Mika HAKKINEN
 M.HAKKINEN
McLaren Mercedes
Michael SCHUMACHER
 M.SCHUMACHER
Ferrari
Ralf SCHUMACHER
 R.SCHUMACHER
Williams BMW

660. Großer Preis

LXXI Gran Premio d'Italia
Sonnig
Monza
Sonntag, 10. September 2000
53 Runden x 5.793 km - 307.029 km
Affiche
F1
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Une fonde anti-Mosley ?

Le 30 août, Max Mosley réunit à Londres les chefs d'équipes pour dévoiler les réformes qui vont entrer prochainement en vigueur. D'abord, l'essence réfrigérée sera bannie dès le GP des Etats-Unis. Puis le quota des pneus alloués pour chaque Grand Prix sera augmenté en 2001 afin de permettre aux voitures de davantage tourner en essais libres. En outre, Mosley accède au désir des équipes de réduire les essais privés qui seront interdits en novembre et décembre. Par ailleurs, une pause de trois semaines sera accordée au mois d'août afin de permettre aux personnels de souffler un peu. En revanche, les qualifications ne reviendront pas le vendredi, comme le souhaitait Bernie Ecclestone, et les Grands Prix ne seront pas non plus ramassés sur deux jours.

 

Cependant plusieurs managers s'élèvent contre la politique de Max Mosley en matière d'aides électroniques. Après avoir lancé en 1999 la guerre aux logiciels et programmations frauduleuses, le président de la FIA, face à l'ingéniosité d'experts en informatique qui seront toujours plus malins que ses propres techniciens, fait machine arrière et annonce maintenant vouloir réintroduire l'anti-patinage ! C'en est trop pour certains patrons. Eddie Jordan, Ron Dennis et Frank Williams s'élèvent contre cette volte-face. Jordan est le plus virulent et lance à Mosley qu'il n'est plus le bienvenu sur les Grands Prix, tandis que Dennis suggère au président de la FIA de ne pas se représenter au terme de son mandat, fin 2001 ! Les débats virent à l'aigre, et Mosley dénonce dans la presse une tentative ridicule de « coup d'État » : « Est-ce que je me mêle de la direction de McLaren, moi ? Est-ce que je conseille à Dennis de démissionner ? Ce n'est pas à lui de décider qui dirige ou non la FIA ! » En tout cas, Mosley sera absent à Monza, mais son porte-parole Francesco Longanesi Cattani évoque une « tempête dans un verre d'eau ». Il rappelle que le président de la fédération est élu par les représentants de plus de cent fédérations à travers le monde et que par conséquent la voix des managers de F1 compte peu...

 

Présentation de l'épreuve

L'autodrome de Monza est pourvu cette année d'une toute nouvelle chicane au bout de la première ligne droite. Le tortueux enchaînement « gauche - droite, gauche - droite » mis en place en 1976 est remplacé par une chicane simple « droite - gauche », censée faciliter les dépassements et éviter les embouteillages, donc les accrochages. Au-delà du point de freinage se trouve en outre une large bande de bitume qui doit permettre aux pilotes en perdition d'éviter les concurrents et de regagner la piste. « C'est mieux pour le pilotage et pour la sécurité », note Jean Alesi. « L'échappatoire est désormais suffisante. Plus besoin également de chevaucher les bordures à chaque tour. Je pense qu'on pourra y passer à deux. »

 

Toutefois, cette nouvelle configuration ne fait pas l'unanimité. Certains pilotes comme Jarno Trulli ou Pedro de la Rosa prévoient ainsi un « carnage » au premier virage. « C'est ridicule, ridicule, insiste Trulli. On va passer de 360 à 60 km/h en quelques dizaines de mètres. Je suis sûr qu'il va y avoir un gros carton. Certains vont freiner tard, d'autres tôt. On arrivera beaucoup trop vite sur cette chicane et certains auront de mauvaises surprises. » « Selon moi, une dizaine de voitures vont tirer tout droit au départ ! Mieux vaudrait démarrer derrière la voiture de sécurité ! » renchérit Heinz-Harald Frentzen. « Ce n'est pas un virage digne d'un circuit de F1. Il est trop serré, trop étroit », ajoute David Coulthard. Ces avis négatifs sont tempérés par Michael Schumacher: « Certes, c'est assez étroit, mais nous devons être disciplinés. Nous ne devons pas nous comporter comme des kamikazes. » Pour une fois, Jacques Villeneuve opine avec son ennemi intime, mais avec sa mesure habituelle: « Ceux qui critiquent cette chicane sont des idiots ! Pour moi, elle est parfaite. Nous sommes des pilotes professionnels, prouvons-le ! »

