Carlos Reutemann enfin champion ?
Après cinq courses le championnat du monde est dominé par Carlos Reutemann qui s'est émancipé de la tutelle de Frank Williams et de son statut de pilote n°2. Refusant d'être plus longtemps un porteur d'eau, il joue désormais sa propre carte. Son avance sur ses deux principaux rivaux Nelson Piquet et Alan Jones est conséquente. 1981 sera-t-elle l'année d'« El Lole » ? Ce n'est pas sûr. Jones fera tout pour rabattre le caquet de son équipier et conserver son titre. Armé d'une Brabham désormais au niveau des Williams, Piquet est un adversaire redoutable.
Seuls ces trois hommes semblent pouvoir lutter pour la couronne. Ferrari rôde son moteur turbocompressé et n'a pas d'ambition pour cette année. Du côté français, les Renault-Elf et les Talbot-Ligier déçoivent grandement pour le moment. Quant à la McLaren MP4, elle se montre très compétitive aux mains de John Watson mais manque encore de mise au point.
Laser contre compensateurs
Afin d'éviter de nouvelles polémiques concernant la fameuse garde au sol de six centimètres, la FISA décide d'installer à Monte-Carlo un laser mesurant la hauteur de caisse des monoplaces. Si une voiture se trouve en dehors de la légalité, tous les temps réalisés par son pilote seront annulés, et il n'aura plus qu'à se relancer pour un tour rapide... s'il bénéficie encore de pneus neufs ! Les coureurs défilent donc devant ce dispositif durant tous les essais. Plusieurs d'entre eux sont piégés, souvent parce que leurs compensateurs ne se sont pas désactivés à temps. C'est le cas de Rebaque, Mansell, Ghinzani, Jabouille, de Angelis... Ce dernier, pourtant aristocrate romain bon teint, réplique aux commissaires par un insolent bras d'honneur ! Encore plus irascible, Reutemann, qui venait de réaliser le meilleur temps, sort de sa voiture en boudant et l'abandonne à des officiels ébahis ! Autre incident le samedi lorsque Siegfried Stohr conteste la mesure délivrée par le laser. Jackie Oliver et son bras droit Daniele Audetto se rendent sur place pour ergoter...
Tout le monde finit par pester contre ce système ultra-moderne. Le n°2 de la FISA Yvon Léon, son promoteur, se fait tout petit... Et pour cause, mêmes les observateurs les moins avisés se demandent pourquoi la fédération s'échine à vérifier la garde au sol des voitures à l'arrêt, alors que tout le monde sait qu'en action les jupes touchent le sol !
Présentation de l'épreuve
Guy Ligier pavoise à Monaco. Trois semaines plus tôt son ami François Mitterrand a été élu président de la République française. Le soir de la victoire, il a servi de chauffeur au nouvel élu. L'amitié entre Ligier et Mitterrand augure d'excellentes relations entre la marque vichyssoise et l'État français qui est son grand commanditaire via la régie des tabacs, la Seita.
Tandis que plusieurs bruits révélaient l'intérêt porté par la Scuderia Ferrari à Nelson Piquet ou à Alan Jones, celle-ci annonce au contraire son intention de prolonger les contrats de Didier Pironi et Gilles Villeneuve pour 1982 et 1983.
A l'autre bout de l'échelle, Fittipaldi Automotive n'aurait plus un cruzeiro dans ses caisses. Son directeur technique Harvey Postlethwaite a plié bagages car les frères Fittipaldi n'ont tout simplement plus les moyens de le rémunérer. De son côté Ken Tyrrell est lui aussi à la recherche de subsides et reçoit l'apport financier de la compagnie Imola Ceramica, sponsor de Michele Alboreto.
Le Team Lotus conserve le soutien officiel d'Essex pour ce GP de Monaco. David Thieme a été libéré sous caution et déambule dans le paddock monégasque... avant de disparaître quelques jours plus tard. Colin Chapman a transformé ses 88 pour les mettre en conformité avec l'esprit du règlement. Voici donc la Lotus 87, donc la coque est celle de la 88 mais avec une carrosserie réglementaire en fibre de carbone.
