Keke ROSBERG
 K.ROSBERG
Williams Honda
Alain PROST
 A.PROST
McLaren TAG Porsche
Elio De ANGELIS
 E.De ANGELIS
Lotus Renault

389. Großer Preis

XIII Grande Premio do Brasil
Sonnig
Jacarepagua
Sonntag, 25. März 1984
61 Runden x 5.031 km - 306.891 km
Das Rennen war für 62 Runden angesetzt und wurde nach der Annullierung der Startprozedur auf 61 Runden verkürzt.
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Présentation de la saison

La saison 1984 commence à Jacarepaguá dans un climat d'effervescence, mais aussi de doute après que le dénouement de la saison 83 a été truqué par la tricherie de Brabham-BMW, couverte et excusée par un président de la FISA de plus en plus contesté.

 

Chez Ferrari on vise bien sûr un troisième trophée des constructeurs d'affilée et si possible le titre des pilotes. René Arnoux subit la concurrence du jeune Italien Michele Alboreto, 27 ans et déjà deux victoires à son palmarès avec Tyrrell. Toutefois la 126 C4 engagée par la Scuderia n'est qu'une évolution de la C3. Le capot moteur a été abaissé et le centre de gravité déplacé pour trouver un peu de motricité. Le moteur turbo est entièrement refondu et un peu plus puissant. Les ingénieurs ont surtout travaillé sur le système d'allumage/injection concocté avec Weber et Marelli. A Rio seul Alboreto en dispose.

 

Après son échec de 1983, Renault-Elf se remet à l'ouvrage avec deux nouveaux pilotes de grande valeur, Patrick Tambay et Derek Warwick. Revanchard après avoir été évincé par Ferrari, Tambay vise le titre mondial qui lui a échappé en 83. La RE50 présente des aménagements aérodynamiques inédits, notamment des échappements d'air débouchant sur les pontons. Le V6 est désormais coiffé de turbos Garrett, les KKK allemands ayant déçu l'année précédente. Les ingénieurs français s'inquiètent toutefois de la consommation excessive du moteur et redoutent les pannes sèches...

 

McLaren-TAG-Porsche aborde 1984 avec d'immenses ambitions. Tout d'abord, Ron Dennis a réuni un duo de pilotes exceptionnel, Niki Lauda et Alain Prost. Limogé par Renault après son échec de Kyalami, le jeune Français a soif de revanche et est enchanté de faire équipe avec Lauda qu'il considère comme son modèle. Celui-ci est moins enthousiaste car il perçoit en son cadet un dangereux rival... Très perfectionniste, John Barnard a définitivement achevé sa MP4/2 trois jours avant l'embarquement pour Rio. Cette voiture ressemble à la MP4/1 mais possède un capot moteur bombé qui donne à l'ensemble une forme de bouteille de « Coca-Cola ». Comme la plupart des autres bolides, la MP4/2 est munie d'un gros aileron arrière associé à deux petits ailerons latéraux. Le V6 turbo Porsche a été remanié et dispose désormais d'échangeurs sous la carrosserie. Sa formidable puissance (750 chevaux) compense la traînée suscitée par le gros aileron. Enfin, McLaren adopte enfin définitivement des freins en fibre de carbone conçus par Carbone Industrie. Esthétiquement, le résultat est superbe et le nouveau « bébé » de Barnard inquiète la concurrence.

 

Brabham-BMW aborde cette nouvelle saison auréolée du titre mondial de Nelson Piquet, mais aussi imprégnée d'une fâcheuse réputation. La révélation de l'affaire de l'essence illégale utilisée fin 83 est encore toute récente. Cette année Gordon Murray n'a pas fait dans l'originalité : la BT53 ressemble beaucoup à la BT52, si ce n'est des pontons allongés et un nez plus galbé. Pour épauler Piquet, Bernie Ecclestone a recruté les frères Fabi. L'aîné Teo sera titulaire, mais comme il disputera en parallèle le championnat CART aux États-Unis, son cadet Corrado sera chargé de le suppléer le moment venu.

 

Williams a conservé ses deux pilotes Keke Rosberg et Jacques Laffite, même si celui-ci n'est pas très heureux à Didcot. Les FW09 apparues au GP d'Afrique du Sud 1983 ont été retouchées par Patrick Head, principalement au niveau de la suspension, désormais à tirants. Le moteur Honda est maintenant équipé du turbos IHI nippons. Le problème est que ce V6 est d'une incroyable brutalité, la puissance venant soudainement après un long temps de réponse. Aussi, le sous-virage inhérent aux Williams depuis des années peut soudain se transformer en un terrible survirage généré par le patinage des roues arrière. Autant dire que Rosberg et Laffite vont devoir sacrément bien maîtriser leurs volants...

