Riccardo PATRESE
 R.PATRESE
Williams Renault
Nigel MANSELL
 N.MANSELL
Williams Renault
Martin BRUNDLE
 M.BRUNDLE
Benetton Ford Cosworth

525o Grande Prémio

XLV British Grand Prix
Talher
Silverstone
domingo, 12 de julho de 1992
59 voltas x 5.226 km - 308.334 km
Affiche
F1
Coupe

Sabiam-no?

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Senna - Prost - Mansell: le grand chassé-croisé

Début juillet, Julian Jakobi démissionne début juillet de la vice-présidence de l'International Management Group afin de se mettre au service exclusif d'Ayrton Senna. Les deux hommes fondent leur propre société, l' « Ayrton Senna Group », destinée à la promotion de l'image du champion brésilien. Mais Jakobi doit aussi l'aider à dénicher un nouveau volant. Car Senna en a assez de subir la domination écrasante des Williams-Renault. Impatient de retrouver les sommets, le champion du monde en titre est las des déboires de son écurie, et menace de tout plaquer. « Il n'est pas exclu que je me retire en 1993 si je n'ai pas de moteur plus puissant. Il me faut des moyens techniques d'avant-garde. » Ces déclarations suscitent des remous au sein de l'entité McLaren-Honda. Ron Dennis connaît trop son pilote pour ne pas sous-estimer ces états d'âme. Mais dans l'immédiat, il doit résoudre un autre problème, duquel dépend d'ailleurs sans aucun doute le futur de Senna: le retrait de Honda, bien réel celui-ci, à la fin de la saison.

 

Senna ne perd pas son temps. Il explore la piste Ferrari, même si la Scuderia semble pour le moment absolument incapable de jouer la gagne. Il rencontre Luca di Montezemolo qui aimerait rebâtir l'équipe autour de lui. Senna n'est point insensible au mythe du cheval cabré. Cependant, il exige des garanties, et en premier lieu le recrutement d'un technicien de renommée mondiale, du calibre de John Barnard. « C'est la clef de voûte de toute négociation », affirme Jakobi. Cela tombe bien: Montezemolo tente justement de convaincre l'ombrageux ingénieur anglais de revenir à Maranello.

 

Senna regarde aussi et surtout du côté de Williams. Hélas, pour atteindre Didcot, il lui faudra écarter ses deux grands rivaux, Nigel Mansell et Alain Prost. Tout reste ouvert. En effet, malgré sa brillante saison, Mansell n'est pas du tout assuré de conserver son volant en 1993. Il avoue ignorer les intentions de Frank Williams à son égard. Celui-ci lui a offert un nouveau contrat de deux ans, sans revalorisation salariale. Or, fort de son futur statut de champion du monde, Nigel réclame quelques millions de dollars de plus. Williams prise peu ce genre de langage. En fait, Alain Prost, pleinement soutenu par Renault et Elf, a déjà signé un pré-contrat avec le team franco-anglais pour 1993 et 1994. Le Français sera sans nul doute considéré comme le pilote n°1. Dès lors, l'avenir de Mansell s'inscrit en pointillé. Soit il accepte de subir Prost, soit il s'en va. Personne ne le retient vraiment. Reste à pourvoir le baquet de Riccardo Patrese qui ne sera certainement pas conservé. Senna est l'affût. Si le défi Ferrari l'excite, il sait pertinemment que c'est avec Williams qu'il pourra la plus aisément redevenir champion du monde. Mais un duo Prost - Senna chez Williams-Renault paraît peu envisageable...

 

Présentation de l'épreuve

Ce GP de Grande-Bretagne se déroule seulement huit jours après celui de France. Les transporteurs ont eu du mal à rejoindre la Manche, toujours à cause de la grève des routiers français, mais tous rejoignent Silverstone en temps et en heure. La plupart des équipes arrivent ici avec les réglages qu'ils ont dénichés lors des essais FOCA qui se sont tenus fin juin.

