Transfert 1995-1996
Présentation de l'épreuve: adieux des tifosi à Alesi et Berger
Après bien des polémiques avec les écologistes italiens, la CSAI est finalement parvenue à réaliser des travaux de grande envergure sur l'autodrome de Monza. La sécurité a été renforcée: sans toucher au dessin du circuit, les virages ont été rapprochés de son centre afin de ménager de plus grandes zones de dégagement. Pour cela, il a fallu abattre quelques arbres, au grand dam des « Verts »... L'asphalte a par ailleurs été entièrement refait. Ces efforts sont récompensés par un grand succès populaire: Giorgio Di Lorenzo, le directeur de l'autodrome, annonce avoir vendu 140 000 billets sur trois jours. Hélas, cela ne suffit pas à contenter Bernie Ecclestone: « Le contrat avec Monza se termine en 1996. Il faudra tout renégocier en 1997 », prévient le Grand Argentier. « L'organisation de cette épreuve est un désastre. Les sponsors ne sont pas bien traités. On ne gère pas la Formule 1 comme une épreuve de Formule 3 ! » Un bon coup de semonce pour mettre la pression des Italiens un peu trop avides d'indépendance vis à vis de la FOCA...
Vendredi 8 septembre, Bernie Ecclestone réunit les membres de la Commission F1 de la FIA pour faire avaliser son projet de calendrier pour 1996. L'affaire n'est pas mince car, alors que le président de la FOCA a déjà eu du mal à imposer un programme de 17 dates en 1995, il annonce 18 Grands Prix pour l'année suivante ! En effet, deux nouvelles épreuves sont prévues en Autriche (Zeltweg) et en Indonésie (Sentul), le GP d'Europe au Nürburgring étant mis « en réserve ». Ron Dennis et plusieurs autres managers font part de leur opposition à une campagne aussi longue. Le problème est résolu quelques jours plus tard lorsque les organisateurs du GP d'Autriche déclarent forfait pour 1996: le nouveau tracé issu de l'ancien Österreichring ne sera pas prêt à temps. D'autre part, les constructeurs débattent d'un autre projet d'Ecclestone: permettre aux « top teams » d'engager une troisième monoplace afin de pallier à l'amincissement du plateau. L'idée est battue en brèche lorsqu'est soulevée la possibilité de faire appel à un sponsor supplémentaire. « C'est inimaginable, cela ferait perdre toute identité commerciale à nos écuries », souligne Christian Contzen de Renault Sport.
Durant tout le week-end, chaque apparition de Gerhard Berger et de Jean Alesi suscite de vives émotions dans les tribunes. Les deux hommes disputent leur dernier Grand Prix en rouge et peuvent mesurer l'immense popularité qu'ils ont acquise au cours de leurs années passées à Maranello. Gerhard Berger - qui détient le record de courses disputées sur Ferrari (90) - se prête volontiers au jeu des bains de foule et signe des centaines d'autographes. « Pour moi, aucun Monza ne vaudra celui de 1988 », rappelle-t-il avec nostalgie. Cette année-là, Berger s'était imposé en Italie devant son équipier Michele Alboreto quelques semaines après la mort de Commendatore. Jean Alesi soigne pour sa part sa morosité en scrutant les nombreuses banderoles à sa gloire brandies aux quatre coins du circuit par les tifosi. « Mieux vaut un Alesi aujourd'hui que 100 Schumacher demain », proclame ainsi une pancarte placée juste devant la murette Ferrari. À noter enfin que les tifosi se trouvent (provisoirement) un autre chouchou, David Coulthard, que quelques rumeurs envoient chez Ferrari en 1996, au cas où Alain Prost lui chiperait le baquet qui lui semblait promis chez McLaren.