 

Alfa Romeo a perdu le soutient de Marlboro mais a obtenu celui de Benetton qui a délaissé Tyrrell. Les voitures d'Euroracing sont donc repeintes en vert. La 184T en carbone ne diffère de la 183T que par ses suspensions et ses pneus Goodyear qui remplacent les Michelin. Elle est l'œuvre des ingénieurs Mario Tolentino et Luigi Marmiroli, rejoints durant l'hiver par Gustav Brunner. Ceux-ci sont très inquiets à cause du V8 turbo : très gourmand en essence, il pourrait bien avaler les 220 litres d'essence autorisés avant même la fin des Grands Prix. La résolution du problème s'annonce épineuse. Côté pilotes, Giampaolo Pavanello a récupéré les deux recalés des « top teams », Riccardo Patrese et Eddie Cheever, qui espèrent redorer leurs blasons.

 

Lotus-Renault entame cette saison avec de grandes ambitions. Gérard Ducarouge a réalisé une superbe 95T en carbone/Kevlar. Elle peut adopter deux configurations aérodynamiques, à haute et basse vitesses. Les échappements débouchent sur les pontons, la boîte compte six rapports et les freins sont en carbone. Lotus a aussi abandonné les pneus Pirelli pour Goodyear. Le duo Elio de Angelis - Nigel Mansell a été reconduit, même si les deux hommes sont de moins en moins « copains ». En outre, Mansell sait qu'il n'a conservé sa place uniquement parce que les négociations menées entre Peter Warr et John Watson ont échoué. Côté turbos, L'Italien recevra des Garrett, l'Anglais des KKK.

 

Ken Tyrrell a perdu le concours de Benetton et se retrouve encore sans sponsor. Il aligne toujours les 012 en forme de delta, dépourvues de pontons latéraux. A noter que les disques de freins sont accolés à la boîte de vitesses, technique qui avait disparu depuis trois ans. Pas de turbo : l'équipe anglaise est la dernière qui utilisera les moteurs V8 DFY Ford-Cosworth, munis d'une nouvelle culasse. Côté pilotes, Tyrrell fait confiance à deux jeunes pousses : l'Anglais Martin Brundle, 25 ans, vice-champion britannique de Formule 3, et l'Allemand Stefan Bellof, 27 ans, brillant pilote de sports prototypes et de Formule 2. Il débarque d'ailleurs en F1 avec l'appui de son ancien patron Willy Maurer. Danny Sullivan a été écarté à la dernière minute à son profit.

 

Après une saison 1983 désastreuse (zéro point inscrit), Guy Ligier aborde la saison 84 gonflé d'espoirs : un budget important (Gitanes et Loto, merci « Tonton »...), une JS23 en carbone/Kevlar, et surtout le V6 turbo Renault. En outre, Michelin a accepté de fournir ses pneus pour un prix raisonnable. Hélas, les ennuis sont arrivés dès les essais hivernaux, les points d'attache de suspension ayant tendance à lâcher... Ligier a recruté Andrea de Cesaris, renvoyé par Alfa Romeo mais qui a montré en 1983 qu'il savait faire autre chose que casser des voitures. Son équipier est François Hesnault, 27 ans, récent champion de France de Formule 3. Ce choix laisse perplexe car Hesnault est peu expérimenté et se trouve lancé dans le grand bain sans préparation sérieuse.

 

La sympathique écurie Toleman et son ingénieur Rory Byrne présentent une version B de la TG183, à l'allure plutôt pataude. Brian Hart a beaucoup travaillé pour fiabiliser son turbo qui utilise désormais un système d'allumage et d'injection Lucas (à la place de Magnetti-Marelli). Alex Hawkridge a recruté le très bon Vénézuélien Johnny Cecotto (qui apporte le concours du café Segafredo, compensant le départ de Candy), ainsi que le jeune prodige brésilien Ayrton Senna da Silva, 24 ans, champion d'Angleterre de Formule 3 l'année précédente après une bataille épique contre Martin Brundle. A signaler enfin que l'ancien coureur Peter Gethin a été nommé team manager par Alex Hawkridge.