 

A l'approche de cette étape anglaise, la ferveur qui entoure Nigel Mansell grimpe de quelques degrés. Le leader du championnat est sollicité de toutes parts. Depuis le début de la saison, c'est par milliers que se comptent les lettres arrivées à sa propriété de l'Île de Man. Afin de satisfaire ses fans, Mansell participe dans les rues de Londres à une exhibition au volant d'une Renault de 1902, celle qui avait gagné le Paris-Vienne cette année-là. Il n'en oublie pas pour autant la course à venir, mais se montre très optimiste. « Chaque fois que j'ai enlevé le GP de France, en 1986, 1987 et 1991, j'ai enchaîné sur celui d'Angleterre: à Brands-Hatch en 86, à Silverstone en 87 et 91. Déduisez-en ce que vous voulez », lâche-t-il dans un sourire malicieux. Outre Mansell, les autres pilotes sujets de Sa Gracieuse Majesté, Martin Brundle, Johnny Herbert, Damon Hill, et même Perry McCarthy, font objet d'une vive attention de la part d'un public de fins connaisseurs.

 

Ayrton Senna n'est pas de belle humeur. Quelques semaines plus tôt, le 26 juin, il a été interpellé par la police britannique à la sortie de Silverstone, roulant à près de 200 km/h au volant d'une Porsche. Les blagueurs expliquent que le Brésilien est tellement dégoûté de sa McLaren qu'il fonçait à Didcot, chez Williams... L'intéressé ne rit pas.

 

Giancarlo Minardi a choisi Alessandro Zanardi pour remplacer Christian Fittipaldi qui soigne ses vertèbres fêlées dans une clinique suisse. L'Italien de 25 ans, déjà aperçu chez Jordan l'an passé, aurait dû piloter une Tyrrell cette saison si Andrea de Cesaris n'avait pas pris in extremis son baquet. Il découvrira la Minardi-Lamborghini à Silverstone, n'ayant pas eu le temps d'effectuer le moindre essai à son volant.

 

L'écrasante domination des Williams FW14B ferait presque oublier que ces monoplaces ne sont pas celles que devait aligner le team de Didcot en 1992. Patrick Head explique pourquoi la FW15 n'est toujours pas en piste: « Nous ne nous attendions pas à nous trouver dans une position aussi favorable avec la FW14B. Nous avons consacré beaucoup d'énergie à la faire marcher. Contrairement à ce vous pourriez croire, la suspension active, qui est un système très complexe, n'est pas totalement fiable, et nous avons fait beaucoup d'efforts pour y remédier, ce qui a retardé la préparation de la FW15. » Il annonce que cette dernière fera ses premiers tours de piste fin août et qu'elle ne sera engagée en Grand Prix que si elle se révèle plus rapide que sa devancière.

 

Ferrari apporte un exemplaire amélioré de la F92A, doté d'une nouvelle suspension, d'un extracteur retouché et d'un moteur « de qualifications » survitaminé. Ce modèle est la propriété exclusive d'Alesi, Capelli étant plus ou moins mis sur la touche. Dallara teste sur la voiture de Lehto une nouvelle suspension inférieure à double amortisseur (et non plus mono-choc), pour régler les incessants problèmes de tenue de route. Du côté Fondmetal, Chiesa ayant cassé sa GR02 toute neuve à Magny-Cours, il doit recourir ici à l'ancien modèle, car aucun mulet n'est disponible

 

Ford et Cosworth annoncent que leur V12 est enfin prêt pour le banc d'essais. Ce moteur très compact sera doté comme le V8 HB de quatre soupapes par cylindre et d'un rappel pneumatique. La centrale électronique Ford devrait offrir un régime dépassant les 14 000 tours/minute. En parallèle, le développement du V8 « série VII » se poursuit. Le directeur de la compétition de Cosworth Dick Scammell indique ne pas savoir si Benetton débutera la saison 93 avec le V8 ou le V12.

 

Footwork met en place son département électronique qui sera dirigé par Rob Williamson. Celui-ci étudie la conception d'une boîte semi-automatique, d'un anti-patinage et d'une suspension active. David Brabham est engagé comme pilote d'essais.

Guy Edwards déniche un gros commanditaire pour Lotus: les huiles Castrol qui possèdent une longue tradition sportive. Toutefois, depuis le titre mondial acquis avec Nelson Piquet en 1983, la firme avait déserté la F1 pour l'Endurance. L'écurie de Ketteringham Hall devient ainsi le Castrol Team Lotus.