 

Le paddock de Monza est aussi entièrement remanié. Naguère, les motorhomes étaient regroupés de façon à former une petite place centrale propice aux rencontres, une « Piazza del popolo ». Mais Bernie Ecclestone a décidé de tout chambouler pour caser les énormes installations de la télévision numérique. Voilà les motorhomes alignés à un mètre les uns des autres, formant un invraisemblable dédale. Bridgestone doit même installer ses camions de montage en dehors du paddock. Les mécaniciens chargés de monter les pneus sont donc contraints de franchir les portillons électroniques pour faire leur travail. Gare à qui égare son badge...

 

De toute évidence, Michael Schumacher joue gros à Monza. Tout d'abord, il n'a pas le droit de décevoir les tifosi qui attendent une victoire, mais surtout un titre mondial des pilotes dont Ferrari est privée depuis 21 ans. Mais il doit surtout se retrouver lui-même. Ses multiples accrochages au cours de l'été, sa défaite face à Mika Häkkinen à Spa, un désarroi visible ont terni son image, non seulement vis-à-vis des versatiles tifosi, mais aussi du public allemand. Après Spa, la chaîne RTL a publié un terrible sondage révélant que 66 % des Allemands considéraient Häkkinen comme « plus brave » que Schumacher. Ce dernier doit une revanche à ses fans. Et comme toujours, il s'est plongé dans un travail acharné, avec un programme d'essais intensifs à Fiorano. Il éprouve la dernière évolution du V10 Ferrari et des réglages visant à mieux maîtriser les gommes Bridgestone, le point faible de la F1-2000. Pour sa part, Jean Todt veille à ce que son champion soit préservé de toute pression médiatique et populaire au cours de ce week-end crucial.

 

Pour sa part, Mika Häkkinen, leader du championnat du monde, roule lors des essais privés à Monza, puis s'attarde à Woking, dans les ateliers de McLaren, pour un long débriefing avec Adrian Newey et tout le staff technique. Il est, parait-il, longuement question des effets de la nouvelle chicane. De retour à Monza pour le Grand Prix, Häkkinen affiche une stratégie limpide pour les quatre derniers Grands Prix: « enchaîner les victoires ». C'est en effet le meilleur moyen de décrocher sa troisième couronne de rang. De son côté, David Coulthard, qui concède 13 points à son équipier, s'agrippe à ses derniers espoirs de titre. « Je suis quand même le dernier pilote McLaren à avoir gagné ici, en 1997 », rappelle-t-il. L'Écossais a rejoint Monza depuis Monaco en hélicoptère avec comme passager invité Pedro Diniz. Selon ce dernier, Coulthard a passé son temps à éreinter Michael Schumacher...

 

Jeudi, pour la traditionnelle conférence de presse, Ricardo Zonta est invité à s'asseoir entre Mika Häkkinen et Michael Schumacher, une référence malicieuse au splendide dépassement réalisé par le premier sur le second à Spa dont le Brésilien fut le témoin privilégié. Toutefois, certains journalistes préfèrent revenir sur la défense très musclée qu'a opposée Schumacher à Häkkinen au freinage des Combes, un tour avant de se faire doubler. Régulièrement pris à parti pour son comportement en piste depuis des mois, l'Allemand peine à refréner son irritation: « Je cours en F1 depuis dix ans, j'ai connu Senna, Mansell et d'autres encore. Laissez-moi vous dire qu'il y aujourd'hui un meilleur esprit sportif qu'auparavant. Nous essayons d'établir des règles de conduite, de progresser dans ce domaine. Ce n'était pas le cas au début des années 90. » Crispé, Schumacher refusera toute autre question embarrassante. « Pour lui, Monza est vraiment cette année une très rude épreuve », constate Claudio Berro, porte-voix de la Scuderia.

 

Début septembre, Neil Ressler, responsable de Jaguar Racing, annonce que Luciano Burti sera le successeur de Johnny Herbert en 2001. Le jeune Brésilien a fait bonne impression lors de sa pige en Autriche, lorsqu'il a remplacé Eddie Irvine au pied levé, puis s'est montré nettement plus rapide que son concurrent, le pilote d'IndyCar Dario Franchitti, lors d'essais comparatifs organisés à Silverstone. Vice-champion de F3 britannique en 1999 avec le Paul Stewart Racing, Burti avait choisi de faire ses classes cette année comme essayeur chez Jaguar au lieu de rejoindre la F3000. Une stratégie qui s'avère payante. Néanmoins, il n'est qu'un second choix pour Jaguar qui rêvait en début de saison de mettre la main sur David Coulthard ou Heinz-Harald Frentzen. Après une première saison calamiteuse (trois points inscrits jusqu'ici), le félin doit revoir ses ambitions à la baisse...

