Nigel MANSELL
 N.MANSELL
Williams Judd
Alain PROST
 A.PROST
McLaren Honda
Alessandro NANNINI
 A.NANNINI
Benetton Ford Cosworth

466th Grand Prix

XXX Gran Premio de España
Sunny
Jerez de la Frontera
Sunday, 2 October 1988
72 laps x 4.218 km - 303.696 km
Affiche
F1
Coupe

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La Formule 1 et le désert andalou

La troisième édition de ce Grand Prix d'Espagne à Jerez est comme les précédentes un « flop » complet. Les pilotes évoluent devant des tribunes vides. Les quelques dix mille spectateurs sont des VIP en goguette conviés par Marlboro, Camel, Repsol ou Coca Cola. Il semblerait que l'Andalousie se moque de la Formule 1 comme de sa première corrida. En fait, cette région pauvre et rurale, frappée par un chômage endémique, ne peut pas drainer un public nombreux. L'entrée coûte 5000 pesetas, soit à peu près le cinquième du salaire mensuel de l'Andalou moyen... Face à ce désastre, Pedro Pacheco, le maire de Jerez et créateur de l'épreuve, a sollicité une aide du gouvernement régional pour boucher son déficit. En outre, ce GP d'Espagne porte le label FOCA. Bernie Ecclestone perçoit ainsi la moitié des revenus de la billetterie, des droits TV, des villages VIP etc. Comme cette épreuve ne produit aucun bénéfice, il ne s'embête pas à assurer sa promotion ! D'où l'absence de public.

 

Cette situation ne peut évidemment pas durer et Ecclestone envisage de transférer le Grand Prix à Barcelone en 1991. Les Catalans ont en effet débloqué des fonds pour se doter d'un circuit ultra-moderne, en marge de l'organisation des Jeux olympiques de 1992.

 

Luis Pérez-Sala, ou les pesetas de l'hidalgo

Si le GP d'Espagne suscite fort peu d'intérêt, en revanche la presse ibérique ne parle que de Luis Pérez-Sala, propulsé au rang de héros national. Le beau Catalan n'a pourtant pas démontré grand-chose au volant de la Minardi. Il a certes nettement éclipsé en début d'année son compatriote, le malheureux Adrián Campos, mais souffre aujourd'hui de la comparaison avec Pierluigi Martini. Comme Campos, Pérez-Sala n'est pas là pour ses beaux yeux. Il bénéficie des largesses de Lois, le géant du jeans, et est surtout apparenté à une richissime famille de banquiers, les Valls Taberner. Néanmoins, les Pérez-Sala ont la course dans le sang puisque les trois frères de Luis ont aussi été pilotes ! Vice-champion d'Europe de F3000 en 1987, Sala est un pilote intelligent, sérieux, combatif, et qui plus est très accessible. Les journalistes espagnols le considèrent comme leur premier « vrai pilote » de F1 depuis Alfonso de Portago.

 

Pérez-Sala endosse ce rôle de précurseur. « Le sport automobile espagnol est encore à l'âge de pierre », explique-t-il. « Nous n'avons pas de promotion, pas de sponsors, pas de constructeurs ni d'écuries privées. Les choses évoluent pourtant, lentement mais sûrement. » Le bel hidalgo revient aussi sur les progrès de Minardi: « C'est une équipe volontaire, bien structurée. Elle vient de régler ses problèmes de fiabilité, elle s'attaque maintenant aux performances [...] Ce qui nous manque, c'est un bon directeur technique. Non pas que les nôtres soient incompétents, loin de là. Mais ils sont seuls. Il nous manque un coordinateur. » C'est pour cela que Giancarlo Minardi a sollicité en vain Gérard Ducarouge avant qu'il ne file chez Larrousse.

