FISA: J-M. Balestre réélu pour quatre ans
En décembre 1986, Jean-Marie Balestre a démissionné de la présidence de la FISA, furieux de la façon dont se déroulaient les travaux du Comité exécutif en son absence. Il dut en effet subir en urgence une opération à cœur ouvert qui l'éloigna quelques semaines de toute activité. Depuis, Balestre n'assumait la présidence que par intérim. Au cours de l'été 1987, il laisse planer le doute sur sa candidature. Il exige d'avoir les mains libres pour réformer à loisir les compétitions internationales de rallye et d'endurance. Les nababs de la fédération, faute d'alternative, se plient sans sourcilier à ses désidératas. Fin septembre, en marge du GP d'Espagne, Balestre est réélu pour quatre ans à la tête de la FISA lors d'une assemblée plénière.
Dans le même temps, Bernie Ecclestone continue d'avancer ses pions sur le grand échiquier du pouvoir sportif. Après avoir placé Max Mosley à la direction de la commission des écuries de la FISA, il fait nommer Charlie Whiting, le chef mécanicien de Brabham, délégué technique auprès de la fédération internationale, aux côtés de Gabriele Cadringher.
Elf - McLaren: accord avorté
A la fin de l'été, Elf a approché Ron Dennis pour évoquer une possible alliance avec McLaren-Honda pour 1988. Séduit par cette offre, le Britannique privilégie cependant encore son partenariat avec Shell, à laquelle il réclame une participation financière accrue. A Jerez de la Frontera, François Guiter le rencontre à nouveau en compagnie de son adjoint Dominique Savary et de Paul-Bernard Sauvaigo, directeur-général adjoint d'Elf France. Dennis leur confirme un accord de principe... sous réserve d'une nouvelle offre de Shell, qu'il attend pour la semaine suivante. Or Michel Pecqueur, le PDG d'Elf-Aquitaine, a fixé au lundi 28 septembre, lendemain du GP d'Espagne, la date butoir pour définir la future politique sportive du groupe.
Dans le même temps, Peter Warr fait le forcing pour prolonger son contrat avec le pétrolier français, quitte à brandir la menace d'un accord avec Mobil. Il expose à Guiter que cela fait quatre ans que Lotus et Elf travaillent avec franchise et réussite, avec le turbo Renault puis le turbo Honda. Il lui transmet aussi un message de Camel qui affirme être prête à démultiplier son investissement en F1, au point de se hisser à la hauteur de Marlboro. « Vous ne perdrez donc rien à rester avec nous... » glisse-t-il avec malice. Gérard Ducarouge vient à la rescousse. Ne supportant pas le départ d'Ayrton Senna, il refuse par principe toute rupture avec Elf, ses alliés de toujours. Guiter souhaite néanmoins attendre la réponse de Dennis et demande un délai au président Pecqueur. Cette grâce lui est refusée. Elf est en effet en pleine bagarre avec Esso, à laquelle elle a ravie le sponsoring des Grands Prix télédiffusés sur TF1. Le groupe texan prépare une riposte d'envergure en cas d'alliance McLaren-Honda-Elf...
Cette ténébreuse affaire trouve son épilogue le lundi 28 septembre, au petit matin. De retour d'Espagne, Peter Warr débarque épuisé à Roissy après avoir transité par Luton. Il gagne la tour Elf à La Défense pour parapher en présence de Paul-Bernard Sauvaigo le contrat Lotus-Elf pour 1988. Dix minutes plus tard, François Guiter annonce à Ron Dennis la fin de leurs pourparlers. Déçu, le maître de Woking n'est cependant pas pris au dépourvu. Shell vient de lui faire une offre alléchante pour la saison 88...
Présentation de l'épreuve
A quatre épreuves du terme de la saison, Nelson Piquet (67 pts) possède une très large avance sur Ayrton Senna (49 pts), Nigel Mansell (43 pts) et Alain Prost (40 pts). Ces écarts sont toutefois légèrement trompeurs, car à cause du barème en vigueur, le Brésilien devra sans doute retrancher quelques résultats, seuls les onze meilleurs étant comptabilisés au final. Or, du fait de son nombre impressionnant de secondes places (six !), il pourrait perdre gros dans cet écrémage. Cependant, Piquet peut être sacré champion du monde dès ce rendez-vous espagnol. Il doit pour cela remporter la course sans que Senna ou Mansell ne finisse second.