 

Jackie Oliver a conclu un partenariat avec BMW pour la fourniture de blocs turbo. Mais l'A7 chargée de les accueillir n'est pas prête en ce début de saison, et ce sont de vieilles A6 à moteur Cosworth qui sont conduites à Rio par Marc Surer et Thierry Boutsen, demeurés au bercail. Au moins Arrows bénéficie enfin d'un budget conséquent grâce au cigarettier Barclay.

 

ATS est toujours liée avec BMW et Manfred Winkelhock a accepté de prolonger son contrat, malgré ses relations houleuses avec Günther Schmidt. Gustav Brunner a imaginé une élégante D7 qui possède une nouvelle boîte de vitesses à six rapports. Ses pontons s'inspirent de la McLaren MP4/2. Problème : si la D7 est présente à Rio, Brunner n'est pas là : il a claqué la porte pour rejoindre Euroracing... L'écurie allemande utilise des pneus Pirelli à la place des Goodyear.

 

L'équipe de John Macdonald se nomme désormais RAM tout court et utilise des moteurs turbos Hart. Dave Kelly a conçu une 01 en aluminium, un bricolage provisoirement confié au jeune espoir anglais Jonathan Palmer, ainsi qu'une 02 en fibre de carbone dont hérite le Français Philippe Alliot, 30 ans, baroudeur des formules de promotion, financé par le cigarettier Skoal Bandit et... la Comtesse du Barry (!).

Spirit a survécu malgré son abandon par Honda. John Wickham a dû se rebattre sur Hart pour motoriser le châssis 101 imaginé par Gordon Coppuck. Viré par Alfa Romeo, Mauro Baldi reçoit le triste privilège de conduire cette voiture presque dépourvue de sponsors.

 

Enzo Osella a déniché un budget de deux millions de dollars pour sauver son écurie et acheter huit exemplaires du V8 turbo Alfa Romeo. Un « collège » d'ingénieurs a élaboré la FA1F, à coque en carbone et à pneus Pirelli. Piercarlo Ghinzani est resté fidèle à son patron mais n'a pas de coéquipier pour le moment.

 

Michelin a réduit sa clientèle pour cette saison et fournit donc seulement Renault, Brabham, McLaren et Ligier. Goodyear franchit enfin le pas et présente des pneus à carcasse radiale, avec sept ans de retard sur Michelin. Williams, Ferrari, Lotus, Tyrrell, Arrows et Alfa Romeo sont ses clients. Pirelli est toujours là, en tant que « fournisseur du pauvre », et équipe Toleman, Spirit, RAM, ATS et Osella.

 

Quelques noms prestigieux sont absents. Abandonné par McLaren, John Watson a discuté avec Brabham et Lotus, sans succès. Jean-Pierre Jarier n'a pas trouvé non plus de volant malgré des contacts avec Ken Tyrrell. Bruno Giacomelli dispute désormais le championnat CART avec l'équipe de Teddy Yip qui a aussi déserté la F1. L'excellent Colombien Roberto Guerrero n'a pas pu trouver de volant et s'est également exilé aux États-Unis. Enfin, Emerson Fittipaldi a accompli quelques essais pour Spirit, avant de renoncer à ce « come-back »... et de se diriger lui aussi vers l'IndyCar. Mais entretemps l'ancien champion du monde est devenu le protecteur du jeune Ayrton Senna auquel il réserve quelques bons conseils.

 

L'économie d'essence à l'ordre du jour

La réglementation a subi des changements majeurs. Jugé trop dangereux, les ravitaillements en essence sont maintenant interdits. Les sabots d'aileron apparus sur les Ferrari et ensuite copiés par beaucoup d'équipes sont aussi prohibés afin de réduire l'appui aérodynamique. La structure déformable avant obligatoire est désormais soumise à un « crash-test », une simulation en laboratoire de choc frontal pour vérifier la résistance de l'élément.

