Le Grand Prix des Pays-Bas est avancé dans le calendrier par rapport à la saison 1973. Nous sommes un an après l'accident mortel de Roger Williamson, et tout le monde espère bien sûr éviter un autre drame.
Avec six vainqueurs en sept courses, la première moitié de cette saison a été très disputée. Tandis que dans l'ensemble on assistait à un duel opposant les McLaren aux Ferrari, le doublé réalisé par les Tyrrell à Anderstorp vient chambouler la hiérarchie. Jody Scheckter est désormais un candidat au titre crédible face à Emerson Fittipaldi, Clay Regazzoni et Niki Lauda. En revanche, après un double abandon en Suède, l'équipe Lotus a perdu ses derniers espoirs de se mêler à la lutte suprême. Quant à la Brabham de Carlos Reutemann, très fringante en début d'année, elle déçoit beaucoup, n'étant performante que sur les pistes très rapides.
Une polémique éclate avant cette course concernant le nombre d'engagés. Après que l'équipe Trojan s'est vu refuser pour la troisième fois de suite son engagement, la Fédération internationale oblige les organisateurs à accepter plus d'écuries aux départs des courses. Trojan se voit autorisée à participer à la course avec Tim Schenken. Il y a 27 voitures inscrites pour cette épreuve de Zandvoort.
Comme prévu, cette course hollandaise voit le retour du pilote local Gijs van Lennep qui se glisse dans le baquet de la deuxième Iso aux côtés d'Arturo Merzario.
En Suède, Carlos Pace a piqué une colère contre sa voiture qu'il jugeait inconduisible. John Surtees n'a pas apprécié le comportement de son pilote et a décidé de le mettre à pied. De fait, Pace est licencié par l'écurie. Du coup Surtees arrive en Hollande avec une seule voiture, celle de Jochen Mass.
Shadow a trouvé un nouveau pilote pour remplacer Brian Redman. Il s'agit du jeune Gallois Tom Pryce, déjà aperçu au GP de Belgique au volant de la Token. De son côté, son équipier Jean-Pierre Jarier est au départ malgré une blessure contractée aux 24 heures du Mans. Celle-ci va l'affaiblir pendant un long moment.
BRM engage de nouveau trois voitures, mais cette fois-ci c'est François Migault qui va utiliser la deuxième P201. Vainqueur des 24 du Mans la semaine précédente, Henri Pescarolo doit se contenter de la P160.
Enfin, remis de sa blessure au pouce, Hans Joachim Stuck fait sa réapparition chez March.
Les qualifications
Les essais libres voient les Ferrari dominer la concurrence. Rien ne semble pouvoir arrêter les machines rouges qui ont rarement été à pareille fête. Sans forcer son talent, Lauda réalise sa quatrième pole position de la saison avec six dixièmes de seconde d'avance sur Regazzoni. Fittipaldi est troisième, à plus d'une seconde du poleman. Il précède Hailwood et Scheckter. Hunt est sixième au volant de l'Hesketh. En quatrième ligne on retrouve Jarier et Depailler. Suivent Hulme, Peterson, l'excellent Pryce et Reutemann.
Ickx est seulement dix-huitième au volant de la deuxième Lotus. Les BRM, anciennes ou nouvelles, sont de plus en plus attirées vers le fond de la grille: Beltoise est 16ème, Pescarolo 24ème et Migault 25ème et dernier. Habitué aux places d'honneur, Merzario est cette fois seulement 21ème. Von Opel est vingt-troisième au volant de la deuxième Brabham officielle. Van Lennep et Schenken ne sont pas qualifiés.
Le Grand Prix
La course se déroule sous un grand soleil estival.
Départ: Lauda prend le meilleur envol tandis que Regazzoni a eu du mal à enclencher une vitesse et se fait doubler par Hailwood et Depailler, mais résiste à Fittipaldi. A l'abord de Tarzan Hunt, mal parti, percute Pryce et envoie celui-ci dans les piquets de protection.
