Disparition d'Enzo Ferrari (14 août 1988)
Depuis plusieurs semaines, la Scuderia, les tifosi, les Italiens suivaient avec inquiétude le déclin d'Enzo Ferrari. A 90 ans, l'Ingegnere souffrait de graves problèmes cardio-vasculaires et d'insuffisance rénale. Tout le monde se préparait sans l'avouer à l'inévitable, et notamment, en coulisses, les responsables de Fiat, propriétaires de l'empire du mourant. Mais le secret le plus absolu entoure les derniers jours du digne patriarche. Le dimanche 14 août 1988, au petit jour, dans sa maison de Modène, Enzo Anselmo Ferrari s'éteint dans la paix du Seigneur. La nouvelle demeure secrète. Le même jour, en fin d'après-midi, le Commendatore est inhumé dans la plus grande discrétion au cimentière San Cataldo. Une quinzaine de personnes, seules dans la confidence, assistent aux obsèques, Piero Lardi-Ferrari en tête. Ce n'est que le lundi 15 août, à 11h59 très précises, que Marco Piccinini annonce au monde entier la disparition de la plus grande légende du sport automobile.
Il serait fastidieux de narrer la carrière d'un homme tel qu'Enzo Ferrari, le plus important peut-être, le plus charismatique sans doute de l'histoire de l'automobile. Son célèbre cheval cabré, simple hommage à un héros de l'aviation de la Première Guerre Mondiale, est devenu l'emblème de la vitesse et a fait le tour du monde. Comme l'écrit Renaud de Laborderie, « italien et passionné, Ferrari l'était jusqu'aux bouts des ongles. Avec une chaleur florentine qui n'excluait jamais son pouvoir de séduction, son goût de l'intrigue, et aussi, du machiavélisme. Il s'est créé un personnage, à la fois en dehors du temps et reflet de son époque. » En effet, malgré sa vie recluse, jusqu'à son dernier souffle Enzo Ferrari s'est enquis des moindres détails de la vie de ses usines et de son écurie de compétition. Mais son absence délibérée des circuits lui conférait une dimension insolite empreinte de mystère. Il était le « deus ex machina », le sage qui prodiguait ses conseils dans l'ombre et savait apaiser les les plus vifs conflits. Le dénouement de la guerre FISA - FOCA en 1981 lui doit ainsi beaucoup, comme le reconnaissent Jean-Marie Balestre et Bernie Ecclestone. En outre, derrière un détachement et une insensibilité apparente, se cachait un homme aussi sensible que pudique, dont la vie fut à jamais déchirée par la mort prématurée de son fils Dino. Ferrari a aussi entretenu des relations très étroites, quasi paternelles avec certains de ses pilotes, et notamment avec Gilles Villeneuve dont la disparition l'a aussi profondément meurtri.
« Par sa personnalité comme par les exploits de ses pilotes, Enzo Ferrari était la course automobile dans sa splendeur et sa fascination parfois dangereuse », écrit de Laborderie. L'intéressé commentait sa réussite avec beaucoup plus de modestie: « Je ne me suis jamais considéré comme un créateur, ni comme un inventeur, mais seulement comme quelqu'un qui met les choses en route et entretient le mouvement », écrit-il dans ses mémoires. Reste la légende d'un homme qui aura fait de son nom le symbole de cette folle aventure de la course automobile, ce combat héroïque de l'homme pour dompter la machine, un des derniers mythes des temps modernes.
Ligier: Dernie file à l'anglaise...
Du côté de Ligier-Gitanes, Michel Tétu fait ses bagages après avoir remis sa démission à Guy Ligier, qui l'a très mal reçue. Mais une bien plus mauvaise nouvelle attend l'ex-rugbyman. Jean-Pierre Paoli a reçu une lettre de Frank Dernie dans laquelle celui-ci demande l'autorisation d'exercer... son préavis de départ entre le 12 août 1988 et le 12 février 1989 ! Cette démonstration d'humour « british » n'absout pas son auteur qui revient tout bonnement sur sa parole pour filer chez Lotus. Dernie a en effet accepté une offre de Peter Warr pour remplacer Gérard Ducarouge à compter de la saison prochaine. Sa démarche manque d'élégance mais est compréhensible. Il est évident que diriger les ateliers du Team Lotus est plus attirant que de prendre en main une armée mexicaine comme Ligier. Par ailleurs, Camel aurait étalé des arguments « convaincants » pour damer le pion à Gitanes, sa concurrente...