L'arrivée de Michael Schumacher chez Ferrari suscite en effet des réactions contrastées parmi les supporteurs italiens. Beaucoup le traitent de « mercenaire » sans âme, dépourvu du charisme de leurs chers Berger et Alesi. La plupart des sorties de la Benetton-Renault n°1 sont ainsi saluées par des salves de sifflets ou des « Va fan c*** ! ». « Papy Silvio », un ami d'Enzo Ferrari plus qu'octogénaire devenu la « mascotte » de la Scuderia, traduit en quelques mots le sentiment général: « Je n'arrive pas à admettre l'arrivée de Schumacher. Plus qu'un pilote, Jean Alesi était un fils pour la Scuderia. Sa passion pour Ferrari est sans borne, comme son talent. Nous avons beaucoup de peine. Je ne comprends pas cette décision ! »
Après avoir mené à bien les négociations entre Michael Schumacher et Ferrari, Niki Lauda quitte ses fonctions de « consultant spécial » auprès de Luca di Montezemolo, officiellement afin de se concentrer sur la direction de sa compagnie d'aviation. Mais en fait, il semblerait que les foucades et autres dérapages verbaux irréfléchis de l'Autrichien aient fini par lasser les pontes de Fiat à Turin. Interrogé à ce sujet, Clay Regazzoni tacle son vieil « ami » : « Niki était chargé des relations entre les pilotes, or il s'est fâché avec Alesi et avec Berger... Je ne vais pas pleurer pour lui ! »
Ligier a eu chaud: son commanditaire historique, la régie française du tabac, la Seita, a bien failli passer à la concurrence, à savoir chez Jordan-Peugeot. Olivier Panis, courtisé par la marque au Lion, devait être du voyage. Mais Guy Ligier veille et a fait fonctionner ses vieilles « amitiés » au sommet de l'État. Finalement, les Bleus continueront à fumer des Gitanes en 1996. Néanmoins, le montant du budget qui leur sera alloué n'est pas encore fixé et Elf, l'autre partenaire incontournable, récemment privatisé, se fait prier pour renouveler son contrat. Tom Walkinshaw et Bruno Michel ont donc encore du pain sur la planche pour boucler le budget 96 de l'écurie de Magny-Cours.
Abandonné par Ferrari au profit de Shell, Agip annonce à Monza son retrait de la Formule 1 à l'issue de la saison. Le pétrolier italien ne pouvait rivaliser avec son rival anglo-néerlandais qui a mis sur la table de Maranello pas moins de 50 milliards de lires (contre 17 milliards pour Agip en 1995...). Toutefois, son porte-parole Alberto Santevecchi affirme que ce retrait s'explique aussi par la nouvelle réglementation sur les carburants: « La FIA prive désormais tous les pétroliers de recherches avancées. Elle freine le progrès et nous interdit toute retombée. Nous ne pouvons plus nous distinguer. Cette politique d'essence banalisée ne nous correspond plus... » Par ailleurs, Agip laisse ses deux autres clients Minardi et Tyrrell sans fournisseur. Ces deux écuries pourraient se tourner soit vers Elf, soit vers Sasol qui équipe Arrows depuis cette année.
Comme chaque année, Ferrari met les petits plats dans les grands pour Monza en apportant quatre voitures. Alesi et Berger disposent chacun d'un mulet. Les 412 T2 reçoivent une évolution du V12 au cheval cabré ainsi que quelques retouches aérodynamiques. Patrick Head et Adrian Newey préparent une Williams FW17 « B » qui devrait apparaître à Estoril et est conçue autour d'une toute nouvelle boîte de vitesses. Jordan apporte de nombreuses évolutions à sa 195: un carénage des roues arrière, une prise d'air facilitant l'admission, un nouvel aileron arrière et un nouveau capot-moteur. La Sauber C14 est munie d'un extracteur corrigé offrant plus d'appui à l'arrière, ce qui autorise Frentzen à se parer d'un aileron très déchargé. Montermini teste sur sa Pacific un nouveau museau dépourvu de son remarquable « becquet ». Enfin, Forti reporte à Estoril l'utilisation de sa transmission semi-automatique.
Essais et qualifications
Vendredi matin, les tifosi patientent près d'une demi-heure avant de voir les pilotes prendre la piste, et pour cause: le tout nouveau bitume n'a pas absorbé les trombes d'eau qui se sont abattues au petit matin sur l'autodrome ! Un Coulthard très en verve réalise le meilleur chrono de la séance qualificative de l'après-midi, mais la pole se jouera lors de la deuxième manche du lendemain.
