Alain PROST
 A.PROST
McLaren Honda
Gerhard BERGER
 G.BERGER
Ferrari
Stefan JOHANSSON
 S.JOHANSSON
Onyx Ford Cosworth

481e Grand Prix

XVIII Grande Premio de Portugal
Ensoleillé
Estoril
dimanche 24 septembre 1989
71 tours x 4.350 km - 308.850 km
Affiche
F1
Coupe

Le saviez-vous ?

Pilote
Constructeur
  • 97e victoire pour Ferrari
  • 1er et unique podium pour Onyx
Moteur

Prost - Honda: un pacte pour rien

Après son altercation avec Alain Prost à Monza, Ron Dennis comprend la nécessité de conclure avec son pilote une sorte de trêve jusqu'à la fin du championnat, afin que celui-ci ne soit pas biaisé par des soupçons de déloyauté de part et d'autre. Bien sûr, Dennis souhaite avant tout préserver son partenariat avec Honda. C'est ainsi qu'il demande à Prost de parapher un communiqué minimalement positif en faveur du motoriste nippon. Pour cela, il agite la carotte et le bâton. Le bâton: il relève une clause de son contrat lui interdisant tout dénigrement à l'encontre de son écurie et de ses fournisseurs. La carotte: en échange de sa signature, Prost aura accès à certaines données techniques confidentielles fournies par Honda, destinées à lui prouver que ses moteurs sont bien les mêmes que ceux d'Ayrton Senna. La diplomatie n'étant pas le point fort de Dennis, c'est Julian Jakobi, le responsable de l'IMG, qui sert d'intermédiaire entre les trois parties, McLaren, Honda et Prost. Ce dernier donne finalement son assentiment le 21 septembre à Estoril, dans le motorhome de Marlboro. Mais c'est pure tactique de sa part : Prost veut ainsi s'assurer d'achever le championnat le plus sereinement possible. Les données fournies par Honda quant aux performances de son moteur à Monza ne le satisfont pas du tout.

 

Le même jour, ce « pacte d'Estoril » est de fait dénoncé par Nobuhiko Kawamoto, l'ancien président de Honda Research and Development, avec lequel Prost a longtemps entretenu des contacts officieux. En visite à Vienne, l'ingénieur japonais s'en prend vivement au champion français: « Les accusations de M. Prost ne tiennent pas debout. Notre politique a toujours consisté à fournir un matériel identique aux pilotes de McLaren. Notre collaboration n'est empreinte d'aucun favoritisme. Pour nous, ce championnat 1989 est plus probant que celui de 1988, en raison de l'amélioration de l'opposition. J'ai personnellement essayé, à plusieurs reprises, de convaincre M. Prost de rester chez McLaren. S'il passe chez Ferrari avec le n°1 de champion du monde, cela ne me trouble pas. Honda envisagera sa communication publicitaire avec un autre pilote. » La situation est effectivement clarifiée...

 

Senna le missionnaire - Bataille pour le titre mondial

Loin de ces soubresauts, Ayrton Senna retrouve une forme de paix intérieure après une période difficile marquée par la mort de son ami Armando Botelho Teixeira. Le Brésilien semble touché par la Grâce. On savait que la Bible était son livre de chevet. Le voici désormais évangéliste. « Ma mission est de porter le message de Dieu aux autres ! » affirme-t-il. On apprécierait plutôt que Senna et Prost, catholiques avoués et sincères, mettent en pratique la première vertu du bon chrétien: le pardon.

 

A quatre épreuves du terme de la saison, Prost jouit d'une confortable avance de vingt longueurs sur Senna. Mais sa position n'est pas si confortable que cela car seuls les onze meilleurs résultats seront retenus pour composer les totaux finaux. Or il a déjà « scoré » onze fois et va commencer à retrancher des points à partir d'Estoril. Ses plus mauvais résultats étant une cinquième et une quatrième place, seule une troisième position peut donc lui permettre d'accroître encore son capital. Senna n'a au contraire aucune soustraction à opérer vu son grand nombre d'abandons. Une série de victoires pourrait lui permettre d'être titré.