 

Mais la plus grosse innovation est le plafonnement des réservoirs d'essence à 220 litres, contre 250 auparavant. Jean-Marie Balestre a imposé cette mesure pour limiter la puissance des moteurs turbo. Les constructeurs sont largement hostiles à cette règle, d'autant plus qu'à terme la FISA souhaite encore abaisser ce maximum à 195 litres. Il s'agit désormais de réduire la pression des turbos pour freiner la consommation de carburant. Ce qui signifie moins de chevaux pour les moteurs. Les ingénieurs ont planché là-dessus tout l'hiver mais partent dans l'inconnu. Les pilotes sont aussi dubitatifs car désormais ils devront surveiller au plus près leur consommation d'essence, et peut-être ralentir considérablement en fin de Grand Prix. « Cette réglementation est absurde, tonne Gordon Murray. Entre les essais et la course elle-même, les machines auront perdu une puissance considérable. Nous devons trouver une astuce pour maintenir l'image suprême de la Formule 1. » Pourtant, gare à qui voudrait enfreindre la loi : Balestre prévient qu'en cas de fraude, la monoplace incriminée serait bannie du championnat du monde.

 

Les ingénieurs se creusent les méninges pour embarquer plus d'essence sans violer la loi. Une solution : réfrigérer le carburant. La plupart des écuries arrivent ainsi à Rio munies de plusieurs caisses contenant le précieux liquide stocké entre - 25 et - 30 °C. Le gain obtenu ne serait pourtant que d'approximativement quatre ou cinq litres. « Mais chaque goutte va compter double ! » lance Gérard Larrousse. Le coup de l'opération paraît en outre très élevé : « Il faut 800 dollars d'azote pour gagner deux fois huit litres... » soupire Gérard Ducarouge. Afin de mieux maîtriser leur consommation, les pilotes bénéficient désormais de mini-ordinateurs incrustés sur les tableaux de bord. Ils peuvent ainsi connaître au litre près l'essence contenue dans leurs réservoirs. Évidemment, ces merveilles d'électronique coûtent elles aussi très cher... Du reste, d'autres paramètres déterminent la consommation : l'aérodynamique, la suspension, la qualité des pneus, les styles de conduite... et le contenu de l'essence elle-même. L'affaire Brabham-BMW est encore dans toutes les mémoires...

 

A signaler enfin qu'en novembre 1983, le tribunal d'appel de la FIA a débouté Williams et Tyrrell et légalisé l'injection d'eau. En outre, la quasi-totalité des monoplaces possèdent des suspensions à tirants, système inventé par Gordon Murray qui comme souvent a fait beaucoup d'émules.

 

Présentation de l'épreuve

Nelson Piquet arrive à Rio de Janeiro en champion du monde et suscite une grande agitation qu'il fuit vivement. Ce Carioca qui paraît si extraverti n'aime pas la foule. En fait, le courant ne passe pas vraiment entre lui et ses compatriotes. Il est admiré, mais pas aimé jusqu'à l'adulation comme le furent jadis Emerson Fittipaldi et Carlos Pace.

 

Outre la question du carburant, le poids demeure un casse-tête récurrent pour les ingénieurs. Pour Arrows et Tyrrell, dernières écuries à utiliser un moteur atmosphérique, c'est même un point crucial. Il faut alléger la voiture au maximum pour essayer de ne pas être trop distancé par les turbos. Ken Tyrrell prétend ainsi que son équipe a fait un très sérieux progrès en adoptant un dispositif d'injecteur d'eau. Gérard Crombac affirme dans Sport Auto qu'en fait il ne s'agit que d'un tour de passe-passe : la 012 est allégée avant le départ bien en dessous du poids minimum (540 kg), puis lestée en eau au cours d'un changement de pneus pour « faire le poids » à l'arrivée. Or, comme on le verra pas la suite, Crombac ne fait qu'approcher la vérité...

 

Les qualifications

Les premiers essais de la saison sont dominés par les Lotus-Renault. Lors de la séance du vendredi, de Angelis signe le meilleur temps devant Mansell et Prost. Le samedi la concurrence est plus sévère, mais de Angelis conserve la pole position. C'est une belle victoire pour la nouvelle Lotus 95T mais aussi pour les pneus Goodyear radiaux. Impliqué dans deux têtes-à-queue douteux avec Prost, Mansell se contente de la cinquième place. Alboreto est enchanté par sa nouvelle Ferrari et se place en deuxième position. En revanche Arnoux est accablé de petits pépins mécaniques et n'est que dixième. Les pilotes Renault ont eu du mal à trouver les bons réglages sur leurs RE50, mais Warwick (troisième) et Tambay (huitième) font plutôt bonne figure. Les nouvelles McLaren-TAG-Porsche tournent comme des horloges, et Prost (quatrième) précède Lauda (sixième). Les Brabham-BMW ont rencontré des problèmes techniques, d'où des résultats décevants : Piquet est septième, Fabi quinzième après avoir endommagé sa voiture. Les Williams-Honda arborent une nouvelle suspension qui génèrent du sous-virage, d'où des essais délicats pour Rosberg, neuvième, et Laffite, treizième.