Samedi après-midi, les favoris prennent leur temps pour se lancer dans la bagarre puisqu'ils ne démarrent qu'au bout de vingt-cinq minutes, sous les sifflets d'un public agacé. Coulthard confirme sa domination de la veille et empoche sa deuxième pole position (1'24''462'''). Hill a commis deux fautes de pilotage, vendredi et samedi, et s'élancera seulement quatrième. En outre, il est victime samedi matin d'un fait rarissime: la rupture d'un moteur Renault. Schumacher (2ème) met beaucoup de temps à dénicher le bon « set-up » sur sa Benetton-Renault, mais il se hisse en première ligne, à une demi-seconde de Coulthard. Herbert (8ème) est une fois de plus très loin de son coéquipier. Les Ferrari (Berger 3ème, Alesi 5ème) ne pourront jouer la victoire qu'au hasard des circonstances, car le V12 italien est assez poussif. Barrichello (6ème) et sa Jordan-Peugeot devancent d'un seul millième la McLaren-Mercedes de Häkkinen (7ème). Leurs équipiers Blundell (9ème) et Irvine (12ème) sont plus loin. L'Irlandais de Jordan, fébrile, s'est signalé par deux sorties de route.
Chez Sauber-Ford, Frentzen (10ème) colle deux secondes à un Boullion (14ème) sur la sellette. Brundle (11ème) place sa Ligier-Mugen devant celle de Panis (13ème) qui est sorti deux fois dans les graviers. Papis réalise le 15ème chrono avec son Arrows-Hart et fait beaucoup mieux que le pauvre Inoue (20ème), auteur de quatre figures sur l'ensemble du week-end ! Les Tyrrell-Yamaha (Salo 16ème, Katayama 17ème) sont toujours instables et peu compétitives. Samedi noir pour Minardi: le matin, Lamy perd son aileron avant sur le sable de Lesmo puis, l'après-midi, Badoer exécute un tonneau après avoir heurté les glissières avant la chicane Ascari. Plus de peur que de mal pour l'Italien et le Portugais, respectivement 18ème et 19ème sur la grille. Du côté de Pacific, Montermini (21ème) devance le médiocre Lavaggi (24ème) de près de deux secondes. Moreno (22ème) place sa Forti devant celle de Diniz (23ème).
Coulthard espère transformer cette pole position en première victoire, d'autant plus qu'il a très mal vécu son abandon précoce en Belgique, alors qu'il menait l'épreuve. « Le secret, c'était d'attendre le dernier moment pour sortir avec le second train de pneus », explique-t-il au soir des qualifications. « Avec le nouveau bitume, l'adhérence était précaire et il fallait adopter un pilotage très coulé. J'espère que cela me sourira demain. »
Le Grand Prix
Alesi réalise le meilleur chrono de l'échauffement du dimanche matin. Le seul événement de la séance est une collision entre Montermini et Blundell qui n'empêchera pas ces deux pilotes de prendre le départ. L'après-midi, le ciel est plutôt couvert mais la météo ne prévoit pas d'averse. Les écuries prévoient de n'effectuer qu'un seul ravitaillement en course, exceptée Tyrrell qui arrêtera Salo et Katayama deux fois.
Stupeur lors du tour de formation: Coulthard se laisse surprendre par ses pneus froids à la sortie de la Variante Ascari et part en tête-à-queue dans le bac à graviers. Une erreur incroyable qui semble condamner la course de l'Écossais. Celui-ci revient aux stands clopin-clopant et le départ sera donné sans lui. Schumacher se retrouve donc virtuellement en pole position.
Départ: Débarrassées de Coulthard, les deux Ferrari de Berger et d'Alesi s'élancent très bien et menacent Schumacher, mais l'Allemand conserve l'avantage à la première chicane. Suivent Herbert, Hill (mal parti) et Häkkinen.
1er tour: Schumacher devance Berger, Alesi, Herbert et Hill. Papis se frotte à Katayama en quittant la Variante Ascari. Les deux pilotes partent en tête-à-queue et se retrouvent en travers de la piste. Montermini puis Moreno heurtent Papis alors que Boullion et Diniz pirouettent pour éviter le carnage.