Williams-Honda est toute proche de remporter le titre mondial des constructeurs. Elle doit pour cela ne pas concéder plus de trois points à McLaren lors de cette épreuve.
C'est la deuxième fois que le Grand Prix d'Espagne se déroule sur le triste circuit de Jerez, encore moins fréquenté que la saison précédente. Cette épreuve n'enchante guère les pilotes, mais au moins la moitié d'entre aux profitent quelques jours plus tôt d'un séjour à Marbella offert par la FOCA.
Frank Williams et Patrick Head révèlent le nom du futur remplaçant de Nelson Piquet. Il s'agit de Riccardo Patrese qui retrouvera ainsi un volant dans une écurie de pointe après quelques années de « purgatoire » chez Alfa Romeo et Brabham. Avec le Padouan, Williams choisit un pilote de grande expérience à l'orée d'une saison 1988 qui s'annonce difficile suite au départ de Honda. A 33 ans et après avoir disputé 156 Grands Prix, Patrese est le coureur le plus chevronné du peloton... mais pas le plus sage. Aussi, selon les mauvaises langues, la paire Mansell - Patrese pourrait bien faire quelques étincelles...
Le volant de la seconde Benetton est aussi très convoité du fait du départ de Teo Fabi aux États-Unis. Quatre pilotes sont sur les rangs: Martin Brundle qui en a assez de ses déboires avec Zakspeed, les jeunes espoirs italiens Alessandro Nannini et Alex Caffi, et enfin l'Anglais Johnny Herbert, nouveau champion britannique de Formule 3.
Pour ce tracé sinueux, les voitures reçoivent une configuration d'appui aérodynamique maximale. Honda apporte à Williams et à Lotus des moteurs de « quatrième génération » codés « GE2-1 », sans préciser en quoi constituent les améliorations apportées... Ferrari poursuit le développement de sa F1.87 et présente des turbos profondément remaniés intérieurement. En outre, la monoplace arbore pour la première fois en course des prises « schnorkel ». René Arnoux reçoit une nouvelle Ligier munie d'un empattement raccourci. La Lola LC utilise désormais un système d'injection 100 % électronique Marelli, en lieu et place du dispositif Lucas greffé sur les autres V8 Ford-Cosworth. Après sa courte apparition à Monza, l'écurie Coloni est de retour, toujours avec Nicola Larini comme pilote. La voiture italienne a entretemps été rénovée au niveau du soubassement, des radiateurs et de l'échappement.
Les qualifications: Mansell perd les pédales
Patrick Head propose à nouveau à ses pilotes le choix entre une voiture à suspension active et une autre à suspension conventionnelle. Piquet opte pour la première, Mansell pour la seconde. Vendredi, l'Anglais paraît avoir fait le bon choix puisqu'il s'adjuge la pole provisoire. Mais le lendemain, il ne parvient pas à améliorer son chrono, et c'est Piquet qui s'empare de la position de pointe avec six dixièmes d'avance.
Mansell encaisse très mal cette déconvenue. De retour aux stands, il refuse d'obtempérer lorsque les officiels lui intiment l'ordre de monter sur la bascule. Réalisant son erreur, il se gare un peu plus loin. Mais tandis qu'Alan Challis discute avec les commissaires pour savoir s'il faudra pousser la Williams pour la peser, Mansell se précipite vers les stands pour grimper dans la FW11B à suspension active ! Il n'effectue que deux tours avant d'être arrêté. Roland Bruynseraede souhaite lui faire des remontrances mais Nigel ne lui en laisse pas le temps: il enlève sa combinaison, court vers le parking, se jette dans sa voiture et fuit le circuit à toute allure ! Ce comportement puéril suscite au choix l'hilarité ou la consternation. La FISA inflige à l'Anglais 3000 dollars d'amende et annule tous ses chronos de la journée, ce qui ne change rien à sa position sur la grille.