 

Mini-putsch chez Onyx-Moneytron

Surprise jeudi soir à Estoril: Onyx annonce le limogeage de Bertrand Gachot avec effet immédiat. Le Franco-Belge a commis l'erreur de laisser diffuser un communiqué mordant rédigé par son manager Pierre Van Vliet. Dans ce libelle, celui-ci a placé des propos excessifs dans la bouche de son client. Il affirme ainsi qu'Onyx ne serait rien sans Gachot puisqu'il a apporté l'argent de Moneytron. D'après lui l'écurie tournerait exclusivement autour de Stefan Johansson. Alan Jenkins et Mike Earle n'apprécient pas cette sortie et obtiennent la tête de Gachot d'un Jean-Pierre Van Rossem ulcéré. La deuxième Onyx est maintenant aux mains du jeune Finlandais Jyrki Järvilehto, appelé plus simplement « JJ » Lehto, le poulain de Keke Rosberg.

 

Mais un peu plus tard, après un entretien avec Gachot et Van Vliet, Van Rossem affirme s'être fait berner par Earle et Jenkins, et promet à son ex-pilote de lui dénicher très bientôt un autre volant... Il rencontre à cette fin Ken Tyrrell qui envisage de se débarrasser de Jonathan Palmer.

 

Présentation de l'épreuve

Une triste nouvelle se répand dans le paddock: Richie Ginther a succombé à une crise cardiaque à l'âge de 59 ans. Le sympathique Américain avait apporté à Honda sa première victoire en Formule 1, à Mexico en 1965. L'ancien ingénieur en chef Yoshio Nakamura, présent à Estoril, lui rend un vibrant hommage.

 

Les négociations entre Gérard Larrousse et Carlo Patrucco sont tombées à l'eau. L'homme d'affaires italien voulait prendre 51% des parts de l'écurie française, ce dont son fondateur n'a pas voulu. Larrousse souhaite maintenant la venue d'un gros sponsor japonais, Espo Corporation, leader national du marché de la location de cassettes vidéos, mais aussi investisseur dans l'immobiliser, l'import-export... Bien sûr, un tel mariage nécessiterait l'engagement d'un pilote nippon, probablement Aguri Suzuki. Côté transalpin, Patrucco se tourne dorénavant vers Brabham qui n'a toujours pas trouvé d'acquéreur depuis la chute de Joachim Lüthi.

 

Christian Vanderpleyn avait rejoint Rial début août sans signer le moindre contrat. Bien lui en a pris puisque devant l'énormité de la tâche qui se présentait à lui (concevoir une bonne machine avec des moyens réduits, supporter Gunter Schmidt...), il a décidé de ne pas poursuivre plus loin l'aventure. Pierre-Henri Raphanel se retrouve du coup bien seul en colonie teutonne. Son équipier Christian Danner ne devrait pas non plus faire long feu chez Rial. Schmidt a exigé qu'il retire de sa combinaison les logos de tous ses sponsors ! « Son manager a empoché l'argent que les commanditaires de Danner devaient m'apporter ! » fulmine-t-il.

 

La lune de miel se poursuit entre Ford et Benetton qui annoncent le prolongement de leur partenariat, avec exclusivité, jusqu'en 1991, avec option sur 1992. Par ailleurs, l'équipe italo-britannique pourrait rouler l'an prochain avec des pneus Pirelli. Tel est en tout cas l'objectif de Dario Calzavara qui aimerait bien avoir un top-team comme client. Il discute en ce sens avec Flavio Briatore.

 

Retenu pour le rendez-vous du Mans en Formule 3000, Jean Alesi cède à nouveau son baquet chez Tyrrell à Johnny Herbert. Celui-ci est hélas victime d'une forte grippe et a pour simple objectif de se qualifier.

 

Entre Monza et Estoril, McLaren et Ayrton Senna ont participé à une séance d'essais sur le Hungaroring qui a permis d'introduire de nouveaux points d'attache de suspensions à l'avant. On notera qu'Alain Prost ne fut pas convié à faire le voyage...

La Williams FW13 fait enfin son apparition aux mains de Thierry Boutsen et de Riccardo Patrese. Dérivée de la FW12C, elle se distingue par une prise d'air plus volumineuse, une ligne générale plus basse, des combinés ressorts-amortisseurs placés à l'avant en position horizontale, au-dessus des genoux du pilote. Cette monoplace, assez laide d'aspect, est bien sûr aussi destinée à disputer le championnat 1990. Pourra-t-elle permettre au V10 Renault d'exprimer son véritable potentiel ? Pour l'instant celui-ci tourne dans sa version « Évolution 3 » lancée à Monza.