2e: Berger déborde Schumacher sur la ligne de chronométrage. Mais la joie des tifosi est de courte durée car Roland Bruynseraede brandit le drapeau rouge: les monoplaces de Papis, Boullion et Montermini obstruent la piste à l'entrée du Rettifilo Centrale.
La course va être relancée pour la distance originelle de 53 tours. Cela permet à Coulthard de reprendre sa place en pole position au volant de son mulet: merci Papis ! Le jeune Italien grimpe aussi dans sa voiture de réserve, de même que Boullion qui partira depuis la pit-lane. Forti confie le mulet à Diniz: Moreno reste donc à pied. Le dimanche est aussi fini pour Montermini car Pacific n'a que deux voitures... Un second tour de formation est lancé au bout de quinze minutes. Cette fois, Coulthard franchit prudemment la chicane Ascari...
Deuxième départ: Coulthard démarre parfaitement et demeure premier. Berger déborde Schumacher à la petite chicane au prix d'un freinage appuyé. Suivent Hill, Alesi et Herbert. Aucun accrochage à signaler à l'arrière.
1er tour: Berger se montre dans les rétroviseurs de Coulthard au premier Lesmo, sans le perturber. À l'issue de cette première boucle, Coulthard mène devant Berger, Schumacher, Hill, Alesi, Herbert, Barrichello, Häkkinen, Brundle et Irvine. Lamy abandonne après avoir cassé son différentiel.
2e: Berger met la pression sur Coulthard. Schumacher et Hill sont dans le sillage de l'Autrichien. Salo se frotte à Panis à la Variante della Roggia. Le Français traverse les graviers et le Finlandais part en tête-à-queue, avant de rejoindre la piste bon dernier.
3e: Sept dixièmes seulement séparent Coulthard et Berger. Barrichello prend la sixième place à Herbert.
4e: Le groupe Coulthard - Berger - Schumacher - Hill se tient en trois secondes. Alesi est un peu en retrait. Häkkinen dépasse Herbert.
5e: Coulthard mène devant Berger (0.7s.), Schumacher (2.2s.), Hill (2.7s.), Alesi (3.7s.), Barrichello (7.2s.), Häkkinen (8.4s.), Herbert (9.9s.), Irvine (12s.) et Brundle (15.6s.).
7e: Alesi recolle au quatuor de tête. En résistant à Boullion, Lavaggi part en tête-à-queue à la première chicane et se retrouve à cheval sur le vibreur. Le Sicilien doit abandonner.
8e: Une grue intervient pour tracter la Pacific de Lavaggi. Par bonheur, cette action s'effectue très promptement. Victime d'une crevaison lente, Brundle se fait successivement dépasser par Blundell et Frentzen.
9e: Coulthard prend un peu de champ sur Berger., menacé par Schumacher et Hill. Plus loin, Häkkinen est aux trousses de Barrichello.
10e: Coulthard devance Berger (2.5s.), Schumacher (4.1s.), Hill (4.7s.), Alesi (6.1s.), Barrichello (12.3s.), Häkkinen (14s.), Herbert (15s.), Irvine (20s.), Blundell (27.5s.), Frentzen (28s.) et Brundle (32.5s.).
11e: Le pneu arrière-gauche de Brundle éclate après la Curva Grande. L'Anglais regagne péniblement les stands et répand ainsi de la gomme sur l'ensemble du circuit. Salo opère un premier ravitaillement. Il était remonté au 14ème rang.
12e: Coulthard adopte son rythme de croisière et possède trois secondes d'avance sur le groupe emmené par Berger. Brundle se gare à son box et ne peut repartir car sa jante est trop endommagée. Sa cavalcade sur trois roues lui vaudra une réprimande des commissaires sportifs.
14e: Coulthard aborde la Variante della Roggia lorsqu'il perd soudain l'arrière de sa Williams et part en toupie dans les graviers. Les tifosi sautent de joie: Berger est en tête ! Coulthard parvient à s'extraire avec peine du dégagement et tente de regagner les stands.
15e: Coulthard pénètre dans la pit-lane et... manque son emplacement, ce qui oblige ses mécaniciens à le tirer jusqu'au box. Puis ils détectent un bris de roulement de roue à l'arrière de la Williams. Le malchanceux Écossais doit renoncer. Ravitaillement de Katayama.