 

Les Alfa Romeo ont cassé plusieurs de leurs turbos. Patrese et Cheever doivent se contenter de la sixième ligne. Les nouvelles Ligier-Renault (de Cesaris 14ème, Hesnault 19ème), font bonne figure. Le jeune Senna (16ème) est le plus rapide du clan Pirelli au volant de sa Toleman-Hart. Son équipier Cecotto est dix-septième mais lui concède deux secondes ! Du côté des moteurs aspirés, on tente seulement de limiter les dégâts. Chez Tyrrell, Brundle (18ème) devance légèrement Bellof (22ème). Les vieilles Arrows A6 de Boutsen (20ème) et Surer (24ème) font de la figuration, tout comme l'Osella-Alfa de Ghinzani (21ème). Baldi qualifie la Spirit-Hart au vingt-troisième rang tandis que la dernière ligne est occupée par les RAM d'Alliot et de Palmer, victimes de problèmes d'évaporation d'essence.

 

Manfred Winkelhock et son ATS, quinzièmes sur la feuille des temps, sont exclus des qualifications et du Grand Prix. En effet lors des essais, le pilote allemand a dû s'arrêter en panne d'essence sur la voie d'accès menant à l'allée des stands. Ses mécaniciens se sont alors précipités pour pousser la voiture jusqu'à son garage, ce qui enfreint l'article 10 du règlement proscrivant de pousser une voiture sur le circuit, lequel comprend l'allée des stands. Convoqué au bureau de la direction de couse, Günther Schmidt fait montre de sa « diplomatie » habituelle. Le ton monte rapidement et les commissaires sportifs décident l'exclusion pure et simple de l'ATS. Schmidt quitte le circuit furieux, annonçant qu'il quitte la Formule 1 pour rejoindre le championnat CART !

 

Le Grand Prix

La course se déroule sous une forte chaleur. On attend de fortes surprises du nouveau règlement. Combien de voitures vont tomber en panne sèche ? Verra-t-on des changements de pneus ou des ajouts de poids ? Les pneus vont jouer un grand rôle. Contre l'avis d'un Pierre Dupasquier sceptique, Lauda et Prost chaussent des Michelin 05 tendres. Les Clermontois ont fourni des « 10 » plus durs à leurs autres clients. Chez Goodyear, on panache généralement entre les B et les C.

 

Après le tour de formation, les monoplaces s'immobilisent sur la grille. Malheureusement, de Cesaris ne parvient pas à enclencher la première. La procédure de départ est annulée et le starter renvoie les pilotes pour une nouvelle boucle d'installation. Le Grand Prix est par conséquent réduit d'un tour. C'est une aubaine pour Cecotto qui avait démarré en retard et pourra retrouver sa place initiale. De Cesaris court aux stands pour s'installer dans son mulet.

 

Départ: Départ moyen de de Angelis qui se fait immédiatement déborder par Alboreto. Warwick et Mansell prennent les meilleurs envols et se retrouvent devant de Angelis au premier virage. Prost connaît un mauvais départ à cause d'un problème de boîte et se retrouve en milieu de peloton. C'est pire pour Piquet qui reste scotché de longues secondes sur la grille avant de pouvoir s'élancer, mais poussé par les commissaires et en dernière position. Cecotto reste lui aussi bloqué, mais il pourra partir.

 

1er tour: Alboreto est en tête en début de tour devant Warwick et Mansell. De Angelis devance Tambay qui se fait déborder par Lauda dans Juncao. Puis l'Autrichien vient à bout de de Angelis. Alboreto mène devant Warwick, Mansell, Lauda, de Angelis, Tambay, Arnoux, Rosberg, Cheever et Prost. Piquet est 24ème.

 

2e: Lauda prend la troisième place à Mansell avant la courbe Sul. Prost double Cheever. Senna et Bellof sont en lutte pour la treizième place.

 

3e: De Angelis met la pression sur Mansell, tandis que Tambay menace les deux Lotus. Prost double Rosberg et Cheever se fait passer par Fabi.

 

4e: Alboreto et Warwick s'échappent franchement en tête de l'épreuve. Tambay double de Angelis à Juncao. Prost menace Arnoux.