A Zolder Renault a manqué le lancement de sa RE30. Depuis, la carrosserie a été revue, ce qui donne à cette voiture une allure beaucoup plus « ramassée » et élégante. Les deux modèles sont munis d'une suspension hydraulique et d'un nouveau V6 qui peut atteindre les 11500 tours/minute.
Les Alfa Romeo ne confirment absolument pas les progrès entrevus fin 1980, et au contraire ne cessent de sombrer en fond de peloton. Mario Andretti a perdu son enthousiasme de début de saison. Pour cette course la 179C apparaît équipée de nouveaux pontons et ailerons.
Les Ferrari 126 CK ne sont apparemment pas favorites à Monaco mais leurs moteurs turbo ont été modifiés afin d'offrir une plus grande souplesse, ce qui pourrait être un bel atout dans les rues monégasques. Elles possèdent un empattement court ainsi qu'un nouveau système de suspensions hydrauliques.
Chez ATS Wheels, Gunter Schmidt a décidé de mettre de côté Jan Lammers avec lequel les relations s'étaient très détériorées. Slim Borgudd est désormais le seul pilote de l'équipe.
McLaren confie pour la première fois une deuxième MP4/1 à Andrea de Cesaris, en espérant qu'il en prenne soin car jusqu'ici il s'est révélé un redoutable froisseur de tôles... Quant à John Watson, il aimerait que ses beaux efforts au volant de cette voiture soient enfin récompensés par quelques points. Après avoir souffert en 80 face à Alain Prost, le Nord-Irlandais a repris « du poil de la bête » en pilotant la superbe création de John Barnard. A signaler que les MP4 possèdent enfin des suspensions compensées.
Fittipaldi confie de nouveau à Chico Serra des pneus Avon, mais face à leur inefficacité, le Brésilien revient aux pneus Michelin le samedi. Les gommes britanniques ne semblent décidément pas à la hauteur...
Pré-qualifications et nouvelles intrigues
Du fait du très grand nombre d'engagés, l'ACM a décidé de mettre en place une séance de pré-qualification le jeudi matin. Y sont convoquées les écuries qui n'ont pas inscrit de points lors de la saison 1980. Cette épreuve d'une heure élimine les Toleman-Hart de Warwick et de Henton, les March de Daly et de Salazar, et l'ATS de Borgudd. Tambay, Surer, Gabbiani et Ghinzani franchissent cette étape.
De nouveau Ferrari et Osella ont essayé d'exclure la Theodore de Tambay, sans succès. Afin de se concilier Teddy Yip, la FOCA a retiré son soutien à l'une des March, celle d'Eliseo Salazar, qui est toute de même autorisé à essayer de se pré-qualifier à condition qu'il ne soit pas éligible à inscrire des points. Il semblerait qu'en fait Bernie Ecclestone ait « racheté » l'engagement de cette March à John Macdonald qui a bien besoin de liquidités et sait pertinemment que ses voitures n'ont aucune chance de se qualifier ici.
Les qualifications
Piquet domine les qualifications. La vitesse de la Brabham fait d'ailleurs naître de nouveaux soupçons de tricherie... Toujours est-il que le Brésilien réalise sa cinquième pole position dès le jeudi. Son chrono n'est pas battu le samedi. Villeneuve fait sensation en obtenant la deuxième place sur un circuit qui n'est pas favorable aux moteurs turbo. Autre exploit, celui de Mansell qui hisse la nouvelle 87 au troisième rang, à un dixième du meilleur temps. Reutemann a été disqualifié le jeudi par les commissaires qui ont jugé sa garde au sol trop basse. Il se qualifie en quatrième position. Jones, qui souffre des séquelles de ses brûlures contractées à Zolder et a rencontré des soucis techniques, n'est que septième. La troisième ligne est italienne avec l'Arrows de Patrese et la Lotus de de Angelis. Laffite qualifie la Ligier-Matra à la huitième place.