16e: Berger précède Schumacher (1.2s.), Hill (1.8s.), Alesi (4.7s.), Barrichello (14.5s.), Häkkinen (17s.), Herbert (18s.), Irvine (25.3s.), Blundell (31.8s.) et Frentzen (32.7s.).
18e: Les leaders doublent les premiers attardés. Berger compte maintenant plus de deux secondes d'avance sur Schumacher. Hill est sur les talons de l'Allemand, mais il est quelque peu gêné par Katayama.
20e: Schumacher et Hill perdent un peu de temps derrière Salo qui tarde à s'écarter. En fin de tour, Berger devance Schumacher (3.3s.), Hill (3.6s.), Alesi (4.9s.), Barrichello (16.4s.), Häkkinen (19.1s.) et Herbert (20s.).
21e: Panis arrive sur la première chicane lorsque sa pédale de frein va au plancher. Le Français part en tête-à-queue et se retrouve sur le bord extérieur de la piste. Les commissaires évacuent le plus vite possible la seconde Ligier éliminée. Ravitaillement de Diniz.
23e: Schumacher et Hill sont englués dans le trafic, ce qui permet à Alesi de les recoller.
24e: Schumacher et Hill arrivent sur Inoue avant la Variante della Roggia. L'Allemand contourne l'Arrows par la gauche, l'Anglais par la droite. Hélas, Inoue n'a pas vu ce dernier et se déporte vers la Williams. Hill retarde donc son freinage au maximum pour le doubler. Il y parvient, mais lorsqu'il arrive au tournant, Schumacher a déjà pris la corde devant lui. Il n'a pas le temps de réagir, bloque ses roues et tape le derrière de la Benetton. Les deux monoplaces échouent en tête-à-queue dans le bac à sable ! Schumacher quitte aussitôt son habitacle pour enguirlander Hill qui l'a percuté involontairement pour la deuxième fois de la saison. Les tifosi sont très heureux: les deux Ferrari sont en tête du GP d'Italie et Berger signe le meilleur tour (1'26''419''').
25e: Berger effectue en fin de tour un long ravitaillement de quinze secondes. Il ressort cinquième et laisse Alesi en tête de l'épreuve. Handicapé par ses pneus froids, Berger est ensuite doublé par Irvine et Blundell. Frentzen et Badoer opèrent un pit-stop. Un tracteur retire les voitures accidentées de Hill et Schumacher.
26e: Alesi observe son unique ravitaillement (14.7s) et ressort devant Irvine et Berger. L'Avignonnais est donc le leader virtuel de l'épreuve. Sur la piste, Barrichello est premier devant Häkkinen. Blundell passe aux stands et repart derrière Frentzen.
27e: Barrichello fait halte au stand Jordan (15.6s.) et repart sixième derrière les Ferrai. Häkkinen est le nouveau leader. Il précède Herbert et Irvine. Badoer sort du second Lesmo en sous-virage complet. Sa Minardi se met à l'équerre et percute de face le rail interne. L'Italien parvient à se garer sur le bas-côté.
28e: Häkkinen et Irvine effectuent un « refueling » et repartent respectivement quatrième et septième. Herbert est en tête de la course. Boullion et Inoue reprennent aussi de l'essence et des pneus neufs. Katayama rejoint son stand pour un second ravitaillement mais ne parvient pas à repartir. Il lui faudra cinq minutes pour remettre les gaz et reprendre la piste.
30e: Très rapide et jouissant d'une piste claire, Herbert a creusé un écart de plus de trente secondes sur Häkkinen et Barrichello, ses rivaux immédiats. Il ravitaille en fin de tour (12.5s.) et ressort en troisième position. Les deux Ferrari retrouvent les commandes de l'épreuve.
31e: Alesi mène devant Berger (0.9s.), Herbert (8.7s.), Häkkinen (14s.), Barrichello (15.5s.), Frentzen (28.8s.), Irvine (31s.), Blundell (31.4s.), Salo (-1t.), Papis (-1t.) et Inoue (-1t.).
