Michael SCHUMACHER
 M.SCHUMACHER
Benetton Ford Cosworth
Gerhard BERGER
 G.BERGER
McLaren Honda
Jean ALESI
 J.ALESI
Ferrari

523. Großer Preis

XXX Grand Prix du Canada
Bedeckt
Montréal
Sonntag, 14. Juni 1992
69 Runden x 4.430 km - 305.670 km
Affiche
F1
Coupe

Wussten Sie es?

Fahrer
Konstruktor
Motor

Ecclestone intrigue contre Williams

Entre les Grands Prix de Monaco et du Canada, Bernie Ecclestone organise une réunion de la FOCA à Maranello, au siège de la Scuderia Ferrari. Les Britanniques s'interrogent sur ce choix pour le moins curieux. Certains y voient anguille sous roche: le « Grand Argentier » aurait conclu une alliance avec Ferrari pour imposer ses vues à l'ensemble de la F1. De fait, sa complicité avec Luca di Montezemolo est évidente. Les constructeurs se méfient. Plusieurs écuries (Lotus, Ligier, Brabham, March) ne font pas le déplacement. Après des années 89, 90 et 91 fastes, Ecclestone s'alarme de la chute des audiences télévisées depuis le début de la saison 92. L'hégémonie des Williams-Renault nuit manifestement au spectacle. Le président de la FOCA aimerait rebattre les cartes, et pour cela propose à ses collègues plusieurs réformes, en fait déjà avancées par Max Mosley et la FISA: réduction de la largeur des pneus arrière, hausse de la largeur maximale des monoplaces, carburant unique proche de celui du commerce... S'il doit remiser son idée de réintroduire les ravitaillements en essence en course, il souhaite néanmoins imposer un arrêt obligatoire pour changer de pneus.

 

A l'issue de débats animés, Ecclestone semble sur le point d'emporter l'adhésion, mais Frank Williams refuse in extremis de signer le procès-verbal de la séance. Après s'être entretenu avec ses partenaires Renault et Elf, il s'aperçoit qu'Ecclestone est bien en train de monter un complot contre son écurie, comme le prouve l'offensive contre les carburants, qui vise en fait Elf. Certes, le milliardaire n'ose pas encore s'en prendre aux principales armes de guerre de Didcot, à savoir les aides électroniques au pilotage. Mais il est bien décidé à faire cesser la domination du team franco-britannique. Celui-ci se rebiffe. « Notre position et celle de Frank Williams ne font qu'une », explique Patrick Faure. « Aujourd'hui, les écuries ont besoin des grands constructeurs, généralistes ou non, pour gagner. Il n'est pas normal de modifier les règles du jeu après les cinq victoires de Mansell. Quand McLaren et Honda enlevaient quinze courses sur seize, personne ne s'en plaignait et n'aurait osé dénoncer la domination anglo-japonaise. » « Un Mansell qui gagne toute le temps ne me plaît pas », répond Ecclestone. « Quand Senna et Prost survolaient le lot, ils entretenaient le mythe. Cette année, il manque un Piquet et un Prost. »

 

Quoiqu'il en soit, Ecclestone se heurte à la règle de l'unanimité qui figure dans les Accords Concorde. Si Williams et les autres rebelles (en premier lieu Lotus) refusent de se rallier à lui, ces réformes ne pourront pas être entérinées au prochain Conseil mondial de la FISA, le 24 juin prochain.

 

Putsch manqué contre Guy Ligier

Ligier-Gitanes est victime ce week-end d'une véritable OPA lancée par Jean-Paul Driot, le patron de l'écurie de Formule 3000 DAMS. Les rumeurs de rachat de la structure de Magny-Cours par Alain Prost, qui ont circulé tout l'hiver, ont en effet excité les convoitises. Afin de réussir son coup, Driot s'est assuré du concours de l'industriel pharmaceutique François Lafon, qui compte s'installer prochainement dans la Nièvre. Le terrain semble favorable. Ligier traverse en effet une très mauvaise passe. Malgré le V10 Renault, les machines bleues n'ont marqué aucun point et sont très loin de pouvoir en inscrire à la régulière. Thierry Boutsen ne cesse de se répandre en déclarations acrimonieuses. Érik Comas ne cache pas non plus son désarroi.

