Transferts: Räikkönen rempile chez Ferrari
Contre toute attente, Ferrari a annoncé le 19 août qu'elle prolongeait le contrat de Kimi Räikkönen pour 2016. Des bruits pressants suggéraient pourtant que le champion finlandais serait remplacé par son compatriote Valtteri Bottas. Ce dernier devrait donc en conséquence demeurer chez Williams-Mercedes aux côtés de Felipe Massa. D'après le quotidien britannique The Telegraph, Williams aurait exigé trop d'argent à la Scuderia pour accepter de libérer Bottas. Mais peut-être que les performances du jeune Finlandais n'ont pas complètement convaincu Ferrari. Cette saison, il ne parvient pas en effet à dominer Massa comme il le faisait en 2014.
Les regards des journalistes se tournent vers la nouvelle équipe Haas qui fera ses débuts en 2016. Nico Hülkenberg pourrait la rejoindre, accompagné par un des pilotes de réserve de Ferrari, Jean-Éric Vergne ou Esteban Gutiérrez. Gene Haas admet cependant discuter avec une dizaine de pilotes.
Lotus au bord du gouffre financier, Renault en sauveur ?
La situation financière de l'équipe Lotus est périlleuse. Un mois plus tôt, Pirelli s'est déjà plainte de factures impayées. A Spa, c'est l'ancien pilote d'essais Charles Pic qui a envoyé un huissier à l'équipe anglo-luxembourgeoise. Pic a en effet été engagé en 2014 pour disputer certaines séances d'essais tout en apportant de l'argent frais à Enstone. Or il n'aurait pas été employé selon les modalités consignées dans son contrat. Un accord doit être trouvé entre Pic et Lotus avant le dimanche soir, sinon l'écurie n'aura pas le droit de quitter le territoire belge. Le responsable des « opérations piste » Alan Permane admet : « Nous sommes dans la pire crise financière que nous ayons jamais connue. Réussir à aligner deux voitures à chaque Grand Prix est un effort énorme pour nous en ce moment. »
On ignore toujours en revanche si Genii Capital va vendre son équipe à Renault Sport. Alain Prost, présent à Spa et qui semble être au cœur des tractations, déclare qu'il faudra patienter jusqu'en septembre pour connaître l'épilogue de cette affaire. Car Renault ne rachètera évidemment pas une équipe en faillite. On murmure que la frime française négocierait avec Bernie Ecclestone l'obtention d'un statut d'« équipe historique », comparable à celui de Ferrari, afin d'obtenir une grosse part du gâteau des droits télévisés.
Présentation de l'épreuve
Après quatre semaines de pause estivale, le championnat du monde de Formule 1 2015 reprend à Spa-Francorchamps. Avec une nouveauté : le retour aux départs manuels, sans assistance de la part des ingénieurs à la radio. A vrai dire la procédure électronique ne change pas, mais les pilotes devront désormais l'effectuer sans que leurs ingénieurs ne leur ordonnent sur quels boutons appuyer... Chaque coureur doit donc mémoriser les étapes de la procédure... ou la noter sur un post-it collé dans le cockpit ! Cette réforme a été adoptée par le Groupe stratégique afin de redonner un peu de piment à des Grands Prix lénifiants. La plupart des pilotes l'accueille favorablement même si évidemment certains craignent une immobilisation au moment de l'extinction des feux qui pourrait avoir des conséquences catastrophiques. Ce sont les risques du métier.
Honda apporte à McLaren un moteur amélioré, plus puissant de 50 chevaux. Ce gain de puissance pourrait faire gagner à la McLaren sept à huit dixièmes au tour, mais cela reste bien au deçà des performances du groupe propulseur Mercedes. Fernando Alonso déclare ne pas voir de différence entre ce nouveau moteur et l'ancien... Yasuhisa Arai, le directeur de Honda F1, a en tout cas reçu l'appui du nouveau président du groupe, M. Takahiro Hachigo. Malgré cette saison 2015 catastrophique, le projet Honda se poursuit donc.
Toujours côté moteurs, Sauber bénéficie à Spa de la dernière évolution de l'unité de puissance Ferrari, ce qui tombe à point nommé pour une équipe qui, de l'aveu même de Felipe Nasr, n'a quasi pas développé sa C34 depuis Melbourne, faute d'argent.