 

La titularisation de Luciano Burti fait un malheureux en la personne d'Alexander Wurz qui, après avoir manqué le volant Sauber conquis par Nick Heidfeld, croyait pouvoir rejoindre Jaguar. L'Autrichien espérait que Wolfgang Reitzle, l'homme-orchestre de l'engagement de Jaguar en F1, serait sensible à sa nationalité autrichienne. Jaguar souhaite en effet percer en terre germanique. De fait, Reitzle avait soumis une offre de principe à Wurz. Mais celui-ci s'est illusionné. « Oui, nous aurions aimé un germanophone pour pénétrer le marché allemand, mais dans notre esprit, il s'agissait de Frentzen », lâche Reitzle. Néanmoins, Wurz devrait trouver un point de chute, puisque McLaren lui a proposé de succéder à Olivier Panis comme essayeur officiel.

 

Arrows s'apprête à perdre son aérodynamicien Eghbal Hamidy, recruté par Jordan pour remplacer Mike Gascoyne, parti chez Benetton. Mais Tom Walkinshaw refuse de laisser filer l'ingénieur iranien au motif que celui-ci aurait pris connaissance des plans de l'Arrows de l'année prochaine et que son contrat court jusqu'à fin 2001. Hamidy ne compte pas se laisser faire et pourrait porter l'affaire en justice. On peut comprendre que Walkinshaw refuse de laisser partir ce spécialiste des machines à faible appui, l'A21 de cette saison 2000 se révélant particulièrement efficace sur les circuits rapides, comme Monza.

 

Les essais préliminaires qui se déroulent à Monza début septembre sont marqués par un gros accident de Giancarlo Fisichella: suite à une rupture de frein avant, sa Benetton heurte les glissières à la Variante Ascari avec une rare violence. Le pilote italien, décidément abonné aux « cartons » en cet été 2000, s'en tire avec des contusions multiples et un ligament de la cheville droite enflammé. Un moindre mal. Le Dr. Watkins astreint Fisichella à un repos complet de cinq jours afin qu'il puisse participer à son Grand Prix national.

 

McLaren comme Ferrari amènent ici quatre voitures, deux de course et deux mulets pour chacun de leurs pilotes. Les MP4/15 reçoivent leur configuration aérodynamique minimale d'Hockenheim, agrémentée d'entrées d'air pour refroidir l'ensemble. Ferrari opte pour le diffuseur à bord plat inauguré en Allemagne, couplé à un aileron ultra-fin. Les autres équipes sont aussi gréées au minimum, à l'exception de Williams qui utilise des ailerons assez épais. Cette fois, toutes les BAR sont munies d'une direction assistée. Enfin, Minardi éprouve en course un nouveau différentiel hydraulique à contrôle électronique.

 

Essais et qualifications

Vendredi, Barrichello réalise le meilleur chrono (1'25''057''') des premiers essais libres devant M. Schumacher et Trulli. McLaren vit une mauvaise journée. Häkkinen perd la matinée à cause d'une panne de transmission et un bris de triangle de suspension expédie Coulthard dans les graviers à Lesmo. Samedi matin, Ferrari et McLaren peaufinent leurs réglages en vue des qualifications. M. Schumacher réalise le meilleur temps (1'23''904'''). Frentzen endommage sa Jordan dans une sortie.

 

Les tifosi exultent ce samedi après-midi: les Ferrari monopolisent la première ligne ! M. Schumacher a cravaché pour décrocher sa 29e pole position (1'23''770'''), un souffle devant un Barrichello très incisif (1'23''797'''). Chez McLaren-Mercedes, Häkkinen (3e) n'est pas très content de son châssis et concède 2/10es à Schumacher. Coulthard (5e) avoue ne pas être parvenu à tirer la quintessence de sa machine. Villeneuve met en valeur la puissance de sa BAR-Honda en décrochant une superbe quatrième place, à moins d'une demi-seconde de la pole. Zonta (17e) était proche de son équipier avant qu'une panne de boîte de vitesses le coupe dans son élan. Les Jordan-Mugen sont bien qualifiées si l'on considère que Trulli (6e) a rencontré des soucis électriques et que Frentzen (8e) a été gêné par de la Rosa. Déception chez Williams-BMW: R. Schumacher (7e) commet quelques erreurs et Button (12e) aurait aimé bénéficier de davantage d'appui.