1er tour: Stuck sort de la route et heurte un grillage. C'est l'abandon pour le jeune Allemand.
Lauda mène avec deux secondes d'avance sur Hailwood. Suivent roues dans roues Depailler et Regazzoni, puis Scheckter, Fittipaldi, Reutemann, Jarier, Peterson et Hulme.
2e: Regazzoni déborde Depailler à Tarzan. Peterson double Jarier. Hunt regagne son stand à la fin de cette boucle. Une de ses suspensions a été tordue par le choc avec Pryce et il doit renoncer.
3e: Regazzoni prend l'aspiration derrière Hailwood au début de la ligne droite principale. L'Anglais ne lui laisse que très peu d'espace et Regazzoni doit se rabattre au dernier moment éviter de percuter le mur des stands. Quelques secondes plus tard, il s'infiltre à l'intérieur et passe. Voici les deux Ferrari en tête du Grand Prix. Fittipaldi prend la cinquième place à Scheckter.
5e: Lauda et Regazzoni s'échappent en tête de la course et comptent déjà plusieurs secondes d'avance sur Hailwood, à la lutte avec Depailler pour la troisième place. Brambilla s'arrête à son stand afin de fixer un fil de bougie débranché. Il repart dernier.
7e: Jarier doit regagner les stands pour changer une rotule de câble d'accélérateur. La réparation dure de longues minutes.
9e: La galère se poursuit chez Surtees. Mass regagne le garage suite à la rupture de l'arbre de transmission.
10e: Lauda compte trois secondes d'avance sur Regazzoni qui a semé Hailwood, attaqué par Depailler. Fittipaldi observe la situation en cinquième position et précède Scheckter, Reutemann, Peterson, Hulme et Watson. Merzario anime ce début de course dans le peloton: il est remonté de la 21ème à la 15ème place.
12e: Depailler attaque Hailwood et s'empare de la troisième place. Fittipaldi revient alors sur son coéquipier.
14e: Fittipaldi double à son tour Hailwood.
15e: Lauda précède Regazzoni de quelques secondes. Depailler est à une dizaine de secondes du leader.
16e: Pescarolo renonce suite à des soucis récurrents de tenue de route.
17e: Hill est victime d'une panne d'embrayage. Le doyen du plateau est contraint à l'abandon.
18e: Peterson prend la septième place à Reutemann.
19e: Beltoise ne parvient plus à sélectionner ses vitesses. Le pilote français abandonne tandis qu'il occupait la quatorzième place.
21e: Edwards s'arrête à son stand à cause de problèmes d'alimentation. Il repartira après un long arrêt.
24e: Un des pneus avant de Schuppan éclate peu avant Pulleveld. L'Australien parvient à contrôler l'Ensign et s'arrête dans l'aire de dégagement située près du rail délimitant l'entrée des stands. Ses mécaniciens vont alors au-devant de lui pour changer sa roue puis le renvoient en course. Mais cette opération est illégale car effectuée en dehors des stands.
25e: Rien n'arrête les Ferrari en tête de l'épreuve. Depailler tient solidement la troisième place devant Fittipaldi, Hailwood et Scheckter. Peterson est septième et précède Reutemann, Hulme, Watson et Merzario.
30e: Reutemann est sous la pression de Hulme et de Watson. Jarier renonce suite à une panne d'embrayage.
32e: Cinq secondes séparent Lauda et Regazzoni.
35e: Hulme dépasse Reutemann, bientôt imité par Watson.
36e: Peterson s'arrête au stand Lotus car il semblerait qu'une de ses roues arrière soit en passe de se détacher. Les mécaniciens resserrent les écrous puis le Suédois reprend la piste en quinzième position. De nouveau il perd tout espoir d'inscrire des points.
37e: Fittipaldi se rapproche de Depailler qui est moins véloce du fait de la lente dégradation de ses pneus.
38e: Fittipaldi attaque Depailler et parvient à lui subtiliser la troisième place.