 

5e: Alboreto commence à semer Warwick. Tambay est dans les roues de Mansell. De Angelis rencontre des problèmes d'injection et se fait doubler par Arnoux à Molykote. Puis c'est Prost qui prend l'avantage sur l'Italien.

 

6e: Alboreto mène devant Warwick (4.2s.), Lauda (11s.), Mansell (14.4s.), Tambay (14.7s.) et Arnoux (16.8s.). Prost est septième et précède de Angelis, Rosberg et Fabi. Piquet est très rapide et déjà revenu en seizième position.

 

8e: Lauda remonte sur Warwick tandis que Prost attaque Arnoux pour la sixième place. Ghinzani s'arrête à son stand pour faire dégager l'admission d'air de ses turbos.

 

9e: Prost dépasse Arnoux par l'intérieur de la courbe Carlos Pace. Senna entre aux stands à faible allure. Son turbo subit une baisse de pression de suralimentation. Le jeune Brésilien doit abandonner alors qu'il était seizième.

 

10e: Lauda dépasse Warwick à Juncao, mais les roues des deux voitures se touchent. L'arrière-droit de la McLaren a frotté l'avant-gauche de la Renault. Lauda se lance à la poursuite d'Alboreto. Prost est juste derrière Tambay.

 

11e: Alboreto mène devant Lauda (5.9s.), Warwick (7s.), Mansell (15.9s.), Tambay (18s.) et Prost (18.2s.). Piquet est quatorzième.

 

12e: Alboreto est lent car sa Ferrari est en train de perdre ses freins. Il effectue un tête-à-queue dans le virage qui précède les stands. Il peut repartir mais entretemps Lauda et Warwick sont passés devant lui. Bellof rentre à son garage avec un câble d'accélérateur brisé.

 

13e: Prost dépasse Tambay dans Juncao. Alboreto effectue une nouvelle pirouette dans la première courbe. Il repart au petit trot et se fait passer par le peloton. Baldi est au stand Spirit pour renoncer à cause d'un rotor cassé sur son distributeur.

 

14e: Lauda est le nouveau leader avec quatre secondes d'avance sur Warwick. Mansell est troisième mais Prost fond sur lui grâce à ses pneus tendres. Piquet et Laffite se font une frayeur lorsque devant eux dans Molykote Ghinzani contrôle in extremis un dérapage. Alboreto est au stand Ferrari. Son étrier de frein avant-droit est cassé. Il redémarre tout de même.

 

15e: Piquet est dixième après avoir difficilement doublé Cheever.

 

16e: Prost déborde Mansell par l'intérieur dans Juncao. Alboreto retourne aux stands où il ne peut qu'abandonner. Il aura tout de même fait forte impression pour sa première course avec Ferrari.

 

17e: Piquet double son équipier Fabi. Laffite arrête sa Williams hors-piste suite à une coupure électrique.

 

19e: Lauda mène devant Warwick (4.2s.), Prost (8.9s.), Mansell (13.5s.), Tambay (19.3s.) et Arnoux (22.5s.). Suivent de Angelis, Rosberg, Piquet et Fabi. Cecotto revient à son stand et renonce suite à une panne de turbo, comme son équipier.

 

20e: Prost se rapproche de Warwick. Cheever prend la dixième place à Fabi.

 

21e: Fabi est en difficulté: il se fait dépasser par Patrese puis par Brundle. Il entre aux stands pour changer de pneus et repart treizième.

 

22e: Prost n'est plus qu'à une seconde et demie de Warwick.

 

24e: Prost attaque Warwick à Molykote mais ne parvient pas à passer. Finalement il prend l'aspiration dans la pleine charge de Juncao et déborde la Renault dans la courbe suivante.

 

25e: Voici les deux McLaren-TAG-Porsche en tête de la cours et semble-t-il inattaquables. Lauda possède onze secondes d'avance sur Prost. Alliot tombe en panne de batterie juste à l'entrée des stands. Les commissaires doivent évacuer la RAM.

 

27e: Tambay entre aux stands pour changer de pneus. Mais il commet une erreur en effectuant un petit tête-à-queue en voulant s'arrêter à son emplacement. Ses mécaniciens doivent pousser la Renault pour effectuer l'opération. Tambay perd ainsi du temps et ne repart qu'en neuvième position.

 

28e: Hesnault quitte la course suite à une surchauffe de son moteur Renault. Il abandonne sa Ligier fumante dans le gazon.

