Querelle autour des turbos: Balestre contre les anciens légalistes
Le Grand Prix d'Argentine, prévu pour se dérouler le 7 mars, a été annulé par l'Automobile Club d'Argentine. L'épreuve n'est en effet plus viable financièrement après avoir perdu ses sponsors. Annulée une première fois durant l'hiver, elle avait été réintégrée lorsque Carlos Reutemann était revenu sur sa décision de quitter la Formule 1. Le forfait argentin devrait permettre la réintégration d'un des deux Grands Prix placés cette saison « en réserve » car eux aussi victimes de problèmes de trésorerie. Il s'agit des Grands Prix d'Espagne et des Pays-Bas."
Au cours de ces deux mois de vacances la FOCA a officiellement relancé l'offensive contre les moteurs turbocompressés. La branche « dure » de l'association des constructeurs se coalise pour réclamer l'interdiction des turbos. Bien sûr, la FOCA n'est pas unie, et Bernie Ecclestone lui-même a conclu un partenariat avec BMW. Mais la conception et la production de turbos coûtent très cher, et à moins de s'appuyer sur un gros commanditaire comme Marlboro ou Parmalat, très peu de constructeurs disposeront de moyens nécessaires pour relever ce défi. On comprend ainsi l'inquiétude d'un Ken Tyrrell ou d'un Jackie Oliver. Cependant le front anti-turbos est désormais rejoint par Guy Ligier. Le Vichyssois a rencontré le président du directoire de PSA Jean Boillot qui lui a confirmé la poursuite du partenariat avec Talbot et du développement du V6 turbo Matra. Mais ce dernier ne sera pas prêt avant 1983. Méfiant, Ligier fait une croix dans son esprit sur l'alliance avec Matra et mise sur l'interdiction prochaine des turbos. Il envisage de revenir au V8 Ford-Cosworth pour la saison à venir.
A Rio de Janeiro Jean-Marie Balestre publie un communiqué très important dans lequel il annonce revenir sur le projet de super-licence qui a suscité la grève ds pilotes à Kyalami. Il prévoit aussi d'ouvrir aux coureurs les commissions chargées de préparer les futures réglementations. Mais Balestre révèle surtout les réformes techniques préconisées par la FISA pour la saison 1983 et qu'il entend présenter au prochain congrès de la FIA à Casablanca. Sans surprise, il suggère l'interdiction de l'effet de sol et la réduction de la largeur des pneus dans un souci de sécurité. Voilà de quoi déplaire à la FOCA. Plus étonnant, il appelle à une « réglementation draconienne » en matière de consommation d'essence. Il s'agit de limiter au maximum la puissance des moteurs et de freiner cette quête à la performance générée par la suralimentation. En clair, le président de la FISA se retourne contre ses alliés d'hier, les équipes « légalistes », Ferrari, Renault et Alfa Romeo, qui toutes ont investi ou investissent dans l'élaboration d'un moteur turbo. A ces marques se rallient BMW, Matra, Hart et Porsche qui empruntent elles aussi la voie de la suralimentation. Au nom de l'amélioration de la sécurité et du contrôle des coûts, Balestre se met donc toutes les parties à dos... Le congrès de Casablanca s'annonce explosif.
Balestre = SS ? / Ecclestone, roi du Brésil
De manière plus anecdotique, le président de la FISA est gêné aux entournures par un très vieux document publié par le magazine italien Autosprint : une lettre datée de 1943 dans laquelle le Waffen-SS « Jean Balestre » prête allégeance au Führer Adolf Hitler... Balestre est évidemment embarrassé de voir ainsi ressurgir son fort nébuleux passé (il fut aussi militant antiraciste avant la guerre et déporté par la Gestapo en 1944...). Il refuse en tout cas d'attaquer Autosprint pour diffamation.