 

Tension chez McLaren: Senna boude Prost

Nelson Piquet atterrit à Jerez de la Frontera aux commande d'un... hélicoptère. Son fameux Learjet est en effet tombé en panne. Résultat: le Carioca a mis sept heures pour rallier l'Andalousie, en provenance de Monte-Carlo. En sortant de l'aérodrome, il croise son compatriote Ayrton Senna. Bien sûr, les deux hommes s'ignorent. Senna ne pardonnera jamais à Piquet ses insinuations injurieuses d'avant-saison. Le triple champion du monde observe son compatriote et commente la situation de celui-ci: « Il s'est passé quelque chose à Estoril. Selon moi, Ayrton est psychologiquement atteint. Il est ainsi fait qu'il ne supporte pas la moindre insatisfaction. Chez lui, toute contrariété, même mineure, revêt des proportions insoupçonnables et tourne au drame. Il se méfie de tout le monde. »

 

Après l'incident portugais, la tension monte entre les deux cow-boys de McLaren. Alain Prost et Ayrton Senna s'évitent. « Ils avaient abattu le mur de méfiance qui les séparait. Maintenant ce mur existe à nouveau. Ayrton a disjoncté à Estoril. Alain est resté correct de bout en bout. Les choses deviennent compliquées à gérer », admet un proche de Ron Dennis. Dans la semaine qui sépare les Grands Prix du Portugal et d'Espagne, Senna accuse Prost d'avoir violé leur « pacte de non-agression » en le poussant lors du feu vert à Estoril. Le Français ne lui répond pas. Par expérience, il sait qu'il est inutile de rentrer dans ce genre de controverses. Le Brésilien a quant à lui écopé d'un avertissement de la part de la FISA. Jean-Marie Balestre débarque en Espagne avec l'intention de faire « régner l'ordre et la paix ». De manière impartiale ? Beaucoup de journalistes en doutent...

 

Une fois dans le paddock, Senna, plus introverti que jamais, fuit la presse et s'enferme avec ses mécaniciens qui lui sont dévoués corps et âme. « Je n'ai rien à dire aux journalistes. Je suis trop concentré sur mon objectif ! » s'agace-t-il. Ron Dennis rend quant à lui publique la consigne qu'il a donnée à ses deux pilotes: « Le premier d'entre vous qui effectuera une manœuvre trop audacieuse vis-à-vis de l'autre et qui mettra ainsi en péril le rendement de l'écurie se verra rappeler à l'ordre par radio. » Rien de bien effrayant. Dennis est certainement allé plus loin...

 

Présentation de l'épreuve

Au championnat, les données sont les mêmes depuis trois Grands Prix. Senna s'adjuge le titre mondial s'il gagne encore une fois, ce qu'il tarde à réussir...

 

Benetton a fait finalement jouer l'option qui la liait à Johnny Herbert après que ses médecins l'ont déclaré apte à conduire d'ici le mois de décembre. Grièvement blessé aux jambes, le jeune Anglais va suivre un long séjour de physiothérapie et de remise en forme chez Tony Mathis, le kinésithérapeute autrichien de Michele Alboreto. La titularisation d'Herbert ferme la porte de Benetton à Eddie Cheever qui était le second choix de Peter Collins. Celui-ci restera donc une saison supplémentaire chez Arrows, même s'il a connu cette année beaucoup moins de réussite que Derek Warwick. Du reste USF&G, le principal sponsor d'Arrows, souhaitait la présence d'un pilote américain dans cette équipe.

 

Michele Alboreto n'a toujours pas de baquet pour l'an prochain. Peter Sauber et Mercedes lui auraient proposé le volant d'une des belles Sauber C9 qui combattent les Jaguar XKR en Groupe C. L'offre est séduisante, mais Alboreto sait qu'il est difficile de revenir en Formule 1 une fois qu'on a mis un pied dehors.

 

AGS tient son nouveau directeur technique. Il s'agit de Claude Galopin, transfuge de GBDA, l'équipe de F3000 dirigée par Jean-Paul Driot et Gilles Gaignault, où il s'était recasé après avoir quitté Ligier. Les Bleus n'ont quant à eux toujours pas recruté d'ingénieur...

