Schumacher - Senna: le clash
Les essais privés organisés par la FOCA qui se tiennent huit jours avant le Grand Prix sont agrémentés d'une nouvelle passe d'armes entre Ayrton Senna et Michael Schumacher. Estimant avoir été gêné par le jeune Allemand lors d'un tour rapide, le Brésilien s'explique avec lui dans les stands. Magic perd rapidement ses nerfs devant la morgue de Schumacher, et le bouscule violemment, voire la gifle selon certains témoins. Des mécaniciens doivent intervenir pour les ceinturer avant qu'ils ne se battent. Cet incident ne fait qu'alourdir un contentieux qui s'est ouvert au GP du Brésil et s'est épaissi en France, lorsqu'un Schumacher approximatif a éperonné Senna. Toutefois, les deux hommes préfèrent en rester là. Senna se refuse à tout commentaire et Schumacher estime que l'incident est clos.
A quelques jours de son premier Grand Prix d'Allemagne, Michael Schumacher suscite dans son pays un engouement inédit pour la Formule 1. Le jeune prodige est harcelé par les journalistes, les photographes et les paparazzis. Sa vie privée est passée au crible. On apprend ainsi qu'il a « piqué » sa petite amie Corinna à Heinz-Harald Frentzen, son ancien rival au sien du Junior Team Mercedes. D'un naturel timide et réservé, « Schum » se lasse rapidement de cette pression médiatique. « Quand je voyais l'hystérie qui entourait Boris Becker, je n'imaginais pas l'envers du décor. Maintenant, je m'en rends compte », soupire-t-il. Il fait néanmoins bonne figure à ses jeunes fans, au fond flatté d'être le premier pilote allemand à atteindre un tel niveau de popularité depuis les as de l'avant-guerre, Rudolf Caracciola et Bernd Rosemeyer.
Essence et pneus: réformes en cours
Hockenheim est le théâtre d'un week-end très politique, et évidemment la question du carburant standard est au centre des débats. Jeudi, les motoristes se réunissent autour de Daniele Audetto, directeur-général de Lamborghini, et tous penchent pour l'adoption d'une essence commerciale dès 1993. Tous, sauf évidemment Renault qui a partie liée avec Elf. Le lendemain, Bernie Ecclestone convoque les membres de la FOCA et, dans son discours d'introduction, souligne à l'intention des récalcitrants (en l'occurrence Williams) que c'est la Commission F1 qui tranchera en définitive. Que reste-t-il donc de la règle de l'unanimité inscrite dans les Accords Concorde ? Finalement, les constructeurs, y compris Williams, votent pour le carburant commercial, mais à l'horizon 1994.
Samedi se tient la réunion de la Commission F1, présidée par Max Mosley en personne. Les participants tentent de définir ce que sera ce fameux « carburant de base » que, soi-disant, l'on pourra aussi bien mettre dans une F1 que dans la 4L de M. Tout-le-monde ! Il importe surtout de compter le nombre de composants chimiques identifiés qui seront conservés. Mosley n'en veut pas plus de 300. Agip en propose 50. Elf se déclare opposée à toute restriction. Bref, personne n'est d'accord, et l'on se dirige vers un statu quo pour la saison 93.
La question des pneumatiques vient aussi sur la table. Fin juin, le Conseil mondial de la FISA a entériné la réduction de la largeur des pneumatiques de 18 à 15 pouces, provoquant la colère de Goodyear qui juge cette décision déraisonnable. Ecclestone se pose en intermédiaire et propose avec la FOCA de se contenter d'une réduction à 16,5 pouces. Mais Mosley réplique que, le Conseil mondial s'étant prononcé, il n'est plus possible de revenir sur la règle des 15''. Le piège se referme autour de Goodyear: Mosley a discrètement fait modifier le règlement: le manufacturier unique de la F1 aura dorénavant l'obligation de fournir tout le plateau. La firme américaine n'a donc plus le choix qu'entre fabriquer des pneus de 15'' pour 1993 ou se retirer. Dans cette éventualité, sa place pour être prise par Avon, manufacturier qui équipe déjà la F3000 et possède de forts liens avec... Ecclestone.