Mercedes introduit sur sa F1 W06 un nouvel aileron arrière en forme de « cuillère ». On a déjà aperçu autrefois ce type de pièce sur des Sauber et des Williams. Le principe est simple : la partie centrale recourbée est censée générer un appui supplémentaire, tandis que les extrémités doivent permettre de réduire la traînée et d'accroître la vitesse de pointe. L'équipe allemande cherche à reprendre un net avantage sur la Scuderia Ferrari qui a remporté le GP de Hongrie avant la trêve. « Ferrari est dans la même situation que nous il y a un an, » explique Daniel Ricciardo. « L'écart avec Mercedes est toujours trop grand et quand il semble se combler, Mercedes introduit des évolutions. Ferrari a davantage de chances sur des circuits plus lents et sinueux. Mercedes devrait se balader ce week-end à Spa. »
Essais et qualifications
Rosberg est le plus rapide lors des séances du vendredi, mais se fait aussi très peur l'après-midi lorsque son pneu arrière-droit éclate alors qu'il s'apprête à franchir Blanchimont à très haute vitesse. La Mercedes effectue une impressionnante embardée mais heureusement ne heurte rien. Pirelli prétend que le pneu défectueux a été découpé par un débris, une version que conteste Rosberg. Hamilton reprend le dessus sur son équipier lors de la séance du samedi matin.
Hamilton conserve l'avantage en qualifications et réalise sa dixième pole position de la saison avec quatre dixièmes d'avance sur Rosberg. Les Williams-Mercedes (Bottas troisième, Massa sixième) sont logiquement en embuscade sur ce tracé qui leur est favorable. Grosjean a réalisé une belle performance en obtenant le quatrième temps, mais malheureusement il reçoit cinq places de pénalité pour avoir changé sa boîte de vitesses et ne partira donc que neuvième, deux rangs derrière Maldonado. C'est Pérez qui récupère la quatrième place avec sa Force India-Mercedes. Son collègue Hülkenberg est onzième. Cinquième avec la Red Bull-Renault, Ricciardo est le premier de ceux qui ne sont pas mus par un moteur allemand. Kvyat est seulement douzième.
Ferrari a passé un mauvais samedi. Vettel est un décevant huitième tandis que Räikkönen a dû s'arrêter en Q2 à cause d'une chute de pression d'huile. Après avoir changé sa boîte de vitesses, il ne s'élancera que depuis le seizième rang. Chez Toro Rosso, Sainz décroche une passable dixième place tandis que Verstappen a reçu une pénalité pour avoir modifié des éléments sur son groupe propulseur. Il partira 18ème. Les Sauber (Ericsson 13ème, Nasr 14ème) font de la figuration, tout comme les Manor de Stevens et Merhi, quinzième et dix-septième sur la grille, mais dernières sur la feuille de temps, à plus d'une seconde et demie des chronos des McLaren.
Button et Alonso ont réalisé respectivement les 17ème et 18ème chronos avec leurs McLaren-Honda, mais ils partiront depuis la dernière ligne. En effet leurs ingénieurs ont changé tant d'éléments sur les unités de puissance qu'à eux deux ils cumulent... 105 places de pénalité ! Vous avez dit absurde ?
Le Grand Prix
Alonso, Button et Nasr partent chaussés de pneus Pirelli durs. Tous les autres ont des modèles tendres.
Tour de formation : Hülkenberg se plaint d'une avarie intermittente sur son groupe propulseur. Après une hésitation, son ingénieur lui ordonne de se positionner tout de même sur la grille.
Grille de départ : Hülkenberg ne peut pas démarrer et agite les bras. Les feux jaunes s'allument et le peloton est relancé pour une seconde ronde d'installation, tandis que Hülkenberg est poussé vers les stands. Il ne prendra pas le départ. Le Grand Prix est amputé d'un tour.
Second tour de formation : Sainz rencontre un manque de puissance et regagne les stands. Dix-huit pilotes seulement s'installent sur la grille.
Départ : Bon envol de Hamilton tandis que Rosberg et Bottas sont plus hésitants. Ils sont doublés par Pérez sur leur gauche, par Ricciardo sur leur droite. Hamilton sort de La Source devant Pérez, Ricciardo, Bottas, Vettel et Rosberg qui a patiné. Très bons départs des McLaren qui se retrouvent devant Verstappen, Räikkönen, Nasr et les Manor.
1er tour : Hamilton mord sur le vibreur dans le Raidillon, ce qui permet à Pérez de se porter à sa hauteur dans la pleine charge de Kemmel. Il espère le doubler mais s'incline finalement aux Combes. Rosberg dépasse Vettel puis Bottas à la chicane de l'Arrêt de Bus, non sans prendre une large trajectoire. Hamilton mène devant Pérez, Ricciardo, Rosberg, Bottas, Vettel, Maldonado, Grosjean, Massa et Ericsson.
