-queue juste devant Irvine et Bernard qui s'accrochent. La Benetton folle tape ensuite la McLaren de Brundle par l'arrière, s'envole, se retourne, exécute un tonneau avant de retomber par bonheur sur ses quatre roues et d'échouer dans le gazon. Brundle a reçu sur son casque une des roues de Verstappen mais par bonheur n'est pas blessé.
37e: Un véhicule entre en piste à Subida do Lago pour tracter la Jordan d'Irvine, immobilisée en pleine piste. Curieusement, la « Pace Car » n'intervient pas. Les bolides de Verstappen, Brundle et Bernard se trouvent eux dans la pelouse, mais il y a de nombreux débris sur le bitume. Schumacher devance Senna (5.6s.), Hill (50.2s.), Alesi (1m. 18s.), Wendlinger (-1t.), Barrichello (-1t.), Katayama (-1t.), Herbert (-1t.), Martini (-1t.) et Comas (-1t.). Ravitaillements pour Panis et Lamy.
38e: Schumacher devance toujours Senna de six secondes. Les drapeaux jaunes sont brandis entre la Curva del Sol et Subida do Lago pour permettre aux commissaires de ramasser les morceaux de carrosserie qui jonchent le sol.
40e: Hill effectue son unique pit-stop (9.6s.) et demeure en troisième position, un tour derrière Schumacher.
42e: Schumacher est leader devant Senna (6s.), Hill (-1t.), Alesi (-1t.), Wendlinger (-1t.), Barrichello (-1t.), Katayama (-1t.) et Herbert (-2t.).
44e: Senna observe son second arrêt aux stands qui se passe idéalement (8.6s.). Wendlinger se bat avec des pneus peu efficaces et contient difficilement Barrichello.
45e: Schumacher entre aux stands et prend pneus et essence en huit secondes. Il ressort loin devant Senna. La course semble jouée. Alesi, Wendlinger et Herbert effectuent aussi leur second arrêt.
46e: Après ces ravitaillements, Schumacher compte neuf secondes de marge sur Senna. Hill rend une minute et dix-sept secondes au leader.
47e: Arrêt de Katayama qui cède ainsi la sixième place à Wendlinger.
48e: Schumacher devance Senna (7.8s.), Hill (1m. 20s.), Alesi (-1t.), Barrichello (-1t.), Wendlinger (-1t.), Katayama (-1t.) et Herbert (-2t.).
49e: Barrichello passe une seconde fois aux stands (10.8s.) et parvient à conserver la cinquième position devant Wendlinger.
50e: Schumacher se retrouve derrière Hill qui ne s'écarte pas volontiers pour faciliter l'éventuel retour de Senna. Mais l'Anglais doit finalement ouvrir la porte. Senna est revenu à six secondes de Schumacher.
52e: Senna attaque et réduit son retard à cinq secondes. Mais Schumacher en a encore sous le pied et hausse son rythme dès le tour suivant.
54e: Schumacher précède Senna (6s.), Hill (-1t.), Alesi (-1t.), Barrichello (-1t.), Wendlinger (-1t.), Katayama (-2t.), Herbert (-2t.), Comas (-2t.) et Martini (-2t.).
55e: Senna reprend une seconde à Schumacher. Le Pauliste n'a pas abandonné tout espoir de succès devant ses fans.
56e: En sortant de Junção, Senna se laisse surprendre par l'absence d'antipatinage et part en tête-à-queue. Le moteur cale. Senna appelle les commissaires à la rescousse, mais ils n'ont pas le droit de lui venir en aide. A la grande consternation du public, Magic est hors course !
57e: Schumacher roule désormais vers une victoire puisqu'il compte facile au moins un tour d'avance sur tous ses poursuivants ! Senna rejoint les stands sous les applaudissements de la foule.
59e: Alesi, troisième, ménage sa monture en cette fin d'épreuve. Il compte dix-neuf secondes d'avance sur Barrichello.
60e: Senna ayant renoncé, les spectateurs quittent les tribunes... Schumacher roule à sa main et signe des chronos en 1'21''.
62e: Barrichello reprend plusieurs secondes à Alesi et lorgne sur la troisième place.
64e: Barrichello revient à quatorze secondes d'Alesi. Katayama se rapproche de Wendlinger qui fait de nouveau face à usure prématurée de ses gommes.
65e: A six tours du but, Schumacher mène devance Hill (-1t.), Alesi (-1t.), Barrichello (-1t.), Wendlinger (-2t.), Katayama (-2t.), Herbert (-2t.), Martini (-2t.), Comas (-2t.), Lamy (-3t.), Panis (-3t.) et Brabham (-4t.).
67e: Barrichello grappille toujours sur Alesi mais est trop loin pour le rattraper. En revanche, l'étonnant Katayama n'est plus qu'à quatre secondes de Wendlinger.
