La chute de Montezemolo
Après la désastreuse prestation des Ferrari à Monza, le couperet est tombé sur la tête de Luca di Montezemolo, contraint par Fiat d'annoncer son départ de la direction de Ferrari.
A 67 ans cet ancien protégé de la famille Agnelli quitte définitivement une Scuderia qu'il avait intégrée quarante ans plus tôt, en 1974, comme directeur sportif. En 1991 Gianni Agnelli l'avait nommé président de Ferrari. Le sommet de sa carrière fut son passage à la tête de Fiat entre 2004 et 2008. Depuis des années cependant Montezemolo était sur la sellette. Il s'était constitué avec Ferrari une sorte de «fief», ce qui irritait fortement John Elkann et Sergio Marchionne, les président et directeur général du groupe Fiat. Marchionne a fini par obtenir le renvoi de Montezemolo et le remplacera à la direction de Ferrari à compter du 13 octobre. Une nouvelle ère s'ouvre dans l'histoire de la firme italienne.
Présentation de l'épreuve
Depuis de nombreux mois, des amateurs de Formule 1 se plaignent de l'omniprésence des messages radios transmis aux coureurs pendant la course qui transforment ceux-ci en véritables robots commandés par les ingénieurs. De nombreux pilotes comme Kimi Räikkönen sont notoirement rétifs à ce genre d'usages. La FIA réagit en interdisant que soient transmis certains types de messages aux pilotes. Cela va du plus absurde (ordonner quand appuyer sur l'accélérateur) à plus utile (donner les temps d'un concurrent). En revanche les ingénieurs peuvent toujours recommander tel ou tel réglage aux pilotes durant la course.
La crise économique continue de frapper le sport automobile et l'avenir des équipes Caterham, Marussia et Sauber apparaît compromis. Lotus et Force India ne sont guère mieux loties. La directrice de Sauber Monisha Kaltenborn avoue ne pas savoir si son écurie sera encore là en 2015. Face à l'éventualité de voir le plateau réduit à huit ou neuf équipes, Bernie Ecclestone semble envisager d'autoriser les autres structures à engager trois voitures. Une mesure longtemps prônée par... Luca di Montezemolo.
Essais et qualifications
Surprise lors des essais : Alonso et sa Ferrari viennent titiller les Mercedes en réalisant les meilleurs temps des premières et troisièmes séances libres.
Lors des qualifications, les Flèches d'Argent sont nettement moins dominatrices qu'à Spa ou à Monza. Elles monopolisent pourtant la première ligne, Hamilton se plaçant en pole position devant Rosberg. Les deux équipiers ne sont séparés que par sept millièmes de secondes. Les Red Bull sont en deuxième ligne, Ricciardo précédant pour une fois Vettel. Les Ferrari ne se portent pas trop mal : Alonso est cinquième et Räikkönen septième. Elles côtoient les Williams peu performantes sur ce tracé : Massa se classe sixième et Bottas huitième. Magnussen est neuvième. Ces neuf pilotes se tiennent en seulement cinq dixièmes.
On retrouve ensuite Kvyat, Button et Vergne. Les Force India sont très décevantes : Hülkenberg est 13ème, Pérez 15ème... Tandis que les Sauber sont accablées de problèmes techniques, la situation devient désespérée chez Lotus : non seulement Maldonado s'est encore mis dans le mur le vendredi, mais en plus le samedi le moteur Renault coupe par intermittence à l'accélération ! Grosjean (seizième) explose : « Je ne peux pas le croire ! P**** de moteur ! »
En fond de grille, cette fois Kobayashi (20ème) ne parvient pas à devancer Bianchi (19ème).
Les participants ont eu de la chance : peu après la fin des qualifications un déluge s'abat sur Singapour pendant plusieurs heures. Ainsi l'asphalte est nettoyé pour la course du lendemain.
Le Grand Prix
Les coureurs ont le choix entre les Pirelli tendres et super-tendres qui promettent un écart de performance de près de deux secondes. Cela ne se vérifiera pas en course. Néanmoins tout le monde part munis de super-tendres. Pirelli table sur des stratégies à trois arrêts.
Juste avant le départ il apparaît qu'un problème électronique frappe la Mercedes de Nico Rosberg.
Tour de formation : Rosberg reste scotché à son emplacement, bloqué au point mort. Il est poussé vers les stands et partira de là. Pendant ce temps Kobayashi arrête sa Caterham dans une échappatoire à cause d'une chute de pression d'huile. Son dimanche est déjà terminé.