2e : Vettel dépasse Bottas à La Source. Maldonado ralentit à la sortie de l'Eau Rouge. Un passage un peu trop brutal sur un trottoir aurait déconnecté la centrale d'alimentation électrique de la Lotus. Le Vénézuélien abandonne tandis que Sainz s'élance des stands avec deux tours de retard.
3e : Hamilton devance Pérez (1.6s.), Ricciardo (2.7s.), Rosberg (4.5s.), Vettel (5.5s.), Bottas (6.3s.), Grosjean (6.9s.) et Massa (7.8s.). Kvyat prend la neuvième place à Ericsson.
4e : Kvyat rattrape Massa tandis que Verstappen, en pleine remontée, devance Ericsson.
5e : Hamilton a près de quatre secondes d'avance sur Pérez. Rosberg ne parvient pas à menacer Ricciardo. Räikkönen efface Ericsson.
6e : Ricciardo se rapproche de Pérez. Kvyat double Massa au freinage des Combes.
7e : Hamilton précède Pérez (5.5s.), Ricciardo (6.1s.), Rosberg (7s.), Vettel (9.2s.), Bottas (13.7s.), Grosjean (14.3s.), Kvyat (14.8s.), Verstappen (17s.), Räikkönen (17.6s.), Ericsson (18.9s.) et Alonso (22.5s.). Ricciardo entre aux stands en fin de boucle.
8e : Ricciardo chausse des pneus médiums (2.4s.) et reprend la course derrière Ericsson. Grosjean s'impose à Bottas en lui faisant l'extérieur aux Combes. Pérez arrive aux stands. Gros blocage de roues pour Kvyat à l'Arrêt de Bus.
9e : Pérez met des pneus tendres mais repart derrière Ricciardo qui réalise donc la bonne affaire. Arrêt de Bottas qui repart avec... trois pneus tendres et un pneu médium à l'arrière-droit ! Grossière erreur de l'équipe Williams...
10e : Hamilton a huit secondes de marge sur Rosberg. Grosjean, Kvyat, Massa, Verstappen et Ericsson effectuent leur changement de pneus. Grosjean ressort derrière Bottas mais le double à Kemmel. Verstappen déborde Ericsson par l'extérieur à Blanchimont.
11e : Changement de pneus pour Räikkönen qui repart entre Massa et Verstappen.
12e : Pérez attaque Ricciardo à Kemmel et le dépasse facilement car ses gommes sont plus tendres que celles de l'Australien. Rosberg entre aux stands et chausse des Pirelli médiums (2.9s.).
13e: Rosberg est reparti derrière Vettel et juste devant Pérez. Le Mexicain l'attaque en sortant du Raidillon. Il veut lui faire l'extérieur mais Rosberg reste devant aux Combes. Pérez ne se « paiera » pas une Mercedes aujourd'hui...
14e : Arrêt aux stands de Hamilton (2.4s.) qui repart avec des pneus médiums. Vettel s'empare provisoirement de la tête de l'épreuve puis s'arrête en fin de tour. Bottas est affligé d'un « drive-through » car il roule avec un panachage de pneumatiques.
15e : Vettel met les pneus médiums (2.5s.) et reprend la piste en sixième position. Ricciardo perd un instant l'arrière de sa voiture à l'Eau Rouge mais parvient à se rétablir.
16e : Hamilton est premier devant Rosberg (3.1s.), Pérez (11.6s.), Ricciardo (14.2s.), Grosjean (16s.), Vettel (18.7s.), Kvyat (23.6s.) et Massa (24.2s.). Bottas effectue sa pénalité et tombe en onzième position.
18e : Grosjean dépasse Ricciardo au bout de la ligne droite de Kemmel. Kvyat retient Massa et Räikkönen.
20e : Grosjean est très rapide et double Pérez avant les Combes. Ricciardo arrête sa Red Bull à la sortie de la chicane de l'Arrêt de Bus. Son moteur s'est brusquement coupé. La voiture est très mal placée, sur le côté droit de la piste. La direction de course lance la procédure de voiture de sécurité virtuelle.
21e : Les pilotes ralentissent tandis qu'on évacue la Red Bull de Ricciardo. Pérez s'arrête chez Force India pour changer de pneus et se retrouve en neuvième position derrière Verstappen.
22e : Fin de la procédure de neutralisation. Grosjean s'arrête aux stands pour chausser des pneus médiums. Il est imité par Massa, Räikkönen, Verstappen et Bottas. A la sortie des stands, Räikkönen attaque Massa aux Combes, sans résultat.
23e : Le ciel se couvre et on craint une averse pour la fin de l'épreuve. Bottas prend la dixième place à Ericsson.