40e: Lauda compte une poignée de secondes d'avance sur Regazzoni. Fittipaldi est à vingt secondes du leader et précède Depailler, Hailwood, Scheckter, Hulme, Watson, Merzario et Reutemann. Edwards abandonne suite à ses problèmes d'alimentation.
41e: Ickx est au ralenti tandis qu'une épaisse fumée émane de sa Lotus. A vrai dire le Belge est en train de perdre une de se roues à cause d'un écrou mal fixé. Par miracle, il parvient à parcourir presque tout à un tour du circuit et à ramener sa voiture aux stands. Brambilla est arrêté à son stand pour changer un pneu avant cloqué.
43e: Après réparations, Ickx est renvoyé en piste par Lotus en quatorzième position.
45e: Depailler voit ses pneus se dégrader sérieusement et il doit lever le pied. Cela permet à Hailwood et à Scheckter de le rattraper.
47e: Hailwood prend la quatrième place à Depailler. Scheckter est désormais dans les roues de son équipier.
48e: Scheckter déborde Depailler qui a donc chuté au sixième rang. Heureusement pour lui il compte encore une belle avance sur Hulme.
50e: Lauda et Regazzoni poursuivent leur parade en tête de la course, avec plus de vingt secondes de marge sur Fittipaldi.
55e: Merzario doit renoncer suite à une panne de boîte de vitesses.
57e: Reutemann est victime d'une crevaison lente et doit s'arrêter au stand Brabham pour changer sa roue. Il perd ainsi beaucoup de temps et ne regagne le circuit qu'en douzième position.
60e: Lauda compte une huitaine de secondes d'avance sur Regazzoni. Fittipaldi est à une trentaine de secondes. Hailwood et Scheckter sont dans le sillage du Brésilien. Depailler est désormais distancé et précède Hulme, Watson, Migault et von Opel.
62e: Migault tombe en panne de boîte de vitesses. Les trois BRM sont hors course.
63e: Meilleur tour en course pour Peterson en 1'21''44'''. Le Suédois remonte sur von Opel.
66e: Hulme est victime d'un problème d'allumage. Il regagne le stand McLaren et doit quitter la course. Watson récupère la septième place.
68e: Très rapide en cette fin de course, Peterson prend la huitième place à von Opel.
70e: Plus rien ne peut inquiéter Lauda qui compte environ dix secondes d'avance sur son équipier.
72e: Fittipaldi, Hailwood, et Scheckter se tiennent en quelques secondes mais il ne semble pas qu'ils puissent s'attaquer avant le drapeau à damiers.
75ème et dernier tour: Niki Lauda remporte sa deuxième victoire de la saison après une impressionnante démonstration. Regazzoni finit deuxième et complète le deuxième doublé de l'année pour Ferrari. Fittipaldi assure une honnête troisième place mais devance de peu Hailwood et Scheckter. On peut noter que les cinq premiers pilotes sur la grille de départ occupent les mêmes places à l'arrivée de la course. Après un début de course méritant, Depailler termine à la sixième place. Watson, Peterson, von Opel, Brambilla, Ickx, Reutemann et Schuppan viennent ensuite. Schuppan sera disqualifié par les commissaires de course pour avoir fait changer sa roue en dehors de la zone des stands.
Après la course
La domination de Lauda et des Ferrari en général a vraiment impressionné la concurrence et il ne fait aucun doute que désormais la Scuderia, si elle améliore quelque peu la fiabilité de la 312, est la mieux placée pour conduire un de ses pilotes au titre mondial. Fittipaldi limite les dégâts et, au contraire de ses rivaux, a vu l'arrivée de chacune des courses, mais sa McLaren doit nettement s'améliorer pour faire pièce aux Ferrari. En attendant le champion brésilien félicite chaleureusement Lauda.
Au classement des pilotes, Fittipaldi conserve la première place avec 31 unités mais ne compte plus qu'un point d'avance sur Lauda. Regazzoni est à trois points du Brésilien, Scheckter à huit points. Au classement des constructeurs, Ferrari est revenue à trois longueurs de McLaren-Ford-Cosworth.
Tony