La Renault RE30 ne donne guère satisfaction ; Prost est neuvième, Arnoux treizième. Watson est dixième avec la McLaren MP4, juste devant son équipier de Cesaris. Les Alfa Romeo laissent toujours à désirer et leurs performances sont médiocres. Andretti se retrouve douzième, Giacomelli dix-huitième. Stohr poursuit ses progrès et se classe quatorzième. Il est le seul qualifié dont la voiture ne dispose pas de compensateur de garde au sol. Pironi a été bien moins heureux que son équipier puisqu'il a touché trois fois le rail ! Il partira dix-septième. Tambay est seizième, Surer dix-neuvième, tandis que les Tyrrell de Cheever (15ème) et d'Alboreto (20ème) échappent de peu à l'élimination.
Les deux Fittipaldi de Serra et Rosberg sont éliminées, malgré un retour aux pneus Michelin le samedi. Exit également les deux Osella et la Brabham de Rebaque. Enfin Jabouille a encore une fois été accablé de soucis techniques et n'est pas qualifié. Le Français est touché au moral et ne semble simplement toujours pas remis physiquement de son accident de Montréal. Guy Ligier songe désormais sérieusement à le remplacer.
Les chronos réalisés le jeudi par Nelson Piquet laissent songeur. En effet il a utilisé deux voitures durant ces essais, une le jeudi, l'autre le samedi, et tout le monde a pu constater que la première roulait bien plus rapidement que la seconde... Certains team managers et pilotes comme Jacques Laffite pensent que cette Brabham est trop légère, en dessous des 585 kg réglementaires, car dotée d'un minuscule réservoir d'essence, totalement illégal. Mais personne n'ose porter réclamation contre le bolide du « roi Bernie ». Lorsque les officiels souhaitent effectuer une pesée, Herbie Blash leur répond que cette voiture est déjà démontée ! En tout cas, la Brabham BT49C est la voiture qui tangue le moins, ce qui est un avantage crucial sur cette piste de Monaco.
Le Grand Prix
La traditionnelle épreuve de Formule 3 du samedi est remportée par le jeune Français Alain Ferté sur une Martini de l'équipe Oreca d'Hugues de Chaunac. Il précède l'Argentin Oscar Laurrari et Jean-Louis Schlesser, le neveu du regretté Jo.
Il fait beau et chaud en ce dimanche de mai 1981. Pour une fois le prince Rainier, en voyage aux USA, n'est pas présent. Prévu pour 15h30, le départ est retardé d'une heure à cause d'une explosion survenue dans les cuisines de l'hôtel Loews, situé au niveau du tunnel. Les pompiers doivent intervenir pour maîtriser l'incendie et évacuer une quinzaine de blessés légers. De plus, sous le choc, des canalisations d'eau ont cédé et la piste se retrouve inondée sous le tunnel ! L'eau est évacuée rapidement mais les fuites ne peuvent être totalement colmatées avant le départ. Par mesure de sécurité, la direction de course décide d'interdire tout dépassement pendant la course entre le virage du Portier et la chicane du port.
Arnoux s'élance avec la Renault RE20B de réserve après avoir endommagé sa RE30.
Départ : Bon envol de Piquet qui reste devant Villeneuve, Mansell, Reutemann et Jones.
1er tour : Après un cafouillage impliquant aussi Prost, Arnoux, Surer et Watson, de Cesaris et Andretti entrent en contact au début de la montée après Sainte-Dévote et atterrissent dans le rail. Piquet est en tête devant Villeneuve, Mansell, Reutemann, Jones, Patrese, de Angelis, Laffite, Prost et Arnoux. Surer entre aux stands pour faire changer sa roue avant droite qui a crevé dans la confusion du départ.
2e : Piquet fait déjà le trou sur Villeneuve. L'Alfa Romeo d'Andretti et la McLaren de de Cesaris ont été poussées en bord de piste dans la montée vers le Casino, et vont y rester jusqu'au drapeau à damiers
3e : Piquet a une seconde et demie d'avance sur Villeneuve. Le train de tête comporte aussi les voitures de Mansell, Reutemann, Jones, Patrese et de Angelis. Le groupe suivant comprend Laffite et les deux Renault-Elf.