 

Vendredi 12 juin, en l'absence de Guy Ligier, resté en France, le duo Driot - Lafon se présente dans le paddock pour lancer son offre d'achat sur le team et l'usine. Par bonheur, Dany Hindenoch veille au grain: il prévient par téléphone le patron, ainsi que quelques hauts responsables politiques. Il peut aussi compter sur Jean Glavany, l'homme-lige de François Mitterrand, qui a opportunément fait le déplacement au Québec. Driot et Lafon doivent piteusement battre en retraite. Mais cet épisode met en lumière la fragilité de Guy Ligier, désormais à la merci d'un assaut plus sérieux.

 

Présentation de l'épreuve

Le Canada et le Québec commémorent cette année le dixième anniversaire de la disparition de leur héros Gilles Villeneuve. La légende de la Ferrari n°27 s'est emparée de Jean Alesi, actuel titulaire de ce numéro. Qui plus est, son style de pilotage généreux n'est pas sans évoquer celui du champion disparu. Les tifosi ne cessent de lui rappeler. Alesi est flatté de la comparaison mais n'y prête guère attention. Outre les piètres performances de sa Ferrari, il doit gérer les suites de l'accrochage qui l'a opposé à Michael Schumacher à Monte-Carlo. Cet incident a fait naître une certaine tension entre les deux jeunes loups qui s'ignorent ostensiblement, sans toutefois échanger des propos aigres-doux. Surtout, l'Avignonnais prépare son mariage avec sa compagne Laurence qui sera célébré huit jours plus tard...

 

Mario Andretti et son fils Michael, grands animateurs du championnat CART, arpentent le paddock de l'Île Notre-Dame, suivis par une meute de photographes et de journalistes. L''ancien champion du monde souhaite que son fiston trouve une place en F1 l'an prochain. A bientôt 30 ans, Michael Andretti, vainqueur du CART l'année passée, semble prêt à faire le grand saut outre-Atlantique. Il a déjà participé à quelques séances d'essais privés avec McLaren. Selon les dernières rumeurs, il pourrait prendre le baquet d'Ivan Capelli chez Ferrari en 1993. Son grand rival américain, le très populaire Al Unser Jr., fait aussi le déplacement à Montréal. Comme Andretti, il s'intéresse de près à la F1 et discute avec Flavio Briatore et Frank Williams.

 

Brabham semble entrer en agonie. Son propriétaire, le groupe japonais Middlebridge, accumule en effet des millions de dollars de dettes et se trouve au bord de la faillite. L'écurie ne survit que grâce aux fonds fournis par une société de prêt sur gage, Landhurst Leasing, dirigée par un homme d'affaires sulfureux, Edward Ball. Celui-ci a d'ailleurs aussi avancé de l'argent au Team Lotus. Dennis Nursey se consacre désormais exclusivement à la recherche de sponsors. Il déniche ainsi pour le GP du Canada l'appui de BMS...un groupe de rock japonais ! John Macdonald, qui avait quitté le navire quelques mois plus tôt, fait son retour et prend en charge la gestion sportive. Il apporte aussi quelques petits commanditaires.

 

La situation est tout aussi grave pour le team March, presque totalement désargenté. Afin de renflouer les caisses, les codirecteurs Ken Marrable et Bernard Bormans ont l'idée originale de passer une petite annonce dans un journal montréalais ! Cette stratégie s'avère payante puisqu'ils récoltent ainsi 45 000 dollars de la part de huit sociétés canadiennes, qui en échange collent leurs logos sur la carrosserie de la machine cyan. Quant à Paul Belmondo, il cherche désespérément de nouveaux sponsors pour conserver son volant après le GP de France, terme de son contrat.

 

La Fondmetal dessinée par Sergio Rinland fait son apparition à Montréal aux mains de Gabriele Tarquini. Cette voiture possède un aérodynamisme très original: le bas de ses pontons est concave dans un plan vertical et les moustaches avant possèdent une forme très élaborée. La boîte mécanique est une X-Trac placée dans un carter Fondmetal, mais l'équipe italienne élabore son propre système semi-automatique. Pour arriver à ce résultat, Rinland a travaillé avec ses anciens collègues de Brabham, notamment son ancien assistant Hans Fouche, ainsi que le concepteur français Max Sardou.