 

Goodyear apporte ici de nouveaux pneus arrière qui plongent pilotes et ingénieurs dans la perplexité. Les petites écuries, privées d'essais, vont mettre beaucoup de temps à comprendre leur fonctionnement.

 

Essais et qualifications

Jerez est un circuit tortueux où, peut-être plus encore qu'à Estoril, les moteurs atmosphériques peuvent concurrencer les turbos. Néanmoins les McLaren-Honda monopolisent une fois de plus la première ligne. Senna réalise la pole position, mais cette fois il ne précède Prost que de soixante-sept millièmes. Les autres machines du camp des turbos manquent cruellement de grip. Les Ferrari (Berger 8ème, Alboreto 10ème) sont en retrait à cause de leur moteur trop brutal. Les Lotus (Piquet 9ème, Nakajima 15ème) peinent à exploiter les nouveaux Goodyear et sont très instables. Les Arrows-Megatron ne parviennent pas à faire monter leurs gommes en température, et le résultat est calamiteux: Warwick se classe 17ème, Cheever 25ème !

 

Les machines aspirées sont à la fête. Mansell place sa Williams-Judd au troisième rang, à deux dixièmes seulement de Senna. Son coéquipier Patrese est septième. Les Benetton-Ford (Boutsen 4ème, Nannini 5ème) sont bien placées également. En revanche, les March-Judd de Capelli (6ème) et de Gugelmin (11ème) auraient pu faire mieux avec de meilleurs réglages. Les Lola LC connaissent une légère embellie confirmée par les bons classements d'Alliot (12ème) et de Dalmas (16ème). Streiff est treizième avec l'AGS, ce qui est sa meilleure qualification depuis longtemps. On peut souligner l'exploit du jeune Larini, excellent quatorzième au volant d'une Osella à moteur Alfa Romeo turbo !

 

Malgré une indigestion assez sévère, Caffi est fidèle au poste et se classe dix-huitième avec la BMS-Dallara. Il côtoie les Ligier d'Arnoux (19ème) et de Johansson (21ème). Les Minardi (Martini 20ème, Pérez-Sala 24ème) sont en queue de classement avec la Tyrrell de Palmer (22ème), la Rial de de Cesaris (23ème), incapable d'utiliser les nouveaux Goodyear, et enfin l'Eurobrun de Modena (26ème). Victime de plusieurs pannes vendredi matin, Tarquini n'est pas parvenu à pré-qualifier sa Coloni. Schneider, Larrauri, Bailey et Ghinzani sont éliminés le lendemain.

 

Riccardo Patrese agresse Julian Bailey

Samedi après-midi, Riccardo Patrese conclut un tour rapide lorsqu'il tombe sur la très lente Tyrrell de Julian Bailey, en passe de revenir aux stands. Le néophyte ne regarde pas dans ses rétroviseurs et gêne considérablement l'Italien. Celui-ci perd ses nerfs: à la sortie d'un droit serré, il se porte à sa hauteur et lui fait une méchante queue de poisson ! Les roues se touchent. La Tyrrell se soulève avant d'atterrir dans les graviers. L'incident cause évidemment du remous dans le paddock. Patrese et Bailey s'expliquent bruyamment. Les commissaires convoquent tout d'abord le jeune Anglais en compagnie de Ken Tyrrell et de Jonathan Palmer. Ils reprochent aux deux équipiers de bouchonner trop régulièrement leurs concurrents, que ce soit en course ou aux essais, et leur adressent un avertissement.

 

Évidemment, Ken Tyrrell ne l'entend pas de cette oreille et s'emporte. La saison de son écurie est déjà suffisamment calamiteuse qu'il n'y a pas besoin d'en rajouter ! Finalement, les commissaires sanctionnent aussi Patrese pour son comportement irresponsable et lui infligent une amende de dix mille dollars. Ce qui est insuffisant pour certains pilotes qui déplorent que le bouillant Riccardo soit retombé dans ses vieux travers et auraient aimé qu'il soit plus sévèrement rappelé à l'ordre. Quant à l'intéressé, il s'estime dans son bon droit et accuse Bailey de l'avoir gêné volontairement.