69e: Katayama s'empare de la cinquième place aux dépens de Wendlinger.
70e: Schumacher achève cette course avec un tour et demi d'avance sur Hill qui ne cherche qu'à terminer au volant d'une Williams très instable. Le Britannique souffre beaucoup physiquement.
71ème et dernier tour: Michael Schumacher remporte son troisième Grand Prix, un tour devant Hill et Alesi, ses poursuivants immédiats. Barrichello console quelque peu les Brésiliens en décrochant une très belle quatrième place. Katayama, cinquième, inscrit ses premiers points en F1, les premiers également de la paire Tyrrell-Yamaha. Wendlinger se contente du point de la sixième place. Herbert, Martini, Comas, Lamy, Panis et Brabham figurent aussi à l'arrivée.
Après la course: Schumacher détrône Senna
Euphorique, Michael Schumacher saute dans les bras de Flavio Briatore avant de grimper sur le podium. « Je ne pouvais pas imaginer plus belle chose que gagner cette course ! » s'extasie le jeune Allemand. « La chance n'y est pour rien. Le moteur et le châssis sont excellents ! » Il est vrai que la Benetton-Ford B194 avait fait forte impression lors des essais d'avant-saison. Aussi les commentateurs ne sont finalement pas surpris de son triomphe inaugural. Succès mis un temps entre parenthèses car Eddie Jordan dépose une réclamation contre le vainqueur pour fond plat non conforme (les supports des dérives latérales n'y seraient pas reproduits, en contradiction avec le règlement). Mais l'équipe technique officielle de Charlie Whiting donne quitus à Benetton... et confisque la caution de Jordan !
Ayrton Senna assume sa faute de pilotage et ne cache pas que la FW16 le laisse dubitatif: « Nous ne sommes tout simplement pas parvenus à la régler correctement pour ce circuit. Schumacher étant un peu plus rapide que moi, il n'y avait rien à faire. Quand j'ai commis mon erreur, j'étais vraiment sur le fil du rasoir. » Est-ce que Williams ne pâtirait de la disparition de la suspension active ? « La suspension mécanique n'est pas aussi simple qu'on le croit », assure le pilote brésilien. « Il faut la comprendre, avancer à petits pas. Ce n'est facile ni pour le pilote, ni pour les ingénieurs. » On le croit volontiers en constatant que Damon Hill, si rapide l'an passé avec la FW15 à suspension active, a été complétement « largué » ce week-end...
Joie chez Ferrari qui grâce à la troisième place de Jean Alesi vit son meilleur début de saison depuis trois ans. « C'est un merveilleux encouragement », indique le jeune Français, qui toutefois s'inquiète du manque de fiabilité du V12 Ferrari. Gerhard Berger, qui a cassé trois blocs ce week-end, peut le confirmer... Du côté de McLaren-Peugeot, on retient le bon début de course de Mika Häkkinen et non la panne qui a mis un terme à son dimanche. Reste que Ron Dennis n'est pas content: il constate que le V10 au Lion rend pas moins de cent chevaux au moteur Renault...
Le terrible carambolage du 36ème tour s'est heureusement achevé sans dommages pour les quatre pilotes impliqués. On se demande encore comment Martin Brundle peut se tenir debout après avoir reçu une des roues de Jos Verstappen sur la tête. « Je ne me souviens de rien, mais je vois que mon casque est fendu... » avoue le pilote McLaren, à la fois penaud et soulagé. La FIA cherche un coupable et décrète qu'il s'agit d'Eddie Irvine. Ce dernier se récrie: certes il a poussé Verstappen vers la bordure, mais il ne l'avait pas vu car il avait perdu son rétroviseur gauche lors d'un contact en début de Grand Prix. Les commissaires ne veulent rien savoir: déjà blâmé pour son comportement lors du GP du Japon d'octobre dernier, le Nord-Irlandais écope d'une course de suspension et de 10000 dollars d'amende. Les compères Jordan et Irvine font néanmoins appel dans la foulée.
Enfin, les très redoutés ravitaillements en essence se sont déroulés sans incident. Mais leur impact stratégique n'a pas été négligeable: c'est parce que les mécaniciens de Benetton se sont montrés plus prompts que ceux de Williams que Schumacher a pu doubler Senna. Cependant de nombreux commentateurs jugent que ces ballets dans les stands ne sont qu'un artifice superflu. « Les ravitaillements brouillent toute la vision de la course, ils ne servent à rien », estime par exemple Tambay, qu'Alain Prost approuve au micro de TF1: « Les ravitaillements dénaturent le spectacle. » Il faut cependant attendre plusieurs Grands Prix pour pouvoir estimer cette innovation ecclestonienne à sa juste valeur.
Tony