 

Chez Williams, Renault décide d'utiliser le V10 RS4 en qualifications et le RS3C en course. Joan Villadelprat, le team-manager de Benetton, confirme que Schumacher et Brundle auront le V8 Ford-Cosworth « génération VI » le dimanche, car plus élastique que le génération VII. Ferrari teste de nouveau sa boîte transversale sans la conserver en course. La Tyrrell 020B, déjà dotée d'un nez inédit à Monaco, reçoit ici une nouvelle géométrie de suspension avant. Enfin, Yamaha réduit la puissance (déjà faible) de son V12 pour en améliorer sa fiabilité. Eddie Jordan cherche déjà un nouveau motoriste pour 93...

 

Andrea Moda, épisode V

Peu après le GP de Monaco, un incident dramatique met en lumière la véritable nature des activités du sieur Andrea Sassetti. Une de ses discothèques est victime d'un incendie criminel. Alors qu'il fuit les flammes, Sassetti essuie des tirs d'armes à feu dont il échappe par miracle. Ses « amis » se sont vraisemblablement rappelés à lui...

 

Quelques jours plus tard, son équipe se fait encore remarquer de façon burlesque. En effet, à cause d'un soi-disant orage, l'avion chargé du transport de ses V10 Judd aurait été contraint de ne pas emporter ceux-ci afin d'alléger la charge de l'appareil. Ainsi Andrea Moda se retrouve au Québec sans moteur. Qu'à cela ne tienne: Sassetti emprunte un Judd à Brabham et le monte dans la monoplace de Moreno, qui échouera bien sûr en pré-qualifications. Quant à McCarthy, il déclare tout simplement forfait pour ce Grand Prix. Las d'un tel manque de professionnalisme, Frédéric Dhainaut démissionne de son poste de directeur sportif.

 

Essais et qualifications

La météo évolue beaucoup au cours du week-end. Au soleil du vendredi succède samedi un ciel lourd, humide et froid. L'immense majorité des pilotes signent leur meilleur chrono le premier jour, le revêtement étant plus lent le lendemain.

 

Ces qualifications réservent une surprise puisque pour la première fois de la saison la pole échappe aux Williams-Renault. Senna obtient la 61ème position de pointe de sa carrière (1'19''775'''), avec neuf centièmes d'avance sur Patrese. Celui-ci est désespéré: pour une fois qu'il devance Mansell, la pole lui échappe ! L'Anglais n'est en effet pas en forme. Il se fourvoie dans ses réglages et exécute un tête-à-queue. Il est l'un des rares à améliorer le samedi, mais partira seulement troisième. Berger signe le quatrième chrono sur la seconde McLaren. Les Benetton-Ford (Schumacher 5ème, Brundle 7ème) sont rapides mais subissent plusieurs pannes. La nouvelle Lotus-Ford 107 progresse à vitesse grand V: à son volant, Herbert se classe sixième, Häkkinen dixième ! L'écurie de Ketteringham Hall n'avait plus été à pareille fête depuis au moins trois ans. Les Ferrari d'Alesi (8ème) et de Capelli (9ème) sont toujours instables et inefficaces.

 

Exploit du jeune Katayama qui hisse sa Venturi-Lamborghini au onzième rang ! Son collègue Gachot (19ème) est plus malchanceux puisqu'il rencontre des soucis de transmission et heurte les glissières. Malgré des fuites d'huile, les March-Ilmor signent des performances honorables. Wendlinger est douzième et Belmondo vingtième, sa meilleure qualification depuis le début de l'année. Minardi est dans le brouillard: tandis que Fittipaldi (25ème) se contente de découvrir le tracé, Morbidelli réalise le treizième temps avec la M191L de réserve. L'Italien n'est en effet pas du tout satisfait de la nouvelle M192. Les Tyrrell-Ilmor ne sont pas dans le coup: de Cesaris (14ème) manque de grip et Grouillard (26ème) est encore victime d'une touchette. Martini (15ème) et Lehto (23ème) ont toujours du mal à mettre au point la rétive Dallara-Ferrari. Alboreto se classe seizième avec la Footwork-Mugen. Suzuki semble lui déboussolé: il multiplie les pirouettes, avoue ne rien comprendre à sa machine et manque sa qualification. « J'ai envie de me pendre ! », lâche-t-il à Auto Hebdo. Chez Jordan, Modena (17ème) est pour une fois épargné par les soucis, au contraire de Gugelmin (24ème) dont le V12 Yamaha manque de puissance. Tarquini place la nouvelle Fondmetal sur le 18ème rang. Chiesa est sans surprise éliminé au volant de l'ancien modèle. Les Ligier-Renault sont « à la rue » : Boutsen (21ème) déplore comme toujours un manque de grip et Comas (22ème) casse un moteur. Comme à l'ordinaire, les Brabham-Judd de van de Poele (tête-à-queue) et Hill (casse moteur) sont recalées.