5e : Deux secondes séparent Piquet et Villeneuve. Mansell parvient à suivre la Ferrari.
6e : Mansell décroche un peu par rapport à Villeneuve. Reutemann et Jones sont dans son sillage.
7e : Piquet est premier devant Villeneuve (1.9s.), Mansell (3.4s.), Reutemann (4.2s.), Jones (5s.), Patrese (6s.) et de Angelis (6.7s.).
9e : Piquet s'échappe franchement et possède quatre secondes et demie d'avance sur Villeneuve. Il prend un tour à Surer.
10e : Mansell est revenu juste derrière Villeneuve. Stohr regagne le stand Arrows à cause de soucis avec sa pompe à essence. Il repart quelques instants plus tard.
11e : Arnoux double Prost. Surer s'écarte devant le peloton composé de Villeneuve, Mansell, Reutemann, Jones, Patrese et de Angelis.
12e : Piquet a maintenant huit secondes d'avance sur ses poursuivants.
14e : A la sortie de l'épingle de l'ancienne gare, Mansell marque une légère hésitation. Infiltré à l'intérieur, Reutemann casse son aileron avant contre l'arrière de la Lotus. L'Argentin ralentit et regagne les stands pour changer de museau.
15e : Mansell lève à son tour le pied car sa Lotus est déséquilibrée. Il stoppe à son stand pour changer sa roue arrière gauche. Reutemann repart bon dernier. Nouveau passage aux stands de Stohr.
16e : Piquet est premier devant Villeneuve (8.6s.), Jones (10s.), Patrese (13.3s.), de Angelis (13.8s.) et Laffite (21.6s.). Suivent Arnoux, Prost, Watson et Tambay.
17e : Mansell abandonne car un point d'attache de suspension s'est rompu dans l'accrochage avec Reutemann. Troisième arrêt pour Stohr.
18e : Jones est le plus rapide en piste et menace grandement Villeneuve.
20e : Jones attaque Villeneuve au freinage de Mirabeau et s'empare de la deuxième place.
21e : Neuf secondes séparent Piquet et Jones. Villeneuve rencontre des problèmes de freins tandis que ses jupes sont déjà usées. Patrese le rattrape.
23e : Stohr est dans les stands pour la quatrième fois de l'après-midi.
24e : Jones remonte petit à petit sur Piquet : son retard est désormais de huit secondes. Patrese est dans les roues de Villeneuve.
25e : Patrese prend la troisième place à Villeneuve. En queue de peloton une rude bagarre oppose Cheever, Giacomelli, Pironi et Alboreto. Reutemann rejoint ce groupe et le dépasse, mais il a un tour de retard.
26e : Piquet est en tête devant Jones (7.4s.), Patrese (15.9s.), Villeneuve (18.3s.), de Angelis (25.2s.), Laffite (34.3s.), Arnoux (37s.), Prost (38.7s.) et Watson (40.7s.). A plus d'une minute viennent Tambay, Cheever, Pironi, Giacomelli et Alboreto, puis à tour Surer et Reutemann.
27e : L'avance de Piquet sur Jones ne cesse de fondre. Après avoir doublé Giacomelli, Pironi bute sur Cheever pour la onzième place. Stohr abandonne suite à ses soucis d'alimentation.
30e : Patrese se gare sur le trottoir dans la descente vers Mirabeau à cause d'une boîte de vitesses bloquée.
31e : Piquet est premier devant Jones (7.5s.), Villeneuve (23.8s.), de Angelis (32s.), Laffite (43.9s.) et Arnoux (45.5s.).
32e : Watson prend la septième place à Prost.
33e : Le moteur de de Angelis part en fumée au virage du Bureau de tabac. L'Italien s'arrête sur le côté de la piste. Au même moment, à l'épingle de la gare, Arnoux glisse sur l'huile répandue par la Lotus et tape le rail.
34e : Pironi attaque Cheever par l'intérieur à Mirabeau. Les roues entrent en contact et l'Américain effectue un tête-à-queue. Il réussit à ne rien taper et se retrouve en travers dans l'échappatoire. Il est poussé par les commissaires et repart derrière Giacomelli et Alboreto. La Lotus de de Angelis et la Renault d'Arnoux sont évacuées.