 

Fisichella conduit sa Benetton en 9e position malgré un sous-virage assez intense. Frappé dans la matinée par un problème d'alimentation, Wurz obtient le 13e temps avec le mulet. Les Arrows-Supertec sont en forme sur ce tracé rapide. De la Rosa (10e) précède Verstappen (11e) qui perd du temps à cause d'un souci hydraulique. Les Jaguar-Ford (Irvine 14e, Herbert 18e) sont très en retrait, notamment à cause de freins défaillants. Les Sauber-Petronas (Salo 15, Diniz 16e) sont trop lentes pour briller ici. Les Prost-Peugeot (Alesi 19e, Heidfeld 20e) manquent à la fois de motricité et de grip. Enfin, les Minardi sont larguées dans les lignes droites à cause de leur piètre cavalerie. Gené (21e) précède Mazzacane (22e), stoppé par une coupure électrique.

 

Le Grand Prix

Häkkinen et M. Schumacher ménagent leurs montures lors du warm-up, ce qui permet à l'étonnant Zonta de signer le meilleur chrono (1'26''448'''). Coulthard sort de la route, de nouveau suite à une rupture de triangle de suspension.

 

L'après-midi, sous un chaud soleil, plus de 120 000 tifosi acclament les Ferrari en première ligne. Chacun espère que ce doublé en puissance se concrétisera en course. Toutefois, l'atmosphère est assez lourde: que va-t-il advenir à cette satanée première chicane ?... L'empilage prédit par les Cassandre aura-t-il lieu ? Côté pneus, les pilotes ont opté pour le composé « médium », c'est-à-dire tendre, proposé par Bridgestone. Un unique ravitaillement sera la norme.

 

Départ: M. Schumacher démarre bien, contrairement à Barrichello qui se fait doubler par Häkkinen et Coulthard, puis par Trulli au freinage. Mal parti, Villeneuve est seulement septième. Dans le peloton, Irvine manque son freinage et harponne Salo. Pour éviter ceux-ci, Diniz tire droit dans l'échappatoire et percute plusieurs panneaux publicitaires avant de revenir en piste. Irvine s'immobilise avec un train avant faussé. Alesi a calé et reste scotché sur la grille.

 

1er tour: Schumacher contient Häkkinen. Le peloton arrive à la Variante della Roggia. Peut-être surpris par un décalage de Barrichello attaquant Trulli, Frentzen oublie de freiner. Il percute l'arrière-gauche de la Ferrari et l'arrière-droit de l'autre Jordan. Les deux bolides jaunes se mettent à l'équerre. Celle de Trulli est projetée vers le rail externe, puis vers les graviers avant de mourir contre la rangée de pneus. Frentzen emboutit Coulthard qui va retrouver Barrichello dans le sable. Les roues et les débris volent dans tous les sens. Les poursuivants tentent de se frayer un chemin, mais de la Rosa touche Zonta, puis escalade la Jaguar de Herbert et part en tonneaux. Dans ses pirouettes, l'Arrows frôle le sommet de la McLaren de Coulthard et atterrit à l'envers tout près de la Ferrari de Barrichello. Face à ce carnage, Charlie Whiting envoie la voiture de sécurité.

 

2e: La Safety Car apparaît en piste. À la Variante della Roggia, les cinq pilotes accidentés sont sur pied, y compris de la Rosa, rapidement extrait de son Arrows. En revanche, à quelques dizaines de mètres de là, un pompier gît au sol, inconscient. Celui-ci a reçu sur la tête une roue folle provenant d'une Jordan. Le poste des commissaires de piste appelle aussitôt les secours. Salo et Diniz se succèdent au stand Sauber pour faire réparer leurs voitures. Heurté par de la Rosa, Zonta subit une crevaison et passe aussi aux stands. Herbert rejoint son garage sans aileron arrière et n'ira pas plus loin. Poussé vers les stands après son départ manqué, Alesi perd un tour car les commissaires ont malencontreusement placé sa boîte au point mort.

 

3e: Des véhicules interviennent à la Variante della Roggia pour retirer les épaves. Coulthard et Barrichello courent vers les stands dans l'espoir d'un drapeau rouge qui leur permettrait d'emprunter leurs mulets. Les médecins arrivent près du malheureux pompier et le découvrent en arrêt cardiaque. L'impossible est tenté pour le sauver, mais le choc reçu sur le crâne ne lui laisse hélas aucun espoir.