 

Le Grand Prix

Il se déroule sous un ciel bas et menaçant. Les Montréalais sont venus en grand nombre (130 000) pour observer les bolides et rendre aussi hommage à Gilles Villeneuve avec force banderoles. Inquiet et fébrile suite à ses contre-performances des essais, Mansell tente de se rassurer et signe le meilleur temps du warm-up.

 

Tour de formation: Modena ne parvient pas à partir immédiatement suite à la rupture de son carter de démarreur. Il s'élancera en dernière position.

 

Départ: Senna démarre bien et reste en tête. Mansell bondit depuis la seconde ligne, déborde Patrese et franchit le premier virage en deuxième position. Derrière les Williams se trouvent Berger, Schumacher, Herbert et Brundle. Tarquini ne parcourt que quelques dizaines de mètres avant d'immobiliser sa nouvelle Fondmetal, boîte de vitesses cassée.

 

1er tour: Brundle double Herbert à l'épingle. Senna mène devant Mansell, Patrese, Berger, Schumacher, Brundle, Herbert, Häkkinen, Alesi et Wendlinger.

 

2e: A l'attaque derrière Senna, Mansell fait un léger travers dans le premier virage et se récupère magistralement.

 

3e: Gachot tente de faire l'intérieur à son équipier Katayama à l'épingle du Casino, mais celui-ci ne le voit pas arriver. Le Franco-Belge brise son aileron avant contre le ponton du Japonais, et doit passer par les stands pour réparer.

 

4e: Senna n'est pas très rapide et mène un train composé de Mansell, Patrese, Berger, Schumacher, Brundle et des deux Lotus.

 

6e: Senna, Mansell, Patrese, Berger, Schumacher, Brundle, Herbert et Häkkinen évoluent en rangs serrés. Plus loin vient un trio comprenant Alesi, Wendlinger et Capelli.

 

7e: Senna prend un peu plus d'une seconde d'avance sur Mansell, mais le peloton est toujours compact.

 

9e: Mansell revient sur Senna et commence à s'impatienter. Il coupe son limiteur de régime et se montre dans les rétroviseurs du triple champion du monde. Une seconde derrière eux, Patrese observe la situation.

 

10e: Senna précède Mansell (0.3s.), Patrese (1.2s.), Berger (1.9s.), Schumacher (2.3s.), Brundle (2.7s.), Herbert (3.6s.), Häkkinen (4s.), Alesi (7.1s.), Wendlinger (8.9s.), Capelli (12s.) et Katayama (21s.).

 

11e: Mansell file le train de Senna sans forcer le passage pour le moment. Le V12 Honda accélère mieux que le V10 Renault, ce qui rend la prise d'aspiration difficile.

 

12e: Les huit premiers sont toujours roues dans roues, tandis qu'Alesi et Wendlinger se rapprochent. A l'abord l'épingle, Gachot, à un tour, est poussé vers l'extérieur par un Grouillard toujours aussi négligeant. La Venturi se cabre et se retrouve bloquée contre le rail. Son malchanceux pilote est remis en piste par les commissaires, ce qui est interdit.

 

14e: Berger esquisse une attaque contre Patrese au niveau du Casino, sans succès. Le paquet s'agite puisque Brundle se fait pressant derrière Schumacher.