Sans Tétu et sans Dernie, les Bleus se retrouvent privés d'ingénieur en chef pour 1989. Guy Ligier entame des pourparlers avec Gérard Ducarouge, mais celui-ci garde en mémoire son éviction de 1981. Il élude poliment la proposition.
Mansell: maladie infantile... ou diplomatique ?
Atteint par la varicelle en Hongrie, Nigel Mansell a pris trois semaines de congé pour se remettre, sur les conseils de Frank Williams. Cependant, fin août, l'Anglais n'est toujours pas rétabli et annonce son forfait pour le GP de Belgique ! Cette absence laisse les commentateurs dubitatifs. Dans l'entourage de Mansell, on évoque une infection hépatique. Mais autour de Williams, on parle plutôt de « maladie diplomatique ». Mansell revient en effet de vacances au Texas...
Il est en tout cas remplacé par Martin Brundle qui vient d'être engagé pour participer au programme d'essais Williams-Renault, dont est bien sûr écarté Mansell, en partance chez Ferrari. D'aucuns suggèrent que Patrick Head, qui aime beaucoup Brundle, souhaite le mettre en valeur pour lui assurer un volant de titulaire aux côtés de Thierry Boutsen en 1989. Agacé par ces rumeurs, Frank Williams rend public le compte-rendu de la visite médicale que Mansell a subi sur l'ordre de son assureur, Lloyd's, et qui stipule que celui-ci a bel et bien contracté la varicelle.
Présentation de l'épreuve
Avec dix victoires en dix Grands Prix, McLaren-Honda assomme le championnat comme aucune autre équipe ne l'avait fait depuis les années 1950. La folle ambition de Ron Dennis de réaliser un « grand chelem », seize victoires en autant d'épreuves, pourrait bien devenir réalité. Au classement des pilotes, Alain Prost et Ayrton Senna sont à égalité avec 66 points chacun, mais à cause du barème en vigueur qui ne retient que les onze meilleurs résultats, c'est en fait celui qui remportera le plus de victoires qui sera sacré. Et pour l'heure, Senna totalise six succès contre quatre à Prost. Dans l'hypothèse, plus que probable, où tous deux se partageraient les succès jusqu'à au terme de la saison, c'est donc le premier qui arrivera au chiffre de neuf victoires qui s'adjugera la couronne.
L'ambiance est bien évidemment morose chez Ferrari. Marco Piccinini observe tristement le téléphone de son mobile-home avec lequel il rendait compte quotidiennement des événements au Commendatore. Depuis près de trois décennies, c'était en effet l'unique lien qui unissait Enzo Ferrari à ses pilotes et à ses ingénieurs lors des week-ends de course. Désormais, ce sont les responsables de Fiat qui s'entretiennent avec un Piccinini en sursis. Cesare Fiorio devrait en effet le remplacer l'an prochain.
Ferrari engage une nouvelle recrue, l'ingénieur motoriste allemand Ralf Hahn qui s'occupait jadis du V6 TAG-Porsche d'Alain Prost. Gustav Brunner prend pour sa part ses fonctions chez Zakspeed, malgré les vociférations de Gunther Schmidt qui le taxe de trahison et d'ingratitude.
De son côté, Enzo Coloni réalise une véritable razzia sur le staff technique d'AGS. Le directeur technique Christian Vanderpleyn et ses adjoints Michel Costa et Frédéric Dhainaut passent avec armes et bagages à l'officine de Pérouse. L'écurie varoise perd aussi le soutien de Bouygues qui n'a, semble-t-il, de toute façon pas tenu ses engagements financiers. Il est vrai que le géant du bâtiment conditionnait son appui au concours d'autres commanditaires qu'Henri Julien n'a pas su dénicher. En conséquence, la petite dizaine d'employés des Automobiles Gonfaronaises n'est rémunérée qu'avec retard. Cela explique probablement la migration de Vanderpleyn et consorts. François Guerre-Berthelot a beau minimiser ces événements, AGS se retrouve dans une situation très délicate. Heureusement, elle a peut-être trouvé un nouvel investisseur en la personne du jeune homme d'affaires Cyril de Rouvre.