 

Le Grand Prix

Lors de l'échauffement, Mansell réalise le meilleur chrono devant Boutsen. Globalement, les pilotes de monoplaces à moteur suralimenté craignent pour leur consommation, tandis que les autres redoutent l'usure excessive des pneumatiques. Un vent important balaie le circuit, ce qui va gêner les pilotes qui déplorent déjà une adhérence précaire.

 

Départ: Prost prend un superbe envol et s'empare immédiatement du commandement. Mansell double Senna dont le moteur a connu une hésitation. Le Brésilien se déporte vers la droite mais Mansell le bloque et reste devant au premier freinage. Derrière les trois premiers se trouvent Capelli, Boutsen et Patrese. Johansson est poussé par Palmer contre l'Eurobrun de Modena et y endommage son aileron avant.

 

1er tour: Boutsen tente de faire l'intérieur à Capelli au second freinage. Celui-ci lui claque la porte au nez et arrache l'aileron de la Benetton. Cela profite à Patrese qui double les deux voitures par l'extérieur. Cheever effectue un tête-à-queue et repart poussé par les commissaires. Prost mène devant Mansell, Senna, Patrese, Capelli, Nannini, Berger, Alboreto, Piquet et Alliot. Boutsen entre aux stands pour changer sa calandre, imité par Palmer. Arnoux abandonne car ses coulisses de gaz sont grippées par de la poussière.

 

2e: Senna prend l'aspiration derrière Mansell devant les stands. Il se jette à l'intérieur et passe, mais il est contraint d'élargir sa trajectoire. Mansell reste à la corde et reprend l'avantage sur son adversaire.

 

3e: Prost a deux secondes d'avance sur Mansell et Senna. Patrese, Capelli et Nannini sont roues dans roues. Johansson s'arrête chez Ligier pour remplacer son aileron avant.

 

4e: Senna lâche prise derrière Mansell. Sa voiture est mal équilibrée et, comme au Portugal, son ordinateur lui signale une surconsommation.

 

5e: Prost devance Mansell (2.3s.), Senna (6.5s.), Patrese (7.1s.), Capelli (7.2s.), Nannini (7.9s.), Berger (8.5s.) et Alboreto (10.8s.). Palmer abandonne car un de ses radiateurs a été percé par Johansson.

 

7e: Capelli tente de faire l'intérieur à Patrese dans la montée vers le premier virage, mais le Padouan le tasse contre la bordure.

 

8e: Mansell revient à une seconde de Prost. Senna bouchonne maintenant le quatuor Patrese - Capelli - Nannini - Berger.

 

9e: Mansell est à six dixièmes de Prost. Va-t-il partir à l'assaut du Français ?

 

10e: Prost mène devant Mansell (0.7s.), Senna (10s.), Patrese (11.1s.), Capelli (11.3s.), Nannini (11.9s.), Berger (12.3s.), Alboreto (16s.), Piquet (18s.), Gugelmin (23s.), Alliot (23.7s.) et Nakajima (27s.). Larini renonce suite à un bris de suspension avant. Il occupait une flatteuse treizième place.

 

11e: Comme l'an dernier à Jerez, Senna contient un peloton de plusieurs voitures. Patrese s'en rapproche dans les courbes, mais en ligne droite le turbo Honda est intouchable.

 

12e: Prost réagit et porte son avance sur Mansell à deux secondes. Sur la Lola d'Alliot, une pierre se loge dans un étrier de frein et découpe la jante avant gauche. Le Vovéen regagne les boxes.

 

14e: Patrese décide de prendre son mal en patience derrière Senna, ce qui exaspère Capelli qui se montre très régulièrement dans les rétroviseurs de son compatriote. Alliot reprend la piste après avoir fait démonter son écope de freins. Il ne va désormais utiliser que le frein moteur.