24e : Hamilton précède Rosberg (2.5s.), Vettel (23.2s.), Grosjean (28s.), Kvyat (33s.), Pérez (38s.), Massa (41.4s.), Räikkönen (43.1s.), Verstappen (44.5s.) et Bottas (54.1s.).
26e : Hamilton augmente son avance sur Rosberg à quatre secondes et huit dixièmes. Grosjean reprend quelques dixièmes par tour à Vettel qui a décidé d'aller jusqu'au bout avec son train de pneus.
27e : Pérez rattrape Kvyat qui préfère rentrer aux stands. Le jeune Russe met des pneus tendres qui devraient lui permettre d'être compétitif en fin de course. Il se retrouve dixième.
29e : Hamilton est premier devant Rosberg (5.5s.), Vettel (29s.), Grosjean (32.6s.), Pérez (41.6s.), Massa (43.4s.), Räikkönen (46.2s.) et Verstappen (49.1s.). Kvyat dépasse Bottas.
30e : Hamilton entre aux stands en fin de tour et met des pneus tendres (2.9s.). Il repart deuxième.
31e : Après une boucle passée en tête, Rosberg stoppe à son tour chez Mercedes, également pour mettre des Pirelli tendres. Il reprend la piste en seconde position, à quatre secondes de son équipier. Vettel reprend de l'avance sur Grosjean.
33e : Massa menace Pérez, avec Räikkönen en embuscade. Verstappen fait un arrêt-éclair chez Toro Rosso pour mettre des gommes tendres, et repart entre Bottas et Ericsson.
34e : Meilleur tour en course pour Rosberg : 1'52''416'''.
35e : Grosjean a haussé le rythme et revient à moins de trois secondes de Vettel. Sainz était dernier avec deux tours de retard. Son stand le rappelle afin de préserver le moteur.
36e : Hamilton est premier devant Rosberg (4.8s.), Vettel (22.4s.), Grosjean (24.6s.), Pérez (33.7s.), Massa (34.5s.), Räikkönen (36.3s.), Kvyat (38.2s.), Bottas (47.8s.) et Verstappen (53.1s.). Suivent Ericsson, Nasr, Alonso et Button.
37e : Kvyat est très rapide en cette fin de course et déborde Räikkönen à Kemmel.
38e : Grosjean est désormais à une seconde de Vettel. Kvyat est aux trousses de Massa et de Pérez.
39e : Quatre secondes séparent les deux Mercedes. Verstappen double Bottas aux Combes, non sans mordre sur l'échappatoire.
40e : Grosjean est maintenant dans les échappements de Vettel dont les pneus sont usés. Kvyat dépasse Massa par l'extérieur aux Combes, avec autorité. Pérez est sa prochaine cible. Verstappen remonte sur ce groupe.
41e : Kvyat prend la cinquième place à Pérez. Verstappen arrive dans le sillage de Räikkönen.
42e : Vettel sort de l'Eau Rouge et aborde la pleine charge de Kemmel lorsque son pneu arrière droit explose. Par bonheur, l'Allemand parvient à maîtriser sa Ferrari, mais il se fait doubler par Grosjean puis par tout le peloton. Il regagne les stands où on jugera inutile de le renvoyer en piste. Pérez, Massa, Räikkönen et Verstappen sont roues dans roues.
43ème et dernier tour : Verstappen dépasse Räikkönen dans Kemmel, cependant il freine trop tard aux Combes, glisse dans l'échappatoire, évite le tête-à-queue, revient en piste... mais entretemps le Finlandais est repassé devant lui.
Lewis Hamilton remporte pour la seconde fois le Grand Prix de Belgique. Rosberg termine deuxième : c'est le septième doublé de la saison pour Mercedes. Grosjean finit troisième et monte sur son premier podium depuis un an et demi. Kvyat hérite de la quatrième place et devance un quatuor composé de Pérez, Massa, Räikkönen et Verstappen. Bottas n'est que neuvième tandis qu'Ericsson prend le dernier point. Nasr, Alonso, Button, Merhi et Stevens rallient aussi l'arrivée.
Après la course
Sitôt sorti de sa voiture, Sebastian Vettel critique vertement Pirelli au sujet de la solidité de ses pneus. Il est vrai que deux pneus arrière ont explosé à pleine vitesse durant le week-end belge. Rosberg appuie les propos de son compatriote. Pirelli se défend en déclarant que ce sont Vettel et Ferrari qui ont joué avec le feu en roulant pendant vingt-huit tours avec un même train de pneus médiums qui ne pouvaient pas, paraît-il, supporter un tel effort. En admettant cette explication, la défaillance survenue à Rosberg le vendredi après-midi n'en demeure pas moins mystérieuse...