Les Ferrari occupent la seconde ligne. Berger précède Alboreto qui a détruit sa voiture dans une sortie de route. Senna (5ème) se débat avec une Lotus dont l'adhérence et la motricité ne sont pas satisfaisantes. Nakajima est relégué au 18ème rang, à six secondes du chrono de Piquet... Chez Benetton, Fabi obtient une belle sixième place. Boutsen (8ème) est handicapé par une tenue de route hasardeuse. Prost (7ème) est à nouveau plongé dans le désarroi. Non seulement l'adhérence de son châssis laisse à désirer, mais en plus le V6 TAG-Porsche a de nouveau des ratés ! Son collègue Johansson n'est qu'onzième. Les Brabham-BMW (Patrese 9ème, de Cesaris 10ème) se partagent la cinquième rangée. Le Romain s'est encore signalé en démolissant sa voiture samedi après-midi... Les Arrows-Megatron (Warwick 12ème, Cheever 13ème) sont instables et peu performantes sur cette piste. Chez Ligier, Arnoux décroche une satisfaisante quatorzième place, loin devant Ghinzani (23ème) qui déplore un manque d'adhérence.
Les Tyrrell (Streiff 15ème, Palmer 16ème) occupent la huitième ligne et devancent la Lola d'Alliot. Capelli place la March-Ford au 19ème rang. Brundle (20ème) et Danner (22ème) s'échinent à tirer le meilleur de Zakspeed lentes et paresseuses. Ils côtoient les Minardi-Motori Moderni (Nannini 21ème, Campos 24ème). On trouve en dernière ligne l'AGS de Fabre et la Coloni de Larini qui décroche sa première qualification. Les Osella de Caffi (immobilisé la plupart du temps par des pannes) et de Forini (accidenté le samedi après-midi) sont éliminées.
Le Grand Prix
Il se déroule sous un ciel chargé. Une petite averse tombe sur le circuit une heure avant le départ, sans avoir le temps d'humidifier le bitume. La victoire paraît promise à une Williams-Honda, mais laquelle ? A priori, Piquet aura un net avantage grâce à sa suspension hydraulique qui lui permettra de conserver une faible hauteur de caisse, et donc de l'effet de sol, durant toute l'épreuve malgré le délestage en carburant. Mansell ne devra donc pas laisser son collègue s'échapper...
Départ: Piquet et Mansell s'élancent sans difficulté. Senna prend un bon départ et déborde les Ferrari par la droite. Warwick percute l'arrière de la Ligier d'Arnoux et arrache sa calandre.
1er tour: Mansell se porte à la hauteur de Piquet avant le dernier virage, la Curva Ducados, puis se jette à l'intérieur et s'empare du commandement. L'Anglais mène donc ce premier tour devant Piquet, Senna, Berger, Alboreto, Boutsen, Fabi, de Cesaris, Prost et Cheever. Warwick stoppe chez Arrows pour faire réparer son train avant et perd un tour.
2e: Dans la ligne droite de départ, Piquet tente en vain de prendre l'aspiration derrière Mansell qui change deux fois de trajectoire. Senna est dans le sillage des Williams.
3e: Les Williams roulent une seconde au tour plus vite que leurs adversaires. Mansell prend du champ sur Piquet. Senna emmène un peloton composé de Berger, Alboreto, Boutsen et Fabi.
5e: Mansell précède Piquet (1.9s.), Senna (6.8s.), Berger (7.7s.), Alboreto (8.2s.), Boutsen (8.6s.), Fabi (9.3s.), de Cesaris (11.8s.) et Prost (12.3s.).
6e: Senna contient difficilement les Ferrari et les Benetton. Campos part en tête-à-queue en essayant de dépasser Fabre. Il repart en dernière position.
7e: Prost prend la huitième place à de Cesaris.
8e: Mansell compte deux secondes et demie de marge sur Piquet. Berger se fait de plus en plus pressant derrière Senna. Malheureusement, la puissance du V6 Honda l'empêche de porter une attaque contre le Pauliste.
9e: Larini abandonne à cause d'un bris de suspension arrière.