Départ : Hamilton part bien tandis que les deux Red Bull se gênent. Alonso en profite pour se glisse à l'extérieur mais freine trop tard au premier virage et tire tout droit. Il reprend la piste second devant Vettel et Ricciardo.
1er tour : Alonso sait que sa manœuvre du départ était litigieuse et il laisse passer Vettel au virage n°7. Passe d'armes virile entre les McLaren de Button et de Magnussen.
Hamilton mène devant Vettel, Alonso, Ricciardo, Räikkönen, Massa, Button, Bottas, Magnussen et Kvyat. Rosberg a pu partir depuis les stands et se trouve dernier.
2e : Hamilton mène devant Vettel (1.6s.), Alonso (2.6s.) et Ricciardo (3.5s.). Vingt-et-unième, Rosberg est bloqué derrière Chilton. Il a beaucoup de mal à passer certains rapports de boîte.
3e : Ricciardo souffre d'un problème avec sa batterie qui ne se décharge pas par intermittence. Cela lui fait parfois perdre quelques dixièmes.
4e : Vettel parvient à suivre Hamilton : il n'a qu'une seconde et huit dixièmes de retard. Alonso est en revanche déjà à six secondes du leader. Rosberg double Chilton mais n'a pas de DRS ni de radio.
5e : Hamilton mène devant Vettel (2.2s.), Alonso (7s.), Ricciardo (9.1s.), Räikkönen (10.3s.), Massa (11.4s.), Button (13.5s.), Bottas (15s.), Magnussen (17.9s.), Kvyat (18.9s.), Vergne (19.6s.) et Hülkenberg (21.4.s.).
7e : Maintenant Hamilton est nettement plus rapide que Vettel et le sème.
8e : Vergne prend la dixième place à Kvyat qui s'est écarté. Rosberg vit un calvaire puisqu'il ne parvient même pas à doubler la modeste Caterham d'Ericsson.
9e : Sutil est le premier pilote à faire changer ses pneus.
10e : Hamilton est premier devant Vettel (4.5s.), Alonso (9.7s.), Ricciardo (14.4s.), Räikkönen (17.3s.), Massa (19s.), Button (20.7s.), Bottas (22.9s.), Magnussen (25.7s.) et Vergne (28.3s.). Hülkenberg change de pneus.
11e : Changement de gommes pour Massa qui chausse des pneus super-tendres. Il repart treizième. Il est imité par Kvyat qui met des pneus tendres. Après avoir repris la piste, Hülkenberg et Kvyat doublent un Rosberg à l'agonie.
12e : Räikkönen, Bottas et Vergne s'arrêtent pour mettre de nouveaux pneus super-tendres. Räikkönen fait une mauvaise affaire en repartant derrière Massa. Vettel s'engouffre dans la voie des stands en fin de tour, imité par Alonso et par Ricciardo.
13e : Vettel, Alonso et Ricciardo ont mis des pneus super-tendres et repartent dans cet ordre. Gutiérrez s'était intercalé entre Massa et Räikkönen mais se fait doubler par le Finlandais. Hamilton a vingt-sept secondes d'avance sur Button et il entre aux stands en fin de boucle.
14e : Hamilton chausse des pneus super-tendres (2.9s.) et repart sans avoir perdu le commandement. Magnussen change aussi ses pneus. Massa puis Räikkönen doublent Pérez qui a brièvement occupé le septième rang. En fin de parcours Rosberg rejoint les stands, à très faible allure car il est privé de limiteur de régime.
15e : Rosberg change de pneus ainsi que de volant. Mais lorsqu'il souhaite repartir il ne parvient pas à enclencher la première vitesse. Il s'échine avec les palettes de son nouveau volant, sans résultat. Après une inutile tentative de reprogrammation, il n'a plus d'autre choix que d'abandonner. Button a chaussé des pneus tendres et est reparti huitième entre Bottas et Vergne.
16e : Vergne reçoit une pénalité de cinq secondes pour être sorti de la piste afin de doubler un concurrent. Pérez et Gutiérrez changent leurs pneus.
17e : Hamilton mène devant Vettel (9.4.), Alonso (10.5s.), Ricciardo (14s.), Massa (22.1s.), Räikkönen (24s.), Bottas (26.9s.), Button (31s.), Vergne (33s.) et Magnussen (34.7s.).
18e : Gutiérrez abandonne à cause d'un problème électrique sur sa Sauber. Il sort en colère de sa voiture après avoir été accablé de soucis techniques durant le week-end.
