Esteban Ocon, dont les parents sont d'origine espagnole, débute en karting en 2004. Il remporte pendant cette période-trois championnats de France. En 2012, il effectue ses débuts en monoplace en Eurocup Formula Renault 2.0 et en Formule 2.0 Alps. Avec ART Grand Prix, il rempile une seconde année en Eurocup Formula Renault 2.0 et termine troisième du championnat. Il rejoint en 2014 la meilleure écurie du championnat d'Europe de Formule 3, Prema Powerteam, et remporte le titre après une longue lutte face à Max Verstappen. On le retrouve également lors de la séance d'essais libre du vendredi du Grand Prix d'Abu Dhabi au volant de la Lotus E22.
Tandis que Verstappen est directement promu en F1 en 2015, Esteban retrouve ART Grand Prix en GP3 Series. Il s'impose dès ses débuts à Barcelone, puis ne gagne aucune autre course du championnat. Malgré tout, grâce à une incroyable série de dix deuxièmes places en onze courses, il est couronné en fin de saison au détriment de Luca Ghiotto. Grâce au soutien de Mercedes, il occupe en parallèle le poste de pilote d'essai chez Force India.
2016: l'opportunité Manor
En 2016, il devient le troisième pilote Renault et participe à quatre séances d'essais libres le vendredi matin. Mercedes le place en DTM, mais son adaptation est compliquée et il ne brille pas. Sa chance arrive lorsque Rio Haryanto, pilote Manor, doit jeter l'éponge à cause de ses sponsors. Mercedes lance alors Esteban dans le grand bain et à peine vingt ans, il effectue ses débuts en Formule 1 en Belgique. Parti dix-septième, il termine seizième en course. Face à Pascal Wehrlein, lui aussi couvé par la marque à l'étoile, Esteban n'est pas ridicule et rivalise avec lui la plupart du temps. Son meilleur résultat est obtenu sous la pluie brésilienne, où il est longtemps en position de marquer des points. Il cède dans les deux derniers tours face à Alonso et Bottas et se classe finalement douzième.
Ses prestations et sa régularité ont globalement été appréciées dans le paddock et des rumeurs insistantes font état d'une titularisation proche chez Force India. L'équipe cherche en effet un remplaçant à Hulkenberg partant chez Renault, et les deux poulains de Mercedes, Ocon et Wehrlein sont en concurrence. L'annonce est faite en fin de saison : c'est bien Esteban Ocon qui est choisi par Force India pour épauler l'expérimenté Sergio Perez. C'est une très belle promotion car l'équipe indienne, qui sera toute rose l'an prochain, sort de sa meilleure saison depuis sa création, avec la quatrième place au championnat et deux podiums signés Perez.
2017: éclosion précoce et houleuse chez Force India
Avant l'entame de la saison 2017, l'objectif affiché par Esteban est de finir toutes les courses dans les points et continuer à apprendre pour se rapprocher de Perez. Objectif atteint à Melbourne, où, qualifié treizième, il finit la course dixième et inscrit donc son premier point. A vingt ans, c'est le plus jeune français à marquer un point. Il continue au même rythme avec le point de la dixième place pour les trois premières courses, mais toujours derrière Perez. Les résultats progressent avec l'arrivée en Europe : il se qualifie en Q3 pour la première fois en Russie et inscrit les six points de la septième place, puis termine cinquième en Espagne... toujours juste derrière Perez. Le Grand Prix du Canada révèle de premières tensions entre les coéquipiers alors que les Force India excellent sur le tracé rapide et jouent le podium face à Ricciardo. Au lieu de faire le jeu d'équipe, la bataille entre coéquipier les pénalisent et ils finissent cinquième et sixième avec une certaine amertume.