Présentation de l'épreuve
L'an passé, les organisateurs du Grand Prix d'Allemagne ont été mis en demeure de rénover le circuit d'Hockenheim. D'importants travaux ont été effectués, notamment au niveau des infrastructures. Les stands forment désormais un bloc d'un seul tenant surmonté d'un « Paddock Club ». Au niveau du tracé, la première courbe après le départ est légèrement resserrée. Ce sont surtout les chicanes qui font l'objet de modifications. Les deux premières sont redessinées et toutes sont désormais entourées d'un bac à graviers. Hélas, le revêtement n'a pas été correctement refait. Les pilotes s'en plaignent après les essais FOCA. De nouveaux travaux de resurfaçage sont effectués, mais durant tout le week-end les bolides sauteront sur le bitume de la deuxième chicane, encore parsemé de bosses.
John Barnard est plus proche que jamais d'un retour chez Ferrari. Après avoir rompu son contrat avec Toyota (qui lui avait demandé de plancher sur un programme F1), l'ingénieur anglais multiplie les rendez-vous avec les envoyés de Luca di Montezemolo. Ce dernier lui offre une proposition en or: un contrat de cinq ans, une antenne en Grande-Bretagne et tous les pouvoirs sur le staff technique. Flatté, Barnard se donne un délai de réflexion symbolique avant de signer des deux mains au soir du GP d'Allemagne.
Le retrait de Honda étant de plus en plus certain, l'identité du futur motoriste de McLaren demeure un mystère. Il est un temps question de BMW. La firme bavaroise a en effet fait dessiner un V12 par Paul Rosche, et c'est afin d'en assurer les essais qu'un châssis fut commandé à Simtec (aujourd'hui utilisé par Andrea Moda). Mais le programme est tombé à l'eau et Rosche affirme que son moteur est déjà démodé. En tout cas, Ayrton Senna ne désespère pas encore de l'alliance japonaise. « Mon avenir est avec Honda ! » clame-t-il avec emphase. Reste que s'il ne dispose pas d'un bon moteur pour 1993, le Brésilien fera ses valises. Mais pour aller où ? Chez Williams ? Une nouvelle cohabitation avec Alain Prost semble exclue. Chez Ferrari ? Le chantier de reconstruction de la Scuderia paraît immense... « Ayrton veut la Williams-Renault à tout prix », lâche Mauricio Gugelmin, son ami intime. « Et ce n'est pas un caprice. La valse des transferts n'est pas vraiment lancée. Il y aura du mouvement et du bruit. »
Début 92, Ivan Capelli était sur un petit nuage. Il réalisait l'ultime ambition de tout pilote italien: intégrer la Scuderia Ferrari. Enfin ses années d'efforts infructueux mais méritants au volant de March rétives trouvaient leur récompense ! Las, le rêve a tourné au cauchemar. Constamment dominé par Jean Alesi, le jeune Milanais a très vite été mis à l'écart par l'équipe technique. Son bilan est absolument piteux: deux points inscrits en neuf courses. « Il y a une Ferrari A pour Jean. Moi je n'ai que la B », grommelle-t-il. Luca di Montezemolo lui a déjà signifié qu'il devra se trouver un autre volant pour l'an prochain. A Hockenheim, après les premiers essais, alors qu'il analyse ses partiels, le pauvre Ivan s'attire cette réplique acerbe de Niki Lauda: « Si tu conduis comme ça depuis douze ans, tu te trompes depuis le début ! » Capelli compte sur Marlboro Ferrari pour se recaser. Il est notamment question de Ligier ou de Jordan.
Un autre Italien arrive sur le marché. Stefano Modena est en effet la cible des lazzis d'Eddie Jordan qui le juge fainéant. A sa décharge, il est difficile d'être motivé par le pilotage d'une voiture dont le moteur Yamaha est tout simplement asthmatique !