Bernie Ecclestone a aussi les oreilles qui sifflent au Brésil. Il est en conflit avec Carlos Cavalcanti, le nouveau président de la Confédération brésilienne du sport automobile. Celui-ci entend contester la mainmise d'Ecclestone sur le Grand Prix du Brésil. Son prédécesseur Charles Naccache lui avait en effet cédé l'exclusivité de l'organisation de toute épreuve automobile au Brésil ! De plus Cavalcanti souhaite que la course nationale retourne à São Paulo en 1983. Ecclestone fera finalement pièce de ces velléités.
Accident de Pironi au Castellet et danger de l'effet de sol
Didier Pironi est un miraculé. Lors d'une séance d'essais au Castellet, son accélérateur s'est coincé. La Ferrari a décollé avant de passer par-dessus les barrières, de trouer les grillages et de s'écraser sur un talus. Par chance, aucun spectateur ne se trouvait là, et Pironi s'en est sorti avec un genou écorché.
Cet accident relance le débat sur le manque de sécurité des bolides à effet de sol. Gilles Villeneuve fait part de son amertume : « Je n'ai plus de plaisir à conduire [ces voitures]. Elles sont soudées à la piste. J'ai l'impression d'être comme le chauffeur d'une locomotive attachée à des rails. Les moteurs sont très puissants. Nous entrons dans les virages à des vitesses incroyables. Les risques sont devenus énormes. »
Présentation de l'épreuve
Elle sera des plus pénibles pour les pilotes. En effet les nouvelles jupes version 82 permettent d'obtenir encore plus d'appui que les jupes coulissantes de 1980. La vitesse de passage en courbe est effrayante. Pour bien faire « travailler » les jupes, les ingénieurs disposent des suspensions très raides sur les monoplaces. Ajoutez à cela une chaleur caniculaire, les bosses qui parsèment la piste et le sens antihoraire qui torture les muscles du cou, et vous comprenez que l'endurance physique des pilotes sera une des clefs de l'épreuve. Ainsi le frêle Nelson Piquet est allé suivre un entraînement quasi militaire avec l'équipe de football brésilienne.
Pour contrer les turbos tout en se conformant au contrôle de pesée, les équipes britanniques de la FOCA ont décidé de tricher sur le poids de leurs monoplaces. Williams, Brabham et Arrows utilisent depuis Kyalami un système de refroidissement des freins par eau comprenant un large réservoir. Pour « faire le poids », il suffit de remplir celui-ci au moment du contrôle. Elles utilisent une faille du règlement qui les autorise à refaire le plein de fluides après la course. A Rio de Janiero, ce « lest larguable » est adopté par la quasi-totalité des équipes, y compris celles du « clan turbo » comme Renault et Ferrari.
Chez Renault, René Arnoux se trouve sur la sellette et certaines rumeurs annoncent son remplacement par le Hollandais Jan Lammers, le constructeur français possédant de nombreux intérêts aux Pays-Bas.
Gordon Murray a décidé de ne plus utiliser provisoirement la BT50 dont le moteur turbo BMW est trop peu fiable. Il réintroduit la BT49 équipée du V8 Ford-Cosworth et crée ainsi une spécification D qui est presque une nouvelle voiture : coque plus légère et plus rigide, carrosserie remaniée, nouveaux circuits de refroidissement et freins en fibre de carbone.
Alfa Romeo lance sa très attendue 182, fruit du travail de Gérard Ducarouge. Cette machine est très légère puisqu'elle ne pèse que 535 kilos. Le nouveau châssis en fibre de carbone a été réalisé en Grande-Bretagne. Ducarouge a apporté quelques originalités : les pontons latéraux et la section inférieure du châssis sont conçus en fonction de l'effet Venturi. Le centre de pression aérodynamique a été déplacé vers l'arrière afin de faciliter les réglages par le jeu des moustaches à l'avant.