 

Essais et qualifications

Les pré-qualifications opposent désormais les Venturi-Lamborghini, les Fondmetal et les Andrea Moda, qui sont sont bel et bien présentes à Silverstone malgré leurs forfaits au Canada et en France. Celles-ci sont bien évidemment éliminées. Moreno rend une seconde et demie à Chiesa, dernier sauvé. Quant à McCarthy, il ne parcourt que quelques tours avec des pneus pluie usagers... alors que la piste est sèche ! Humilié, l'Anglais exprime vertement sa façon de penser à Andrea Sassetti. Par solidarité, certains spectateurs arborent des t-shirts flanqués de l'inscription « Let Pel out ! », vendus par McCarthy himself, toujours à court de liquidités...

 

Lors des essais du samedi matin se produit une collision qui aurait pu avoir de graves conséquences. Bertrand Gachot exécute un tête-à-queue et s'immobilise au bord de la piste dans le secteur délicat de Vale. Les drapeaux jaunes sont agités. Riccardo Patrese les aperçoit et ralentit pour dépasser la Venturi. En revanche Érik Comas, blotti derrière la Williams, ne voit aucune signalisation. Il tente de s'infiltrer entre Gachot et Patrese et, arrivant trop vite, accroche la Williams. Les deux voitures partent en glissade et s'écrasent très violemment contre les glissières. Si les coques sont détruites, ni Patrese ni Comas ne sont heureusement blessés. Les commissaires sportifs convoquent ensuite le Français qui avoue ne pas avoir aperçu les drapeaux jaunes. Il écope d'une amende de 5000 dollars et d'un avertissement qui sera inscrit sur sa licence.

 

Les pilotes signent leurs meilleurs chronos le vendredi car une pluie incessante perturbe les essais qualificatifs du samedi après-midi. Surmotivé par ses fans, Mansell assomme toute concurrence et s'empare de la pole position (1'18''965''') en laissant Patrese à deux secondes ! L'Italien prend son infortune avec humour et, vendredi soir, vient tâter l'entrejambe de son équipier, « pour comprendre où il puise l'énergie pour signer pareils chronos ! » Les McLaren-Honda ne rencontrent aucun problème majeur et sont tout simplement trop lentes. Senna (3ème) concède deux secondes et sept dixièmes à Mansell et Berger (5ème) plus de trois secondes. Les Benetton-Ford (Schumacher 4ème, Brundle 6ème) sont loin à cause d'une adhérence médiocre. Les Lotus-Ford (Herbert 7ème, Häkkinen 9ème) confirment leur rapide progression. Soupe à la grimace chez Ferrari: Alesi (8ème) doit rapidement remiser sa nouvelle machine (moteur cassé....) puis se débat avec une voiture de rechange mal réglée. Capelli (14ème) déplore un sous-virage excessif.

 

Comas profite des réglages adoptés lors des essais FOCA pour placer sa Ligier-Renault au dixième rang, malgré sa collision avec Patrese. Boutsen, absent de ces séances, n'est que treizième. Les Venturi-Lamborghini (Gachot 11ème, Katayama 16ème) sont également dans le coup. Chez Footwork, Alboreto s'adjuge le 12ème temps tandis que Suzuki, bénéficiant d'une nouvelle position de conduite, est enfin à son aise et se classe 17ème. Tarquini place sa Fondmetal sur le quinzième rang. Son collègue Chiesa ne peut défendre ses chances avec le vieux modèle et ne se qualifie pas. Les Tyrrell-Ilmor (de Cesaris 18ème, Grouillard 20ème) sont dépourvues de grip. Les Dallara-Ferrari (Lehto 19ème, Martini 22ème) continuent de régresser. Même constat pour les March-Ilmor: Wendlinger (21ème) peine à se qualifier et Belmondo est éliminé vendredi par une rupture de boîte. Désastre chez Jordan: non seulement le V12 Yamaha est dramatiquement poussif, mais en plus Modena (23ème) et Gugelmin (24ème) rencontrent des problèmes avec leurs boîtes de vitesses. Morbidelli (25ème) sauve de justesse sa très médiocre Minardi. A court d'entraînement, Zanardi échoue au 27ème rang. Cela profite à D. Hill (26ème) qui rend un bel hommage à son père en obtenant sa première qualification à Silverstone. C'est la première fois qu'une Brabham roulera en course depuis Kyalami. Moins heureux, van de Poele passera son dimanche dans les stands.