Olivier Grouillard est à nouveau en manque de liquidités et devrait perdre son baquet au soir de ce Grand Prix. Son remplaçant pourrait être l'Italien Emmanuele Naspetti, récent vainqueur du GP de Pau de F3000. Chez Fondmetal, l'éviction d'Andrea Chiesa, à court de budget, est également imminente. L'équipe italienne apporte deux GR02 en Allemagne, mais curieusement le jeune Suisse n'est pas autorisé à les toucher. Une manière de le décourager ? Enfin, Paul Belmondo n'aura plus de budget après le GP de Hongrie. L'Allemand Heinz-Harald Frentzen, ex-créature de Mercedes, est sur les rangs pour le remplacer.
Gérard Larrousse affiche un nouveau commanditaire: le groupe américain Comstock dont on dit qu'il pourrait racheter à terme les parts de Venturi. Cette entreprise basée à Atlanta est notamment spécialisée dans la promotion immobilière. Ses capitaux permettent à Larrousse de boucler enfin son budget 1992. Les March arborent pour cette épreuve le logo de... Rial. Günther Schmidt, qu'on ne savait pas si généreux, fait un geste en faveur de son ancien ingénieur Gustav Brunner, actionnaire de l'écurie britannique, et donne quelques marks en provenance de sa marque de jantes.
Andrea Moda a un nouveau directeur sportif, un illustre inconnu du nom de Sergio Zago. Entre les épreuves de Silverstone et d'Hockenheim, Perry McCarthy a rencontré Il Signor Sassetti qui lui a avoué ne l'avoir recruté que pour éviter une pénalité de la part de la FISA ! Qu'il ne s'étonne donc pas si les mécaniciens ne s'occupent pas de sa voiture !
Pour la première fois de la saison, Benetton utilisera en course le V8 Ford-Cosworth « série VII » qui pourra donner sa pleine mesure dans les longues lignes droites d'Hockenheim. Les McLaren sont ici équipées d'un nouvel extracteur. La Ferrari d'Alesi dispose d'une suspension avant inédite, prélude à l'apparition de la seconde version de la Ferrari F92. A noter que les Tyrrell-Ilmor sont depuis Silverstone munies d'un correcteur d'assiette au niveau des suspensions. Un dispositif que Ken Tyrrell voulait garder secret, mais visiblement quelqu'un n'a pas su tenir sa langue...
Essais et qualifications
Comme d'habitude, les pré-qualifications sont l'occasion pour Andrea Moda de se donner en spectacle. Le pauvre McCarthy n'est autorisé à prendre la piste que pour un tour non-chronométré, qui plus est avec un moteur défectueux ! Furieux, l'Anglais rentre à son box sans passer par le contrôle de pesée, ce qui lui vaut une exclusion. Moreno échoue quant à lui à se sauver, mais ne rend que trois dixièmes à la vieille Fondmetal de Chiesa.
Les Williams-Renault sont absolument souveraines sur ce tracé. Grâce à leur suspension active, ce sont les seules monoplaces à ne pas tressauter sur les bosses. Elles monopolisent ainsi la première ligne. Mansell s'adjuge dès le vendredi la position de pointe (1'37''960'''), sa neuvième en dix courses. Patrese attend le samedi pour le rejoindre, justement à cause de problèmes de suspension active. Les McLaren-Honda (Senna 3ème, Berger 4ème) sont repoussées à plus d'une seconde. Alesi hisse sa Ferrari au cinquième rang, tout en concédant trois secondes à Mansell. Capelli (12ème) se plaint d'un moteur poussif. Les pilotes Benetton, Schumacher (6ème) comme Brundle (9ème), se signalent par des sorties de route. Remarquables performances des Ligier-Renault de Comas (7ème) et de Boutsen (8ème), bien servies par leur V10 Renault, malgré plusieurs pannes de transmission.