 

5e: Le dégagement de la piste se poursuit. Ignorants tout du drame, les pilotes préparent le redémarrage en gardant leurs pneus en température. M. Schumacher précède Häkkinen, Villeneuve, R. Schumacher, Fisichella, Button, Wurz, Verstappen, Gené, Heidfeld, Mazzacane, Diniz, Zonta, Salo et Alesi (qui compte un tour de retard).

 

7e: Salo a perdu son capot moteur et doit repasser aux stands pour refixer certains éléments de carrosserie.

 

8e: Le pompier blessé est évacué en ambulance, puis héliporté vers l'hôpital central de Milan dans un état désespéré. La direction de course maintient la voiture de sécurité, le temps que tous les débris soient balayés et que la barrière de pneus défoncée par Trulli soit remise en état.

 

10e: La piste est enfin dégagée. La voiture de sécurité éteint ses gyrophares et va s'effacer à l'issue du prochain tour.

 

11e: Alors que la Safety Car regagne les stands, M. Schumacher contient le peloton dans le Rettifilo Centrale. Il roule à son rythme et fait chauffer ses freins à deux reprises, obligeant ses poursuivants à décélérer. La seconde fois, l'Allemand donne un tel coup de frein qu'il surprend tout le monde. Button bifurque en catastrophe vers la gauche pour éviter la BAR de Villeneuve et lèche le rail avec sa roue arrière-gauche. Il revient en piste au moment où Schumacher appuie sur le champignon et relance la compétition. Button tente de se retrouver sa position, mais sa Williams refuse de tourner dans la Parabolica et atterrit dans la barrière de pneus.

 

12e: Le drapeau vert est agité. M. Schumacher prend une seconde et demie d'avance sur Häkkinen. Verstappen chipe la sixième place à Wurz. Zonta double Mazzacane et Diniz. Les commissaires évacuent la Williams de Button.

 

13e: M. Schumacher précède Häkkinen (2.1s.), Villeneuve (3.6s.), R. Schumacher (5.1s.), Fisichella (6s.), Verstappen (6.6s.), Wurz (8.5s.) et Gené (9.5s.). Zonta poursuit sa remontée et efface Heidfeld.

 

14e: Deux secondes et demie séparent Schumacher et Häkkinen. Irrésistible, Zonta dépasse Gené au premier virage, puis Wurz à la parabolique. Salo s'offre un « tout-droit » à la première chicane.

 

15e: Alors qu'il tenait le rythme d'Häkkinen, Villeneuve est trahi par son moteur qui coupe net après la deuxième chicane, sans doute suite à une défaillance électronique. Le Canadien se range dans les graviers. Verstappen déborde Fisichella à la première chicane.

 

16e: Décidément très rapide, Verstappen chipe la troisième place à R. Schumacher. Zonta fait l'extérieur à Fisichella au premier tournant. Heidfeld part en tête-à-queue à la seconde chicane et se retrouve à contresens en pleine piste. Sa Prost est rapidement dégagée.

 

17e: Zonta déboîte R. Schumacher sur la ligne de chronométrage. Le voilà quatrième. Plus loin, Salo remonte au neuvième rang.

 

18e: M. Schumacher est premier devant Häkkinen (3.3s.), Verstappen (11.1s.), Zonta (11.6s.), R. Schumacher (13.5s.), Fisichella (15s.), Wurz (18s.), Gené (19s.), Salo (22s.), Mazzacane (23s.), Diniz (24.5s.) et Alesi (-1t.).

 

19e: Zonta est aux trousses de Verstappen pour la troisième place. Il essaie de le doubler au premier virage. Le Hollandais freine tard et conserve l'ascendant.

 

21e: Zonta prend l'aspiration de Verstappen dans la ligne droite principale et s'impose au premier freinage. Mais le Néerlandais « croise » la BAR dans l'enchaînement, et les deux bolides réaccélèrent côte à côte. Grâce à sa meilleure traction, Zonta s'impose.

 

22e: M. Schumacher compte maintenant quatre secondes d'avance sur Häkkinen. Verstappen reste au contact de Zonta. Fisichella menace R. Schumacher sans pourvoir l'attaquer. Salo a doublé Gené.

 

24e: Zonta apparaît chez BAR pour un ravitaillement (7s.), met peu d'essence et repart en 11e position. Curieusement, BAR prévoit de le stopper une nouvelle fois.

 

25e: L'intervalle entre Schumacher et Häkkinen atteint cinq secondes. Salo dépasse Wurz à la première chicane, puis rejoint Fisichella.