 

15e: Mansell tente de déborder Senna aux abords de la dernière chicane. Emporté par sa fougue, il freine bien trop tard et traverse le terre-plein. Il y casse son aileron avant puis se retrouve en tête-à-queue dans la ligne droite principale, en plein milieu de la piste. Il fait marche arrière pour éviter Senna (qu'il a tout de même dépassé) puis cale hors trajectoire. Berger profite de la confusion pour dépasser Patrese qui a levé le pied. Gugelmin abandonne, transmission cassée.

 

16e: Les deux McLaren sont désormais en tête tandis que Mansell reste dans sa voiture. Il s'est fait un peu mal au dos dans son embardée. Finalement, les commissaires de piste l'évacuent en le portant par les aisselles. Parfaitement indemne mais furieux, Nigel court ensuite vers Ron Dennis pour se plaindre du comportement de Senna qui selon lui l'a expédié hors la piste.

 

17e: Gachot reçoit le drapeau noir pour avoir été poussé par les commissaires. Sa course est terminée.

 

18e: Senna mène devant Berger (0.5s.), Patrese (0.9s.), Schumacher (1.4s.), Brundle (1.9s.), Herbert (3.3s.), Häkkinen (4s.), Alesi (6s.), Wendlinger (10s.) et Capelli (14s.). La Williams de Mansell est toujours sur la piste, juste devant les stands.

 

19e: Suite à un bris de suspension, Capelli perd le contrôle de sa Ferrari à la sortie de la première chicane et s'écrase très violemment contre le mur. Son casque heurte même le béton, mais fort heureusement il quitte sa voiture sans la moindre blessure.

 

20e: Senna contient toujours le même train. Une grue est en piste pour retirer la Ferrari de Capelli. La monoplace de Mansell est enfin évacuée.

 

21e: Senna prend le meilleur tour provisoire (1'24''782''') mais Berger et Patrese demeure sur ses talons. Brundle harcèle Schumacher.

 

22e: Seizième, Belmondo retient un trio composé de Boutsen, Lehto et Grouillard. Sous la pression, il traverse les graviers de la dernière chicane mais demeure devant ses poursuivants.

 

24e: Senna, Berger et Patrese se suivent de très près. Les deux Benetton sont en embuscade. Les Lotus sont décrochées.

 

25e: Senna devance Berger (0.6s.), Patrese (1.1s.), Schumacher (1.8s.), Brundle (2.2s.), Herbert (5s.), Häkkinen (9s.), Alesi (13s.) et Wendlinger (16s.).

 

27e: Senna abaisse le record du tour (1'23''938''') et prend une petite marge d'une seconde sur Berger.

 

29e: Les leaders arrivent sur les premiers attardés qui sont, dans l'ordre dans lequel ils se présentent, Modena, Grouillard, Lehto, Boutsen et Belmondo.

 

30e: Les cinq premiers ne rencontrent pas de difficulté majeure avec les retardataires. Senna compte huit dixièmes d'avance sur Berger.

 

31e: Senna précède Berger (0.5s.), Patrese (2s.), Schumacher (2.6s.), Brundle (2.9s.), Herbert (8.1s.), Häkkinen (14s.) et Alesi (18s.).

 

32e: Une fois défaits du trafic, Senna, Berger et Patrese se retrouvent encore une fois roues dans roues. Les Benetton les rejoignent.

 

33e: Schumacher (1'23''276''') rattrape le trio de tête... sans décramponner Brundle qui le colle tel un sparadrap ! Belmondo remplace ses gommes suite à un tête-à-queue.

 

35e: Berger attaque Senna à l'avant-dernière chicane, sans succès. Herbert regagne les stands au ralenti, en panne d'embrayage.

 

36e: Häkkinen est contraint à son tour à l'abandon suite à une défaillance de sa boîte de vitesses semi-automatique. Les deux Lotus sont hors-course. Du coup, Alesi entre dans les points.

 

37e: Senna est premier devant Berger (0.7s.), Patrese (1s.), Schumacher (1.5s.), Patrese (2.5s.), Alesi (17.7s.), Wendlinger (19.4s.) et Katayama (46s.).

 

38e: Senna ralentit soudainement avant le Pont de la Concorde, victime d'une panne électronique. Il s'immobilise sur le bas-côté. Berger s'empare de la tête. Modena se retire après avoir cassé sa transmission.