 

15e: Prost précède Mansell (1.9s.), Senna (15s.), Patrese (15.6s.), Capelli (15.9s.), Nannini (16.4s.), Berger (16.9s.) et Alboreto (19s.). Nakajima part en toupie dans le gazon. Il cale et doit abandonner.

 

16e: Alboreto se gare face au muret des stands, moteur en panne après une fuite d'eau. Martini quitte aussi l'épreuve avec une boîte de vitesses bloquée.

 

17e: Le moteur de Streiff explose dans la dernière portion du tracé. Le Français se range dans la pelouse.

 

18e: Prost laisse Mansell à deux secondes. Senna maintient une longueur entre lui et Patrese. Capelli et Nannini sont dans le sillage immédiat de la Williams.

 

20e: Prost précède Mansell (1.8s.), Senna (17.7s.), Patrese (18.2s.), Capelli (18.5s.), Nannini (19.3s.), Berger (20s.), Piquet (26s.), Gugelmin (28s.), Caffi (41s.) et Warwick (45s.).

 

21e: Pressé par Capelli, Patrese se montre plus entreprenant envers Senna, en vain.

 

22e: Mansell repart à l'attaque. Son retard sur Prost n'est plus que de neuf dixièmes.

 

23e: Mansell signe le meilleur chrono depuis le départ: 1'29''567'''.

 

24e: Les McLaren-Honda résistent aux Williams-Judd. Prost contient Mansell pendant que Senna repousse les assauts de Patrese.

 

25e: Prost est en tête devant Mansell (0.3s.), Senna (20.3s.), Patrese (21.2s.), Capelli (21.5s.), Nannini (22.6s.) et Berger (23.4s.).

 

26e: Réponse de Prost à Mansell: un temps d'1'29''268'''.

 

28e: Prost et Mansell tombent sur un peloton d'attardés mais restent soudés l'un à l'autre. Plus loin, Capelli s'agite toujours dans les rétroviseurs de Patrese.

 

29e: Beaucoup de pilotes redoutent une usure prématurée de leurs pneumatiques. Nannini stoppe ainsi chez Benetton pour monter des gommes neuves.

 

30e: Mansell passe sous la barre d'1'29''. Berger change de pneus en neuf secondes. En fin de tour, Prost devance Mansell (1.5s.), Senna (28.7s.), Patrese (29.5s.), Capelli (29.7s.), Piquet (39.3s.), Gugelmin (43s.), Nannini (46s.), Berger (50s.), Caffi (51s.), Warwick (53s.) et de Cesaris (53.6s.).

 

31e: Nannini s'attribue le meilleur tour en course (1'28''576'''). Changement de pneus pour Piquet (7.9s.) qui redémarre derrière Warwick et de Cesaris.

 

32e: Une seconde et demie sépare Prost et Mansell. Senna retient toujours Patrese et Capelli. Berger prend la huitième place à Caffi.

 

34e: Très rapide avec ses pneus neufs, Nannini s'empare de la sixième place aux dépens de Gugelmin. De Cesaris dépasse Caffi.

 

35e: Mansell paraît vouloir préserver ses enveloppes et rend désormais trois secondes à Prost. Senna roule à trente-cinq secondes de là, tandis que Capelli semble décidé à en finir avec le « bouchon Patrese ».

 

36e: Capelli déborde Patrese « au forceps » dans le premier secteur du circuit. Il se lance maintenant aux trousses de Senna qui a pris deux secondes d'avance.

 

37e: Prost est devant Mansell (2.1s.), Senna (35.1s.), Capelli (35.6s.), Patrese (39.2s.), Nannini (47s.) et Gugelmin (51s.). Cheever change de gommes. Il est dix-neuvième et dernier.

 

38e: De Cesaris s'arrête dans l'herbe, moteur fumant suite à une rupture de pompe à huile.

 

39e: Capelli rattrape Senna et le déborde par l'extérieur dans l'ultime épingle. Voici l'Italien troisième.