 

30e: Warwick et Mansell entrent dans les stands pour changer de gommes. Le pilote Renault redémarre en conservant sa troisième place. En revanche le moustachu de Lotus ne repart que huitième derrière Rosberg et Piquet. Patrese et Cheever changent aussi de pneus peu après. Ghinzani abandonne suite à une rupture de couple conique.

 

31e: Piquet dépasse Rosberg à Molykote. Toutefois ces deux pilotes se font bientôt doubler par Mansell, bien plus rapide grâce à ses pneus neufs. Puis c'est Tambay qui les efface. Ces quatre pilotes passent devant Arnoux dont l'arrière de la Ferrari est en flammes à cause d'une panne de batterie. Le Grenoblois s'arrête sur le bas-côté.

 

32e: Piquet s'arrête à son stand pour chausser de pneus neufs. Il ressort huitième derrière Brundle, à presque un tour de Lauda.

 

33e: Les deux McLaren caracolent en tête: Lauda compte une dizaine de secondes d'avance sur Prost. Warwick est troisième à quarante secondes et précède de Angelis, Mansell et Tambay.

 

34e: Le turbo surchauffé de Fabi rend l'âme et l'Italien stoppe dans une échappatoire. Une canalisation d'huile cassée à bientôt raison de l'autre Brabham, celle de Piquet. Le héros local abandonne sa voiture dans l'herbe. De Angelis stoppe aux stands pour chausser des Goodyear neufs, puis repart huitième. Brundle entre dans les points.

 

35e: Lauda mène devant Prost (7.4s.), Warwick (27.7s.), Mansell (1m. 01s.), Tambay (1m. 02s.) et Brundle (1m. 34s.). Lauda avait pris un tour à Rosberg, mais le Finlandais repasse bientôt devant l'Autrichien. Le moteur turbo Honda semble plus puissant que le Porsche de la McLaren.

 

36e: Mansell quitte brusquement la piste au bout de la ligne droite. La Lotus traverse les grillages de protection et emporte quelques piquets au passage. L'Anglais quitte sans mal son habitacle.

 

38e: Une panne d'électricité se déclare sur la McLaren de Lauda. La prise fournissant le courant de la batterie au faisceau d'alimentation générale est rompue. Lauda ralentit et se fait doubler par Prost.

 

39e: Prost entre aux stands pour changer de pneus. Juste derrière lui survient Lauda qui sort de sa voiture. L'arrêt de Prost dure vingt longues secondes à cause d'un écrou arrière-gauche grippé. Lorsque le Français reprend la piste, Warwick a pris le commandement.

 

40e: Warwick mène un Grand Prix pour la première fois de sa carrière. Il compte une vingtaine de secondes d'avance sur Prost. Tambay est troisième devant Rosberg. De Angelis prend la cinquième place à Brundle.

 

42e: Déçus par l'abandon de Piquet, beaucoup de spectateurs quittent les tribunes... Prost est le pilote le plus rapide en piste et signe le meilleur tour en course: 1'36''499'''.

 

43e: Warwick se rend compte que son train avant oscille dangereusement vers la gauche, conséquence de sa touchette avec Lauda. Il continue malgré tout car sa première victoire est en vue. Patrese entre à son stand au ralenti, boîte de vitesses en flammes.

 

44e: De Cesaris est au stand Ligier où il abandonne après avoir cassé son levier de vitesses. Il n'y a plus que dix voitures en piste. Brundle arrive aux stands pour changer de pneus et cède ainsi la sixième place à Cheever.

 

45e: Warwick est pris dans le trafic et se trouve notamment en sandwich entre Rosberg et de Angelis.

 

47e: Warwick mène devant Prost (à 28s.) et Tambay (59s.). Rosberg, de Angelis et Cheever sont dans les points mais à un tour. Suivent Brundle, Boutsen, Surer et Palmer.

 

50e: Trente secondes séparent Warwick et Prost. Rosberg et de Angelis luttent pour la quatrième place.

 

51e: Warwick part en tête-à-queue dans l'épingle qui commande la ligne droite. Son triangle de suspension avant-gauche vient de se rompre. Le malheureux Anglais n'a plus qu'à ramener sa Renault au garage. Prost prend la tête du Grand Prix.

 

52e: Avec près d'une minute d'avance sur Tambay, Prost a course gagnée. Il diminue de mille tours son régime moteur pour ménager du carburant. Warwick met pied à terre, fort déçu de voir ce succès lui échapper.