Le vent souffle aussi très fort sur Eurobrun. Faute d'argent, l'ER188 n'est pas développée et, après un début de saison encourageant, régresse dans la hiérarchie. Surtout, le torchon brûle entre les deux associés, Walter Brun et Giampaolo Pavanello. Le premier reproche au second son manque de professionnalisme et se plaint de supporter seul le financement de l'équipe, Pavanello ne s'impliquant pas dans la recherche d'investisseurs. Les seuls bailleurs de fonds réguliers de l'écurie italienne sont en effet Brun et Marlboro, via Stefano Modena. De son côté, Pavanello souhaite racheter les parts de Brun et envisage d'engager le team en 1989 sous le nom d'Euroracing.
Gérard Ducarouge quittera Lotus fin 88, c'est un fait acquis. Pour aller où ? Certains l'envoient chez Ligier, d'autres chez Williams. Mais il est surpris à Spa sortant du motorhome de Gérard Larrousse et de Didier Calmels... Il est visiblement très intéressé par le potentiel technique de l'écurie française, et surtout par son futur partenariat avec Chrysler-Lamborghini.
Peter Collins annonce que Benetton prolonge le contrat d'Alessandro Nannini jusqu'en 1990. Le nom de son futur équipier n'est pas connu. L'espoir britannique Johnny Herbert était évoqué avec insistance bien qu'il ait participé à une séance d'essais avec Lotus. Mais le 21 août, il a été victime d'un terrifiant accident lors de l'épreuve de Formule 3000 de Brands-Hatch et souffre depuis de multiples fractures aux jambes, aux chevilles et aux pieds. La suite de sa carrière paraît bien compromise.
Minardi a récemment effectué des essais de pneumatiques avec Pirelli qui envisage un retour en Formule 1 en 1989. Lee Gaug de Goodyear s'inquiète de cette éventualité, non qu'il redoute la concurrence des pneus italiens, mais il craint le retour des gommes de qualification et une hausse importante des coûts de production.
Présent à Spa, Jean-Marie Balestre confirme que la FISA demandera aux écuries d'aligner au moins deux voitures la saison prochaine, en plus d'un dépôt de garantie relativement élevé, afin de décourager certains projets peu consistants. Par ailleurs, le président menace l'autodrome de Monza qui est sommé depuis plusieurs années de procéder à des travaux d'aménagement qui n'ont toujours pas été effectués. Il évoque la possibilité de déménager le Grand Prix d'Italie au Mugello, circuit que vient d'acquérir Ferrari.
Le Grand Prix de Belgique à Spa-Francorchamps, traditionnellement disputé fin mai, est désormais repoussé en août. La météo risque donc d'avoir son mot à dire dans ce secteur des Ardennes surnommée le « pot de chambre belge » ! Les turbos seront favorisés par l'altitude de 450 mètres. Mais l'important pour les ingénieurs est de parvenir à un parfait équilibre aérodynamique pour permettre aux bolides d'être aussi compétitifs dans les portions lentes et rapides.
Ligier apporter deux JS31 en « version légère » aptes à favoriser les qualifications. Avant cette étape belge, les grandes écuries participent à une importante séance d'essais à Monza au cours de laquelle Patrick Head réintroduit la suspension réactive sur les Williams afin de la fiabiliser, en vain. Ce dispositif est donc absent ici. McLaren adopte en revanche une nouvelle direction testée par Senna en Italie. Enfin, Ferrari charge Alboreto d'utiliser un V6 dont la cartographie permet une moindre consommation. Verdict du Milanais: moins d'essence pompée certes, mais trop peu de chevaux !
Essais et qualifications
Vendredi matin, Larrauri est éliminé lors de la séance pré-qualificative après une sortie de route dans laquelle il endommage son museau. Pendant ce temps-là, Piquet rencontre des problèmes d'embrayage sur sa Lotus de course et une panne de boîte de vitesses sur son mulet. Ces incidents vont gravement l'handicaper quelques heures plus tard.
Les séances qualificatives sont perturbées par la pluie. Samedi, le circuit est noyé sous les eaux, si bien que c'est vendredi, lors d'un après-midi entrecoupé d'une violente averse, que les pilotes réalisent leurs meilleures performances. Le temps que la piste sèche, ils ont grosso modo cinquante minutes pour se frayer un chemin dans un trafic intense et déterminer leur position sur la grille.