JPS-Lotus présente la 91 en fibre de carbone. Elle dispose de pontons latéraux d'une pièce s'étendant jusqu'à l'aileron arrière. Colin Chapman a aussi imaginé une suspension avant disposant de trois triangles possibles pour modifier l'empattement. Mais de prime abord, avec ses lignes rondouillardes, la 91 ne diffère pas grandement de la 87.
La Ferrari 126 C2 a de nouveaux pontons latéraux. Mais un problème apparaît aux Italiens : si le moteur turbo est toujours plus puissant, les pneus arrière Goodyear s'usent aussi plus rapidement, et des changements en course sont à prévoir. Ferrari comme Renault utilisent désormais des freins en fibre de carbone. McLaren arbore ce type de freins uniquement lors des essais.
Dave Wass a corrigé les Arrows A4 qui n'ont pu se qualifier en Afrique du Sud. La géométrie de suspension est revue ainsi que le capot moteur, tandis que les pontons s'arrêtent désormais au niveau des roues arrière. Très peu de changements enfin pour la Williams. L'équipe de Didcot prépare la FW08 tout en espérant faire rouler prochainement son prototype à six roues.
Ensign inaugure la MN181 signée Nigel Bennett. C'est une voiture très classique avec une coque composée d'un mélange d'aluminium, de nids d'abeille et de fibre de carbone. Roberto Guerrero est à son volant. Nouvel engin aussi pour Theodore avec la TY02 de Tony Southgate. C'est un châssis monocoque en nid d'abeille et aluminium plus rigide. Aucun sponsor ne vient égayer sa livrée. En revanche l'équipe Fittipaldi a enfin dégoté quelques petits commendataires brésiliens qui vont lui permettre de compléter son programme 1982. Adrian Reynard a considérablement allégé le châssis March, mais la grande nouveauté est que les machines de Mass et Boesel sont désormais colorées en blanc et bleu, couleurs du cigarettier Rothmans, nouveau sponsor de RAM.
Les qualifications
Ces séances manquent singulièrement d'intérêt car les manufacturiers ont apporté des pneus de qualifications si tendres qu'ils ne tiennent qu'un ou deux tours ! De plus la chaleur est si écrasante que tous les acteurs semblent envelopper dans une moite torpeur. Les turbos dominent même si cette piste ne leur est pas a priori favorable. Prost réalise sa troisième pole par un temps obtenu dès le vendredi. Villeneuve s'est de nouveau surpassé pour amener sa Ferrari au second rang, une position flatteuse. La Ferrari se comporte bien dans les courbes rapides mais manque d'adhérence dans les virages lents. Ainsi Pironi n'est que huitième. On note la très belle performance de Rosberg, troisième avec la Williams. Victime de deux accidents qui ne sont pas de son fait, Arnoux est repoussé au quatrième rang. Tous deux ralentis par des soucis techniques, Lauda et Reutemann sont en troisième ligne. Watson est un piteux douzième avec l'autre McLaren. Les Brabham-Ford-Cosworth de Piquet et Patrese sont respectivement septième et neuvième.
Les nouvelles Alfa ont subi de nombreuses pannes. De Cesaris est dixième et Giacomelli seizième. D'autres soucis de jeunesse ont frappé les Lotus (De Angelis onzième, Mansell quatorzième). Alboreto (13ème) fait de son mieux avec une Tyrrell non améliorée faute d'argent tandis que Borgudd (21ème) se bat pour la qualification. Les ATS font bonne figure ; Winkelhock est quinzième et Salazar, qui s'est foulé une cheville, dix-huitième. Dix-septième, Boesel est le meilleur du camp Pirelli. Son équipier Mass n'est que 22ème. Chez Arrows, Baldi arrache son ticket d'entrée (19ème) au contraire de Henton. Daly, Jarier et Serra sont aussi en queue de classement tout comme les... Ligier. Les JS17 sont trop lourdes, les V12 Matra ratatouillent, Laffite s'est blessé au dos en skiant... Résultat : Laffite 24ème et Cheever 26ème et dernier. Un désastre !