10e: Mansell précède Piquet (2.9s.), Senna (13s.), Berger (14s.), Alboreto (14.8s.), Boutsen (15.6s.), Fabi (16s.), Prost (17s.), de Cesaris (25s.), Cheever (29s.), Johansson (30s.), Patrese (30.5s.), Palmer (31s.) et Alliot (33s.).
11e: Prost recolle au « groupe Senna ». Fabre regagne son garage avec une commande d'embrayage brisée.
12e: Johansson prend la dixième place à Cheever. Danner s'arrête chez Zakspeed pour remplacer son boîtier électronique.
13e: Trois secondes entre les Williams. Alboreto s'impatiente derrière Berger. Il fait l'intérieur à son équipier au premier virage, puis se lance aux trousses de Senna. Au même instant, Fabi esquisse la même manœuvre contre Boutsen... qui lui ferme la porte.
14e: Mansell est très rapide et roule en 1'29''750'''. Alboreto s'agite dans les rétroviseurs de Senna qui ne dévie pas d'un pouce de sa trajectoire. « Magic » a encore décidé de rallier l'arrivée sans changer de pneus et n'entend pas céder au Milanais. Comme les deux hommes se détestent, on s'attend à du grabuge...
15e: Mansell est premier devant Piquet (3.7s.), Senna (20.5s.), Alboreto (21.1s.), Berger (21.9s.), Boutsen (22.6s.), Fabi (25s.), Prost (26s.), de Cesaris (34s.), Johansson (36s.) et Cheever (47s.).
16e: Piquet tente de rester au contact de Mansell et réalise un superbe chrono: 1'28''855'''.
17e: Alboreto ne fait pas mieux que Berger derrière Senna. Fabi a légèrement décroché et se retrouve menacé par Prost. Patrese fait une excursion dans les graviers et regagne péniblement la piste. Nannini change ses pneus.
18e: Le groupe Senna prend un tour à Campos dans la dernière portion du circuit. Boutsen essaie de profiter de la manœuvre pour faire l'extérieur à Berger dans la ligne droite principale, sans réussite. Johansson double de Cesaris. Patrese est aux stands pour changer de pneus et faire examiner sa suspension. Il chute au vingt-troisième rang.
20e: Mansell domine devant Piquet (4.6s.), Senna (25.9s.), Alboreto (26.6s.), Berger (27.1s.), Boutsen (27.9s.), Fabi (28.8s.), Prost (29.6s.) et Johansson (38s.).
21e: Cheever s'arrête aux stands afin de changer de pneumatiques.
23e: Mansell possède cinq secondes et demie de marge sur Piquet. Senna continue de traîner derrière lui son petit train multicolore. Onzième, Palmer mène la catégorie 3,5l devant Alliot.
25e: Mansell est devant Piquet (6.2s.), Senna (32.2s.), Alboreto (32.9s.), Berger (33.4s.), Boutsen (33.9s.), Fabi (34.7s.) et Prost (35.3s.).
27e: Constatant qu'il bute sur les Benetton, Prost s'arrête aux stands pour changer de pneus (11.3s). Il escompte rattraper ses adversaires avant qu'eux-mêmes ne passent par les stands. Il ressort derrière Johansson. De Cesaris renonce avec une boîte de vitesses bloquée. Ghinzani abandonne aussi après que des débris ont endommagé un capteur d'allumage sur sa Ligier.
28e: Mansell et Piquet arrivent sur un train de retardataires comprenant Palmer, Alliot, Nakajima, Streiff et Capelli.
29e: Fabi observe son changement de pneus. L'arrêt dure dix-huit secondes et l'Italien repart neuvième... derrière les McLaren. Voilà déjà un adversaire de moins pour Prost !
30e: Mansell prend un tour à Capelli qui, surprit, roule sur le bas-côté et exécute un tête-à-queue. Le jeune Italien regagne ensuite son stand pour remplacer ses gommes encrassées.
31e: Mansell est premier devant Piquet (5.8s.), Senna (33.4s.), Alboreto (34.1s.), Berger (34.4s.), Boutsen (34.9s.), Johansson (39s.), Prost (48s.), Fabi (1m. 03s.), Palmer (1m. 30s.) et Alliot (1m. 31s.).