35e : Cinq secondes et demie entre Piquet et Jones. Le drapeau rayé de jaune et de rouge est agité sous le tunnel à cause de l'huile et de l'eau qui se trouvent à cet endroit.
36e : Reutemann regagne le stand Williams. Il s'extrait de sa monoplace dont la boîte de vitesses est bloquée. C'est son premier abandon depuis le GP de Long Beach 1980.
37e : Piquet frotte la glissière avec sa roue arrière gauche à la sortie de Sainte-Dévote, sans conséquence. Jones revient à deux secondes du Brésilien.
38e : Piquet et Jones sont pris dans le trafic. Giacomelli et Pironi ont été doublés. Puis les leaders se débarrassent de Tambay.
39e : Piquet et Jones sont désormais roues dans roues. La Brabham est devenue survireuse et Piquet monte sur ses freins à chaque virage. Le duel entre les deux rivaux est lancé. Villeneuve est à vingt-et-une secondes de ce duo.
41e : Jones se montre dans les rétroviseurs de Piquet. Il tente de s'infiltrer à l'intérieur à la Rascasse, sans succès.
42e : Piquet est premier devant Jones (0.6s.), Villeneuve (21s.), Laffite (52s.), Watson (55s.) et Prost (1m. 07s.). Suivent à un tour Tambay, Pironi, Alboreto, Giacomelli et Cheever. Surer a concédé deux tours.
45e : Jones tente de déborder Piquet par l'extérieur à Sainte-Dévote mais n'a pas la place pour passer. L'Australien commet ensuite une petite faute à la sortie du Portier et perd le contact immédiat avec le leader. Dans le peloton Alboreto passe à l'attaque et menace Pironi et Tambay.
46e : Jones a une seconde et demie de retard sur Piquet. Prost s'arrête en panne de moteur. Il se débattait depuis le début de l'épreuve avec une suspension faussée dans une touchette. Tambay entre dans les points.
48e : Meilleur tour en course pour Jones (1'27''47'''). Tambay rencontre des problèmes de boîte de vitesses. Il perd deux places face à Alboreto et Pironi.
49e : Pironi prend la sixième place à Alboreto. Giacomelli double Tambay.
50e : Piquet est leader devant Jones (1.1s.), Villeneuve (31.1s.), Laffite (58.9s.), Watson (1m. 01s.), Pironi (-1t.), Alboreto (-1t.), Giacomelli (-1t.), Tambay (-1t.), Cheever (-1t.) et Surer (-2t.).
51e : L'écart est passé à deux secondes entre Piquet et Jones. Le Brésilien semble avoir eu raison de l'agressivité de l'Australien.
52e : A Sainte-Dévote Alboreto escalade le vibreur et part en toupie. Il tente de se relancer lorsque Giacomelli qui le suivait le percute de plein fouet en sortie de virage. Les deux Italiens sont éliminés. Leurs voitures sont promptement dégagées par des commissaires exemplaires.
54e : Piquet revient sur Cheever et Tambay qui sont en bagarre. A l'approche du Bureau de Tabac il tente de doubler Tambay par l'intérieur alors que celui-ci a déjà amorcé sa trajectoire. Les roues de la Brabham se bloquent sur la chaussée poussiéreuse. Piquet est expédié contre le rail. Voilà une erreur assez stupide qui lui coûte la victoire. Jones s'empare de la tête tandis que Watson regagne son garage.
55e : Jones est maintenant premier avec trente secondes d'avance sur Villeneuve. Watson abandonne: il n'y a plus une seule goutte d'huile dans son moteur. Il y a encore sept voitures en piste.
57e : Jones est premier devant Villeneuve (31.1s.), Laffite (1m. 01s.), Pironi (-1t.), Cheever (-2t.) et Surer (-2t.) qui vient de doubler Tambay.
59e : Jones a trente-deux secondes d'avance sur Villeneuve. Néanmoins il commence à sentir que son moteur hoquette par moment. Il redoute la panne d'essence.