Les Toleman-Hart de Fabi et Warwick sont éliminées, tout comme l'Ensign de Guerrero et l'Osella de Paletti. Le jeune Italien a été recalé le vendredi matin lors de la séance de pré-qualification réintroduite du fait du grand nombre de partants.
Le Grand Prix
La course se déroule sous une chaleur écrasante qui va épuiser bien des pilotes. Les pneumatiques devraient avoir une forte importance. Afin de pallier à une défaillance des pneus arrière, Ferrari a choisi une gomme de type « B », moyennement dure. Les autres équipes de Goodyear et le clan Michelin ont choisi des pneus tendres.
Départ: Mauvais envol de Prost. Villeneuve part très bien et s'empare de la tête devant Arnoux et Rosberg. Prost n'est que quatrième au premier freinage.
1er tour: Arnoux et Rosberg franchissent Molykote côte à côte mais le Français conserve l'avantage. Le Finlandais le double finalement dans la courbe Carlos Pace. Il essaie ensuite de passer Villeneuve par l'extérieur à Norte mais loupe son freinage et se fait déborder par les deux Renault dans la ligne droite de Juncao. A l'issue de ce premier tour Villeneuve mène devant Arnoux, Prost, Rosberg, Patrese, Pironi, Piquet, Reutemann, Lauda et Alboreto.
2e : Arnoux est sur les talons de Villeneuve tandis que Patrese menace Rosberg. De Cesaris prend la dixième place à Alboreto.
3e: Patrese déborde Rosberg à Juncao. Pironi part en tête-à-queue et se retrouve seizième. De Cesaris déborde Lauda.
4e: Les cinq premiers se tiennent dans un mouchoir de poche, mais Piquet remonte sur eux.
5e: Piquet dépasse Rosberg à Juncao.
6e: Prost commet une petite erreur à Norte et les deux Brabham de Patrese et Piquet en profitent pour le dépasser. Le moteur du pilote français n'est pas très performant et le condamne à une course d'attente.
7e: Villeneuve mène devant Arnoux (0.7s.), Patrese (1.5s.), Piquet (2.1s.), Prost (4s.), Rosberg (4.3s.) et Reutemann (5s.). Vient ensuite un groupe composé de de Cesaris, Lauda, Alboreto, Watson et de Angelis. Jusqu'ici dix-neuvième, Laffite rentre au stand Talbot pour réparer une jupe arrachée sur un trottoir.
8e : Patrese menace Arnoux. Prost et les Williams sont semés par les quatre leaders.
9e: Piquet double son équipier Patrese à Juncao et se retrouve troisième. Des clameurs s'élèvent dans les tribunes.
10e: Piquet menace désormais Arnoux. De Cesaris est aux stands pour changer de pneus. Mais l'arrêt s'éternise et il se retrouve vingt-quatrième. Accrochage entre de Angelis et Alboreto qui se retrouvent dans le gazon. Ils repartent après avoir perdu quelques places.
11e: Arnoux rencontre les mêmes problèmes de moteur que Prost. Rosberg prend la cinquième place à Prost.
12e: Victime d'une crevaison, Boesel tire tout droit et atterrit dans les graviers.
13e: Villeneuve a deux secondes d'avance sur Arnoux menacé par Piquet, Patrese et Rosberg. Également à cause d'une crevaison, Daly part en tête-à-queue et ne peut pas repartir.
15e: Piquet continue de harceler Arnoux tandis que Patrese et Rosberg sont très près des deux hommes. De Cesaris est de retour aux stands et cette fois-ci ne repartira pas. Son carénage inférieur s'est en effet détaché.
16e: Villeneuve a maintenant quatre secondes d'avance sur ses poursuivants. Piquet attaque Arnoux dans la courbe de Sul mais le Français ferme la porte. Prost est sous la menace de Reutemann, Lauda et Watson.