 

Essais et qualifications

Vendredi matin, Gérard Ducarouge et Michel Tétu font du scandale auprès des officiels de la FISA. Les autorités refusent en effet aux teams soumis aux pré-qualifications d'installer leurs motorhomes. Jean-Marie Balestre et Bernie Ecclestone poursuivent une politique visant à écœurer les petites écuries et les contraindre à quitter la F1. Du reste, avec un plateau réduit à 34 engagés, la séance pré-qualificative pourrait être étendue à une heure et demie et intégrée à la première séance d'essais libres, comme cela était le cas en 1988.

 

Les pré-qualifications offrent une étonnante hiérarchie en plaçant en tête Johansson, Alliot, Dalmas et Moreno, soit quatre modèles différents. Mais Dalmas est disqualifié pour être reparti des stands sans l'autorisation des commissaires, qui plus est avec un lot de pneus portant la marque du Grand Prix d'Italie et le numéro de Tarquini ! Henri Cochin proteste de sa bonne foi, sans émouvoir les officiels. Du coup Alboreto, cinquième chrono, est repêché. Larini est aussi exclu pour ne pas s'être astreint au contrôle de pesée. Sont aussi éliminées les toujours aussi lentes Zakspeed de Schneider et Suzuki, l'Osella de Ghinzani, la Coloni de Bertaggia (embrayage cassé), l'autre AGS de Tarquini, l'Eurobrun de Larrauri et l'Onyx de Lehto (rupture de suspension).

 

Ravi des nouveaux réglages apportés à sa machine, un Senna impérial ne laisse à personne le soin de lui disputer la pole position (1'15''468'''). Prost, quatrième, concède sept dixièmes à son coéquipier mais ne se plaint ni de son châssis, ni de son moteur. Les McLaren subissent néanmoins plusieurs problèmes de sélecteur de vitesses. Elles sont à portée de tir des Ferrari (Berger 2ème, Mansell 3ème) dont la très bonne tenue de route compense le déficit de puissance. Les pneus Pirelli de qualification se comportent excellemment, et ce sont les Minardi qui les exploitent le mieux. Martini se classe cinquième, Pérez-Sala neuvième. Jamais la petite Scuderia n'avait été à pareille fête ! Les nouvelles Williams (Patrese 6ème, Boutsen 8ème) sont à court de mise au point et survirent excessivement. Excellente prestation de Caffi (7ème) avec la Dallara. Comme en Hongrie, son coéquipier de Cesaris (19ème) ne parvient pas à tirer un bon parti de ses Pirelli extra-tendres.

 

Les Brabham (Brundle 10ème, Modena 11ème) profitent aussi des Pirelli mais leur adhérence se dégrade au fil du week-end. Johansson place l'Onyx survivante au douzième rang. Les Benetton-Ford (Nannini 13ème, Pirro 16ème) souffrent d'une tenue de route désastreuse. Les March subissent encore de nombreuses pannes, et comme souvent Gugelmin (14ème) s'en sort mieux que Capelli (24ème). Moreno réalise un excellent 15ème chrono mais il subit samedi d'une panne électrique. Il prend alors la voiture de Bertaggia mais il est victime à son volant d'un très violent accrochage avec Cheever. Sa Coloni s'envole et atterrit très endommagée sur ses quatre roues. Il lui faudra reprend sa voiture moribonde pour la course. Les Lola-Lamborghini (Alliot 17ème, Alboreto 21ème) ne brillent pas plus que les Lotus-Judd (Piquet 20ème, Nakajima 25ème). Palmer est 18ème avec sa Tyrrell. Arnoux (23ème) côtoie en fond de grille des Arrows (Warwick 22ème, Cheever 26ème) très instables. Les éliminés sont Herbert (diminué par sa maladie), Grouillard, Danner et Raphanel.

 

Le Grand Prix

Le soleil et la chaleur sont au rendez-vous en ce dimanche de fin d'été. Senna réalise le meilleur temps du warm-up malgré une panne de boîte de vitesses. Dans l'ensemble, les pilotes McLaren ne sont pas très contents de leur châssis. Cheever réalise un étonnant huitième chrono avec son Arrows. « Ce type me désespère ! » soupire Jackie Olivier. « Il ne fait rien de bon lors des essais, il est dernier au départ, et le dimanche matin il marche comme un avion ! »

 

Sur les conseils de Lee Gaug, la plupart des pilotes prévoient deux relais et partent avec des pneus tendres C. Les Benetton (qui ont un sérieux problème d'usure), les Arrows et la Lola d'Alboreto ont des « B » durs. Palmer monte des B à gauche, des C à droite. Chez Pirelli, tout le monde sélectionne la gamme tendre. De Cesaris et Capelli rencontrent des problèmes d'allumage lors de leur boucle d'installation et partiront avec leurs mulets. Brundle écope d'une amende de 10 000 dollars pour avoir roulé trop vite dans l'allée des stands.