 

26e: M. Schumacher précède Häkkinen (6.5s.), Verstappen (20.3s.), R. Schumacher (28s.), Fisichella (29s.) et Salo (29.3s.).

 

28e: Schumacher tourne deux à trois dixièmes plus vite que Häkkinen à chaque passage. Sept secondes les séparent. Zonta a perdu du temps en doublant Diniz, puis Mazzacane.

 

29e: Zonta déborde Gené au premier tournant et se retrouve huitième.

 

30e: Schumacher améliore le record du tour (1'26''008''') et repousse Häkkinen à huit secondes et demie. Salo opère son ravitaillement (11.4s.) et repart dixième. Mazzacane et Alesi passent aussi aux stands.

 

32e: M. Schumacher devance Häkkinen (9s.), Verstappen (27s.), R. Schumacher (33s.), Fisichella (36s.), Wurz (44s.) et Zonta (45s.).

 

33e: Verstappen apparaît chez Arrows pour remettre de l'essence et changer d'enveloppes (9.8s.). Il ressort entre Zonta et Diniz.

 

34e: Wurz défend sa sixième place devant Zonta. Gené est chez Minardi pour son unique pit-stop.

 

36e: M. Schumacher réalise son meilleur chrono (1'25''663'''). Il mène devant Häkkinen (9.5s.), R. Schumacher (40.5s.), Fisichella (43.4s.), Wurz (51.8s.), Zonta (52.5s.), Verstappen (58.8s.) et Diniz (1m.).

 

37e: M. Schumacher s'offre un travers sur la bordure extérieure du second Lesmo. Bloqué derrière Wurz, Zonta rejoint le stand BAR pour un second pit-stop (6.5s.). Il ressort devant Salo.

 

38e: Dix secondes séparent M. Schumacher et Häkkinen. Diniz effectue son unique ravitaillement et se relance entre Salo et Gené.

 

39e: Häkkinen est dans le trafic. Il perd quelques dixièmes à cause de Gené qui manque son freinage à la chicane.

 

40e: M. Schumacher pénètre aux stands pour son ravitaillement (7.2s.) et cède le commandement provisoire à Häkkinen.

 

41e: Häkkinen attaque et passe pour la première fois sous la barre d'1'26''. Il compte quatorze secondes d'avance sur Schumacher.

 

42e: Häkkinen entre aux stands à la fin de ce tour avec quinze secondes de marge sur son rival.

 

43e: Häkkinen effectue son ravitaillement (6.6s.). M. Schumacher reprend les commandes sous les clameurs des tifosi. Wurz se plie aussi à son unique pit-stop et parvient à repartir devant Zonta.

 

44e: R. Schumacher fait halte chez Williams pour ravitailler et conserve sa troisième place. Fisichella stoppe pour sa part chez Benetton et cale au redémarrage. Le Romain s'échine à relance son moteur, et n'y parvient que poussé par ses mécaniciens. Il perd ainsi plus d'une minute et tout espoir d'inscrire des points.

 

45e: Häkkinen cravache pour mettre la pression sur M. Schumacher. Il lui reprend une seconde dans ce tour.

 

46e: M. Schumacher précède Häkkinen (10s.), R. Schumacher (48s.), Verstappen (53s.), Wurz (1m. 02s.), Zonta (1m. 04s.), Salo (1m. 16s.), Diniz (1m. 22s.), Gené (-1t.), Mazzacane (-1t.), Fisichella (-1t.) et Alesi (-2t.).

 

48e: Häkkinen revient à huit secondes de M. Schumacher qui ménage sa mécanique. Bien plus loin, R. Schumacher a repoussé Verstappen à six secondes.

 

50e: Häkkinen boucle le meilleur tour de la course (1'25''595'''). Il concède un peu plus de six secondes à Schumacher.

 

52e: Cinq secondes séparent Schumacher et Häkkinen à un tour du but.

 

53e et dernier tour: Michael Schumacher remporte ce GP d'Italie. C'est la 41e victoire de sa carrière. Häkkinen se classe deuxième. R. Schumacher termine une nouvelle fois troisième. Verstappen (4e) donne à Arrows son meilleur résultat de la saison. Wurz (5e) marque ses premiers points en 2000. Zonta prend la sixième place. Suivent Salo, Diniz, Gené, Mazzacane, Fisichella et Alesi.