Wendlinger (10ème) tire un excellent parti de sa March-Ilmor sur cette piste qu'il connaît par cœur. Son collègue Belmondo (22ème) obtient aisément sa qualification. Les Lotus (Herbert 11ème, Häkkinen 13ème) rencontrent de grosses difficultés avec leur suspension active et reviennent samedi au dispositif « passif ». Belle prestation de Grouillard, quatorzième au volant de sa Tyrrell. De Cesaris (20ème) casse un moteur puis sort de la piste. Les Footwork-Mugen (Suzuki 15ème, Alboreto 17ème) ne sont également pas à la fête. Larrousse connaît un week-end dantesque. Katayama (16ème) plie une coque et Gachot (25ème) se sauve de justesse après avoir cassé trois moteurs. Les Dallara-Ferrari (Martini 18ème, Lehto 21ème), très instables sur les bosses, sont encore moins performantes qu'à l'ordinaire. Tarquini place sa Fondmetal au 19ème rang. Chiesa conduit toujours la vieille GR01 et n'a donc aucun espoir de se qualifier. Les Jordan ont fort peu d'appui pour compenser la faiblesse de leur V12 Yamaha. Le résultat n'est pas brillant: Gugelmin (23ème) se qualifie car son copain Senna le prend dans son aspiration (!) tandis que Modena reste sur le carreau. Les Minardi-Lamborghini sont toujours inefficaces. Zanardi le suppléant (24ème) devance Morbidelli (26ème). Enfin, en dépit d'une évolution du moteur Judd, les Brabham de van de Poele et de Hill sont éliminées.
Le Grand Prix
Grâce à Michael Schumacher, l'Hockenheimring fait le plein avec plus de 130 000 spectateurs venus encourager le « Petit Mozart de la Formule 1 ». Par chance, le soleil est aussi au rendez-vous.
La plupart des concurrents partent en pneus Goodyear C tendres. Les pilotes Williams comptent sur l'avantage dont ils bénéficieront en début d'épreuve pour changer de gommes à mi-parcours. Leurs adversaires de McLaren, pourtant pareillement chaussés, visent eux une épreuve « non-stop ». Chez Benetton, si Brundle prend les C, Schumacher sélectionne les B plus durs. Cette option est aussi celle des Ferrari et de la Ligier de Comas.
Départ: Patrese démarre en trombe et dépasse Mansell, surpris par sa boîte qui passe directement de la première à la troisième vitesse. L'Italien vire en tête au premier virage devant son équipier, Berger et Senna. Les Benetton passent la Ferrari d'Alesi.
1er tour: Dès la première ligne droite, Mansell déborde son équipier et reprend la tête au freinage de la chicane. Senne double Berger au même endroit. Schumacher met une roue dans les graviers à la troisième chicane. Brundle tente de le dépasser dans la pleine charge suivante, mais sans succès. Mansell mène devant Patrese, Senna, Berger, Schumacher, Brundle, Alesi, Capelli, Comas et Boutsen. Zanardi a grillé son embrayage et regagne les stands pour renoncer.
2e: L'ordre de bataille est parfait: les deux Williams mènent devant les deux McLaren, les deux Benetton, les deux Ferrari, les deux Ligier et les deux Lotus. Suzuki emmêle un pied dans sa colonne de direction. Il manque un freinage et atterrit dans le bac à sable.
3e: Mansell mène devant Patrese (2.5s.), Senna (6.4s.), Berger (7.3s.), Schumacher (7.8s.), Brundle (8.8s.), Alesi (11s.), Capelli (12s.), Comas (14s.), Boutsen (14.5s.), Herbert (16s.) et Häkkinen (17s.).
4e: Les Williams s'échappent comme à l'accoutumée. Le second peloton est composé des McLaren et des Benetton. Wendlinger exécute une figure à la troisième chicane. L'Autrichien fait halte à son stand pour changer ses gommes puis repart.
5e: Mansell compte trois secondes de marge sur Patrese. Schumacher est à l'attaque derrière Berger.
7e: Mansell est en tête devant Patrese (4.3s.), Senna (10.9s.), Berger (12.4s.), Schumacher (13s.) et Brundle (15.6s.).
8e: Katayama part en tête-à-queue à la première chicane et s'échoue dans les graviers. C'est l'abandon pour le pilote Larousse. Grouillard renonce également à cause d'une surchauffe moteur. Il était de toute façon sous le coup d'une pénalité pour départ anticipé.