 

Le Grand Prix

Mika Häkkinen ne se présente pas au départ du warm-up, dimanche matin. Réveillé avec quelque retard, le jeune Finlandais est une des victimes du catastrophique nouveau plan de circulation mis en place pour ce Grand Prix. Pris dans un bouchon, il obtient d'un policeman la permission d'emprunter la voie extérieure, avant d'être intercepté quelques kilomètres plus loin par des agents beaucoup moins coulants. Häkkinen peut finalement rejoindre le paddock à temps pour la course, mais son passeport est confisqué. Il est convoqué pour le lendemain par un magistrat.

 

Le ciel menaçant et les incroyables embouteillages n'ont pas découragé les fanatiques de Nigel Mansell. Plus de 200 000 spectateurs enfiévrés ont pris place dans les gradins de l'ancien aérodrome. Ils saluent bruyamment leur champion à chacune de ses apparitions. Celui-ci réalise sans peine le meilleur temps du warm-up. L'après-midi, les nuages sont toujours présents mais la météo indique que le Grand Prix se déroulera sur piste sèche. L'ambiance est telle dans les tribunes que les officiels demandent à Mansell de prendre un micro pour appeler au calme. Nigel refuse: pourquoi devrait-il sermonner ses fans ?

 

Comme à l'accoutumée, les Williams prennent le départ avec le moteur Renault RS3C. Après quelques hésitations, Alesi utilise la Ferrari « améliorée ».

 

Départ: Mansell fait patiner ses roues, ce qui permet à Patrese de s'infiltrer à l'intérieur et de virer en tête à Copse. Derrière, Brundle prend un excellent envol et pointe au troisième rang devant Schumacher, Senna et Berger. Comas bloque ses roues et abîme ses pneus.

 

1er tour: Mansell attaque aussitôt Patrese, le déborde avant Maggots et reprend le commandement de l'épreuve. Il s'échappe immédiatement. Senna se défait de Schumacher dans l'enchaînement Becketts - Chapel. Puis Berger s'en prend à l'Allemand et le déborde à Stowe. Mais un peu plus tard, l'Autrichien part au large au freinage de Priory. Schumacher et Herbert le doublent. En fin de tour, Mansell compte trois secondes d'avance sur Patrese. Suivent Brundle, Senna, Schumacher, Herbert, Berger, Alesi, Comas et Häkkinen.

 

2e: Mansell s'envole sous les vivats du public. Il relègue Patrese à cinq secondes ! Schumacher prend l'aspiration de Senna dans Hangar Straight puis plonge à l'intérieur. Les deux hommes franchissent Stowe côte à côte, et le Brésilien conserve l'ascendant.

 

3e: Mansell imprime un rythme d'enfer et tourne deux secondes au tour plus vite qu'un Patrese résigné. Brundle parvient à suivre l'Italien.

 

4e: Schumacher demeure sur les talons de Senna sans trouver le moyen de forcer le passage. Derrière ce duo, Herbert contient Berger et Alesi.

 

5e: Mansell devance Patrese de dix secondes. Häkkinen prend la neuvième position à Comas.

 

6e: Mansell précède Patrese (12s.), Brundle (14s.), Senna (15.4s.), Schumacher (16.1s.), Herbert (19s.), Berger (20s.), Alesi (21s.), Häkkinen (29s.), Comas (30s.), Alboreto (33s.) et Capelli (35s.).

 

8e: Mansell continuer d'écraser ce Grand Prix et jouit de quinze secondes d'avantage sur son coéquipier. Les écarts se resserrent entre Brundle, Senna et Schumacher.

 

9e: Mansell roule en 1'25''847'''. Patrese, le plus rapide du peloton, tourne en 1'27''...

 

10e: L'intervalle entre Mansell et Patrese se chiffre à dix-sept secondes. Fait rarissime: Frank Williams sourit devant une caméra de télévision !