 

40e: Prost est premier devant Mansell (5s.), Capelli (37s.), Senna (40s.), Patrese (40.4s.), Nannini (46s.), Gugelmin (51s.), Berger (1m. 02s.), Caffi (1m. 16s.), Warwick (1m. 18s.) et Piquet (1m. 19s.).

 

41e: Mansell laisse filer Prost car ses pneus sont à la toile. Senna perd le contact avec Capelli et reste sous la pression de Patrese.

 

42e: Piquet attaque Warwick pour le gain de la dixième place. L'Anglais escalade une bordure et glisse vers les graviers. Son moteur tourne encore mais la coque de l'Arrows est endommagée. Il choisit de renoncer.

 

43e: Capelli se dépense pour combler son retard sur Mansell. Il lui a déjà repris quatre secondes.

 

45e: Prost compte cinq secondes et demie de marge sur Mansell, trente-deux secondes sur Capelli. Nannini est le plus rapide en piste.

 

46e: Mansell arrive chez Williams pour chausser des pneus frais. Le moteur de Capelli meurt dans un nuage de fumée. Le jeune Italien, fort déçu, laisse glisser sa March dans le gazon.

 

47e: Mansell retrouve le circuit trente-cinq secondes derrière Prost, mais douze secondes devant le duo Senna - Patrese. Ceux-ci sont désormais menacés par le retour-éclair de Nannini.

 

48e: Nannini déborde Patrese au sommet de la ligne droite des stands. Il s'en prend ensuite à Senna et le dépasse par l'intérieur dans la dernière épingle. Piquet prend la huitième place à Caffi.

 

49e: Patrese attaque Senna au premier freinage mais le Pauliste lui coupe la trajectoire. En fin de boucle, Prost entre aux stands pour changer tranquillement ses pneus (8.3s.). Il conserve le commandement, vingt secondes devant Mansell.

 

50e: Senna s'arrête à son tour chez McLaren pour chausser un train de pneus neufs. Il repart septième entre Berger et Piquet.

 

51e: Prost devance Mansell (18.5s.), Nannini (28.8s.), Patrese (34.9s.), Gugelmin (45.2s.), Berger (50s.), Senna (55s.) et Piquet (1m. 06s.).

 

52e: Mansell ne ménage pas son effort et reprend environ une seconde à Prost à chaque passage. Berger et Senna fondent sur Gugelmin qui a choisi de ne pas stopper.

 

54e: Berger dépasse Gugelmin.

 

55e: Senna prend à son tour l'avantage sur Gugelmin. Berger est sa prochaine cible. Le Pauliste attaque fort bien qu'il ne soit pas assuré d'avoir assez d'essence pour achever l'épreuve. Boutsen remonte à la neuvième place en doublant Caffi.

 

56e: Prost est premier devant Mansell (12s.), Nannini (28s.), Patrese (38.5s.), Berger (49.7s.), Senna (51.5s.), Gugelmin (53s.) et Piquet (1m. 17s.).

 

57e: Mansell s'octroie un nouveau record (1'27''999''') et revient à dix secondes de Prost..

 

58e: Mansell perd l'usage de son embrayage. Il réduit sa cadence et renonce donc à tout espoir de remonter sur Prost. Senna s'empare de la cinquième position aux dépens de Berger.

 

60e: Prost réalise le meilleur chrono du jour: 1'27''845'''. Senna se lance aux trousses de Patrese qui roule avec des vieux pneus.

 

61e: Prost précède Mansell (19s.), Nannini (38s.), Patrese (49s.), Senna (56s.), Berger (57s.), Gugelmin (1m. 09s.), Piquet (1m. 23s.), Boutsen (1m. 24s.) et Caffi (1m. 27s.).

 

62e: Cheever revient aux stands pour changer de gommes après une crevaison.

 

63e: Mansell concède désormais vingt-et-une secondes à Prost. Senna est dans la roue de Patrese.