9e: Wendlinger observe un second arrêt pour remplacer sa calandre.
10e: Mansell est premier devant Patrese (5.2s.), Senna (13.3s.), Berger (15.5s.), Schumacher (15.9s.), Brundle (19.2s.), Alesi (28.4s.), Capelli (30s.), Comas (32.5s.) et Boutsen (34.4s.).
11e: Mansell contrôle la situation aux avant-postes. Schumacher menace Berger au prix de quelques freinages appuyés.
13e: Mansell compte sept secondes d'avance sur Patrese, quinze secondes sur Senna. Herbert est le premier pilote à changer ses pneumatiques. De Cesaris effectue un tête-à-queue sans conséquence.
14e: Le tableau de bord de Mansell lui signale une crevaison, sans doute à tort. L'Anglais regagne néanmoins le stand Williams pour changer de pneus (8.1s.), plus tôt que prévu initialement. Il ressort troisième derrière Patrese et Senna. Berger rentre également car il a senti quelque chose détacher sur son train arrière. Son arrêt est long (14.6s.) car ses mécaniciens peinent à fixer la roue arrière-gauche.
15e: Patrese compte neuf secondes de marge sur Senna. Mansell est aux trousses du Pauliste. Berger retrouve son stand avec un moteur bafouillant, peut-être à cause d'un problème électronique. La McLaren est poussée vers le garage.
16e: L'étonnant Tarquini prend la dixième place à Häkkinen.
17e: Mansell est revenu dans les échappements de Senna.
18e: Mansell se blottit derrière Senna sans porter d'estocade pour le moment. Häkkinen repasse devant Tarquini.
19e: Mansell tente de déborder Senna par l'extérieur avant la première chicane mais le champion du monde garde sa position. Le Britannique, trop impatient, tente ensuite de déboîter aux abords de l'Ostkurve. Senna résiste et Mansell loupe son freinage, ce qui l'oblige à traverser l'échappatoire de la chicane. Il revient en piste collé à l'arrière de la McLaren et la dépasse dans la ligne droite suivante. Patrese change ses pneus à la fin de ce tour (7.2s.) puis reprend la piste derrière Schumacher. Boutsen remplace ses gommes.
20e: Mansell mène devant Senna (3.7s.), Schumacher (7.2s.), Patrese (9.9s.), Brundle (12.8s.), Alesi (29s), Capelli (34s.), Comas (48s.), Häkkinen (52s.) et Boutsen (53s.). Wendlinger observe un troisième arrêt pour faire resserrer le boulon de fixation de son lest.
21e: Capelli renonce suite à une perte de puissance de son moteur. Tarquini remplace ses gommes. Après une longue immobilisation, Berger reprend la piste pour voir si son moteur fonctionne de nouveau. L'expérience ne s'avérant pas concluante, il met définitivement pied à terre un tour plus tard.
22e: Häkkinen se gare sur le bas-côté, moteur coupé.
24e: Mansell s'envole et possède sept secondes de marge sur Senna qui a choisi de ne pas changer de pneus.
23e: Patrese fait la jonction avec Schumacher. Herbert s'arrête dans l'herbe suite à une chute de pression d'essence. Il n'y a plus de Lotus en course.
25e: Schumacher se défend sans faiblesse face à Patrese. Celui-ci se décale régulièrement dans les pleines charges pour le déstabiliser, sans résultat.
26e: Mansell devance Senna (9.4s.), Schumacher (12.6s.), Patrese (12.9s.), Brundle (22s.) et Alesi (42s.). De Cesaris quitte l'épreuve avec un moteur serré.
27e: Mansell abaisse le record du tour à presque chaque passage. Schumacher est harcelé par Patrese. Il allume ses roues pour prendre un tour à Gachot à la deuxième chicane.
29e: Mansell boucle son meilleur chrono du jour (1'42''379'''). Schumacher et Patrese « avalent » Belmondo à l'entame de la première ligne droite. L'Italien prend l'aspiration de la Benetton et, malgré les turbulences, se décale à deux reprises vers la gauche. L'Allemand ne lui laisse aucun espace et conserve l'ascendant au freinage de la chicane.