 

Départ: Grâce à sa boîte électronique, Berger prend le commandement devant Senna. Mansell se glisse dans le sillage de son équipier mais Senna conserve l'avantage. Viennent ensuite Prost, Martini, Patrese et Caffi.

 

1er tour: Berger prend le large et conclut cette boucle d'ouverture avec une seconde et demie d'avance sur Senna. Suivent Mansell, Prost, Martini, Patrese, Caffi, Boutsen, Brundle, Modena, Pérez-Sala et Johansson.

 

2e: Berger s'échappe pendant que Mansell est sur les talons de Senna. Prost ne parvient pas à se défaire de Martini.

 

3e: Quatre secondes séparent Berger du duo Senna – Mansell. Boutsen prend l'avantage sur Caffi.

 

4e: Berger tourne en 1'21''098''' et repousse Senna à cinq secondes et demie. Johansson prend la onzième position à Pérez-Sala.

 

5e: Berger précède Senna (6.8s.), Mansell (7.2s.), Prost (10s.), Martini (12s.), Patrese (13s.) et Boutsen (15s.). Johansson double Modena tandis que Nannini et Gugelmin se défont de Pérez-Sala. Le moteur de Moreno coupe par intermittence. Le Brésilien dégringole en queue de peloton.

 

6e: Johansson dépasse Modena. La tenue de route des Brabham s'altère très rapidement.

 

8e: Mansell déborde Senna au bout de la ligne droite des stands. Les deux Ferrari sont en tête, mais neuf secondes les séparent. Johansson dépasse Brundle.

 

10e: Mansell prend le meilleur tour en course: 1'20''535'''. Senna voit Prost grossir dans ses rétroviseurs, tandis que Martini retient les Williams. Johansson dépasse Caffi dont les pneus Pirelli peinent à chauffer.

 

11e: Berger est premier devant Mansell (7.8s.), Senna (10s.), Prost (12s.), Martini (14.9s.), Patrese (15.1s.), Boutsen (15.8s.), Johansson (26s.), Caffi (27.8s.), Brundle (29.1s.), Nannini (31.1s.), Gugelmin (37.1s.), Piquet (40.5s.) et Modena (42.8s.).

 

12e: Moreno renonce car l'alimentation électrique de son moteur est décidément défaillante.

 

14e: Berger a trop présumé de ses pneus en ce début de course et doit maintenant les ménager. Mansell revient à six secondes.

 

16e: Mansell reprend quelques dixièmes à Berger à chaque passage. Senna garde Prost à distance. Celui-ci rencontre des vibrations à l'avant droit. Martini résiste toujours à Patrese et à Boutsen.

 

18e: Trois secondes séparent les deux Ferrari. De Cesaris se range dans la pelouse avec un allumage cassé.

 

19e: Berger est bouchonné sur quelques mètres par son vieil ami Arnoux. Nannini déborde Brundle.

 

20e: Berger tombe sur un troupeau d'attardés comprenant Cheever, Alboreto, Pirro, Warwick, Nakajima, Pérez-Sala et Modena. Mansell revient ainsi dans ses roues.

 

21e: Berger précède Mansell (0.8s.), Senna (5.4s.), Prost (8s.), Martini (13.4s.), Patrese (14.1s.), Boutsen (14.4s.), Johansson (24s.), Caffi (40.4s.), Nannini (40.8s.), Brundle (43.2s.) et Gugelmin (51.8s.). Pirro juge sa voiture inconduisible et choisit de troquer ses Goodyear B contre des C.

 

22e: Berger et Mansell se retrouvent roues dans roues. Senna et Prost sont maintenant aux prises avec les retardataires. Nannini s'empare de la huitième place aux dépens de Caffi.

 

23e: En entamant la parabolique, Berger est gêné par Modena et Warwick qui se battent pour la dix-neuvième place. Mansell prend l'aspiration derrière l'Autrichien.