 

Après la course: les larmes de M. Schumacher

La marée rouge envahit la piste pour acclamer son héros retrouvé Michael Schumacher. Grâce à ce succès, son premier depuis trois mois, le pilote allemand revient à seulement deux points de Mika Häkkinen au championnat du monde, redonne confiance à Ferrari, mais surtout balaie des semaines de doute, parsemées d'incidents en piste, de polémiques stériles et de critiques en tous genres. L'ambiance sur le podium est à la fois électrique et poignante car la nouvelle de la mort du pompier blessé, Paolo Gislimberti, commence à se répandre. Du reste, cette 41ème victoire de Schumacher fait de lui l'égal du légendaire Ayrton Senna, aimé et regretté de tous, ce qui accroît encore une émotion palpable.

 

La conférence de presse qui suit le podium est mémorable. Interrogé sur sa victoire, Michael Schumacher, la gorge nouée, ne lâche que quelques mots: « Je ne dirais pas que je suis comblé... Ce n'est pas le mot juste. Je suis simplement heureux. Et épuisé... vidé. » Puis un journaliste évoque Ayrton Senna, qu'il rejoint au palmarès. « Cela représente beaucoup pour moi... » lâche Schumacher. Ses mâchoires se crispent, puis il fond en larmes, une main sur les yeux. L'assistance est interdite. Le « Kaiser », le « Baron rouge », le froid champion sans faille et sans faiblesse, craque. Mika Häkkinen, médusé, tapote la nuque de son rival. Les journalistes se tournent vers le Finlandais, mais lui-même est fort ému. Il ne balbutie que quelques mots avant de laisser la parole à Ralf Schumacher. Celui-ci, ébahi de voir son frère dans cet état, ânonne quelques banalités pour meubler, le temps que Michael se reprenne.

 

Les pleurs du champion allemand resteront sans explication. En tout cas, il ignorait à cet instant la mort du pompier: c'est son frère Ralf qui lui apprendra plus tard. Sans doute le souvenir d'Ayrton Senna a-t-il accru son émotion. Bien qu'il n'en laissât rien paraître à l'époque, Schumacher fut extrêmement touché par la disparition tragique du Brésilien qui s'est tué sous yeux à Imola le 1er mai 1994. Au point de songer à tout laisser tomber. Schumacher avait beaucoup d'admiration pour Senna, ce rival, cet adversaire, ce modèle aussi, qu'il aura finalement peu connu. Par ses larmes, le champion évacue aussi sans doute le stress, les doutes emmagasinés au cours de ce terrible été 2000 où il a semblé si proche de l'effondrement, surtout après ses deux accidents lors des GP d'Autriche et d'Allemagne. En butte à de violentes critiques, parfois excessives, voir cruelles, de la part de ses pairs et de la presse allemande, cet hyper-sensible s'est caparaçonné dans son personnage de champion hautain, voire dédaigneux. Une apparence, comme le démontre cette scène touchante. Mais que l'on ne compte pas sur ce pudique pour s'étendre: « Parfois, certaines questions ne réclament aucune réponse. Je ne veux pas entrer dans le détail de celle-ci. » En tout cas, par cette émotion sincère et saisissante, la popularité de Schumacher regrimpe en flèche. « Merci de nous avoir montré ton cœur » lui déclare le lendemain la presse allemande.

 

Mort de Paolo Gislimberti

Peu après l'arrivée tombe la nouvelle redoutée depuis l'accident du départ: le pompier blessé, Paolo Gislimberti, est mort, frappé par une roue détachée de la Jordan de Frentzen. Victime de traumatismes crânien et abdominal, le malheureux n'avait aucune chance de s'en tirer. Gislimberti, 33 ans, était pompier volontaire à Lavis, dans le Trentin. Passionné par le sport automobile, grand fan de la Scuderia Ferrari, il officiait depuis plusieurs années pour le Grand Prix d'Italie. Ses obsèques ont lieu à Lavis le 14 septembre 2000. Ferrari est représentée par Luca Badoer, Stefano Domenicali et Claudio Berro. Le cercueil de ce tifoso est recouvert d'un drapeau orné du cheval cabré. Gaston Mazzacane est le seul pilote en activité à faire le déplacement, même si Rubens Barrichello et Heinz-Harald Frentzen envoient une gerbe de 110 roses. Gislimberti laisse derrière lui une jeune veuve, Elena, enceinte de six mois, qui mettra au monde quelques semaines plus tard une fille posthume. À l'initiative de Luca di Montezemolo et Bernie Ecclestone, les pilotes se mobiliseront pour réunir une cagnotte de 50 000 dollars afin de subvenir aux besoins de la jeune mère.