Senna remporte cette première « bataille des Ardennes » en signant sa vingt-cinquième pole position (en 1'53''718'''), ce qui lui permet de désormais devancer Lauda et Piquet au palmarès. Prost est second et concède quatre dixièmes à son équipier. Les Ferrari de Berger et d'Alboreto occupent la seconde ligne. Tous deux ont dû remplacer leurs pop-off valves qui s'avéraient défaillantes. Menacé chez Williams, Patrese se réveille en signant un superbe cinquième chrono. Il précède nettement Brundle (12ème) qui se plaint d'une adhérence précaire. Les Benetton-Ford (Boutsen 6ème, Nannini 7ème) se sont toutes deux accrochées avec les Arrows-Megatron (Warwick 10ème, Cheever 11ème). Atteint par un mauvais virus, Warwick ne peut boucler deux tours sans avoir envie de vomir. Il est responsable d'une mésentente avec Boutsen qui aboutit sur une collision. Pour sa part, Nannini brise une roue contre la voiture de Cheever... Si Warwick s'excuse auprès de Boutsen, Cheever accuse Nannini d'être responsable de l'incident les ayant opposés.
Nakajima place sa Lotus-Honda au huitième rang et précède Piquet qui, on l'a vu, est retardé par de sérieux problèmes techniques. Les March-Judd manquent de fiabilité: Gugelmin (13ème) casse son moteur et Capelli (14ème) est victime d'un bris de suspension à La Source. Ils côtoient la Dallara du valeureux Caffi (15ème). Alliot (16ème) déniche enfin de bons réglages pour sa Lola LC. Dalmas (23ème) ne peut défendre ses chances suite à une coupure électrique. Les Ligier-Judd (Arnoux 17ème, Johansson 20ème) font pour une fois un peu mieux que de la figuration, probablement parce qu'elles ont signé leurs meilleurs chronos avant l'averse. Elles encerclent l'AGS de Streiff (18ème) et la Rial de de Cesaris (19ème). On retrouve en fond de grille la Tyrrell de Palmer (21ème), la Coloni de Tarquini (22ème), les Zakspeed de Ghinzani (24ème) et de Schneider (25ème), et l'Osella de Larini (26ème).
Minardi pleure ses deux monoplaces (Pérez-Sala 27ème, Martini 28ème), décidément trop lentes sur les pistes rapides. Modena échoue à se qualifier, tout comme Bailey, gourmandé par Ken Tyrrell après une nouvelle sortie de route... Quant à l'échec des Eurobrun, il est directement imputable à Giampaolo Pavanello qui a refusé d'utiliser les V8 Ford-Cosworth spécialement préparés par Heini Mader pour cette épreuve.
Brundle se met en valeur samedi après-midi en signant le meilleur temps sur le mouillé. L'étonnant Caffi se classe septième avec sa Dallara de réserve.
Le Grand Prix
Dimanche matin, les pilotes sont rassurés par un vent frais qui balaie un ciel clair. Mais le warm-up revêt une importance capitale pour régler les voitures. Prost adopte une configuration aérodynamique sensiblement différente de celle de son coéquipier. Il met en effet peu d'aileron à l'avant afin de diminuer sa consommation. Pessimiste, Berger évoque à nouveau la gloutonnerie de son V6 Ferrari. A son retour aux stands, il a néanmoins l'heureuse surprise d'être bousculé par une belle créature qui lui abandonne son numéro de téléphone, griffonné sur un morceau de papier...
Le ciel se couvre peu avant le départ mais heureusement les orages redoutés n'éclateront pas. Afin d'éviter un accrochage calamiteux, Senna et Prost conviennent de ne pas s'affronter avant le freinage délicat de La Source.
Départ: Placé sur une portion sale de la piste, Senna fait patiner ses roues. Prost saisit l'opportunité et, depuis l'extérieur, négocie en tête le premier virage devant Senna, Berger, Alboreto, Boutsen et Patrese.
1er tour: Blotti derrière l'aileron de son équipier, Senna le double par l'intérieur dans la ligne droite de Kemmel et reprend le commandement au freinage des Combes. Nakajima et Nannini dépassent Patrese. A la fin de ce premier tour, Senna devance Prost, Berger, Alboreto, Boutsen, Nakajima, Nannini, Patrese, Warwick et Piquet.