 

11e: La question est dorénavant de savoir si Mansell va pouvoir tenir ce rythme durant toute l'épreuve. Pour l'heure, il ne donne aucun signe de relâchement. Pendant ce temps-là, Senna et Schumacher pourchassent Brundle.

 

12e: Mansell est premier devant Patrese (22.7s.), Brundle (26s.), Senna (27s.), Schumacher (27.8s.), Herbert (32s.), Berger (34s.), Alesi (35.5s.), Häkkinen (37s.) et Comas (45s.).

 

13e: Mansell prend un tour aux premiers attardés, Hill et Martini. Ce dernier se débat avec une tenue de route catastrophique.

 

14e: Mansell lève un peu le pied. Il peut se le permettre: Patrese est relégué à vingt-trois secondes !

 

16e: Mansell traverse le trafic pendant que, beaucoup plus loin, Brundle, Senna et Schumacher se tiennent en deux secondes. Häkkinen attaque Alesi pour le gain de la huitième place. Comas, Alboreto et Capelli luttent pour la dixième position.

 

17e: Senna revient dans les échappements de Brundle, sans pour autant se débarrasser de Schumacher.

 

19e: Mansell perd un peu de temps derrière Boutsen et de Cesaris qui se chamaillent pour la quinzième position. Le peloton est très compact puisqu'on ne compte toujours aucun abandon.

 

20e: Mansell caracole devant Patrese (22.1s.), Brundle (24.5s.), Senna (24.9s.), Schumacher (25.4s.), Herbert (34.5s.), Berger (36s.), Alesi (38.1s.), Häkkinen (38.4s.), Comas (1m. 03s.), Alboreto (1m. 04s.) et Capelli (1m. 05s.).

 

21e: Senna met une grosse pression sur Brundle. Häkkinen s'empare de la huitième place aux dépens d'Alesi.

 

22e: Mansell reprend sa marche en avant et porte son avance sur Patrese à vingt-cinq secondes. Modena accroche de Cesaris qui crève un pneu et doit parcourir une bonne partie du circuit au ralenti pour rejoindre les stands. Le Romain repartira très attardé.

 

23e: Brundle, Senna et Schumacher se fraient un chemin parmi les retardataires. Martini fait changer ses gommes.

 

24e: Trente secondes séparent les deux Williams. Patrese bute sur des attardés, et notamment sur Lehto.

 

25e: Senna ne laisse aucun répit à son vieux rival Brundle, mais celui-ci verrouille toutes les portes. Schumacher les observe, le nez dans la McLaren du Pauliste. Comas change ses pneus, endommagés depuis le premier virage.

 

27e: Mansell a trente-sept secondes de marge sur son compagnon d'écurie. Senna fait l'extérieur à Brundle à Stowe sans parvenir à passer.

 

28e: Mansell domine devant Patrese (38s.), Brundle (43s.), Senna (43.4s.), Schumacher (44s.), Herbert (52s.), Berger (54s.), Häkkinen (56s.), Alesi (57s.), Alboreto (-1t.), Capelli (-1t.) et Gachot (-1t.).

 

29e: Berger fait halte aux stands pour chausser des pneus neufs (6.7s.) et perd deux places. Capelli prend l'avantage sur Alboreto. Katayama abandonne, victime de son embrayage. Wendlinger se retire également suite à la rupture d'un crabot sur sa boîte.

 

30e: Mansell entre aux stands en fin de tour pour prendre des Goodyear frais. L'opération est un peu longuette (12s.) mais le héros local repart très loin devant Patrese.

 

31e: Brundle sème quelque peu Senna grâce aux dépassements d'attardés. Herbert met pied à terre suite à une avarie de sa boîte semi-automatique. Son collègue Häkkinen récupère sa sixième place.

 

33e: Mansell devance Patrese de douze secondes. Arrêt pneus pour Tarquini.

 

34e: Schumacher apparaît dans la pit-lane pour changer d'enveloppes et ressort derrière Häkkinen. Alesi prend aussi des pneus neufs. Gachot rentre au garage avec une monoplace fumante. Un roulement arrière a surchauffé.