19e : Chilton est victime d'une crevaison à l'avant droit et rejoint son stand pour changer le pneu défectueux.
20e : Alonso est très rapide et est revenu à moins de trois secondes de Vettel.
22e : Alonso se rapproche encore de Vettel : l'écart est de moins de deux secondes.
23e : Deuxième changement de pneus pour Massa qui prend des pneus tendres et repart onzième. Magnussen effectue un « tout-droit » au premier freinage.
24e : Bottas s'arrête chez Williams et chausse des pneus tendres. Il est gêné par Chilton lorsqu'il reprend la piste.
25e : Alonso effectue son second arrêt et chausse un train de pneus super-tendres. Il repart en cinquième position. Vergne change aussi de pneus et observe sa pénalité de cinq secondes. Massa et Bottas doublent Hülkenberg.
26e : Vettel s'arrête chez Red Bull et chausse des Pirelli tendres. Il reprend sa route derrière Alonso. Changements de pneus aussi pour Räikkönen et Hülkenberg. En fin de parcours Hamilton apparaît dans la voie des stands.
27e : Hamilton remet des pneumatiques super-tendres. Il repart deuxième et laisse le commandement provisoire à Ricciardo. Deuxième arrêt pour Magnussen.
28e : Ricciardo troque ses pneus tendres pour des super-tendres. Il reprend la piste en quatrième position. Quatre secondes séparent Hamilton et Alonso.
29e : Pérez, Grosjean et Kvyat sont en bagarre pour la douzième place. Un léger contact se produit entre le Français et le Mexicain. Celui-ci change ses pneus en fin de tour. Quant à Kvyat il est handicapé physiquement car il ne peut pas se désaltérer suite à une panne de sa pompe à eau.
30e : Hamilton mène devant Alonso (5.4s.), Vettel (11.7s.), Ricciardo (20.3s.), Button (29.1s.), Massa (31.1s.), Räikkönen (32s.), Bottas (34.7s.), Vergne (51.9s.) et Magnussen (52.8s.).
31e : Dans l'enchaînement des virages 8 et 9, Sutil ferme la porte à Pérez et le tasse contre le mur avant le virage à droite. Pérez casse son aileron avant dans cet incident, puis la pièce passe sous sa voiture dans la ligne droite suivante, répandant d'importants débris. La voiture de sécurité entre sur la piste.
32e : Alonso entre au stand Ferrari pour anticiper son troisième et dernier arrêt. Il chausse les pneus tendres. Button et Räikkönen mettent aussi leurs derniers trains de pneus tendres. Tandis que Räikkönen sort des stands, Vergne, surpris, coupe le premier virage et double ainsi le Finlandais, avant de lui rendre la place. Pérez est à son stand pour changer son aileron avant et repart dix-septième.
34e : Les commissaires ramassent les débris de la voiture de Pérez. Les retardataires sont autorisés à reprendre leur tour de retard.
36e : Sutil reçoit cinq secondes de pénalité pour avoir doublé Bianchi hors des limites de la piste.
38e : Après une longue et ennuyeuse neutralisation, la course reprend. Hamilton conserve le commandement devant Vettel, Ricciardo, Massa, Bottas, Button, Räikkönen, Vergne, Magnussen, Kvyat, Hülkenberg, Sutil, Maldonado, Grosjean, Bianchi, Pérez, Ericsson et Chilton.
39e : Hamilton s'envole : en deux tours il s'est constitué une avance de quatre secondes sur Vettel. Il réalise le meilleur tour de la course : 1'50''417'''.
41e : Sutil rentre au garage Sauber après une chute de pression d'eau. Les deux voiture suisses sont hors course.
43e : Hamilton mène devant Vettel (12.4s.), Ricciardo (14.6s.), Alonso (16.4s.), Massa (20.9s.), Bottas (23.5s.), Button (24.4s.), Räikkönen (25.8s.), Vergne (26.6s.) et Magnussen (27s.).
44e : Bagarre entre Maldonado, Grosjean et Pérez pour la douzième place. Vergne s'arrête à son stand pour son dernier changement de pneus.
45e : Pérez effectue un quatrième arrêt et met des pneus des super-tendres. Il se retrouve 17ème.
46e : Magnussen est à la peine : à cause d'une surchauffe son baquet lui brûle le derrière et sa pipette contient de l'eau bouillante... Il effectue un ultime passage aux stands et, comme Pérez, chausse les gommes les plus tendres.