17e: Rosberg attaque Patrese dans la ligne droite de départ et le dépasse ainsi. Plus loin Piquet prend l'aspiration derrière Arnoux à Juncao et le déborde enfin par l'intérieur. Quelques virages plus loin Rosberg passe à son tour la Renault. C'est la fin de la course pour Alfa Romeo puisque le moteur de Giacomelli, alors onzième, cesse de fonctionner. L'Italien s'arrête dans le gazon. De son côté Laffite rejoint son garage et abandonne à cause d'une tenue de route calamiteuse et d'un problème d'allumage.
18e: Piquet et Rosberg partent à la chasse de Villeneuve. Patrese double à son tour Arnoux. De son côté Lauda prend la septième place à Reutemann.
19e: Villeneuve précède Piquet (1s.), Rosberg (2s.) et Patrese (7.1s.). Lauda attaque et passe Prost pendant que Watson déborde Reutemann.
20e: Piquet et Rosberg remontent très rapidement sur Villeneuve. Prost repasse Lauda tandis que beaucoup plus loin, Cheever s'arrête sur le bas-côté après la rupture d'une durite d'eau.
21e: Piquet et Rosberg sont revenus sur les talons de Villeneuve, et le Finlandais essaie d'en profiter pour passer le Brésilien. Les McLaren et les Renault sont en bagarre et échangent leurs places: Prost et Watson se retrouvent devant Arnoux et Lauda. Reutemann attaque Lauda dans la dernière courbe et harponne la McLaren. Les deux pilotes continuent mais l'Autrichien ralentit car ses suspensions sont touchées.
22e: Tandis que Piquet harcèle Villeneuve, Reutemann commet une seconde erreur : il percute Arnoux dans la courbe Lagoa et les deux voitures échouent dans les grillages. Au même instant Baldi s'écarte pour laisser passer Pironi et Alboreto, mais pas de Angelis. Il se rabat devant la Lotus qui part en vrille et percute les protections. Si Baldi continue, de Angelis abandonne. Lauda regagne son stand pour mettre pied à terre.
24e: Rosberg déborde Piquet par l'extérieur avant Molykote, mais freine un peu tardivement et glisse. Piquet conserve sa trajectoire et repasse devant le Finlandais. Baldi est aux stands pour réparer l'arrière de son Arrows endommagée par l'accrochage avec de Angelis.
25e : Villeneuve mène devant Piquet (0.4s.), Rosberg (0.9s.), Patrese (6.5s.), Prost (17s.) et Watson (18.5s.). Suivent Mansell, Winkelhock, Pironi et Alboreto.
26e: Rosberg tente de déborder Piquet à Juncao, sans succès.
27e: Rosberg dépasse Piquet par l'intérieur à Molykote. Le voici deuxième. Il tente de se rapprocher de Villeneuve mais un réglage d'aileron un petit peu trop conservateur le rend moins rapide que la Ferrari et la Brabham à pleine vitesse.
29e: Ne lâchant rien, Piquet se place dans les échappements de Rosberg dans la ligne droite Juncao et le passe par l'extérieur à Sul.
30e: Piquet attaque Villeneuve par l'extérieur dans l'enchaînement de Nonato et parvient à la devancer. Villeneuve tente de conserver sa place mais met pour cela deux roues dans l'herbe et est déséquilibré. La Ferrari part en tête-à-queue, traverse la piste devant Piquet et finit sa course dans la barrière de pneus. Le public brésilien bondit dans les gradins: Piquet est en tête de la course.
31e: Piquet est premier devant Rosberg (1.5s.), Patrese (3.2s.), Prost (8.1s.), Watson (8.6s.) et Mansell (18.3s.). Suivent Winkelhock, Pironi, Alboreto et Mass.
33e: Patrese part dans une étonnante embardée qu'il contrôle avec difficulté. Toujours sur la piste, il se relance mais commet un second tête-à-queue. Sa Brabham semble incontrôlable, et pourtant il parvient à se relancer, mais s'est fait doubler par Prost et Watson.