 

64e: Johansson voit une de ses roues avant se détacher à cause de fortes vibrations qui ont fragilisé son châssis. Le Suédois parvient à immobiliser sa Ligier sur le bas-côté.

 

65e: Senna dépasse facilement Patrese sur la ligne de chronométrage et s'empare de la quatrième place. Cheever regagne son garage. Sa voiture talonne et la coque est endommagée. La tenue de route est trop hasardeuse et l'Américain préfère se retirer.

 

66e: Prost devance Mansell (24s.), Nannini (39.2s.), Senna (55.3s.), Patrese (56s.), Berger (1m. 01s.) et Gugelmin (1m. 11s.). Plus loin, Boutsen est sur les talons de Piquet.

 

68e: Revenu en trombe derrière Patrese, Berger tente de prendre l'aspiration avant le premier virage. L'Italien se défend avec vigueur. L'Autrichien plonge à la corde pour le surprendre mais il est déporté vers l'extérieur. Patrese le « croise » et reprend sa position.

 

70e: Prost précède Mansell de vingt-sept secondes, Nannini de quarante secondes. Senna est au bord de la panne sèche. Patrese et Berger se placent dans son sillage.

 

71e: Patrese a semé Berger qui doit économiser de l'essence. Il est dorénavant blotti derrière Senna, prêt à le doubler à la moindre défaillance.

 

72ème et dernier tour: Alain Prost décroche sa 34ème victoire en Formule 1. Mansell termine deuxième après une course brillante. Nannini finit troisième et grimpe sur son deuxième podium de la saison. Senna sauve in extremis sa quatrième place devant Patrese et Berger. Gugelmin, Piquet, Boutsen, Caffi, Dalmas, Pérez-Sala, Modena et Alliot rallient également l'arrivée.

 

Après la course: Senna accuse Honda

Ayrton Senna tombe en panne sèche quelques mètres après avoir franchi la ligne. Cette fois, son ordinateur de bord disait vrai... Voilà qui n'améliore pas son humeur. « Je ne comprends pas, dit le Brésilien. Généralement, en début de saison, Prost et moi consommions sensiblement pareil. Cette fois l'écart est énorme. Notre système électronique étant très sophistiqué, je ne possède pas de réponse précise. On peut penser à une série de choses. J'ai même une idée, pas très claire. Je préfère donc ne rien dire. Et garder la tête froide. » Senna sous-entend ainsi qu'Honda le désavantagerait au profit de Prost... Il n'en dira pas davantage et, très las, s'envole pour Brésil le soir même.

 

Qu'est-ce qui a permis à Alain Prost de moins consommer et de bénéficier de performances supérieures ? Le Français a une idée sur la question: « Durant les essais et le warm-up, j'ai essayé différentes configurations de ce que je voulais et je suis parti dans des directions opposées en mettant l'accent sur une consommation moins critique. Je me suis ainsi aperçu qu'en adoptant un peu plus d'appui, je gagnais un peu d'essence. Mon arme est peut-être de pouvoir peaufiner le « truc » qui fait la différence plutôt que de m'acharner à décrocher la pole... » Et une pique supplémentaire à destination de son équipier...

 

Pour ne rien arranger, Honda sème le trouble après la course par un communiqué de presse pour le moins ambigu rédigé par Osamu Goto: « Honda est prêt, pour ces deux derniers Grands Prix, à donner à ses pilotes une égale chance de vaincre. » Qu'est-ce à dire ? Que ce n'était pas le cas jusqu'ici ? Goto refuse de commenter cette phrase litigieuse. Les imaginations s'enflamment...

 

En tout cas, ce Grand Prix ne change pas grand-chose à la situation au championnat du monde. Senna demeure à un succès du titre mondial, et Prost doit toujours enchaîner les victoires pour lui souffler cette couronne. « Je ne m'accorde que 30 % de chances » déclare le Français, prudent. Enfin, cette treizième victoire de l'année permet à McLaren de dépasser son propre record de douze premières places décrochées en 1984.

Tony