32e: Arrêt de Boutsen. Le Belge repart huitième... derrière Prost. Le Français a fait une excellente opération en s'arrêtant le premier car il est désormais en mesure de doubler tous les pilotes du groupe Senna lorsque ceux-ci s'arrêteront... ou même avant.
33e: Senna a pris du champ sur Alboreto. Deux secondes les séparent désormais.
35e: Neuf secondes entre Mansell et Piquet. Ce dernier préserve ses pneus car il envisage de ne pas les changer. Les Ferrari sont revenues derrière Senna. Johansson change ses enveloppes (8.1s.) et ressort en neuvième position.
36e: Prost est l'homme le plus rapide en piste et remonte assez rapidement sur Berger. Alboreto fait le forcing derrière Senna mais sans succès. Les Ferrari sont les dernières à s'accrocher au « wagon jaune ».
38e: Piquet perd un temps fou à se débarrasser des retardataires. Il klaxonne depuis deux tours derrière le duo Palmer - Alliot, sans pouvoir s'en défaire ! Prost n'est plus qu'à sept secondes de Berger. Arrêt pneus pour Warwick.
39e: Mansell a désormais dix-huit secondes de marge sur Piquet. Johansson dépasse Fabi dont le moteur cahote.
40e: Cinquante secondes séparent Mansell et Senna. Le Pauliste et les pilotes Ferrari zigzaguent au milieu des attardés. Brundle change de gommes.
41e: Piquet a enfin doublé Alliot et Palmer, mais rend vingt-quatre secondes à son équipier ! Prost a les Ferrari en point de mire. Alboreto tente de déborder Senna dans le premier virage, mais le Brésilien ferme la porte.
42e: Le moteur de Fabi coupe par intermittence. L'Italien choisit de quitter la course. Patrese revient à son stand pour remettre des pneus frais. Sa suspension est légèrement faussée et use donc rapidement la gomme.
43e: Mansell effectue son changement de pneus. Il repart après onze secondes d'arrêt, toujours premier mais juste devant la moustache de Piquet. Le Brésilien harcèle l'Anglais qui demeure inébranlable. Prost est dans la roue de Berger.
44e: Berger est las de patienter derrière Alboreto. Il lui fait l'intérieur au virage précédant les stands. Mais les deux équipiers se gênent mutuellement et glissent à l'extérieur. Voyant cela, Prost reste à la corde, puis à la réaccélération déborde les deux Ferrari d'un même mouvement ! Le voici quatrième.
45e: Mansell est premier devant Piquet (1.1s.), Senna (27s.), Prost (28.4s.), Berger (28.7s.), Alboreto (28.7s.) et Boutsen (31s.).
46e: Piquet revoit sa tactique et entre finalement aux stands pour mettre des gommes neuves. Hélas, il oublie de maintenir ses freins serrés, ce qui empêche ses mécaniciens de changer ses roues ! Le temps qu'il s'en aperçoive et que les nouveaux pneus soient fixés, il a perdu dix-neuf secondes. Il repart devant les Ferrari.
47e: Mansell compte désormais trente secondes d'avance sur un trio composé de Senna, Prost et Piquet. Berger entre aux stands pour changer de pneus, en court-circuitant allègrement l'échappatoire.
48e: Énervé par son mauvais arrêt, Piquet décide de faire l'extérieur à Prost dans la montée vers le premier virage. Le Forézien conserve sa ligne. Le Carioca monte à sa hauteur et tente de se rabattre, mais il freine trop tard. La Williams pirouette et se retrouve à contresens de la piste. Piquet se relance mais perd deux places récupérées par Alboreto et Boutsen. Berger est ressorti des stands en septième position.
49e: Senna retient maintenant un peloton composé de Prost, Alboreto et Boutsen. Berger signe le meilleur tour en course: 1'26''986'''. Capelli change une seconde fois de pneus car son précédent jeu engendrait de fortes vibrations. Nannini abandonne en panne de turbo.