 

35e: L'écart demeure stable entre les Williams-Renault. Senna est revenu à quelques dixièmes de Brundle.

 

37e: Mansell précède Patrese (13s.), Brundle (18.8s.), Senna (19.2s.), Häkkinen (37s.), Schumacher (51s.), Berger (52s.) et Alesi (1m. 10s.). Changement de gommes pour Capelli.

 

38e: Mansell améliore le record du tour (1'24''036'''). Senna et Brundle sont englués dans le trafic.

 

39e: Gugelmin renonce après avoir cassé son V12 Yamaha.

 

40e: Schumacher heurte Modena à la sortie du virage de Club et l'envoie en tête-à-queue. Berger en profite pour prendre la sixième place à l'Allemand. Modena parvient quant à lui à se relancer.

 

41e: Mansell est premier devant Patrese (20s.), Brundle (27.1s.), Senna (27.7s.), Häkkinen (46.1s.), Berger (55s.), Schumacher (55.8s.), Alesi (1m. 14s.), Alboreto (-1t.), Comas (-1t.), Capelli (-1t.) et Boutsen (-1t.).

 

42e: Mansell compte vingt-deux secondes d'avance sur Patrese. Brundle oppose toujours une résistance opiniâtre à Senna.

 

44e: Alesi se range dans l'herbe car la bonbonne de son extincteur de bord vient d'exploser ! Encore un « jour sans » pour Ferrari...

 

45e: Vingt-sept secondes entre les Williams. Senna suit toujours Brundle comme son ombre, malgré des pneus abîmés qui engendrent de fortes vibrations. Modena immobilise sa Jordan, moteur fumant.

 

46e: Häkkinen a usé ses pneus et réduit sa cadence. Berger et Schumacher le poursuivent.

 

48e: Trente secondes d'écart entre Mansell et Patrese. Häkkinen repousse les assauts de Berger mais ses enveloppes sont à la corde.

 

49e: Berger se défait d'Häkkinen dans Hangar Straight. Puis Schumacher double le Finlandais dans la descente vers Bridge.

 

50e: La suspension arrière de de Cesaris est faussée depuis son choc avec Modena. La Tyrrell échappe à l'Italien qui part en tête-à-queue à Luffield. Il est poussé hors circuit par les commissaires.

 

51e: Mansell devance Patrese (27s.), Brundle (36s.), Senna (37s.), Berger (1m. 01s.), Schumacher (1m. 02s.), Häkkinen (1m. 04s.), Alboreto (-1t.), Comas (-1t.), Capelli (-1t.) et Boutsen (-1t.).

 

52e: Senna harcèle Brundle et semble prêt à porter le fer dans la Benetton.

 

53e: Senna parvient enfin à doubler Brundle à Stowe. Hélas, quelques secondes plus tard, sa transmission le lâche au virage de Club. Le Brésilien renonce pour la sixième fois en neuf Grands Prix.

 

54e: A six tours du but, Mansell continue de cravacher et passe sous la barre d'1'24''. Le public britannique est aux anges !

 

55e: Les spectateurs agitent leurs Union Jack en prévision du triomphe de Mansell. Morbidelli abandonne car sa pression d'huile est à zéro. Il était quatorzième.

 

56e: Mansell est premier devant Patrese (32s.), Brundle (44s.), Berger (1m.), Schumacher (1m. 02s.) et Häkkinen (1m. 15s.).

 

57e: Pour le plaisir, Mansell abaisse une dernière fois le record du tour (1'22''539'''). Onzième, Grouillard met la pression sur Boutsen qui se débat avec des pneus cloqués.

 

58e: Schumacher fait le forcing pour prendre la quatrième place à Berger. Il boucle le second meilleur chrono du jour (1'24''344''').

 

59ème et dernier tour: Nigel Mansell remporte sa vingt-huitième victoire en F1. Les tribunes hurlent de joie. Patrese finit deuxième, Brundle troisième. Le moteur de Berger part en fumée dans les derniers mètres. Schumacher s'empare de la quatrième position tandis que l'Autrichien coupe la ligne en roue libre, au cinquième rang. Sixième, Häkkinen prend un point. Alboreto, Comas, Capelli, Boutsen, Grouillard, Suzuki, Lehto, Tarquini, Martini et Hill rejoignent aussi l'arrivée.