La tension monte d'un cran à Bakou quinze jours plus tard. Dans une course folle, émaillée de nombreux safety car, Esteban se trouve quatrième derrière Perez quand il le déborde à la relance. Hélas il se rabat trop tôt et détruit l'aileron de Perez : son pneu arrière est crevé, les deux Force India doivent rentrer aux stands, c'est une catastrophe pour l'équipe. Esteban terminera huitième mais le ton est donné entre les pilotes dont le niveau est de plus en plus proche. Malgré l'électricité dans les box (nouvel accrochage en Hongrie), les résultats sont solides et Esteban poursuit sa belle série d'arrivée dans les points. Le paroxysme de cette bataille arrive en Belgique où les deux Force India vont s'accrocher à deux reprises. D'abord au départ, sans dégât par miracle, puis au vingt-neuvième tour quand Esteban déborde le mexicain. Celui-ci ferme la porte sans ménagement et comme à Bakou les deux voitures s'accrochent : aileron cassé pour lui et crevaison pour Perez... Esteban fulmine et s'épandra dans les médias : « Perez a essayé de me tuer deux fois » ! A partir de cette course, l'équipe instaurera des consignes : les pilotes n'ont plus le droit de se battre en piste.
En Italie pour la course suivante, il fait un récital en qualifications sous la pluie et signe le cinquième temps, qui se transforme en troisième place sur la grille après l'application de pénalités. Il finira sixième, premier des pilotes hors top-team. Les points sont systématiques avec une belle cinquième place au Mexique puis la série s'arrête au Brésil où Grosjean l'accroche au premier tour. Il termine l'année huitième du championnat avec un total de quatre-vingt-sept points, treize de moins que Perez ; et avec dix-huit arrivées dans les points en vingt courses. La prestation est solide et il s'est montré largement au niveau de Perez en deuxième partie de saison, ce qui laisse augurer de belles choses pour 2018 avec un duo renouvelé chez Force India, qui espère aussi que l'ambiance s'apaisera.
2018 : les doutes et le piège des transferts
La saison 2018 débute moins bien que la précédente, la Force India VJM11 est moins compétitive, instable en sortie de virage d'après les pilotes. Cela se constate dans les résultats car Esteban n'inscrit qu'un seul point dans les trois premières courses. Son coéquipier Perez lui reste à zéro. La voiture s'améliore petit à petit et Esteban fait des progrès majeurs, notamment en qualification. La quatrième manche à Bakou est une nouvelle démonstration des progrès de Force India, avec Ocon qualifié septième devant Perez ; mais elle sera aussi à nouveau tragique pour lui... Le pilote français, très bien parti, tente de dépasser Räikkönen sixième dès le troisième virage : le pilote Ferrari ne voit pas la Force India et c'est l'accrochage, Esteban termine sa course dans le mur. C'est d'autant plus amer pour lui que la course est très animée et que son coéquipier réussi à atteindre le podium. Après un nouvel abandon sur panne technique en Espagne, Esteban reprend sa moisson régulière de points, avec notamment une belle sixième place à Monaco. Le retour du Grand Prix de France après dix ans d'absence ne sourit pas à Esteban, ni aux français en général, qui abandonne dès le premier tour après un accrochage avec Grosjean.
Ces nombreux heurts en course entachent petit à petit la réputation d'Esteban qui apparait parfois brouillon, malgré une pointe de vitesse indéniable. Par ailleurs, en coulisse se trame un autre bouleversement dans la saison du français. L'équipe Force India affiche clairement son manque de trésorerie, en parallèle des déboires de son dirigeant Vijay Mallya, ruiné, en exil à Londres et recherché par un mandat d'arrêt international... Fin juillet, l'équipe est placée en liquidation judiciaire, à la recherche d'un repreneur ! Ce sera le feuilleton de l'été, bien que le travail en piste continue : Esteban, sixième au Red Bull Ring et septième à Silverstone, reprend la main sur son coéquipier au championnat. Pendant la trêve estivale, les administrateurs judiciaires indiquent avoir accepté l'offre d'un consortium dirigé par l'homme d'affaires Canadien Lawrence Stroll. Si c'est une bonne nouvelle pour l'équipe, c'est plus mauvais pour Esteban car il est tenu pour acquis que le fils du nouveau patron, Lance Stroll, sera dans l'équipe en 2019. Il se murmure un moment que Stroll prendrait la place d'Esteban dès Spa, ce qui n'arrivera pas. L'avenir d'Esteban s'assombrit un peu plus quand, proche d'un futur contrat Renault, l'équipe d'Enstone fait un coup de maître en août en signant Ricciardo pour 2019 ! Les portes se ferment mais Esteban garde malgré tout sa concentration, preuve en est faite à Spa, au retour de la F1, avec une magnifique qualification en troisième place sous la pluie. Entouré en conférence de presse par Hamilton et Vettel, il reçoit un fort soutien des multiples champions du monde qui appuient son talent dans le contexte fragile de son avenir incertain.