 

54e: Prost mène devant Tambay (49.6s.), Rosberg (1m. 09s.), de Angelis (1m. 13s.), Cheever (-1t.) et Brundle (-1t.). Suivent Boutsen, Surer et Palmer, relégués à deux tours.

 

56e: Tambay est au bord de la panne sèche à cause d'une fuite survenue sur un échangeur. Le Cannois doit considérablement lever le pied pour finir la course. Par conséquent Rosberg remonte sur lui très rapidement.

 

57e: Rosberg double Tambay à Juncao sans rencontrer de résistance.

 

59e: Tambay se maintient devant de Angelis qui doit lui aussi surveiller sa consommation.

 

60e: Tambay tombe en panne d'essence à l'entrée de Juncao. Il arrête sa Renault hors trajectoire tandis que les drapeaux jaunes sont agités dans le secteur.

 

61ème et dernier tour: Alain Prost remporte sa dixième victoire en Formule 1. Rosberg obtient la deuxième place et le premier podium du moteur turbo Honda. De Angelis est troisième d'une course finalement décevante pour les Lotus-Renault. Cheever se classe quatrième pour sa première course avec Alfa Romeo. Brundle obtient une très belle cinquième place pour son premier Grand Prix. Tambay est classé sixième. Boutsen, Surer et Palmer sont les seuls autres pilotes classés.

 

Après la course

Jackie Oliver dépose une réclamation contre Tyrrell, arguant que celle-ci a procédé à un ravitaillement en essence lors de l'arrêt de Brundle. Après vérification, les commissaires rejettent la plainte. Oliver était sur une bonne piste, mais n'a pas eu le nez assez fin...

 

Tout va très vite dans la Formule 1 moderne, et pas seulement au sens propre : ainsi le turbo TAG-Porsche atteint les sommets dès sa cinquième course, tandis que Rosberg offre un podium à la Williams-Honda pour sa seconde sortie. Le trio de tête de 1983 Ferrari - Brabham-BMW - Renault appartient déjà au passé.

 

Alain Prost sourit jusqu'aux oreilles. On ne l'avait pas vu aussi joyeux depuis des mois. Sa seconde collaboration avec McLaren commence sous les meilleurs auspices : « J'avais joué gros en venant chez McLaren. Et je suis déjà récompensé... C'est quand même formidable ! » Niki Lauda est très déçu car la victoire lui tendait les bras sans cette panne stupide. Il n'en félicite pas moins chaleureusement son jeune équipier. Une réelle amitié est en train de naître entre les deux hommes. Et pour Ron Dennis, John Barnard, Mansour Ojjeh et Hans Mezger, c'est la confirmation que leur association a de forts beaux jours devant elle... McLaren pourrait bien être l'équipe à battre en 1984.

 

Toutefois, le spectacle produit lors de ce Grand Prix du Brésil ne ravit pas grand monde. La règle des 220 litres est pointée du doigt, surtout chez Renault où l'on paraît le plus en souffrir. Bien sûr, la marque au Losange prétend défendre avant tout l'intérêt sportif. Patrick Tambay se plaint ainsi que désormais les pilotes ne rouleront plus qu'à l'économie, tout en dénonçant certes avec justesse que le nouveau règlement, loin de réduire les coûts, les fait exploser : « Je suis persuadé que mon petit frère peut courir dès demain. Ce n'est plus du pilotage. Quant à ceux qui parlaient d'économie... Électronique, ordinateurs, essence lourde, congelée, moteurs de qualifications [...] ! Je pense que J-M Balestre a pris conscience de l'hérésie de la chose ! » Le président de la FISA souffle le chaud et le froid : d'une part il concède qu'une négociation est peut-être nécessaire avec les équipes, d'autre part il confirme qu'en 1985 les réservoirs seront limités à 195 litres !

 

 

Classements (avant la disqualification des Tyrrell):

 

Pilotes Constructeurs
1.Prost9 pts1.McLaren-TAG-Porsche9 pts
2.Rosberg6 pts2.Williams-Honda6 pts
3.de Angelis4 pts3.Lotus-Renault4 pts
4.Cheever3 pts4.Alfa Romeo3 pts
5.Brundle2 pts5.Tyrrell-Ford-Cosworth2 pts
6.Tambay1 pt6.Renault1 pt
Tony