Fin juin 1999, la Commission européenne publie les résultats de son enquête longue de deux ans sur les agissements de la FIA et la gestion des droits commerciaux de la Formule 1 par Bernie Ecclestone. Comme on pouvait s'y attendre, le commissaire à la Concurrence Karel Van Miert éreinte les relations entre la pouvoir sportif et la Formula One Administration, nouvelle dénomination de la société ecclestonienne chargée de gérer l'aspect économique de cette discipline. Selon lui, FIA et FOA violent les articles n°85 et 86 des normes européennes en matière de concurrence. Quatre infractions sont relevées :

1) La FIA utilise son monopole dans l'octroi des licences pour bloquer les compétitions qui pourraient faire de l'ombre à ses propres championnats ;

2) De fait, elle a écarté du marché une série concurrente (affaire GTR) ;

3) Toujours par abus de pouvoir, elle acquiert les droits de retransmission de toutes les compétitions automobiles mondiales ;

4) La FIA et la FOA sont coalisées pour empêcher la création de toute compétition rivale du championnat du monde de F1 ;

 

Le point le plus critique concerne cependant la dévolution des droits commerciaux des compétitions aux différentes sociétés de Bernie Ecclestone, la FOA pour la F1 et International Sportworld Communicators Ltd pour les autres championnats. Karel Van Miert reproche à la FIA d'utiliser son pouvoir de réglementation afin d'obliger les participants à abandonner leurs droits sur les retransmissions télévisées pour les céder ensuite à Bernie Ecclestone. Pire encore, les droits des promoteurs d'épreuves reviennent directement à ce dernier après que la fédération lui a octroyé le pouvoir de décider qui pouvait ou non organiser un Grand Prix... Concernant le quatrième point, Karel Van Miert s'interroge sur le fait que beaucoup de contrats entre la Formule 1 et les promoteurs de Grands Prix interdisent aux circuits concernés de figurer dans des séries concurrentes. Plus étonnant encore, en vertu des accords signés avec Ecclestone, les radiodiffuseurs peuvent se voir infliger un surcoût s'ils retransmettent d'autres compétitions représentant une menace concurrentielle potentielle pour la F1, comme par exemple l'IndyCar...

 

En conséquence, la Commission européenne engage une procédure contre la FIA devant la Cour de justice européenne. La fédération a trois mois pour organiser sa défense. A l'issue de cette procédure, elle aura le choix entre renégocier les contrats incriminés avec les promoteurs et les diffuseurs, ou bien prendre le risque d'une amende pouvant s'élever jusqu'à 10 % des bénéfices issus des droits TV. Dans l'immédiat, cette affaire a pour effet de repousser encore les projets ecclestoniens d'entrée en bourse de la Formule 1... Mais le « Grand Argentier », à peine remis de son opération cardiaque, affiche en cet été 1999 une parfaite sérénité. Il prétend que les contrats litigieux ont déjà été renégociés et mis aux normes communautaires. «Les clauses qui avaient soulevé des objections de la Commission n'apparaissent plus dans les nouveaux contrats », affirme-t-il.

 

Ecclestone laisse en vérité à son compère Max Mosley le soin de contre-attaquer. Le président de la FIA conteste vigoureusement le rapport de la Commission européenne et s'étonne que ses griefs, appuyés sur des documents confidentiels, aient été rendus publics, notamment dans le Financial Times. Il s'agit de la seconde « fuite » de ce genre. La première avait eu lieu en décembre 1997 et fait l'objet d'une action légale. D'autre part, Mosley attaque de nouveau la législation européenne anti-tabac, qu'il assimile à un acharnement contre le sport automobile, et bandit la menace de déserter l'Europe à l'avenir.

 

Cependant, la Commission de Bruxelles est affaiblie par un scandale de fraude et de népotisme impliquant plusieurs de ses membres, dont l'ancien Premier ministre français Édith Cresson. La Commission présidée par Jacques Santer a démissionné en mars 1999 et la Commission Manuel Marin n'assure ensuite qu'un intérim jusqu'aux élections européennes de juin. En septembre, la nouvelle commission présidée par Romano Prodi prend ses fonctions. Karel Van Miert ne fait pas partie de celle-ci et cède le portefeuille de la Concurrence à l'Italien Mario Monti. Ce dernier se heurte immédiatement à Max Mosley qui prépare pour l'an 2000 une virulente contre-offensive médiatique et juridique contre l'UE.

 

Sources :

- https://www.liberation.fr/sports/1999/07/01/formule-1-la-commission-europeenne-attaque-la-federation-pour-non-respect-de-la-concurrence-fia-une-_278730/

- https://franceracing.fr/f1/fia-vs-europe-vieille-histoire/

Tony