2e: Senna compte une seconde et demie d'avance sur Prost qui est suivi de près par un Berger incisif. Celui-ci tente de faire l'intérieur au Français aux Combes, sans succès. Warwick dépasse Patrese dont la Williams, mal réglée, glisse beaucoup.
3e: Berger menace toujours Prost. Mais bientôt l'Autrichien décélère car un problème électronique détraque son moteur. Piquet déborde Patrese. Arnoux percute de Cesaris dans le virage de Rivage. Tous deux échouent dans les graviers. Le Français accuse l'Italien d'avoir « pilé » devant lui...
4e: Senna compte trois secondes de marge sur Prost. Cheever se défait de Patrese. Berger s'arrête à son stand pour remplacer sa centrale de gestion Marelli-Weber.
5e: Senna devance Prost (3.2s.), Alboreto (5.5s.), Boutsen (9s.), Nakajima (14s.) et Nannini (14.6s.). Piquet et Cheever dépassent Warwick. La voiture de Berger est rentrée au garage.
6e: Nakajima se met en valeur comme rarement. Cinquième, il résiste superbement à Nannini et à son chef de file Piquet.
7e: Prost ne menace pas Senna car sa McLaren glisse dans les portions lentes. En effet, puisqu'il est parti avec peu d'appui, ses pneus s'altèrent rapidement. Il concède quatre secondes à son équipier. Alboreto et Boutsen demeurent dans son sillage. Berger reprend la piste avec quatre boucles de retard.
9e: L'écart est stable entre les McLaren-Honda. Nakajima retient toujours Nannini qui devient la cible des assauts de Piquet. Onzième, Brundle est attaqué par les March de Capelli et de Gugelmin.
10e: Piquet prend la sixième place à Nannini. Gugelmin double Capelli. Dalmas renonce, pour la deuxième fois seulement cette saison, suite à la rupture de son moteur qui cafouillait depuis le départ.
11e: Senna est premier devant Prost (4.1s.), Alboreto (9s.), Boutsen (17s.), Nakajima (25s.), Piquet (27s.), Nannini (28s.), Cheever (31s.), Warwick (33s.), Patrese (33.8s.), Brundle (37s.), Gugelmin (38s.) et Capelli (38.6s.).
12e: Prost a semé Alboreto et Boutsen. Piquet est aux trousses de Nakajima. Gugelmin déborde Brundle.
13e: Senna devance Prost (4.2s.), Alboreto (12.2s.), Boutsen (22.4s.), Nakajima (29.7s.), Piquet (30.5s.) et Nannini (33s.). Capelli double Brundle. Berger signe le meilleur tour de la course: 2'00''772'''.
15e: Cinq secondes séparent dorénavant Senna et Prost. Larini rejoint son stand pour abandonner à cause d'un problème d'alimentation. Berger regagne définitivement son garage, son moteur ayant cédé pour de bon.
16e: Senna est leader devant Prost (5s.), Alboreto (16.4s.), Boutsen (27.5s.), Nakajima (36.7s.), Piquet (37.2s.), Nannini (40.5s.), Cheever (43s.), Warwick (44.2s.), Patrese (45.7s.), Gugelmin (47.1s.), Capelli (48s.) et Brundle (51s.).
17e: Piquet déborde Nakajima à Kemmel. Le Carioca se lance à la poursuite de Boutsen. Le duo Gugelmin - Capelli fait la jonction avec le trio Cheever - Warwick - Patrese.
18e: Senna réalise son meilleur chrono de l'après-midi (2'01''061'''). Prost roule à cinq secondes et demie et conclut lui aussi son tour le plus rapide (2'01''702''').
20e: Gugelmin tente de faire l'extérieur à Patrese à la chicane de l'Arrêt de Bus, mais celui-ci lui coupe la trajectoire. Le Brésilien escalade le trottoir et se fait déborder par un Capelli très audacieux qui se faufile à l'intérieur.
21e: Senna précède Prost (6s.), Alboreto (25s.), Boutsen (38s.), Piquet (46s.), Nakajima (51s.), Nannini (52s.), Cheever (56s.), Warwick (56s.), Patrese (58s.), Capelli (1m.) et Gugelmin (1m. 01s.).