33e: Une mini-caméra fixée sur l'aileron arrière de la Ferrari d'Alesi reprend sa liberté et percute la suspension avant-gauche de Berger avant la Variante della Roggia. Le triangle est brisé net. Berger est contraint de se garer dans l'herbe en catastrophe. Dans son malheur, l'Autrichien a une chance inouïe, car il aurait pu recevoir cette caméra pesant plus d'un kilogramme en pleine tête...
34e: Alesi mène maintenant devant Herbert, relégué à huit secondes. Häkkinen et Barrichello sont en bagarre pour la troisième place.
35e: À la lutte avec Papis pour la huitième place, Salo part au large au second Lesmo et sort dans les graviers. Il parvient néanmoins à rejoindre la piste sans perdre de position.
37e: L'intervalle entre Alesi et Herbert est stable. Le Français semble se diriger vers la victoire. Häkkinen prend un peu de champ sur Barrichello. Blundell pourchasse Irvine.
39e: Alesi est leader devant Herbert (7.1s.), Häkkinen (14.7s.), Barrichello (20s.), Frentzen (33.7s.), Irvine (36.1s.), Blundell (37.3s.), Papis (-1t.), Salo (-1t.) et Boullion (-1t.).
41e: Alesi s'inquiète car il sent une faiblesse sur son train arrière. Son ingénieur de piste lui demande pourtant de continuer. Irvine est victime d'une chute de pression d'huile. Il gare dans la pelouse sa Jordan fumante.
42e: Barrichello perd peu à peu l'usage de sa boîte à cause d'un souci hydraulique. Il perd trois secondes au tour sur Häkkinen.
43e: Alesi garde sept secondes d'avance sur Herbert. Frentzen dépasse Barrichello qui rentre aux stands en fin de boucle. Salo prend la septième place à Papis.
44e: Barrichello met pied à terre avec une pompe hydraulique hors d'usage. Salo et Papis sont en bagarre pour la sixième place, mais Boullion remonte sur eux.
45e: L'arrière de la Ferrari d'Alesi racle le bitume. Le Français s'engouffre dans l'allée des stands. Ses mécaniciens découvrent que le roulement de sa roue arrière-droite s'est grippé. La course est terminée pour Alesi qui voit encore une victoire lui échapper, au grand désespoir des Italiens. Herbert récupère les rênes de l'épreuve.
46e: À sept tours du but, Herbert est en tête, dix-huit secondes devant Häkkinen. Frentzen est troisième à trente-deux secondes.
48e: Herbert est premier devant Häkkinen (17s.), Frentzen (30s.), Blundell (36s.), Salo (-1t.), Papis (-1t.), Boullion (-1t.), Inoue (-1t.), Diniz (-2t.) et Katayama (-6t.).
50e: L'intervalle est stable entre Herbert et Häkkinen. Plus loin, cinq secondes séparent Frentzen de Blundell. Papis détient la sixième place et le point qui va avec, mais Boullion le menace dangereusement.
52e: Dix-huit secondes séparent Herbert de Häkkinen. Boullion déborde Papis et s'empare de la sixième position.
53ème et dernier tour: Johnny Herbert remporte son deuxième Grand Prix de la saison. Häkkinen finit deuxième et offre à McLaren son premier podium en 1995. Frentzen se classe troisième: c'est le premier podium de l'écurie Sauber. Blundell est quatrième. Salo, cinquième, ouvre enfin le compteur de Tyrrell. Le dernier point revient à Boullion. Suivent Papis, Inoue, Diniz et Katayama.
Après la course
Très déçus par l'issue de l'épreuve, les tifosi n'envahissent pas moins la piste comme chaque année, mais n'adressent que des applaudissement polis aux occupants de ce podium inattendu, Johnny Herbert, Mika Häkkinen et Heinz-Harald Frentzen. Herbert savoure ce deuxième succès de la saison qui rappelle à tous qu'il peut être autre chose que le « larbin » de Michael Schumacher. Il reconnaît toutefois bien volontiers avoir joui d'une chance assez inouïe puisqu'il a profité de cinq abandons devant lui ! « Je vais finir par croire à mes chances au championnat ! » s'esclaffe le blondinet rigolard.