 

Après la course: l'apothéose de Mansell

Le drapeau à damiers est à peine agité que les spectateurs renversent les barrières pour envahir l'autodrome et exprimer leur joie. La marée hurlante se précipite sur son champion. Mansell effectue un demi-tour d'honneur, un drapeau britannique à la main, mais est bientôt assailli au virage de Club, arraché à son cockpit et secoué dans tous les sens par des fans extatiques. Heureusement, des commissaires le sauvent en l'exfiltrant manu militari. Le vainqueur grimpe dans un fourgon Ford Transit, direction le podium. Sa monture n'a pas cette chance: elle est littéralement désossée par des admirateurs qui veulent repartir avec un « souvenir » de leur idole. Martin Brundle et Damon Hill sont également littéralement stoppés par des fans qui souhaitent les congratuler ou leur donner de force des étendards.

 

Lorsque Mansell paraît sur le podium, 200 000 poitrines crient leur allégresse. Des milliers d'« Union Jack » sont brandis. « King Nigel » embrasse Riccardo Patrese, ainsi que Martin Brundle, également très applaudi pour sa superbe résistance face à Ayrton Senna. Après un vibrant God save the Queen, Mansell arrose de champagne Christian Contzen, très heureux de fêter par ce triomphe les quinze années de présence de Renault en Formule 1. C'est en effet à Silverstone, en 1977, que cette aventure a commencé...

 

Épuisé mais comblé, Mansell se confie ensuite à ses amis: « J'ai bien aimé cette fin de course à petite vitesse (sic). Mais je ne m'attendais pas à ce qu'elle a engendré. C'était réellement incroyable. Pour moi, ce fut une drôle d'expérience de me retrouver juché sur les épaules de tous ces gens que je ne connaissais pas. » Un policier à cheveux blancs se penche près de lui: « J'étais, jadis, du service d'ordre qui encadrait les concerts des Beatles et la finale de la coupe du monde de football à Wembley, en 1966. Ce que j'avais vu alors, je ne le pensais plus possible. Vous l'avez réédité. » Mansell sourit, avant d'aller prendre le thé avec Rosanne... Il reçoit un peu plus tard un télégramme de félicitations signé Jackie Stewart: avec vingt-huit victoires, il est désormais le plus titré des coureurs britanniques.

 

Riccardo Patrese se satisfait lui comme il peut. En quinze années de Formule 1, il n'avait jamais inscrit de points en Angleterre. Voilà une anomalie réparée. « Nigel était sur une autre planète aujourd'hui », constate-t-il, amer.

 

Chez McLaren, le désarroi est complet. « On savait que ça allait être dur, mais pas à ce point ! » soupire Ron Dennis. Ayrton Senna dresse un bilan sans concession de sa situation: « Le déclin de McLaren ne date pas de cette année, je l'ai perçu dès l'année dernière. Nous avons décroché le titre certes, mais grâce aux ennuis des Williams. Cette année c'est pire. Je n'ai désormais plus le choix. Si je ne trouve pas rapidement une écurie capable de disputer le championnat 1993 dans les meilleures conditions, je préfère me retirer. » Dennis encaisse ce coup de massue.

 

Dans le paddock, Bernie Ecclestone croise Alain Guillon, le président d'Elf-France, et lui tend une main molle: « Je vous félicite. Vous êtes trop fort. Il faut faire quelque chose... » Guillon ne se démonte pas: « Elf utilise ce carburant depuis sept ans et il est même disponible dans le commerce. » Le Grand Argentier ne répond rien. D'aucuns lui prêtent des projets machiavéliques pour anéantir l'hégémonie des Williams-Renault-Elf...

 

Avec 76 points, Mansell se rapproche de la consécration mondiale alors que la mi-saison est à peine dépassée. Patrese (40 pts) tient solidement la seconde place, puis viennent Schumacher (29 pts), Berger (20 pts), Senna (18 pts) et Brundle (13 pts). Chez les constructeurs, Williams-Renault (116 pts) n'a rien à redouter de Benetton-Ford (42 pts) et de McLaren-Honda (38 pts).

Tony