22e: Boutsen reprend quelques secondes à Alboreto. Le moteur de Nakajima se tait au pied du raidillon. Nannini double la Lotus, qui reprend vie pour encore quelques kilomètres, avant que son pilote ne la ramène aux stands. Warwick double Cheever qui a abîmé prématurément ses gommes.
23e: Senna compte sept secondes d'avance sur Prost. Bien qu'il soit privé d'embrayage, à l'instar de son équipier, Capelli menace Patrese et frôle son aileron arrière lors d'un freinage. Nakajima abandonne.
25e: Senna devance Prost (7.6s.), Alboreto (28s.), Boutsen (42.5s.), Piquet (52.6s.), Nannini (59.4s.), Warwick (1m. 03s.) et Cheever (1m. 06s.). Capelli fait l'intérieur à Patrese à La Source. Le Padouan tasse le Milanais contre la bordure et conserve sa position.
26e: Capelli déborde Patrese par l'extérieur aux Fagnes. Tous deux conservent leurs trajectoires et franchissent l'enchaînement roues contre roues. C'est finalement Capelli, mieux placé, qui en sort premier.
27e: Déstabilisé par de mauvais freins, Piquet effectue une courte excursion dans la pelouse et perd tout espoir de rattraper Boutsen. Ghinzani se gare aux Combes après la rupture d'une canalisation d'huile sur sa Zakspeed.
28e: Senna possède neuf secondes de marge sur Prost qui désormais ne songe qu'à préserver ses pneumatiques. Capelli prend la huitième place à Cheever au freinage de Stavelot. Gugelmin est sur les talons de Patrese.
29e: Piquet s'aperçoit que son moteur surchauffe. Ses radiateurs sont en effet obstrués depuis sa sortie de route. Patrese double Cheever à l'Arrêt de Bus. L'Américain freine très tard et surprend Gugelmin qui doit faire un écart pour éviter de l'harponner.
30e: Senna domine devant Prost (13.5s.), Alboreto (35s.), Boutsen (53s.), Piquet (1m. 06s.), Nannini (1m. 09s.), Warwick (1m. 12s.), Capelli (1m 19s.), Patrese (1m. 19s.), Cheever (1m. 30s.) et Brundle (1m. 40s.). Gugelmin a laissé son extracteur contre un trottoir. Il part en tête-à-queue après Blanchimont et cale, faute d'embrayage. Il doit renoncer.
31e: Patrese s'immobilise dans une échappatoire, moteur Judd muet. Tarquini s'arrête chez Coloni pour faire réparer sa crémaillère de direction et perd cinq minutes dans cette opération.
32e: Prost laisse filer Senna et lui concède maintenant dix-sept secondes. Nannini se rapproche de Piquet.
34e: Nannini est revenu juste derrière Piquet qui réduit sa cadence pour sauver son moteur. Plus loin, Capelli rattrape Warwick qui perd de la pression de suralimentation.
35e: Senna a dix-neuf secondes de marge sur Prost. Une fumée bleue s'échappe de la Ferrari d'Alboreto. Le V6 italien expire et vomit son huile...
36e: Alboreto poursuit sa route avec son moteur en flammes, jusqu'à ce que celui-ci s'éteigne après les Combes. Capelli dépasse Warwick.
37e: Senna est premier devant Prost (21.1s.), Boutsen (1m. 03s.), Piquet (1m. 19s.), Nannini (1m. 20s.) et Capelli (1m. 24s.). Alboreto regagne les stands à pied.
38e: Piquet résiste très fermement à Nannini. Celui-ci le déborde par la gauche en passant devant les stands. Leurs roues se frôlent au freinage, exercice délicat pour Piquet dont les disques sont abîmés. Il tire tout droit à La Source tandis que Nannini, opportuniste, braque à droite et s'empare ainsi de la quatrième place.
39e: Piquet est la prochaine proie de l'insatiable Capelli. Schneider regagne son garage, bloqué en quatrième vitesse. Il jette l'éponge.
40e: Senna prend un tour à Cheever et à Brundle, en bagarre pour la huitième place. Le Brésilien devance Prost (23.4s.), Boutsen (1m. 02s.), Nannini (1m. 15s.), Piquet (1m. 21s.), Capelli (1m. 22s.), Warwick (1m. 28s.), Cheever (-1t.), Brundle (-1t.) et Caffi (-1t.).