30e: Patrese attaque Schumacher à chaque accélération mais il lui manque toujours quelques mètres pour s'imposer. En fin de boucle, Mansell mène devant Senna (14.2s.), Schumacher (17.8s.), Patrese (18.2s.), Brundle (30.3s.), Alesi (52.5s.), Comas (1m. 14s.), Boutsen (1m. 24s.), Alboreto (1m. 43s.) et Morbidelli (-1t.).
31e: Patrese fait l'extérieur à Schumacher avant l'Ostkurve, mais le pilote Benetton lui barre la route. Puis, le jeune Allemand profite du dépassement de Martini dans le Stadium pour prendre un peu d'avance sur la Williams.
32e: Patrese se défait de Martini tandis que Schumacher bute sur Lehto dans le premier secteur. Patrese tente de passer la Benetton dans la seconde ligne droite, en pure perte. Puis, tous deux se débarrassent Lehto à la chicane suivante. A la sortie de l'Ostkurve, Patrese se décale à droite et se porte à la hauteur de son adversaire. Mais celui-ci est mieux placé pour aborder la prochaine chicane et reste devant. La résistance du jeune Schumacher face au vétéran italien est très impressionnante.
33e: Patrese se colle au train de Schumacher avant l'Ostkurve puis se déporte vers l'extérieur. Encore une fois, le jeune espoir résiste mais il arrive trop vite sur la chicane. Il freine en catastrophe et laisse enfin filer Patrese.
34e: Mansell mène devant Senna (14.3s.), Patrese (20.5s.), Schumacher (25.7s.), Brundle (33.5s.), Alesi (58.1s.), Comas (1m. 24s.) et Boutsen (1m. 33s.).
35e: Patrese pourchasse dorénavant Senna. Cinquième, Brundle est aujourd'hui très transparent. Pour sa défense, il souffre d'une violente douleur dorsale. Abandon de Tarquini, moteur cassé.
36e: Patrese boucle le meilleur tour de la course (1'41''591'''). Il concède moins de trois secondes à Senna.
37e: Mansell devance Senna de quinze secondes. Patrese a repris encore une seconde au Brésilien.
38e: Senna hausse son rythme pour repousser Patrese, mais doit composer avec des pneus déjà très usés. De son côté, l'Italien pousse au maximum et abîme aussi sa gomme.
39e: Patrese est dans les échappements de Senna et rencontre les mêmes difficultés pour passer que face Schumacher. Il tente de déborder le Brésilien à la dernière chicane mais ce dernier lui ferme la porte sans ménagement.
40e: Mansell est premier devant Senna (13.2s.), Patrese (13.3s.), Schumacher (31.6s.), Brundle (36.6s.), Alesi (1m. 09s.), Comas (1m. 33s.), Boutsen (1m. 36s.), Alboreto (-1t.) et Morbidelli (-1t.).
41e: Patrese monte sur ses freins à la chicane de l'Ostkurve mais parvient à garder le contrôle de sa Williams. Comas occupe le septième rang en gommes usées. Il est sous la menace de Boutsen qui lui dispose de pneus tendres frais.
42e: Patrese évolue dans le sillage de Senna. La cavalerie du V12 Honda et les turbulences l'empêchent de se porter une attaque.
43e: Mansell s'inquiète de l'état de ses gommes et diminue sa cadence. Patrese entame ce tour le nez dans la boîte de Senna. Il franchit trop rapidement la Nordkurve, escalade le vibreur, met deux roues dans la poussière et rattrape de justesse un commencement d'embardée. Morbidelli effectue un tête-à-queue et perd deux positions au bénéfice des Dallara.
44e: Chaud bouillant, Patrese est prêt à tout pour régler son compte à Senna. Comme cinq boucles plus tôt, il lui fait l'intérieur avant la dernière chicane. Mais à nouveau Senna lui coupe la route.