 

24e: Devant les stands, Mansell se déporte à droite au moment même où Warwick fait l'intérieur à Modena. Berger a l'horizon bouché et ne peut répliquer. Warwick aperçoit Mansell à temps dans ses rétroviseurs et lui ouvre le passage avant le freinage. Voici le Lion en tête du Grand Prix.

 

25e: Mansell est leader devant Berger (1.1s.), Senna (3s.), Prost (7s.), Martini (16s.), Patrese (16.5s.) et Boutsen (17s.). Capelli abandonne sur une rupture de ressort de soupape.

 

26e: Senna rattrape Berger au gré du trafic. Brundle stoppe chez Brabham pour remplacer ses Pirelli. Pirro chausse lui son troisième train de Goodyear. Le moteur de Cheever se tait à la sortie de la parabolique.

 

27e: Prost arrive chez McLaren pour changer ses pneus et reprend la piste entre Johansson et Nannini.

 

29e: Mansell, Berger et Senna se tiennent en trois secondes. Plus loin, Patrese klaxonne toujours derrière l'imperturbable Martini.

 

30e: Mansell devance Berger (2s.), Senna (4.5s.), Martini (18.7s.), Patrese (19.8s.), Boutsen (20.7s.), Johansson (31.3s.), Prost (38.8s.), Nannini (48s.), Gugelmin (1m. 01s.), Piquet (1m. 02s.) et Palmer (1m. 03s.). Changements de pneus pour Caffi et Alliot.

 

31e: Pirro rejoint encore une fois son garage où ses mécaniciens détectent un amortisseur grippé. Le jeune Italien met pied à terre.

 

32e: Senna met la pression sur Berger qui rencontre du sous-virage. Gugelmin est chez March pour prendre des pneus neufs. Hélas, il cale au démarrage et perd de précieuses secondes avant de relancer son moteur. Piquet remplace aussi ses gommes.

 

33e: Caffi et Piquet entrent en contact à la parabolique intérieure et s'enlisent tous deux dans le bac à sable. C'est un double abandon.

 

34e: Berger observe un changement de roues très rapide (6.8s.) mais il retrouve tout de même la piste derrière les Williams.

 

35e: Senna entre aux stands, laissant Mansell en tête devant... Martini ! Le Brésilien peine à redémarrer après avoir pris ses nouveaux pneus et perd douze secondes dans cette mésaventure. Il repart devant Johansson. Boutsen change aussi d'enveloppes.

 

36e: Mansell devance Martini (23s.), Patrese (24s.), Berger (28s.), Senna (31s.), Johansson (39s.), Prost (40s.), Nannini (1m. 02s.) et Boutsen (1m. 06s.).

 

37e: Prost dépasse Johansson qui fait le choix d'une course non-stop. Modena change ses pneus Pirelli totalement inefficaces. Warwick endommage sa calandre contre la Minardi de Sala.

 

38e: Martini retient Patrese, lui-même sous la menace de Berger et de Senna. Alboreto chausse des gommes neuves.

 

39e: Changement d'enveloppes pour Patrese qui repart derrière Nannini.

 

40e: Mansell rejoint la pit-lane, laissant Martini et sa Minardi au commandement ! Mais, peut-être gêné par des mécaniciens de McLaren, Nigel rate son box et s'arrête deux mètres trop loin, devant le garage Benetton ! Ses mécaniciens se précipitent pour le pousser mais il préfère enclencher la marche arrière, ce qui est formellement prohibé. Finalement, son changement de pneus lui coûte vingt secondes et il reprend la course entre Senna et Prost. La direction de course se saisit aussitôt de l'affaire et la disqualification de l'impétueux moustachu paraît inéluctable. Privé d'appui faute d'aileron avant, Warwick heurte le rail aux Esses et s'immobilise sur le bas-côté.

 

41e: Berger déborde Martini sur la ligne de chronométrage et retrouve les avant-postes. Puis Senna dépasse le Transalpin dans la parabolique intérieure. Il tombe ensuite sur Alliot qui refuse longtemps de s'écarter.

 

42e: Mansell entame une folle remontée. Il revient sur Martini et le double sans coup férir. Mais en coulisses, Jean-Marie Balestre convoque Roland Bruynseraede et lui ordonne de présenter le drapeau noir à la Ferrari n°27. Arrêt pneus pour Arnoux.

 

43e: Berger a deux secondes d'avance sur Senna, cinq secondes sur Mansell. Martini s'arrête chez Minardi pour monter des pneus neufs (14s.). Il chute au neuvième rang.