 

Cette tragédie est le premier accident mortel en Formule 1 depuis les drames d'Imola en 1994. En ce qui concerne le décès du pauvre pompier, on ne peut qu'accuser la fatalité, car nul ne peut survivre au choc d'une roue lancée à plus de 200 km/h. En revanche, l'origine du terrifiant carambolage de la deuxième chicane donne matière à débat. Juste après celui-ci, Rubens Barrichello n'a pas de mots assez durs pour fustiger Heinz-Harald Frentzen:« J'étais derrière Jarno et je me suis décalé sur la gauche pour me préparer au dépassement. À peine étais-je arrivé à sa hauteur que je sens un coup à l'arrière. Frentzen avait dû déconnecter son cerveau. Ce n'est pas un problème de freins, c'est sa tête qui n'a pas fonctionné ! Selon moi, il est mis sous pression par Trulli et a voulu se le payer, mais il n'avait pas la place et a créé tout ce b*rdel. Ce qui est triste, c'est la mort du pompier. Il n'y était pour rien, lui ! » Frentzen présente une version légèrement différente: « J'étais derrière Barrichello lorsqu'il a changé de trajectoire et freiné brutalement, très tôt. Impossible de l'éviter. »

 

Quoiqu'il en soit, pas moins de six pilotes ont été éliminés dans cette seconde chicane. « J'avais pris un très bon départ, raconte David Coulthard. J'étais passé de la 5e à la 3e place. L'accident est venu derrière moi et soudain une voiture m'a embarqué... » À l'arrière, ce fut aussi le chaos. Pedro de la Rosa s'est envolé au-dessus de la Jaguar de Johnny Herbert. « Je venais juste de voir l'accident d'Irvine à la première chicane quand j'en ai vu un plus gros devant moi, narre l'Anglais. J'ai d'abord aperçu une roue volant à 30 mètres du sol, puis une Arrows qui me passait par-dessus. Cela s'est arrêté là. » De la Rosa peut s'estimer heureux d'être entier: non seulement il a subi une série de tonneaux, mais il a failli retomber en piqué sur la Ferrari de Barrichello ! « Il y avait tellement de fumée, de poussière et de débris que je n'ai rien vu, déclare le Catalan. Passé le nuage, je suis tombé sur Zonta et Herbert. J'ai tapé l'un des deux et je suis parti en tonneaux. Ma voiture s'est arrêtée les roues en l'air. Les commissaires sont parvenus très vite à la rétablir, je me suis détaché et j'ai rampé sur le gravier... Une chance d'être intact ! »

 

Bilan d'étape

Ce week-end marque aussi un tournant sportif dans ce championnat 2000. En effet, pour la première fois depuis le début de l'été, la Ferrari a nettement dominé la McLaren-Mercedes. Mika Häkkinen n'a jamais pu menacer Michael Schumacher. « Nous avions une bonne voiture, mais la Ferrari était meilleure encore, constate le Finlandais. Nous avons retouché un peu les ailerons lors de mon arrêt, mais il était trop tard, Michael avait course gagnée. » Pour sa part, David Coulthard, victime innocente du carambolage, fait une croix sur la couronne mondiale. « Je vais faire de mon mieux pour les dernières courses et repartir du bon pied la saison prochaine », lâche-t-il, amer. Au classement des pilotes, tout reste très ouvert puisque Häkkinen (80 pts) n'a que deux longueurs d'avance sur Schumacher (78 pts). Chez les constructeurs, Ferrari (127 pts) revient à quatre unités de McLaren-Mercedes (131 pts).

 

Le carnage du premier tour a aussi permis aux seconds couteaux de s'illustrer. Bien aidé par la puissante cavalerie du V10 Honda, Ricardo Zonta a effectué huit dépassements et aurait pu finir sur le podium si BAR ne lui avait pas imposé une stratégie inepte à deux arrêts. Malmené depuis quelques courses par Pedro de la Rosa, Jos Verstappen est quant à lui redevenu « the Boss » : sa quatrième place est le meilleur résultat d'une Arrows depuis 1998. Elle permet à l'équipe de Tom Walkinshaw de passer devant Sauber au classement des constructeurs. Verstappen aurait même pu finir troisième avec un peu de chance. Mais cette position est revenue à Ralf Schumacher qui assure de fait à Williams-BMW la troisième place du championnat des constructeurs, avec 14 points d'avance sur Benetton-Supertec.

 

Sources :

- https://www.autonews.fr/article/la-f1-va-aider-la-famille-de-paolo-6011

- Renaud de Laborderie, Le Livre d'or de la Formule 1 2000, Paris, Solar, 2000.

- Sport auto, octobre 2000

- Auto Hebdo, 13 septembre 2000

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