50e: Mansell est premier devant Senna (33s.), Prost (33.5s.), Alboreto (34s.), Boutsen (34.7s.), Piquet (36s.), Berger (42s.), Johansson (51s.), Palmer (-1t.) et Alliot (-1t.). Changement de pneus pour Campos.
51e: Boutsen dépasse Alboreto dans la dernière épingle.
52e: Boutsen est revenu dans les échappements de Senna et de Prost. Alboreto observe son changement de gommes (8.1s.) et repart au huitième rang derrière Johansson. Les pilotes Ferrari ont eu bien tort de retarder leurs arrêts...
53e: Mansell a trente-cinq secondes d'avance sur Senna. Celui-ci est bien décidé à rejoindre l'arrivée avec ses « semelles » usées. Mais la Lotus glisse beaucoup en courbe, et il faut toute l'habileté de son pilote pour la maintenir sur la route.
54e: Senna, Prost, Boutsen et Piquet sont roues dans roues. Berger est à environ trois secondes de ce groupe. Gêné par Nakajima, Streiff part en tête-à-queue juste devant ce peloton, mais heureusement se retrouve dans le gazon. Il parvient à repartir.
55e: Senna et cie arrivent sur Nakajima, qui s'écarte sportivement devant les poursuivants de son équipier. Cependant, Prost comprend qu'il va abîmer ses propres pneus en demeurant collé à la Lotus du Brésilien. Aussi, il ne résiste guère lorsque Boutsen et Piquet l'attaquent et le dépassent.
56e: C'est dorénavant Boutsen qui mène la chasse derrière Senna, le « bouchon perpétuel ». Danner abandonne après avoir perdu l'usage de son quatrième rapport.
57e: Trente-six secondes entre Mansell et Senna. Au premier virage, Piquet se montre dans les rétroviseurs de Boutsen, puis Berger déborde Prost. Palmer tente de prendre un tour à Arnoux lorsque ce dernier lui coupe la route. La Tyrrell heurte la Ligier, se soulève et atterrit dans le gazon avec une suspension brisée. Le « Doc » abandonne et laisse ainsi le commandement en « D2 » à Alliot.
58e: Boutsen attaque furieusement Senna, en vain. Johansson rejoint le train. Nakajima part en toupie dans une épingle. Comme son équipier, il ne s'est pas arrêté et ses gommes sont très usées. Il reprend sa route derrière Streiff. Après avoir expédié Palmer dans le décor, Arnoux commet un surrégime et casse son moteur. Le Grenoblois n'est pas très en forme aujourd'hui...
59e: Mansell compte trente-trois secondes d'avance sur Senna qui emmène une cohorte très agitée comprenant Boutsen, Piquet, Berger, Prost, Johansson et bientôt Alboreto.
60e: Piquet déborde Boutsen par l'intérieur du premier virage. Plus loin, Alboreto prend la septième place à Johansson.
61e: Piquet harcèle à son tour Senna, sans résultat. Prost double sans mal Berger qui paraît en difficulté.
62e: De la fumée s'échappe de la Ferrari de Berger qui poursuit sans s'en soucier. Dans la partie sinueuse du circuit, Piquet tente désespérément de doubler Senna, mais celui-ci lui barre la route à chaque fois en donnant des coups de frein.
63e: Piquet prend l'aspiration derrière Senna à l'abord du premier virage. Il déborde la Lotus par l'intérieur. Senna tente de résister mais cette fois cède pour éviter l'accrochage. Pour « Magic », c'est l'hallali ! Ses gommes sont usées jusqu'à la toile. Boutsen et Prost le dépassent sans peine. Berger abandonne après avoir endommagé son radiateur d'huile contre une bordure.
64e: Débarrassé de Senna, Piquet se sent pousser des ailes et reprend quatre secondes à Mansell en un tour ! Alboreto et Johansson chassent Senna, mais devant eux se trouve Cheever, à un tour, lui-même bloqué par la Lotus.
65e: Alboreto efface Cheever, puis double Senna. Mansell devance Piquet (26.3s.), Boutsen (35.3s.), Prost (36.2s.), Alboreto (40.5s.), Senna (41s.), Johansson (42s.), Alliot (-1t.) et Cheever (-1t.).