 

39e: Les leaders sont pris dans le trafic. Patrese tente de garder le contact avec Berger. Schumacher est gêné par Morbidelli à la sortie du dernier virage. Un Brundle opportuniste en profite pour le dépasser.

 

40e: Berger mène devant Patrese (1.1s.), Brundle (3s.), Schumacher (3.5s.), Alesi (20.3s.), Wendlinger (22s.), Katayama (50.6s.), de Cesaris (1m. 04s.), Comas (1m. 08s.), Alboreto (1m. 09s.) et Martini (-1t.). Morbidelli fait remplacer ses pneus.

 

41e: Grouillard fait halte chez Tyrrell pour changer de gommes.

 

42e: Berger, Patrese, Brundle et Schumacher se tiennent en environ cinq secondes. Brundle tourne en 1'22''328''' et se rapproche de Patrese qui vient de perdre son sixième rapport.

 

44e: Patrese n'arrive plus à enclencher ses 4e et 5e vitesses. Il laisse passer les Benetton et rejoint son garage. Pour la première fois de l'année, aucune Williams-Renault ne verra l'arrivée.

 

45e: Désormais second, Brundle mène la course de sa vie et paraît en mesure de pourchasser Berger.

 

46e: Le rêve de Brundle s'envole: trahi par sa transmission, il s'arrête sur le bas-côté après le Pont de la Concorde.

 

47e: Berger est premier devant Schumacher (8.1s.), Alesi (28.3s.), Wendlinger (35.4s.), Katayama (1m. 10s.), de Cesaris (1m. 17s.), Comas (1m. 27s.), Alboreto (-1t.), Martini (-1t.) et Lehto (-1t.).

 

48e: Berger perd l'usage du bouton qui lui permettait de rétrograder directement de la 6ème à la 1ère vitesse. Il doit donc se rabattre sur les palettes situées derrière son volant qu'il n'a pas l'habitude d'utiliser. Ses temps au tour en pâtissent quelque peu.

 

50e: Schumacher réduit son retard sur Berger: cinq secondes les séparent.

 

52e: Schumacher tombe sur Comas et Alboreto qui se battent pour la huitième place. Il perd quelques secondes dans ces dépassements. Plus loin, Martini tarde à s'écarter devant Alesi.

 

54e: Berger concède quelques dixièmes à Schumacher mais son leadership n'est pas menacé. Les positions sont figées.

 

55e: Berger précède Schumacher (6.3s.), Alesi (38s.), Wendlinger (1m.), Katayama (-1t.), de Cesaris (-1t.), Comas (-1t.) et Alboreto (-1t.).

 

56e: De Cesaris reprend une seconde par tour à Katayama. Alboreto est dans les échappements de la Ligier de Comas. Il tente en vain de se porter à sa hauteur dans les lignes droites.

 

58e: Berger porte son avantage sur Schumacher à huit secondes. Alesi roule à quarante secondes de l'Autrichien.

 

59e: Schumacher est gêné par un Belmondo très lent. Il lui brandit son poing en le dépassant.

 

61e: Berger réalise le meilleur tour en course: 1'22''325'''. Neuf secondes le séparent de Schumacher.

 

63e: Alors qu'il tenait la cinquième place, Katayama commet un surrégime fatal à son moteur. Le Nippon regagne son garage avec un arrière-train fumant. Comas est désormais sixième mais harcelé par Alboreto.

 

65e: Berger devance Schumacher (10.4s.), Alesi (46s.), Wendlinger (1m. 11s.), de Cesaris (-1t.), Comas (-1t.), Alboreto (-1t.), Martini (-1t.), Lehto (-1t.) et Boutsen (-2t.).

 

66e: De Cesaris tourne trois secondes au tour plus vite que Wendlinger. Il vise la quatrième place mais concède encore seize secondes à l'Autrichien. Privé de freins et complétement épuisé, Belmondo termine la course à faible allure.

 

67e: Comas s'est forgé un petit matelas d'une seconde sur Alboreto.

 

68e: De Cesaris n'a plus de freins et a cassé son collecteur d'échappement. Il diminue son rythme et laisse revenir Comas. Fittipaldi s'arrête dans l'herbe avec une boîte de vitesses en feu. Il éteint lui-même l'incendie à l'aide d'un extincteur arraché aux commissaires de piste.