48e : Hamilton a vingt secondes d'avance sur Vettel. Il doit encore passer aux stands pour mettre les pneus tendres. Bottas, Button et Räikkönen sont roues dans roues, en bagarre pour la sixième place.
50e : Hamilton mène devant Vettel (23.3s.), Ricciardo (27.9s.), Alonso (28.8s.), Massa (40.2s.), Bottas (46.2s.), Button (46.8s.), Räikkönen (48.3s.), Hülkenberg (49.2s.) et Maldonado (53.5s.). Vergne, Magnussen et Pérez, dotés de pneus frais, remontent sur les Lotus de Maldonado et de Grosjean.
52e : Hamilton entre aux stands pour mettre des pneus tendres. Malgré une opération rapide, Vettel s'empare du commandement et Hamilton ressort au niveau de Ricciardo.
53e : Après une courte lutte, Hamilton conserve la deuxième place face à Ricciardo. Vettel est désormais en tête (pour la première fois en 2014 !) mais Hamilton le rattrape très facilement. Button s'arrête après le virage n°14. A cause d'une panne d'électricité, la McLaren a tout simplement cessé de fonctionner.
54e : Hamilton est juste derrière Vettel. Il le déborde dans la ligne droite précédant le virage n°7 et retrouve ainsi la première place. Vergne double Maldonado en mettant deux roues hors piste. Malgré tout le voici neuvième.
55e : Hamilton a pris trois secondes de marge sur Vettel. Button disparu, Bottas est maintenant menacé par Räikkönen. Les pneus du pilote Williams sont très dégradés. Magnussen prend la dixième place à Maldonado.
56e : Vettel, Ricciardo et Alonso se tiennent maintenant en une seconde et demie. Plus loin, Bottas, Räikkönen, Hülkenberg et Vergne forment un peloton. Ils sont rattrapés par Magnussen et par Pérez qui s'est défait des Lotus.
58e : Vergne reçoit à nouveau cinq secondes de pénalité pour sa manœuvre litigieuse sur Maldonado. Il double tout de même Hülkenberg.
59e : Vergne est déchaîné en cette fin d'épreuve : il dépasse Räikkönen puis Bottas et se retrouve sixième. Pérez est tout aussi rapide : il double Magnussen puis Hülkenberg.
60ème et dernier tour : Les deux heures de course étant atteintes, cette boucle sera la dernière. Pérez attaque Räikkönen dans la courbe n°6 mais ce dernier lui ferme la porte. Mais Pérez s'impose quelques mètres plus loin. Pour Bottas c'est l'hallali : il roule avec les mêmes pneus depuis le 24ème tour et ceux-ci tombent en lambeaux. Pérez, Räikkönen, Hülkenberg et Magnussen le doublent.
Lewis Hamilton remporte sa septième victoire de la saison, la deuxième de sa carrière à Singapour. Il précède Vettel dont c'est le meilleur résultat de la saison. L'Allemand finit juste devant Ricciardo et Alonso. Massa termine cinquième après une course sans histoire. Vergne et Pérez, les deux furieux de la fin de la soirée, sont d'héroïques sixième et septième. Les derniers points sont pour Räikkönen, Hülkenberg et Magnussen. Bottas n'est qu'onzième et précède Maldonado, Grosjean, Kvyat, Ericsson, Bianchi et Chilton.
Jean-Éric Vergne a été si véloce dans les derniers tours que sa pénalité de cinq secondes ne lui fait même pas perdre de position.
Après la course
Pour la première fois en sept éditions du Grand Prix de Singapour, aucun pilote n'a touché le mur durant la course.
Le podium est des plus joyeux, animé par un Eddie Jordan qui décidément a manqué sa vocation d'histrion. Sebastian Vettel n'est cependant pas au mieux car il souffre de crampes d'estomac, conséquence de la déshydratation.
Kevin Magnussen, légèrement brûlé par son baquet, est emmené au centre médical du circuit pour des examens de routine.
La victoire de Hamilton et l'abandon de Rosberg marquent peut-être un tournant de la saison puisque le Britannique récupère la première place du championnat du monde. Il n'avait plus occupé cette position depuis le Grand Prix d'Espagne. Il précède de trois points son équipier et rival. Avec soixante points de retard sur Hamilton, Ricciardo peut encore espérer demeurer dans la lutte pour le titre jusqu'à Abou Dhabi. Alonso récupère la quatrième place du classement aux dépens de Bottas.
Chez les constructeurs, tandis que Mercedes se dirige tranquillement vers le titre, Force India-Mercedes s'empare de la cinquième place au détriment de McLaren-Mercedes.
Tony