C'est un bon après-midi aussi pour Mika Häkkinen dont la deuxième place sauve une saison jusqu'ici bien misérable. En outre, il s'agit du premier podium pour d'un moteur Mercedes depuis quarante ans et le GP d'Italie 1955 ! Ce beau résultat ne fait pas oublier les faiblesses de la MP4/10, décidément ratée. En conférence de presse, Häkkinen joue les petits rigolos: lorsqu'un journaliste lui demande comment est sa tenue de route, il répond par une quinte de toux ! Puis, plus sérieusement, il vante les progrès du V10 Mercedes-Ilmor: « Les gens de Mercedes ont fait un super boulot de développement. En outre, nos problèmes de fiabilité semblent résolus, et cela est sans doute le grand enseignement de ce Grand Prix. » Norbert Haug partage cet enthousiasme: « Depuis le GP d'Angleterre, nous avons fait de réels progrès en matière de performance, en prenant certains risques. Cela nous a valu beaucoup de pannes. Mais cela semble appartenir au passé. Pas à pas, nous nous rapprochons de l'objectif que nous nous sommes fixés. » Puis, Norbert Haug et Wolfgang Schattling sortent des bouteilles de champagne qu'ils conservaient dans le motor-home Mercedes. « Pas question ! » s'interpose Ron Dennis. « Nous ne boirons le champagne qu'à la première victoire ! »
Le doublé que Ferrari entrevoyait à la mi-course s'est transformé en double abandon. Gerhard Berger a eu très chaud en recevant sur sa suspension une caméra FOCA détachée de la dérive droite de l'aileron arrière de Jean Alesi. Un mécanicien se serait appuyé sur cet élément lors du ravitaillement de l'Avignonnais, ébranlant ainsi la fixation. Berger sait qu'il a frôlé la mort: « Je revois ce machin foncer sur moi, c'est effrayant... Cela s'est passé si vite que je ne pouvais rien faire. J'ignore combien cela pèse, mais je constate que ça a cassé une biellette ! Si elle m'était arrivée sur le casque... Je préfère ne pas y penser ! » Jean Alesi est en revanche dévasté: pour la seconde année consécutive, une panne le contraint à l'abandon alors qu'il était en passe de triompher à Monza, devant « son » public ! « L'an dernier, si on m'avait mis un pistolet entre les mains, je me serais tirer une balle dans la tête ! » se souvient-il. « Mais on m'a fait comprendre que m'isoler n'était apparemment pas ce qu'il fallait faire. Alors cette fois, je reste... On me dit d'arrêter de rêver ! Mais moi, je ne rêve que de cette victoire à Monza... Je crois que je suis maudit... »
Encore un week-end décevant pour Williams-Renault qui rentre d'Italie avec un zéro pointé. La déception est très vive pour David Coulthard qui, pour la deuxième fois de suite, perd une victoire qui lui tendait les bras à cause d'un bris mécanique. « Et pourtant, nous avions la meilleure voiture », soupire Frank Williams. Quant à Damon Hill, il n'est bien sûr question que de son énième accrochage avec Michael Schumacher, dont il apparaît pleinement responsable. L'Allemand se fait un malin plaisir de lui enfoncer la tête sous l'eau, dénonce sa maladresse et, contre toute vérité, l'accuse de fourberie: « Damon ne cherche qu'à m'éliminer ! Il ne sait rien faire d'autre ! » explose Schumi. Pour sa défense, Hill accable Taki Inoue, coupable d'avoir louvoyé devant sa Williams. Ce qui n'explique pas son freinage trop tardif. « Cet incident est complètement ridicule, stupide... Je suis en colère, très déçu. Comme Michael... » balbutie le malheureux Britannique. Dans un esprit de revanche consécutif à l'incident de Spa, Michael Schumacher et Flavio Briatore déposent une réclamation contre le pilote de la n°5 qui écope d'une course de suspension avec sursis pour avoir provoqué cette collision.
Réprimandé par les officiels, vilipendé par la presse, peu soutenu par son équipe, le pauvre Damon Hill quitte Monza sans demander son reste. Avec quinze longueurs de retard sur Schumacher à cinq courses de la fin du championnat, ses espoirs de titre mondial s'amenuisent de plus en plus. Au classement des constructeurs, Benetton-Renault file vers le titre et compte désormais vingt points d'avance sur Williams-Renault.
Tony