Singapour sera le point d'orgue de la confrontation Perez/Ocon quand le mexicain envoie le français dans le mur dès le premier tour...C'est l'estocade pour un Esteban en perte de vitesse, il ne marquera que quatre points sur six dernières courses bien compliquées. Il se retrouvera notamment dans la polémique au Brésil en accrochant le leader Verstappen en essayant de se dédoubler. Ce dernier, perdant ainsi la course, furieux, bousculera violemment le français après course ; des images qui feront malheureusement le tour du monde. Trois jours avant la dernière course, c'est la fin du suspense sur l'avenir d'Esteban avec l'annonce de la titularisation de Kubica dans le dernier baquet à pourvoir sur la grille, chez Williams. Le lendemain, Mercedes confirme son nouveau rôle pour 2019 : pilote d'essai et de réserve. Sa dernière course résumera bien sa saison : après un solide début, Esteban voit son moteur partir en fumée et doit abandonner. Il termine l'année douzième au championnat avec quarante-neuf points, bien moins bon que l'année d'avant, mais avec un bilan tout de même reluisant de seize à cinq en qualification face à Perez.
2019 : une année de pause pour apprendre chez les champions du monde
En 2019, Esteban ronge donc son frein sur le banc de touche, en accompagnant l'équipe Mercedes sur tous les circuits de la saison. Il considère le verre à moitié plein et veut maximiser cette expérience de travailler au quotidien avec une équipe championne du monde. C'est en quelques sortes le même pari qu'avait fait Olivier Panis, vingt ans avant lui, sans volant fin 1999 et qui avait rebondit avec succès en tant qu'essayeur chez McLaren-Mercedes. Il s'active aussi en coulisse pour préparer son retour en F1 en 2020. Sa piste numéro une est bien évidemment la place occupée par Bottas chez Mercedes et dont le contrat s'achève fin 2019. Le directeur Toto Wolf, toujours par ailleurs manager du normand, affirme en effet que le baquet tant convoité auprès de Hamilton se jouera entre Bottas et lui. Hélas pour le français, c'est bien Bottas qui est renouvelé fin août, condamnant un peu plus la filière de jeune pilote Mercedes : après Wehrlein, c'est Ocon qui n'est pas retenu par l'étoile.
Le jeune français rebondit immédiatement en officialisant son arrivée chez Renault en 2020. Il exulte à l'idée de retrouver Enstone, à la place qui l'attendait déjà en 2019, avant l'arrivée de Ricciardo : « j'ai grandi à Enstone avec Lotus puis Renault depuis 2010. J'ai beaucoup d'attaches avec cette écurie et les gens qui la composent, ce sont eux qui m'ont ouvert les portes du sport automobile de haut niveau ». Il signe un contrat de deux ans avec Renault, avec des options au-delà de 2021, et nourrit de grands espoirs dans le team français en pleine progression.
2020 : retour poussif mais progressif chez Renault
Le retour d'Esteban sur les grilles en 2020 est bien compliqué, la faute à un manque de rythme global. Il faut dire que la saison tarde à démarrer à cause de la pandémie de coronavirus ; la reprise ne s'effectuant qu'en juillet, cela fait vingt mois que le normand n'a pas pris part à une course de F1 ! Esteban fait face en 2020 à un coéquipier redoutable, Ricciardo, qui entame sa seconde année à Enstone, avant de partir chez McLaren en fin d'année. Ce départ, conclut avant même le début de cette saison, aurait pu faire d'Esteban le leader naturel de Renault en 2020. Ce ne sera pas le cas, loin de là. Côté sportif, Esteban atteint son objectif dès le premier grand prix en Autriche en entrant directement dans les points, huitième, profitant toutefois des aléas de course devant lui. Mais le reste de la saison est décevant, systématiquement qualifié derrière Ricciardo, il a du mal à trouver du rythme en course malgré un engagement et une motivation infaillible.