41e: Capelli s'empare de la cinquième place aux dépens de Piquet. Palmer renonce car son câble d'accélérateur s'est brisé. Johansson s'immobilise quant à lui après la rupture d'un roulement de roue.
42e: A un tour du but, Senna possède vingt-neuf secondes d'avance sur Prost.
43ème et dernier tour: Ayrton Senna remporte sa septième victoire en 1988 devant Prost. Boutsen récolte la troisième place à domicile et précède son équipier Nannini. Grand animateur de cette course monotone, Capelli finit cinquième. Piquet se contente de la sixième position. Warwick, Cheever, Brundle, Caffi, Alliot et Streiff coupent aussi la ligne d'arrivée. Tarquini concède sept tours au vainqueur et n'est pas classé.
Après la course: Prost baisse les bras
Comme l'écrit le journaliste de L'Équipe Johnny Rives, la victoire d'Ayrton Senna « n'a pas fait un pli ». « Senna champion, ce n'est pas encore fait... Mais c'est comme si ça l'était ! » En effet, le Pauliste mène maintenant par sept victoires à quatre pour Prost, et n'est donc plus qu'à deux succès du titre mondial.
Alain Prost paraît très découragé et concède même sa défaite au championnat, un peu prématurément: « J'ai changé mes réglages, explique-t-il, pour faire la différence au niveau de la consommation. Et si je ne m'en tiens qu'aux chiffes, j'y suis parvenu puisque j'ai consommé trois ou quatre litres de moins que Senna. Mais en mettant très peu d'appui aérodynamique à l'avant, la voiture, après une quinzaine de tours, était arrêtée dans les portions sinueuses. Quand la piste s'est dégradée, et que de l'huile est apparue, les pneus sont devenus rapidement moins efficaces, et la McLaren difficile à conduire. Après 25 tours, j'ai lâché prise et laissé partir Senna qui ne connaissait pas de problèmes de consommation. [...] Senna mérite vraiment le titre cette année. Pour moi, les carottes sont cuites... Je ne me vois pas gagner quatre courses d'ici la fin de la saison. »
Par sa résignation, Prost se livre en pâture à l'opinion publique. Certains journalistes, qui l'avaient déjà critiqué après son abandon à Silverstone, colportent complaisamment ces propos pessimistes. A contrario, Ayrton Senna ne pavoise pas et n'accepte pas cette abdication en sa faveur. « Ce n'est pas facile de battre Alain ! » se récrie-t-il devant ses nouveaux courtisans. « Il faut être sans cesse sous pression et efficace. Cette course fut sans doute moins difficile que celle de Budapest où ma voiture n'était pas au mieux de sa forme, mais j'ai cravaché. » Quant au championnat, « rien n'est définitivement joué. Je peux commettre des erreurs », rappelle Ayrton, l'air grave.
Avec 147 points, McLaren s'adjuge le titre mondial des constructeurs grâce à une avance de 103 longueurs sur Ferrari ! Ron Dennis congratule chaleureusement Gordon Murray et Neil Oatley qui ont conçu cette fusée imbattable qu'est la MP4/4. Quant aux ingénieurs de Honda, ils fêtent cette troisième campagne victorieuse consécutive avec une retenue toute... nippone. Osamu Goto sourit.
Disqualifications des Benetton
Thierry Boutsen décroche une superbe troisième place devant un public belge très sympathique et enthousiaste. « Ma voiture fut parfaite, le moteur fantastique... » savoure le Bruxellois.
Malheureusement, son résultat et celui d'Alessandro Nannini sont rapidement mis en cause par Gabriele Cadringher, l'ingénieur de la FISA. Le prélèvement de carburant effectué sur leurs machines après l'arrivée révèle un indice d'octane trop élevé, dépassant les 102 RON réglementaires. Ce n'est cependant qu'au mois de décembre, après la fin du championnat, que le Conseil Mondial de la FISA inflige 250 000 dollars d'amende à Benetton et prononce les disqualifications de Boutsen et de Nannini. Du coup, Capelli monte virtuellement sur la troisième marche du podium, Piquet récupère la quatrième place. Warwick et Cheever grimpent dans les points, offrant ainsi trois unités supplémentaires à Arrows.
Tony