34e: Après s'être fait dépasser par Mansell et Winkelhock, Patrese revient à son stand. Victime de la chaleur, il est complètement épuisé et incapable de sortir seul de sa voiture. La course est évidemment finie pour lui. Pendant ce temps Pironi fait changer ses pneus et remettre de l'essence dans son réservoir.
35e : Rosberg se rapproche de Piquet pendant que Prost parvient à semer Watson. Mass fait changer ses pneus mais perd du temps à cause d'un écrou grippé.
36e: Piquet mène devant Rosberg (0.8s.), Prost (6.3s.), Watson (10.2s.), Mansell (25.9s.) et Winkelhock (43.7s.). Suivent Alboreto, Borgudd, Pironi et Salazar. Prost signe le meilleur tour: 1'37''016'''.
37e: Pironi prend la huitième place à Borgudd. Victime de la rupture d'un bras de direction, Serra finit sa course dans les barrières.
39e: Salazar entre dans les stands en panne de moteur. Le V8 a rendu l'âme en pleine allée et les mécaniciens d'ATS doivent pousser la machine jusqu'au garage.
41e: Piquet précède Rosberg (2.2s.), Prost (9.3s.), Watson (16.7s.), Mansell (40.3s.), Winkelhock (59s.) et Alboreto (1m. 01s.).
43e : Rosberg a usé ses pneus dans quelques embardées et n'est plus en mesure de menacer réellement Piquet. De son côté Prost perd de nouveau le contact avec les deux premiers.
45e : Piquet a deux secondes et demie d'avance sur Rosberg.
46e: Alboreto prend la sixième place à Winkelhock.
48e : Piquet souffre de la chaleur et emprunte quelques trajectoires peu orthodoxes. Mais à cause de ses pneus altérés Rosberg ne parvient pas à le rattraper.
50e : Piquet devance Rosberg (3.3s.), Prost (20.4.), Watson (29.1s.), Mansell (59.8s.), Alboreto (1m. 22s.) et Winkelhock (1m. 26s.). Suivent Pironi (-1t.), Borgudd (-1t.), Mass (-2t.), Jarier (-2t.) et Baldi (-5t.).
52e : Piquet prend un tour à Winkelhock.
54e : Piquet précède Rosberg (3.7s.), Prost (24.6s.), Watson (33.8s.), Mansell (1m. 08s.) et Alboreto (1m. 25s.).
55e : Rosberg commet une erreur dans la courbe Moretta et met les quatre roues dans l'herbe.
56e: Piquet a porté son avance sur Rosberg à sept secondes. Prost a maintenant 27 secondes de retard.
58e : Sept secondes et demie entre Piquet et Rosberg. Watson se rapproche de Prost.
60e: L'intervalle entre Piquet et Rosberg dépasse maintenant les dix secondes.
62e : Piquet précède Rosberg (9.6s.), Prost (35.3s.) et Watson (43.3s.). Dans les tribunes les supporteurs brésiliens s'agitent pour fêter leur champion.
63ème et dernier tour: Nelson Piquet franchit la ligne d'arrivée en vainqueur. Le Carioca l'emporte devant son public en délire. Rosberg termine deuxième et monte sur son premier podium pour Williams. Prost obtient la troisième place et est le seul pilote du clan turbo à inscrire des points. Watson ajoute trois points au total de McLaren. Mansell finit cinquième tandis qu'Alboreto inscrit son premier point en Formule 1. Winkelhock finit septième après une très belle course. Pironi est huitième et précède Mass, Jarier et Baldi.