61e : Jones lève le pied car son moteur continue de ratatouiller. Mais Villeneuve ne le rattrape pas pour le moment. Laffite a une minute et treize secondes de retard sur le premier.
62e : Jones prend un nouveau tour à Tambay qui finit l'épreuve à petite allure avec une boîte bloquée en troisième.
65e : Jones est leader devant Villeneuve (29.7s.), Laffite (1m. 18s.), Pironi (-1t.), Cheever (-2t.), Surer (-2t.) et Tambay (-3t.).
66e : Chez Williams c'est la circonspection : il est évident que le moteur de Jones ne tourne plus rond. Le pilote souhaiterait remettre de l'essence dans sa monoplace, mais il doit pour cela être certain de repartir des stands devant Villeneuve.
67e : En fin de boucle Jones emprunte la voie des stands. Ses mécaniciens se saisissent d'une buse pour remettre dix litres d'essence dans son réservoir. L'opération dure une quinzaine de secondes.
68e : Jones reprend la piste avec six secondes d'avance sur Villeneuve. A priori son pari est réussi, mais son problème n'est pas résolu : le V8 Cosworth continue de pétarader !
69e : Villeneuve flaire le parfum de la victoire, oublie ses freins, ses jupes et ses pneus usés, et se lance à la poursuite de Jones. En fin de tour l'écart est de 4.9 secondes.
70e : Quatre secondes et trois dixièmes entre Jones et Villeneuve.
71e : Jones est gêné par Cheever qui tarde à s'écarter. Villeneuve se débarrasse de l'Américain en fin de parcours. L'écart entre les deux leaders est alors de deux secondes.
72e : Villeneuve arrive dans les roues de Jones. En toute fin de parcours il a moins d'une seconde de retard.
73e : Grâce à la puissance de son turbo Villeneuve déborde Jones par l'intérieur sur la ligne de chronométrage. Le pilote Williams n'a rien pu faire et cède ainsi la victoire. La foule applaudit chaleureusement le Québecois qui est son véritable chouchou.
74e : Villeneuve s'envole en tête. Jones a baissé les bras et ne songe plus qu'à conserver sa position. Laffite est trop loin pour le menacer.
75e : Jones tourne au ralenti et se fait même repasser par Cheever. Il concède plus de trente secondes à Villeneuve.
76ème et dernier tour : Gilles Villeneuve renoue avec la victoire en Formule 1 et offre son premier succès au moteur turbocompressé Ferrari. Jones termine deuxième avec une voiture à l'agonie. Laffite n'avait pas les moyens de se mêler à la lutte pour la victoire mais obtient une belle troisième place. Pironi est quatrième et complète ainsi le succès de Ferrari. Malgré leurs différents problèmes, Cheever et Surer inscrivent les derniers points distribués. Tambay ferme la marche avec quatre tours de retard.
Après la course
Villeneuve a certes profité des déboires de Piquet et de Jones, mais la victoire d'une voiture à moteur turbo à Monaco fait sensation. Les motoristes italiens peuvent être fiers de leur travail. Déjà le turbo Ferrari semble prendre le pas sur le turbo Renault. Quant à Villeneuve, cette victoire, sa première sur un circuit européen, est aussi due à son incroyable adresse et à son sens de l'attaque hors du commun. Durant tout le week-end, il a sans cesse frôlé le rail sans jamais le toucher, malgré une tenue de route médiocre. Didier Pironi a voulu imiter son pilotage : il s'est crashé trois fois ! Et c'est un peu une nouvelle victoire à domicile pour le Québécois: comme Scheckter, de Angelis, Rosberg, Daly, Giacomelli, Cheever et Piquet, il a élu résidence en Principauté.
Malgré son abandon qui met fin à sa série de quinze arrivées consécutives dans les points, Reutemann conserve la première place du championnat avec dix points d'avance sur Jones. Au classement des constructeurs Williams devance désormais Brabham de trente-trois points. Ferrari émerge au troisième rang devant Ligier-Matra et Arrows.
Tony