Par ailleurs, tandis que son coéquipier magnifie la Renault RS20 avec deux podiums en trois courses en deuxième partie de saison, Esteban rencontre aussi une certaine malchance avec quatre abandons mécaniques lorsqu'il était en position d'inscrire des points. Fin octobre certaines rumeurs éjecteraient même le français de chez Renault, remplacé par un autre, Gasly, qui a le vent en poupe après sa victoire à Monza. Il n'en sera rien, Ocon est bien confirmé par son directeur qui confirme toutefois des progrès attendus. Le Grand Prix de Turquie illustre bien la saison d'Esteban : qualifié septième, il fait un excellent départ qui le propulse à la troisième position au premier virage. Mais il n'en sort pas indemne : percuté par son coéquipier et envoyé en tête à queue, ce sera une nouvelle course sans point. Esteban garde le moral : « C'est dommage, on a beaucoup de malchance ces temps-ci. La seule chose à dire, c'est : à la prochaine ! On est dégoûtés mais ça viendra ».
Son optimisme et son travail sont enfin récompensés au Grand Prix de Sakhir, sur la configuration ultra-rapide du tracé. Parti pour un long relai en pneus durs il remonte le peloton jusqu'à la quatrième place et bénéficie des erreurs des deux Mercedes aux avant-postes pour obtenir une superbe deuxième position ! A vingt-quatre ans et pour son soixante-sixième Grand Prix, Esteban monte sur son premier podium, qui vient embellir une saison globalement difficile où il n'aura pourtant rien lâché. Au final, Esteban se classe douzième du championnat, loin, très loin de son coéquipier, cinquième du général avec le double de points et qui lui a infligé un sévère quinze à deux en qualification. Confiant en ses capacités, Esteban espère capitaliser sur son expérience acquise pour faire bien mieux en 2021. Il sera certes débarrassé de Ricciardo dans l'équipe mais récupérera en lieu et place le revenant Alonso, que l'on sait intraitable avec ses coéquipiers et qui revient affamé.
2021 : la première victoire avec Alpine
Malgré le gel partiel des F1 et les ambitions modérées de son équipe, Esteban espère poursuivre ses nets progrès en 2021 et surtout devancer son nouvel équipier Fernando Alonso. Malgré un premier rendez-vous manqué à Bahreïn, le début de saison est plutôt réussi avec une série de quatre courses terminées dans les points. Ce sont toutefois des petits points et Esteban doit bien constater que, contrairement à l'an passé, son équipe ne peut plus rivaliser avec McLaren et Ferrari, plus rapides derrière les top team intouchables Mercedes et Red Bull.
Esteban enregistre son premier abandon de la saison à Bakou (turbo cassé) et se confronte ensuite à un manque de rythme systématique, concluant quatre courses sans point. Alpine décide de changer son châssis pour Silverstone, permettant son retour dans les points, neuvième.
La manche suivante en Hongrie sera le plus beau moment de l'année pour le français. Qualifié huitième, son départ prudent lui permet d'éviter les carambolages du départ sous la pluie : il se retrouve deuxième derrière Hamilton ! Mieux, il prend la tête à la suite d'une erreur stratégique de Mercedes. Esteban mène ainsi 65 des 70 tours de courses, résistant à la pression permanente de Vettel derrière lui, puis du retour de Hamilton en fin de course, bien retenu par le jeu d'équipe d'Alonso. A 24 ans, Esteban Ocon devient le quatorzième pilote français à s'imposer en F1 ! Une victoire autant méritée qu'inattendue avant la pause estivale.
Esteban récolte encore des points le reste de la saison, l'excellente exécution des week-ends par Alpine compense le rythme en retrait et optimise les résultats face à la rivale Alpha Tauri. Sa fin de saison est très réussie avec une cinquième place au Qatar, puis il passe à deux doigts du podium en Arabie Saoudite, doublé sur la ligne par Bottas ! Lors de cette course mouvementée, il aura aussi fait l'expérience d'un départ en pôle, spectateur privilégié du duel au sommet entre Verstappen et Hamilton !
Il se classe onzième au championnat, une place de mieux que l'année précédente mais avec une moyenne de point plus faible, et sept points derrière son coéquipier Alonso. Convaincu par son talent, Alpine a prolongé le contrat du français très tôt dans la saison, et ce jusqu'à fin 2024.
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Vincent