 

44e: Mansell est lancé aux trousses de Senna. Nannini se débat avec une voiture très instable et contient les assauts des pilotes Williams.

 

45e: Patrese et Boutsen dépassent Nannini qui préfère continuer ainsi plutôt que changer encore de pneus.

 

46e: Berger précède Senna (4.5s.), Mansell (5.4s.), Prost (9s.), Johansson (17s.), Patrese (36s.), Boutsen (37s.), Nannini (38s.), Martini (43s.) et Palmer (58s.). Bruynseraede apparaît sur le muret des stands et brandit le drapeau noir accompagné du numéro 27. Mansell est disqualifié.

 

47e: Mansell ignore les ordres du directeur de course et fait le forcing derrière Senna. Pendant ce temps-là, Cesare Fiorio s'empoigne avec Ron Dennis et accuse les mécaniciens anglais d'avoir volontairement tardé à dégager la voie devant Mansell.

 

48e: Les yeux rivés sur la McLaren qui le précède, Mansell n'obtempère toujours pas. Second arrêt de Brundle.

 

49e: Senna et Mansell passent devant les stands, le Brésilien à gauche de la trajectoire, l'Anglais sensiblement à droite. A l'abord du freinage, Senna se rabat brusquement pour prendre la corde. Mansell reste à sa place et harponne la roue arrière-droite de la McLaren. Celle-ci part en travers et disparaît dans un nuage de poussière au fond du bac à sable ! Senna quitte immédiatement son bolide, ivre de colère, tandis que Mansell se range piteusement, suspension avant-gauche pliée. Berger conclut le meilleur tour de la journée: 1'18''986'''.

 

50e: Berger est désormais leader devant Prost (16.7s.), Johansson (35.6s.), Patrese (44s.), Boutsen (47s.), Nannini (54.5s.), Martini (1m.), Palmer (1m. 17s.), Nakajima (-1t.) et Brundle (-1t.).

 

51e: Senna demeure en bord de piste, adossé à un rail, l'œil hagard. Dans la tour de contrôle, c'est le branle-bas de combat. Le président Balestre convoque sur le champ Fiorio et Mansell afin de leur infliger des sanctions exemplaires.

 

53e: Berger est en route vers la victoire. Il compte quinze secondes d'avance sur Prost qui a résolu de se contenter de sa position.

 

55e: Johansson occupe la troisième place mais ses gommes sont très usées, et il est en outre bouchonné par Sala. Patrese le file. Nannini exécute un tête-à-queue, sans conséquence mais qui le contraint à la plus grande prudence.

 

57e: Berger a vingt secondes de marge sur Prost. Patrese est dans la roue de Johansson.

 

58e: Patrese dépasse Johansson sur la ligne de chronométrage. Martini se rapproche de Nannini.

 

59e: Berger précède Prost (24.1s.), Patrese (48.6s.), Johansson (51.1s.), Boutsen (58s.), Nannini (1m. 14s.), Martini (1m. 21s.), Palmer (-1t.), Nakajima (-1t.) et Brundle (-1t.).

 

60e: Les radiateurs de la Williams de Boutsen sont obstrués et son V10 Renault surchauffé rend le dernier soupir dans les stands.

 

61e: Patrese s'arrête sur le circuit, moteur éteint. Comme celle de son équipier, sa Williams a ramassé des débris de gomme qui ont bloqué les conduits d'aération. Johansson retrouve la troisième place.

 

62e: Martini renonce à poursuivre Nannini car sa nuque, sollicitée par la force centrifuge, le fait souffrir.

 

64e: Berger mène devant Prost (26s.), Johansson (52s.), Nannini (1m. 17s.), Martini (-1t.) et Palmer (-1t.).

 

66e: Berger roule à sa main mais creuse toujours l'écart sur un Prost très sage.

 

68e: Berger est premier devant Prost (30.4s.), Johansson (54.7s.), Nannini (1m. 20s.), Martini (-1t.), Palmer (-1t.), Nakajima (-1t.), Brundle (-1t.), Alliot (-1t.) et Gugelmin (-1t.).

 

70e: Johansson ralentit dans ces derniers mètres car il est au bord de la panne sèche.

 

71ème et dernier tour: Gerhard Berger remporte le cinquième Grand Prix de sa carrière. Prost assure une excellente seconde place. Johansson apporte à Onyx son premier podium. Nannini finit quatrième au volant d'une Benetton pourtant très rétive. Martini empoche la cinquième place. Le dernier point revient à Palmer. Nakajima, Brundle, Alliot, Gugelmin, Alboreto, Pérez-Sala, Arnoux et Modena rejoignent aussi l'arrivée.