66e: Piquet ne cherche pas à assurer la seconde place mais au contraire attaque comme un dératé. Il concède encore vingt-quatre secondes à Mansell.
67e: Dans la grande courbe n°8, Piquet commet une erreur et tire tout droit dans l'herbe. Il repart au moment même où surgit Boutsen. Déconcentré et mal servi par des freins endommagés, le Belge part en tête-à-queue au virage suivant et s'enlise dans les graviers: c'est fini pour lui ! Johansson double Senna.
68e: Piquet ralentit sérieusement. Prost le rattrape et le dépasse à la Curva Peluqui. Le Brésilien bloque ses roues pour éviter une sortie de piste.
69e: Piquet s'arrête aux stands pour faire enlever les débris qui obstruent ses pontons. Il repart quatrième, derrière Johansson mais devant Senna. Le moteur d'Alboreto explose: l'Italien se traîne jusqu'aux stands pour renoncer.
70e: Mansell devance Prost (29s.), Johansson (38s.), Piquet (43s.), Senna (1m. 09s.), Alliot (-1t.), Cheever (-1t.), Streiff (-1t.), Nakajima (-2t.) et Warwick (-2t.).
71e: Johansson est menacé par Piquet mais résistera jusqu'au bout.
72ème et dernier tour: Cheever tombe en panne d'essence et perd ainsi la septième place au profit de Streiff.
Nigel Mansell remporte son douzième Grand Prix après une belle démonstration. Les McLaren de Prost et de Johansson l'entourent sur le podium. Piquet échoue au quatrième rang. Senna se classe cinquième après avoir fixé ses rétroviseurs tout l'après-midi. Alliot récolte le dernier point et gagne la course des moteurs atmosphériques. Streiff est septième. Cheever est classé est huitième. Nakajima, Warwick, Brundle, Capelli, Patrese et pour la première fois Campos sont aussi à l'arrivée.
Après la course
Ce Grand Prix d'Espagne n'a pas manqué de paradoxes. Alors que la veille il avait fait une nouvelle fois montre de sa fragilité psychologique, Nigel Mansell a dominé cette course sans faillir, alors que Nelson Piquet, d'ordinaire réputé pour son flegme, a complémentent perdu ses nerfs. Le Brésilien reconnaît volontiers ses erreurs mais garde le sourire. Mansell jubile... bien que sa jambe gauche soit paralysée par une crampe. « Des attaches de mon siège ont lâché sur les bosses, raconte-t-il. Je glissais dans tous les coins du cockpit ! » « Si j'ai une bonne voiture et un bon moteur, je suis devant... Si cela était arrivé à chaque fois, je n'en serais pas là au championnat aujourd'hui... » ajoute-t-il avec ironie.
Cette course spectaculaire a ravi le (faible) public grâce à la stratégie osée mais finalement guère payante d'Ayrton Senna. « Le problème était que mes poursuivants étaient trop rapides derrière moi, dans mon sillage, mais incapable de me doubler ! » rigole le Pauliste. Il est vrai que ce circuit de Jerez offre fort peu de zones permettant aux pilotes de se décaler...
Piquet n'est donc pas encore champion du monde. Il compte 70 points contre 52 à Mansell et 51 à Senna. Williams remporte officiellement le trophée des constructeurs, le quatrième de son histoire, mais ce triomphe a un goût amer du fait de la rupture avec Honda. Inquiet de l'avenir, Frank Williams se contente de sourire aux messages de félicitations.
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Trophée Jim Clark |
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Trophée Colin Chapman |
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1. |
J. Palmer |
71 pts |
1. |
Tyrrell-Ford-Cosworth |
135 pts |
2. |
P. Streiff |
64 pts |
2. |
March-Ford-Cosworth |
38 pts |
3. |
I. Capelli |
38 pts |
3. |
AGS-Ford-Cosworth |
35 pts |
4. |
P. Fabre |
35 pts |
4. |
Lola-Ford-Cosworth |
34 pts |
5. |
P. Alliot |
34 pts |
Tony