Après la course: polémique autour des réservoirs d'eau
Célébré par le public, Piquet quitte son habitacle en piètre état physique, comme l'année précédente à Las Vegas. Il monte sur le podium en sueur, vacillant, hagard, le regard vide. Peu après avoir reçu son trophée, il s'écroule dans les bras de Bernie Ecclestone. Keke Rosberg et Alain Prost viennent à son secours, aidés par quelques officiels, et on l'étend sur le sol de la tribune... tandis que retentit l'hymne brésilien. Plus de peur que de mal heureusement pour le champion du monde qui revient rapidement à lui et réapparaît ensuite sous les vivats de la foule.
Comme ils l'avaient convenu, les mécaniciens de Brabham et de Williams font le plein de fluides après l'arrivée afin que leurs bolides satisfassent au contrôle de pesée. Cela se passe mal chez Brabham : les hommes de Herbie Blash versent trop d'eau et le réservoir en polyester éclate... sous les yeux des commissaires techniques ! Ferrari et Renault déposent une plainte contre Williams et Brabham, mais elle est évidemment rejetée : comment les commissaires cariocas pourraient disqualifier le vainqueur, l'homme de Rio ? De plus l'organisateur du Grand Prix se nomme Ecclestone... Jean Sage et Marco Piccinini ne s'avouent pas vaincus et portent l'affaire devant le tribunal d'appel de la FIA. En guise de représailles, au nom de la FOCA, Ken Tyrrell porte plainte contre Ferrari qui selon lui n'aurait pas ravitaillé Pironi en essence selon les règles, mais lui non plus ne sera pas écouté.
Carlos Reutemann prend sa retraite
En quittant le paddock de Rio, René Arnoux et Niki Lauda se plaignent de Carlos Reutemann qui selon eux les a « sortis » en l'espace de deux tours. L'intéressé clame son innocence. Une dizaine de jours plus tard, la polémique est oubliée : Reutemann annonce qu'il quitte la Formule 1 avec effet immédiat, et cette fois-ci sa décision est irrévocable. Il avait pourtant signé en décembre 1981 un contrat de premier pilote avec Frank Williams. Mais il est fort probable qu'« el Lole » en a assez des tensions perpétuelles entre lui et Patrick Head. De plus il n'a jamais digéré son échec d'octobre 81 à Las Vegas qu'il attribue à sa propre équipe. Travailler dans un tel climat de défiance est devenu impossible. Néanmoins Reutemann n'a jamais expliqué officiellement les raisons de son retrait. Pour certains, le conflit militaire autour des îles Malouines a rendu impossible la collaboration d'un Argentin avec un constructeur britannique. Reutemann a peut-être subi des pressions de la part de son gouvernement. Quoiqu'il en soit, comme son ancien équipier et rival Alan Jones, il est très clair qu'il ne se sent plus à l'aise dans la Formule 1 de 1982 polluée par les querelles politiques.
Pilote très doué, d'un brio incontestable, charismatique malgré un tempérament taciturne, Reutemann aurait certainement mérité de devenir champion du monde. Son principal défaut, sa faiblesse psychologique, lui a fait perdre l'ultime occasion de remporter la couronne fin 1981. Après cet échec, toute motivation s'est envolée. A 40 ans, il est temps pour lui d'entamer une nouvelle vie. Quelques années plus tard, il deviendra homme politique et on songera à lui pour présider une Argentine libérée de la dictature.
Classement des championnats (avant les disqualifications de Piquet et de Rosberg) :
1. Prost : 13 pts
2. Piquet : 9 pts
3. Rosberg : 8 pts
4. Reutemann : 6 pts
5. Arnoux : 4 pts
Watson : 4 pts
6. Lauda : 3 pts
7. Mansell : 2 pts
8. Alboreto : 1 pt
1. Renault : 17 pts
2. Williams-Ford-Cosworth : 14 pts
3. Brabham-Ford-Cosworth : 9 pts
4. McLaren-Ford-Cosworth : 7 pts
5. Lotus-Ford-Cosworth : 2 pts
6. Tyrrell-Ford-Cosworth : 1 pt
Tony