 

Après la course: la revanche de Berger

C'est un Berger exténué mais euphorique qui regagne les stands en saluant la foule, tête nue. Le grand Autrichien tient enfin sa revanche après les heures dramatiques d'Imola et une interminable série d'épreuves interrompues par des problèmes mécaniques. Sa course fut limpide et il ne s'est jamais angoissé, pas même quand Mansell l'a doublé. « Nos réglages aérodynamiques étaient différents. Il avait une plus grande vitesse de pointe et son dépassement ne lui posait aucune difficulté. Moi je ne pensais qu'à mes pneus. Je les ai très vite détruits car j'ai attaqué très fort d'entrée. Je l'ai regretté. Mais après mon changement de pneus, ce fut super. La voiture était parfaite. Certes, sans l'accident de Mansell, ma fin de course aurait été sans doute plus difficile. » Berger est d'autant plus satisfait que l'adhérence de la Ferrari était globalement supérieure à celle des McLaren-Honda, un progrès encourageant.

 

L'autre exploit du jour est celui de Stefan Johansson, troisième avec sa petite Onyx, et qui est tombé en panne sèche quelques mètres après l'arrivée ! Le Suédois rate ainsi la cérémonie du podium... « Nous avons effectué de nombreux essais privés depuis quelques semaines, ils sont payants, d'autant que ce tracé correspondait parfaitement à notre voiture », explique-t-il. En outre, il a rallié l'arrivée sans changer de pneus. « Ils n'auraient pas tenu deux tours supplémentaires, admet-il, mais c'était le bon choix. »

 

Affaire Mansell et pugilat italo-anglais

Hélas, la résurrection de Berger et la prouesse de Johansson passent inaperçues face au scandale provoqué par la collision Senna – Mansell. Le Brésilien regagne les stands vert de rage. « Il m'a viré ! Il m'a viré ! » éructe-t-il. « Pourquoi est-il resté sur la piste après avoir été disqualifié ? Pourquoi ? » Puis il gagne dans le camion-atelier de McLaren et s'enferme dans le mutisme. Malheureusement, Ron Dennis ne partage pas sa résignation. Perdant son flegme, l'Anglais marche d'un pas vif vers le stand Ferrari et interpelle John Barnard: « Sorry John, lorsque tu verras Fiorio, peux-tu lui dire de se préparer à recevoir mon poing dans la gueule ? » Maurizio Nardon, l'ingénieur de Mansell, tente de s'interposer et défend son pilote. « Tell him to go f*** himself ! » explose Dennis.

 

Jean-Marie Balestre convoque Fiorio et Mansell devant les commissaires. Avec l'autoritarisme et la morgue dont il est coutumier, le président de la FISA inflige de lui-même une course de suspension et 50 000 dollars d'amende au pilote anglais. Celui-ci se récrie, affirme qu'il n'a pas vu le drapeau noir et que Fiorio ne lui a pas transmis l'information... En vain. Balestre est inflexible. Mansell s'en va en claquant la porte et part se calmer les nerfs à Majorque. Son manager Mike Francis se charge de sa défense devant les journalistes: « Cette affaire est ridicule. Tout a commencé à cause de McLaren. En arrivant aux stands, Nigel a aperçu au dernier moment leurs mécaniciens. Il a dû donner un coup de volant pour les éviter et stopper plus loin. Là, il attendu que ses mécaniciens viennent le chercher. Ne voyant rien venir, il a enclenché la marche arrière. Le drapeau noir ? Pas vu. Les ordres par radio ? Pas entendu. L'accrochage avec Senna ? No comment. » On le croit ou pas...

 

Pendant que Senna et Mansell s'écharpent à distance, Alain Prost compte les points. « Pour une fois, je ne suis pas au centre d'une polémique ! » glisse-t-il, faraud. Voyant que Dennis est trop occupé à s'écharper avec Fiorio, il se permet de boycotter la conférence de presse d'après-course. Hélas, Bernie Ecclestone veille et lui colle une amende de 10 000 $ !... Avec dorénavant vingt-quatre points d'avance sur Senna, Prost est presque certain de remporter le titre mondial en fin de saison. Il peut chaleureusement remercier son futur coéquipier...

Tony