45ème et dernier tour: Mansell a considérablement levé le pied et ne compte plus que cinq secondes d'avance sur Senna. Ce dernier résiste comme il peut à un Patrese des plus pressants. Avant la dernière chicane, l'Italien se montre dans les rétroviseurs du Brésilien. Sa dernière chance de passer se situe à l'Onkokurve, c'est-à-dire à l'entrée du Stadium. Il se déporte vivement à l'intérieur mais Senna tourne à la corde comme si de rien n'était. Patrese freine sur la portion sale de la piste, part en tête-à-queue et s'évanouit dans la pelouse. Il cale et termine ainsi son laborieux Grand Prix.
Nigel Mansell franchit la ligne d'arrivée en vainqueur. C'est son huitième succès de la saison. Senna se classe deuxième et inscrit ses premiers points depuis Monaco. Schumacher, troisième, s'offre un podium devant ses fans. Brundle se classe quatrième, Alesi cinquième. Comas termine sixième et empoche le dernier point. Boutsen échoue à quelques dixièmes de son équipier. Patrese est classé huitième. Terminent également Alboreto, Lehto, Martini, Morbidelli, Belmondo, Gachot, Gugelmin et Wendlinger.
Après la course: bonnet d'âne pour Patrese
Nigel Mansell a vécu un après-midi plus pénible qu'à l'accoutumée. Les derniers tours de la course furent délicats à cause de pneumatiques usés, et il a dû serrer les dents pour encaisser les vibrations engendrées. Néanmoins, il peut maintenant envisager le titre mondial dès la prochaine épreuve en Hongrie. Il lui faudra pour cela inscrire quatre points de plus que Riccardo Patrese. Mais, superstitieux jusqu'au bout, l'Anglais refuse encore d'évoquer cette consécration: « Le championnat ? No comment. Non, rien. Quand comme moi on a couru déjà trois fois après sans l'attraper... »
Son collègue Riccardo Patrese fut le grand animateur de la course, pour un résultat nul. Le Padouan a clairement perdu ses nerfs et commis des erreurs de débutant, face à Schumacher d'abord, puis derrière Senna. « Ayrton n'a rien à se reprocher », dit-il. « Il a défendu sa place sportivement. Ce qui fut moins évident avec Schumacher... ». Patrese reproche à l'Allemand ses changements de trajectoire et ses freinages intempestifs. Mais on peut répliquer qu'un vétéran de 38 ans devrait savoir parer à ce genre de manœuvres... Du reste, là n'est pas le plus grave. Après dix Grands Prix en 1992, Patrese court encore après sa première victoire et sa première pole, alors qu'il dispose de la monoplace de référence. La comparaison avec Mansell est saisissante. Patrese demeure un pilote de grande classe, mais son incapacité à adapter son pilotage à la suspension active porte un coup très rude à sa réputation. Il n'a que peu de chances de conserver son volant chez Williams en 1993. Son meilleur avocat est maintenant... Mansell. Pas si bête, le moustachu !
Finalement, Ayrton Senna se satisfait de sa seconde place qu'il a su conserver, en utilisant toutes les ficelles de son métier. « Théoriquement, j'aurais dû moi aussi changer de pneus, mais c'était me condamner à finir derrière quatre ou cinq voitures impossible à dépasser », explique-t-il. « J'ai changé de tactique. J'ai piloté aussi proprement que possible pour préserver mes pneus et aller au bout. Ce fut payant. Mais les dix derniers tours furent vraiment pénibles, avec d'énormes vibrations et la pression de Patrese... » Une belle leçon du nouveau « professeur » de la Formule 1.
Enfin, Ford a réussi l'examen de passage de son V8 série VII. Schumacher a en effet pu résister très longtemps aux assauts de Patrese, qui s'est dit surpris par la vitesse de pointe de la Benetton. Il a également remarqué la surprenante accélération du V12 Honda. Face à ce réveil de la concurrence, Renault songe donc à introduire son V10 RS4 en course. Bernard Dudot déclare que ce sera peut-être chose faite dès le GP de Hongrie.
Tony