L'humeur est meilleure chez Lotus. La troisième place de Romain Grosjean tombe à point nommé pour cette équipe en pleine tourmente. Le pilote franco-suisse déclare tout sourire: « Pour nous, ce podium a le goût d'une victoire. »
Grâce à ce tranquille succès, Hamilton accroît son avance au championnat sur Rosberg. Vingt-huit points les séparent désormais. Rosberg paraît accepter avec philosophie cette nouvelle défaite. Les tensions survenues entre les deux équipiers l'année précédente semblent décidément oubliées. Toto Wolff et Niki Lauda veulent éviter tout affrontement pour ne pas nuire à l'image de Mercedes. Mais le spectacle en pâtit terriblement. Suite à cet abandon, son premier de l'année, Vettel n'a pratiquement plus aucune chance de se mêler à la lutte pour le titre mondial. Au classement des constructeurs, Lotus prend la cinquième place à Force India.
Guy Ligier: mort d'un géant
Ce même 23 août, le sport automobile français perd l'un de ses plus glorieux capitaines. Guy Ligier s'est éteint à l'âge de 85 ans. Incroyable destin que celui de ce garçon boucher vichyssois devenu un des plus prestigieux constructeurs français. Petit mais râblé, il commence sa carrière sportive par l'aviron puis devient un rugbyman de bon niveau. A l'athlète s'ajoute un homme d'affaires avisé qui se construit une petite fortune dans le BTP. Il arrive à la course auto sur le tard, à la fin des années 50. Pilote éclectique, il remporte quelques succès en Formule 2, en Endurance, et devient champion de France des rallyes en 1966 pour le compte de l'équipe Ford-France. Il dispute aussi épisodiquement quelques Grands Prix de Formule 1, sans briller. Son meilleur ami sera Jo Schlesser avec lequel il triomphe aux 12 heures de Reims en 1967. Sa mort brutale en 1968 incite Guy à abandonner provisoirement la compétition.
En 1969, il fonde sa propre écurie, Ligier Automobiles, dont toutes les voitures porteront les initiales « J.S. » en hommage à Schlesser. Il obtient quelques succès en Endurance, notamment avec le fameux coupé JS2. Puis, en 1976, avec le concours de la Seita et de Matra, Ligier se lance en Formule 1. C'est le début de l'aventure des « Bleus » qui durera vingt-cinq ans. Les plus belles années sont les premières, à savoir la période 1976-1981. Avec son pilote fétiche Jacques Laffite, l'ancien rugbyman tutoie les sommets de la discipline reine et frôle le titre mondial. L'échec de l'alliance avec PSA et Talbot en 1982 marque le début d'un inexorable déclin. Pendant dix ans, l'équipe de Vichy, qui déménagera ensuite à Magny-Cours, ne cesse de vivoter, malgré le soutien du gouvernement français où Guy compte de nombreux amis. En 1992, il vend son équipe qui deviendra Prost Grand Prix en 1997, avant de disparaître en 2001. En parallèle de la compétition, Ligier se spécialise dans la conception de voiturettes. La marque réapparaît dans les années 2000 en Endurance, puis en 2014 en partenariat avec l'écurie OAK Racing de Jacques Nicolet. Mais Guy Ligier, affaibli par l'âge et goûtant une retraite bien méritée, ne servait plus que de prête-nom à cette aventure.
Généreux, truculent voire déconcertant, l'homme avait aussi un caractère difficile, entier, volcanique. Les garages résonnent encore de ses colères mémorables. Mais Guy Ligier était un authentique sportif, un compétiteur au sens noble du terme. Un « self-made-man » à la française. Sans jamais remporter de titre mondial, son écurie a fait aimer la Formule 1 à toute une génération de passionnés. Il a porté très haut les couleurs tricolores sur la scène sportive internationale.
En quelques mois, la France a perdu François Guiter, Jean-Pierre Beltoise, Gérard Ducarouge et enfin donc Guy Ligier. Quatre hommes qui, à des titres divers, ont permis, impulsé, inspiré le renouveau du sport automobile français dans les années 60 et 70, puis l'ont porté au pinacle. Un sport automobile aujourd'hui toujours populaire, mais ignoré, décrié, méprisé par les autorités publiques, boudé par les acteurs économiques, et hélas meurtri par la mort accidentelle de son plus bel espoir, Jules Bianchi. Triste époque de médiocrité et de désillusion, loin, très loin, de cet âge d'or de la France automobile dont Guy Ligier fut un des géants.
Tony