 

69ème et dernier tour: Gerhard Berger remporte sa septième victoire en carrière devant Schumacher et Alesi. Wendlinger obtient une exceptionnelle quatrième place pour la petite équipe March, et ce à la régulière. De Cesaris termine cinquième malgré un moteur expirant. Comas, sixième, inscrit le premier point de l'écurie Ligier depuis 1989 ! Alboreto, Martini, Lehto, Boutsen, Morbidelli, Grouillard et Belmondo rejoignent aussi l'arrivée.

 

Après la course: Mansell déraille

La victoire de Berger est un temps mise en suspens car les commissaires techniques dirigés par Charlie Whiting découvrent que les cloisons verticales de son aileron avant dépassent le porte-à-faux autorisé (50 cm) de quelques millimètres. Comme cela relève d'une erreur de montage et ne procure aucun avantage, l'Autrichien n'est pas disqualifié.

 

La sortie de route de Nigel Mansell fait jaser. Pour tous les observateurs, le leader du championnat, furieux de ne pouvoir doubler Ayrton Senna, a « pété un câble ». Après être resté deux bonnes minutes dans sa voiture, attendant on ne sait quoi, l'Anglais est venu enguirlander Ron Dennis: « Senna est un salaud ! Il n'a pas le droit de faire ça ! Il m'a tassé ! Ce n'est pas de ma faute ! » éructe-t-il. Le patron de McLaren se contente de hausser les épaules. Mansell regagne ensuite son garage pour pester encore contre le Brésilien, en fait sans doute contre son inconséquence. « Il est arrivé trop vite et ne pouvait plus tourner... » précise Senna qui refuse lui aussi d'entretenir une énième polémique avec son rival. Le pauvre Nigel quitte rapidement le circuit en hélicoptère, sous les quolibets des journalistes britanniques. « Décidément, il ne changera jamais ! » disent-il en substance. « Seul Mansell peut empêcher Mansell de devenir champion du monde », écrit Gérard Crombac. « Mansell mérite une grande estime. Mais il restera toujours Mansell », conclut sagement Christian Contzen.

 

Senna a réussi à piéger le pilote Williams, mais il n'en a pas profité à cause des caprices de l'électronique. C'est son fidèle lieutenant Gerhard Berger qui recueille les lauriers après avoir su faire preuve de patience et d'opportunisme. « Au début, ce fut très dur, raconte l'Autrichien. J'étais quatrième et capable d'aller plus vite, mais il était impossible de dépasser. Il y avait trop de risques à courir. C'est une question d'autodiscipline. Puis, quand je me suis retrouvé derrière Ayrton, je me suis aperçu que j'étais plus rapide que lui. Mais là encore, impossible de doubler. » Le retrait de son leader lui a donné sa première « vraie » victoire pour McLaren car celle de Suzuka l'an passé lui fut offerte par ce même Senna. Cependant, Berger ne pense pas que ce second succès consécutif de McLaren relance le championnat: « Comme nous l'avons vu aujourd'hui, les Williams sont toujours les voitures à battre. Nous sommes trop loin derrière. »

 

C'est la fête chez Ligier-Gitanes: les Bleus n'avaient plus marqué un point depuis le GP de France 1989 ! Érik Comas est gentiment chahuté par ses mécaniciens. Le jeune Drômois garde cependant la tête froide: « C'est mon plus beau jour en F1. Et ça devait bien finir par arriver. Je pense même que c'était programmé ! » Accessoirement, Ligier et Comas permettent à Renault de ne pas repartir bredouille de la Belle Province. Thierry Boutsen est beaucoup plus sombre: d'incessantes coupures électriques l'ont empêché d'attaquer durant toute la course.

 

Mansell demeure un confortable leader du championnat du monde, avec 56 points. Il précède Patrese (28 pts), Schumacher (26 pts), Senna et Berger (18 pts), ainsi qu'Alesi (11 pts). Au classement des constructeurs, Williams-Renault caracole en tête avec 84 unités, très loin devant McLaren-Honda (36 pts), Benetton-Ford (31 pts), Ferrari (13 pts) et Footwork-Mugen (5 pts).

Tony